Et pourtant, elles restent invisibles
« Au premier regard, elles restent invisibles et silencieuses. Et puis, on les voit : ces sœurs, mères, épouses ou victimes, nounous, femmes de chambre, analphabètes, femmes voilées ou en boubou, régnant dans les odeurs d’huile de palme sur des cuisines minuscules, cloîtrées dans des immeubles de quartiers relégués… nous voilà assommés de clichés, qui semblent tellement caricaturaux et qui, pourtant, foisonnent aux guichets des préfectures et des consulats, en filigrane des politiques d’intégration ou bien dans certains reportages télévisés.
N’en déplaise à nos représentations, les femmes migrantes sont là, d’autant plus déterminées que le chemin migratoire a été éprouvant, d’autant plus actives qu’elles doivent prouver encore davantage, d’autant plus fortes que leur situation, et de femme, et de migrante, les rend plus vulnérables aux discriminations et injustices sociales. Elles existent et agissent pour et par elles-mêmes, tributaires de notre incapacité collective à penser la complexité et la diversité de leurs situations et parcours de vie privée et professionnelle.
Au travers de ce petit guide, c’est bien de la femme migrante, la femme mobile, dont nous voulons ici tracer les portraits et les projets, et auxquelles nous voulons rendre justice. »
Les femmes bougent et la moitié des migrants sont des migrantes. « Dans le monde, 49% des migrants sont des migrantes. En Europe, 52,4% des migrants sont des migrantes, en Asie 49% et en Afrique 46,2%. Les femmes représentent 53% des migrants arrivant sur le territoire français. Ces chiffres sont stables depuis plusieurs dizaines d’années ». De plus en plus de femmes migrent seules.
Les routes migratoires sont plus dangereuses pour les femmes que pour les hommes. Les raisons de la migration des femmes, « épouses, étudiantes, voyageuses, affairées, réfugiées », sont multiples. Et contrairement aux idées répandues, les femmes sont souvent qualifiées, « Derrière les nounous et les femmes d e ménage, des infirmières, des comptables ou des ingénieures… ». Pour elles, ce qui domine reste cependant le travail précaire et l’absence de droits. « Il en a fallu des batailles pour que le mouvement des sans-papiers devienne celui des travailleurs sans-papiers puis des travailleurs et travailleuses sans-papiers ! »
Les femmes immigrées sont des actrices de la société. Les auteur-e-s de la brochure soulignent que « l’intégration n’est pas une injonction ».
Elles et ils traitent aussi des réfugiés qui sont aussi des réfugiées, de la convention de Genève qui écarte les persécutions de genre de son application, déniant ainsi la qualité de réfugiée aux femmes victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle, ou victimes de violences dans le « cadre privé ».
Une petite brochure à faire connaître.
En complément possible :
Cimade : Migrations : État des lieux 2012, Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays (article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme)
Sous la direction de Jules Falquet, Helena Hirata, Danièle Kergoat, Brahim Labari, Nicky Le Feuvre, Fatou Sow : Le sexe de la mondialisation. Genre, classe, race et nouvelle division du travail, SciencesPo Les Presses 2010, Le genre est un organisateur clé de la mondialisation néolibérale
Cimade : Petit guide pour conjuguer la migration au féminin, Télécharger le petit guide
Didier Epsztajn
Publié le 17 juin 2013
http://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2013/06/17/et-pourtant-elles-restent-invisibles/