Conseil fédéral – Europe Ecologie Les Verts Aquitaine https://aquitaine.eelv.fr Le site d'Europe Ecologie Les Verts Aquitaine Tue, 24 Apr 2018 09:51:43 +0200 fr-FR hourly 1 Intervention de politique générale de Davis Cormand au Conseil fédéral de décembre 2017 https://aquitaine.eelv.fr/2018/01/09/intervention-de-politique-generale-de-davis-cormand-au-conseil-federal-de-decembre-2017/ Tue, 09 Jan 2018 13:33:04 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13331 Cher.e.s ami.e.s, Profitons de ce temps de débat entre nous pour essayer de problématiser ensemble les enjeux tels que nous devons les aborder dans les temps qui viennent. D’abord un point de contexte tel que je le perçois, tout cela étant, bien entendu soumis à la discussion. ...]]>
Cher.e.s ami.e.s,
Profitons de ce temps de débat entre nous pour essayer de problématiser ensemble les enjeux tels que nous devons les aborder dans les temps qui viennent. D’abord un point de contexte tel que je le perçois, tout cela étant, bien entendu soumis à la discussion.
Après notre sortie du gouvernement en 2014, après la période compliquée jusqu’en 2017 et suite à la dernière séquence électorale encore plus complexe (et c’est le moins qu’on puisse dire !), il y a eu une sorte de “reboot” du paysage politique français. Avant, nous étions habitués au paysage bipolaire : la social démocratie d’un coté, la droite de l’autre. S’ajoutait à ce paysage l’Extrême Droite, mais qui était relativement isolée par un « cordon sanitaire » politique . Nous, écologistes, nous essayions d’exister tant bien que mal dans ce paysage là en affirmant une autonomie partidaire associée à des accords avec la « Gauche » au niveau local, et plus ou moins assumée au niveau national.
Mon sentiment est que depuis 2017, le paysage politique a considérablement évolué et s’est transformé en une sorte de « triangle des Bermudes » composé de trois angles :
– D’abord celui du « populisme de l’establishment », qui a fédéré dans un « cercle de la raison » ( selon la terminologie inventée par Alain Minc en 1995 pour désigner le projet politique d’Edouard Balladur ) une partie de gestionnaires du PS et de la droite autour d’Emmanuel Macron. Avec un pouvoir très incarné, très vertical. Je le qualifie de populiste il assume la remise en question des corps intermédiaires et donc les contre-pouvoirs: syndicats, médias, etc etc.
– Le second angle de ce triangle est celui d’« un populisme de Gauche assumé comme tel », et ce n’est donc pas un procès d’intention que je fais. Celui-là est incarné par la France Insoumise et Jean-Luc Mélenchon. Là encore, il y a l’affirmation d’une hégémonie politique qui entend se substituer aux autres Partis politiques, aux syndicats, aux médias et aux ONG.
– Et enfin le troisième angle c’est celui du « populisme extrémiste » incarné aujourd’hui par le Front National.
Mon impression est que tout ce qui essaie de se rapprocher de ce « Triangle des Bermudes » y est absorbé et y disparait. On voit bien qu’une partie de l’opinion publique et les observateurs mettent en demeure les uns et les autres de se positionner par rapport à ce triangle. D’ailleurs les 3 angles du triangle se « tiennent par la barbichette » car ils ont tous bien évidemment intérêt à ce que cette géométrie politique là perdure. Ils ont tous les 3 intérêts à continuer de bénéficier de ce paysage politique.
Je pense que notre enjeu en tant qu’écologistes est de résister à la tentation de nous positionner par rapport à ce triangle et d’assumer de porter un autre imaginaire. Ce n’est pas simple. Au niveau de Les Républicains, Il y a la tentation de Wauquier d’incarner un angle « trumpiste », populiste d’extrême droite pour déloger le Front National de sa situation actuelle. De l’autre côté, on a un PS qui ne sais plus ou il habite entre : “Est-ce qu’il faut être un peu Mélenchonisé ?” ou : “Est-ce qu’il faut aller avec Macron” ou encore « comment réinventer la social-démocratie », etc…  Je persiste à penser que vouloir se positionner par rapport à ce nouveau « champ de bataille » politique incarné par ce « triangle de Bermudes » est sans issue, sauf à assumer un choix de fusion avec l’angle du triangle dont nous sommes vraisemblablement le moins éloigné: La France Insoumise. Je n’ai pas le sentiment que cette option soit souhaitée dans notre Parti.
Le second sujet que je soumets a notre réflexion : c’est celui du gros travail mené avec le Comité d’initiative sur l’élaboration d’une proposition de méthode pour nous réinventer, nous fonder, nous refonder, nous métamorphoser, muter etc. Je crois qu’il y a une étape préalable qui manque encore dans notre démarche et qui est celle pourtant essentielle de la définition de « ce que nous sommes ». Qu’est ce qui fait que nous sommes ensemble, dans un parti écologiste, pour porter un imaginaire politique écologiste ? C’est à mon sens la première pierre de fondation qui nous permettra ensuite de discuter avec d’autres et de réfléchir à une recomposition qui dépasse, qui déborde, qui transcende le triangle des Bermudes évoqué précédemment.
