Eva Joly à Toulouse et dans le Monde pour les 10ans d’AZF

À noter la photo de dépôt de fleurs avec Dominique Queija, militant historique des Verts de Toulouse, ouvrier rescapé de l’explosion d’AZF présent sur le site le 21 septembre 2001, et aujourd’hui membre du bureau du groupe local EELV Toulouse.

 

 

Eva Joly boudée par la gauche à la commémoration d’AZF

 

Envoyée spéciale à Toulouse (Haute-Garonne) – Eva Joly aime souvent à dire que « l’écologie pense la complexité », ce qui en freine la compréhension immédiate. Hier après-midi, à Toulouse, elle a pu vérifier sur le terrain la réalité de cette maxime. Car la candidate d’Europe Ecologie-Les Verts, venue pour faire entendre la voix des écologistes lors de la commémoration du dixième anniversaire de l’explosion de l’usine, s’est retrouvée bien seule. Seule, et ouvertement boycottée.

Sur le site, qui n’est plus aujourd’hui qu’une grande prairie bordée de quelques arbres, au moment du dépôt des gerbes, se trouvait tout le gratin régional. Il y avait le préfet, Henri-Michel Comet, en grande tenue ; le maire socialiste de Toulouse, Pierre Cohen ; le président socialiste du Conseil régional, Martin Malvy ; sans oublier les députés et présidents d’association. Curieusement, personne n’a semblé remarquer la candidate écologiste, pourtant entourée de micros et de caméras, et accompagnée du député Yves Cochet, ancien ministre.

Personne n’est venu la saluer. Pas plus les politiques présents que les autorités administratives, pour lesquelles c’est pourtant une obligation républicaine. Et au moment de faire la photo devant la stèle, Eva Joly s’est retrouvée au quatrième rang. Invisible, donc.

 

« ELLE VEUT QU’ON BOUFFE COMMENT ? »

Il faut dire que l’affaire AZF est un concentré des profondes divisions qui fissurent la gauche sur les questions environnementales. La CGT campe sur la défense de l’emploi, et n’aborde l’épineuse question de la sécurité sur les sites dangereux que par le biais de la sous-traitance.

« Quand on développe la sous-traitance en cascade, on affaiblit la chaîne de sécurité », a expliqué Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT. Lequel a lui aussi soigneusement évité Eva Joly, dont les positions sont une énigme pour les militants. « Elle est contre l’industrie chimique, elle est bien sympa, elle veut qu’on bouffe comment ? » s’agace un cégétiste.

Pierre Cohen, le maire, scientifique de formation, ne parvient pas à comprendre ce qu’il perçoit comme une dérive obscurantiste. Peut-être est-il légèrement mal à l’aise quand on lui ressort que dans une autre vie, quand il était maire de Ramonville-Saint-Agne, une petite bourgade proche de Toulouse, il défendait l’extension du site AZF, contre les écologistes, le conseiller régional Gérard Onesta en tête, ce qui figure sur les compte-rendus des réunions municipales.

 

« QUELLE HONTE ! IL N’A PAS PEUR, LUI ! »

Les écologistes, bons camarades mais sans excès, se chargent aujourd’hui de le lui rappeler. Les relations sont des plus tendues également avec le président du Conseil économique et social environnemental de Midi-Pyrénées, Jean-Louis Chauzy. Lors de la cérémonie de commémoration, M. Chauzy a déposé une gerbe, tandis qu’Eva Joly prononçait bien fort : « Quelle honte ! Il n’a pas peur, lui, hein ! » Jean-Louis Chauzy, qui resta impassible, était lui aussi, avant l’explosion, un chaud partisan de la montée en puissance d’AZF, sans insister sur les mesures de sécurité.

La cérémonie terminée, Eva Joly a expliqué devant les caméras qu’elle n’était bien sûre pas opposée à l’existence d’une industrie chimique, mais que « cet accident ne venait pas de nulle part, il était inscrit dans l’histoire. Et il y en aura d’autres. » Et de plaider pour des contrôles plus fréquents pour les 647 sites Seveso classés « seuil haut », c’est à dire très dangereux, et qui ne sont inspectés en moyenne qu’une fois par an.

Pierre Cohen, maire de Toulouse, n’a pu s’évaporer quand Eva Joly s’est avancée vers lui. Il a murmuré « bonjour, et merci d’être là ». Puis il l’a écoutée distraitement, tout en regardant ailleurs, avant de lui lancer, un petit sourire en coin : « Et surtout… bonne chance ! »

Anne-Sophie Mercier

http://www.lemonde.fr/politique/article/2011/09/22/eva-joly-boudee-par-la-gauche-a-la-commemoration-d-azf_1575923_823448.html#ens_id

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