Syrie, l’urgence d’agir !

Des mouvements populaires secouent le monde entier, en particulier au sud de la Méditerranée.

 

Des printemps arabes aux révoltes en Turquie, des peuples se soulèvent, d’autres renversent des dictatures ou affrontent une répression sanglante. Marquant la fin d’une période post-coloniale et l’émergence de nouvelles puissances, ces bouleversements s’inscrivent dans les crises multiples que connaît notre système mondialisé, sur fond de raréfaction des ressources.

 

Depuis le début du soulèvement populaire contre la dictature de Bachar El Assad, en mars 2011, la Syrie vit une tragédie : 100 000 morts, 2 millions de réfugiés et plusieurs millions de déplacés.

 

La population s’est organisée, mais la répression féroce du régime, armé par la Russie et l’Iran, soutenu par des combattants étrangers, menace la résistance.  Face à cela, les divisions internes et l’inaction de la communauté internationale ne parviennent ni à faire émerger une solution politique, ni à protéger les  civils (« no fly zones », corridors humanitaires) et accueillir suffisamment de réfugiés.

 

Face à ce drame humain, la France et la Grande-Bretagne lors de précédentes exactions particulièrement choquantes avaient annoncé des possibles livraisons d’armes à l’opposition, mais il n’en a rien été.

 

L’utilisation des armes chimiques si redoutée n’a pu être empêchée. C’est un pas de plus dans l’horreur (souvenons nous des premiers manifestants mineurs dont la torture avait déclenché les manifestations pacifiques, des bombardements de civils, etc.) mais c’est aussi la fin d’un tabou international que réprouvent même les soutiens de Bachar El Assad, Iran et Russie.

 

C’était une menace dont il avait été proclamé qu’elle serait la ligne rouge à ne pas dépasser… sans qu’on sache très bien ce qui s’ensuivrait, tant les grandes puissances semblent naviguer à vue, réagissant au coup par coup, incapables de s’unir pour proposer ou imposer une solution négociée.

 

Trop d’atermoiements ont favorisé ce qui était invoqué pour ne pas  trop intervenir : la montée supposée de l’islamisme, l’intrusion de djihadistes, puis du Hezbollah et de Al Qaïda. Que l’on a trop rapidement dit majoritaires. Cette affirmation, absolument pas vérifiée (ces groupes sont les plus résolus, les mieux armés (!) donc plus visibles) a détourné les populations d’une solidarité active et a permis aux gouvernements de tergiverser.

 

De même, y-a-t-il eu une mise en exergue des divisions de l’opposition, coalition et coordination, qui existent mais  qui ont trop souvent servi de prétexte pour une non intervention.

 

Une autre « certitude » a joué dans ces hésitations, l’illusion que Bachar El Assad défendait les minorités, en particulier chrétiennes, que son départ entraînerait des violences ou un éclatement du pays. Au dire des chercheurs comme François Burgat, confirmant ce que nous disait l’ambassadeur de la coalition, ce danger ne tient pas compte de la longue histoire de la Syrie, de son multiculturalisme… L’instrumentalisation des appartenances, là encore, sert à diviser, les monter les unes contre les autres et paralyser la communauté internationale.

 

A cette propagande efficace, s’ajoute la méfiance de l’opinion publique face aux gouvernements, capables des pires mensonges comme l’ont montré les deux guerres du golfe, surtout la dernière, avec les résultats catastrophiques que l’on constate aujourd’hui en Irak, et bientôt en Afghanistan.

 

Il n’est guère étonnant, alors, que les décisions d’interventions militaires soient majoritairement contestées. Ce sont les mêmes pays qui ont soutenu, pour ne pas dire mis en place, les dictatures qui disent vouloir aujourd’hui les combattre. Et comment ne pas craindre une instrumentalisation du conflit dans la grave crise sociale et économique que nous traversons ?

 

Mais si nous devons être lucides sur l’état du monde, nous ne pouvons oublier que, à la différence de l’Irak, c’est le peuple syrien qui s’est soulevé. Sous prétexte de complexité nous ne pouvons abandonner un peuple aux massacres.

 

Il ne s’agit pas de « punir », ni de seulement sanctionner, mais d’arrêter cette guerre inégale et de parvenir à des négociations multilatérales dont il n’est pas sûr que tout ait été fait pour les mettre en place.

 

Pour cela, nous devons réfléchir à toutes les possibilités : à l’aune de nos principes de non-violence, en ayant conscience du cynisme de la politique mondiale, des intérêts de nombre de protagonistes, mais avec la conscience de ce qui se trame en Syrie et de l’acte terrifiant qui vient de se commettre.

 

Il est important de soutenir l’opposition syrienne qui porte un projet démocratique, séculariste qui prend en compte la pluralité de la société syrienne, dans son droit parfaitement légitime de se donner les moyens de se défendre.

 

Françoise Alamartine – 5 septembre 2013
Secrétaire nationale adjointe, en charge de l’International

 

Photo prise à Azaz en août 2012 (domaine public) par Voice of America News/Scott Bob 

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