La recherche sur la pollution et santé sera amputée des 8 millions d’euros nécessaires
Bernard Jégou, directeur de l’Institut de recherche sur la santé, l’environnement et le travail, se bat pour que l’État ne se désengage pas du financement de la recherche.
Coup de colère des scientifiques. L’État coupe les aides au programme d’étude sur les liens entre les contaminants chimiques et les maladies comme les cancers, les malformations…
Pétition sur Internet
« Notre pétition sur Internet vient de dépasser les 2 000 signatures », note Bernard Jégou, directeur de l’Irset, l’Institut de recherche sur la santé, l’environnement et le travail, à Rennes.
L’appel est lancé à l’Agence nationale de la recherche (ANR). C’est elle qui attribue l’argent de la recherche, en France. Voici un mois, elle a annoncé qu’elle n’enverra pas les 8 millions d’euros que l’Institut attendait.
Pesticides, Bisphénol A, nucléaire…
Huit millions pour quoi faire ? « Poursuivre nos recherches sur les contaminants de l’environnement et leurs effets », indique Bernard Jégou.
Exemples ? « Les pesticides et la maladie de Parkinson ; le Bisphénol A et l’infertilité masculine, les radiations nucléaires et les cancers… Notre Institut fait travailler ensemble des médecins du CHU de Rennes et de Pointe-à-Pitre, dans les Antilles ; des chimistes, des épidémiologistes, des généticiens, des statisticiens… Et notre recherche était prévue dans le Grenelle de l’environnement ! » En dehors de tout lien avec des entreprises privées.
Pressions sur le ministre
« Nous regrettons cette décision », explique Maurice Héral, responsable du département environnement et ressources biologiques de l’ANR. « Notre budget a baissé de 10 % en deux ans. Nous avons dû reporter notre aide à ce programme. » Pour lui, c’est le ministère de la Recherche et de l’Enseignement supérieur qui a « gelé » ces crédits.
Faut-il y voir une conséquence de pressions de l’industrie chimique ? Nucléaire ? « Je ne sais pas, répond Bernard Jégou. Nos recherches ont un caractère ultrasensible. Il pourrait y avoir un conflit d’intérêt. »
Maurice Héral n’y croit pas davantage. La preuve : l’ANR organise un colloque sur les avancées de la recherche dans tous ces domaines, le 1er et le 2 février. Les scientifiques font un rêve : que l’État vienne y annoncer qu’il ouvre finalement son porte-monnaie. Des parlementaires de l’UMP et du PS font le siège de Laurent Wauquiez, ministre de la Recherche.
La France est en retard
« La France manque de chercheurs dans ces domaines, reprend Bernard Jégou. Nous sommes en retard par rapport à d’autres pays. Nous pourrions en former. Il y a des emplois à la clé pour créer de nouveaux types de tests. »
Au même moment, le registre des malformations de l’hôpital de Lyon va devoir fermer. Créé en 1973, il recense les naissances de bébés sans cœur, avec des jambes soudées… Il permet d’établir les liens entre malformations et environnement.