Dix ans après l’explosion d’AZF, restent la tristesse, la colère et l’amertume
Vous trouverez ci-dessous mon éditorial de la lettre d’information électronique du groupe des élus Europe Ecologie Les Verts de la ville de Toulouse.
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A Toulouse, cette rentrée a été marquée par la date du 21 septembre. A l’occasion de cette journée de commémoration de la catastrophe AZF, les élus écologistes se sont recueillis aux côtés des associations, des représentants des autorités publiques et à l’unisson de toutes les formations politiques du Conseil municipal. En présence d’Eva Joly, nous avons rendu hommage aux 31 morts et aux 2 500 blessés de l’accident industriel le plus grave jamais survenu sur le sol français.
10 ans après ce jour funeste, l’émotion et la tristesse sont toujours là. Tous ceux qui étaient présents lors de la cérémonie de commémoration ont pu la ressentir physiquement.
Mais au-delà de la douleur ressentie à l’égard des victimes, nos sentiments restent la colère et l’amertume.
La colère, parce que les responsables de cette catastrophe n’ont pas été condamnés. Nous n’oublions pas l’attitude déloyale de la société Total, qui a dès le lendemain de l’explosion envoyé ses enquêteurs, qui ont accompli seuls sous prétexte d’enquête interne, des actes qui ont été dénoncés par les parties civiles comme des entraves à la justice. Les membres de cette Commission d’enquête ont vu les dernières personnes à être entrées dans le hangar 221. Ils ont mené des interrogatoires sans en faire part à la police. Ils ont procédé à des prélèvements et ont modifié l’état des lieux. Des pièces à conviction essentielles n’ont jamais été retrouvées et ont fait défaut à l’information pénale. Au final, malgré les manquements à la sécurité relevés à de nombreuses reprises et les « fautes organisationnelles » dénoncées par le tribunal dans le verdict du premier procès, la justice a considéré qu’en l’absence de preuve formelle de la responsabilité de l’industriel, elle devait prononcer un non lieu.
Aujourd’hui, dix ans après le drame, des décennies après les premières alertes lancées par les écologistes sur le risque industriel, le besoin de justice n’a pas été satisfait. Et tous nos espoirs sont à présent tournés vers le procès en appel qui se déroulera en novembre. Nous voulons croire que son issue sera différente, car faute de vérité sur cet accident, le temps ne suffira pas à réconcilier les mémoires et à apaiser les divisions.
L’amertume, parce que dix ans après cette explosion, et huit ans après la promulgation d’une loi qui instituait des « Plans de prévention des risques technologiques » (PPRT), les mesures ne sont pas prises pour garantir qu’un accident de cette ampleur dans une zone urbanisée ne puisse plus jamais se produire. Car aujourd’hui, plus de trois ans après la date limite d’approbation des PPRT prévue par cette même loi, sur les 420 PPRT qui doivent être mis en oeuvre à l’échelle nationale, seule une centaine a été approuvée.
Notre agglomération compte 7 sites concernés par un PPRT, parmi lesquels la SME-SNPE et Esso SAF (à Fondeyre), classées Seveso seuil haut. La SME-SNPE poursuit ses activités sur l’île du Ramier, à quelques centaines de mètres de l’ancien site AZF, c’est à dire en pleine agglomération. L’usine fait parler d’elle à chaque fois que sont détectés des rejets polluants dans la Garonne, comme ceux de perchlorate d’ammonium il y a quelques mois. Et Toulouse n’est pas une exception, puisque le même industriel s’est récemment rendu responsable des mêmes rejets à Bordeaux, jusque dans le réseau d’eau potable ! Parce qu’il est inadmissible que de telles activités continuent de s’exercer au coeur d’une agglomération, nous demandons le déménanagement de la SME-SNPE dans une zone à l’écart de l’urbanisation.
En ce qui concerne l’unique PPRT signé à ce jour, celui du dépôt Esso de Toulouse – Fondeyre (où sont stockés quelque 36 000 m3 de produits pétroliers raffinés), le résultat est plus que décevant. A l’encontre de l’avis rendu par la Ville de Toulouse et la Communauté urbaine, qui demandaient le déplacement du dépôt hors de cette zone urbaine, ce sont cinq entreprises riveraines qui devront être expropriées !
Nous ne pouvons nous satisfaire de cette gestion du risque. Et nous demandons que des moyens supplémentaires soient consacrés à la mise en oeuvre de ces plans de prévention, au contrôle des sites ainsi qu’à l’indemnisation de leurs riverains.
Ce n’est qu’à ces conditions que nous pourrons considérer que les leçons d’AZF ont réellement été tirées.