Pierre Larrouturou : 10 mesures pour éviter l’effondrement

Quand le gouverneur de la Banque d’Angleterre explique que la prochaine crise peut être « plus grave que celle de 1930 », quand le Président de l’Autorité des marchés financiers français affirme que nous risquons « un effondrement de l’ensemble du système économique mondial », quand Nicolas Sarkozy explique qu’un tsunami menace nos économies, nul ne peut plus douter de la gravité de la situation.

Quand Roosevelt arrive au pouvoir en 1933, dans un pays miné par la crise et le chômage. Il lui suffit de 3 mois pour mettre en œuvre 15 réformes majeures. Les catastrophes annoncées par les financiers ne se sont pas produites.

Vu l’ampleur et la gravité de la crise, il faut agir vite mais avoir une approche globale, et demander au G 20 de mettre en œuvre ces 10 mesures :

1.     Séparer les banques de dépôt et les banques d’affaires

Il est urgent d’interdire aux banques de spéculer avec l’argent de M. et Mme Tout-le-monde pour protéger l’épargne des citoyens et ne pas faire courir de risques aux finances publiques ni au financement de l’économie réelle.

2.     Créer immédiatement une taxe sur les transactions financières

Si l’Europe avait créé une Taxe Tobin, fin 2008, au plus fort de la première crise financière, elle aurait déjà rapporté entre 200 et 600 milliards, selon les différents scénarios. Avec une telle cagnotte, le Parlement européen aurait réglé la crise grecque en quelques semaines sans demander le moindre effort aux citoyens et sans attendre le feu vert de 16 parlements nationaux.

3.     En finir avec l’irresponsabilité des financiers

Depuis quelques semaines, c’est une véritable guerre que certains spéculateurs ont déclaré à la zone Euro. Il faut agir avec force pour les mettre hors d’état de nuire: supprimer les clauses restrictives qui affaiblissent la portée de l’interdiction des CDS nus, interdire l’anonymat sur les marchés financiers, imposer des chambres de compensation sous tutelle publique aux marchés de gré-à-gré et décider de sanctions rétroactives pour les responsables ayant eu des comportements fautifs.

4.     Mettre fin au sabordage fiscal 

Pour rééquilibrer les comptes publics, mettre en œuvre des plans d’austérité est sans doute la plus mauvaise solution. On peut trouver d’importantes marges de manœuvre en annulant une bonne partie des baisses d’impôts octroyées aux grandes entreprises et aux citoyens les plus riches depuis 20 ans.

5.     Lutter radicalement contre les paradis fiscaux 

Le G 20 doit intensifier la lutte contre le paradis fiscaux : en rendant obligatoire la transparence des comptes des entreprises, en boycottant les entreprises ayant des filiales dans ces paradis fiscaux et en mettant fin à la pratique de l’optimisation fiscale des groupes internationaux via les prix de transfert.

6.     Sécuriser les salariés, Lutter contre les licenciements

En Allemagne, malgré un choc économique 2 fois plus fort, le chômage a augmenté 6 fois moins qu’en France. Comment expliquer ce « miracle » ? Le Kurzarbeit. Le principe est très simple : au lieu de licencier 20 % de ses effectifs, une entreprise qui voit baisser son chiffre d’affaires de 20 % va baisser son temps de travail  de 20 % et garder tous les salariés. Et l’État assure le maintien du revenu des salariés.

7.      Sécuriser les chômeurs

Dans chacun de nos pays, chaque mois, des centaines de milliers d’hommes et de femmes arrivent en fin de droit et basculent dans une très grande précarité. Vu la gravité de la crise et le peu d’espoir d’un retour rapide au plein-emploi, il est fondamental de prolonger l’indemnisation des chômeurs et d’améliorer leur accompagnement et leur accès à la formation.

8.     Lutter contre les délocalisations

Les dirigeants du G 20 doivent instamment demander à l’OMC de faire respecter par tous les États qui participent au commerce mondial les normes sociales et les normes écologiques qu’ils ont signées. Si tel n’est pas le cas d’ici 3 ou 4 ans, des taxes aux frontières devraient rétablir les conditions d’un échange juste.

9.     Signer à nouveau la Déclaration de Philadelphie

Certes, depuis 1944, le monde a beaucoup changé, mais à l’heure où redoublent les tentations de repli nationalistes et les risques de dumping fiscal et social, il est urgent d’affirmer publiquement que c’est seulement par un sursaut de coopération et de justice sociale que nos pays peuvent sortir de la crise.

10.  Convoquer un nouveau sommet de Bretton-Woods

Au-delà de ces mesures d’urgence qu’il faut mettre en œuvre sans délai, les dirigeants du G 20 doivent prendre acte que nous vivons la fin d’un modèle de développement et qu’il est vital de prendre le temps de réfléchir, ensemble, aux meilleurs moyens de construire un nouveau modèle.

Pierre Larrouturou – www.larrouturou.net

Conseiller régional Ile de France. Membre du Conseil d’Orientation Politique d’EELV.

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