L’écologie politique est en réalité à la croisée des chemin. D’une force politique « prédictive », qui alertait sur les risques que notre modèle de développement faisait courir à notre environnement et à la planète, nous sommes désormais dans un contexte où l’effondrement écologique, social, démocratique a commencé. Cela nous oblige à revisiter notre projet, notre vision et notre stratégie.
Une des pistes que nous devrions explorer c’est de réfléchir à un mouvement, à un parti de l’écologie politique, qui essaie d’articuler, de structurer les 3 leviers qui nous permettent d’agir sur le réel :
– En tant que militants politiques, le 1er levier c’est celui des résistances : c’est notre côté “zadiste”, le fait que nous nous opposons aux projets que nous  considérons incompatibles avec l’idéal et les valeurs qui sont les nôtres. Ce sont en fait des relations et des actions que nous nourissons en tant que militant.e.s mais que nous avons du mal à articuler réellement en tant que mouvement.
– Le deuxième levier est celui des utopiesou des utopies concrètes. C’est toutes celles et tous ceux qui inventent l’imaginaire de demain à une échelle souvent locale ou individuelle mais qui préfigurent la société désirable que nous voulons construire. Là encore, nous sommes nombreuses et nombreux à être impliqué.e.s sur ces chantiers, mais nous avons des difficultés à articuler ces initiatives avec notre activité en tant que Mouvement.
– et le 3e levier est celui sur lequel on a concentré l’essentiel de notre travail  collectif jusqu’à maintenant, c’est le levier institutionnel, celui de la régulation.
La manière de réinventer une forme parti, une forme mouvement, serait de réfléchir à comment on articule ces 3 niveaux d’interventions pour changer les choses. Car la résistance et l’utopie on besoins du levier institutionnelle pour remporter des victoires et massifier les possibles. Et de la même façon, le levier institutionnel est condamné à l’échec si celui-ci n’est pas accompagné par une société « en phase » et prête à mettre en oeuvre la radicalité des changements que nous savons utiles.
Autre réflexion qui peut-être la nôtre et je ne veux pas être trop sévère avec nous-mêmes, mais depuis quelques années j’ai le sentiment que si nous sommes courageux.ses et résilient.e.s dans l’action militante, nous avons été fainéant.e.s, insuffisant.e.s, nous n’avons pas mis assez d’énergie dans le fait de restructurer, de réinventer, une doctrine écologiste. En fait notre mouvement politique se nourrit via des sources diverses : artistiques, philosophiques, naturalistes, scientifique, sociologique, etc… Mais nous n’avons pas encore fait un travail suffisant de structuration de tout cela et nous n’interrogeons pas, ou qu’au coup par coup, l’ensemble des angles qui percutent la société, à la lumière de notre vision écologiste.
Ma conviction c’est qu’une force politique qui se dit à vocation majoritaire ne peut faire l’économie de ce travail de fond et si on a l’ambition de vouloir grandir, grossir, infuser, structurer le débat, il faut que nous revenions à ce travail fondamental que j’ai le sentiment que nous avons un peu oublié parce que l’on a confondu deux choses : la vision écologiste dont je viens de parler et ce qui constitue un programme. Et j’espère qu’on a tous conscience que l’objet d’un parti politique n’est pas seulement un programme et un projet mais que c’est beaucoup plus que cela.  C’est aussi un imaginaire politique, un récit politique sur une vision de la société qu’il nous faut porter. Nous avons été trop souvent dans une approche un peu scolaire ou technocratique de notre rôle en tant qu’intervenants politiques et pas assez les porteurs d’un imaginaire global. C’est d’ailleurs pour cela qu’il ne va pas de soi que nous devions fusionner avec d’autres forces politiques qui ont pu intégrer dans leurs programmes des items écolos, mais dont le projet global, l’imaginaire politique entre en contradiction, ou en dissonance, avec ce que nous considérons comme les fondamentaux de l’écologie politique. Je pense à l’écosophie, la non-violence, le refus de l’anthropocentrisme, la décroissance, etc etc.
Mais pour avoir une critique et des éléments de différenciation qui soient audibles par rapport à eux, encore faudrait-il que nous mêmes re-nourrissions ce récit.
Pour cela il y a un certain nombre de propositions de chantiers qui sont déjà dans nos esprits, dont celui de l’écologie que j’ai évoqué précédemment et je n’y reviens pas. Il y a également celui de l’économie. J’étais il y a quelques semaines en Midi Pyrénées ou Christelle de Crémiers a fait un exposé passionnant sur la post croissance en formulant quelque chose que l’on a toutes et tous a l’esprit sur le fait que ce qui est une des forces de l’écologie, c’est que c’est le pilier critique le plus radical du capitalisme. L’angle marxiste originel, si je puis dire, était celui de critiquer le capitalisme à travers ses conséquences sociales. La critique écologiste du capitalisme va plus loin : elle remet en cause le fondement même du capitalisme qui implique une croissance infinie dans un monde fini. Or, si les conditions sociales jugées acceptables ou non sont « négociables », la capacité de résilience de la nature ne l’est pas.
Je pense que nous partageons toutes et toute cette réflexion là, y compris dans l’objectif de nous positionner sur l’échiquier politique de façon radicalement anticapitaliste et antiproductiviste.  Cette entrée assez novatrice, centrée sous l’angle des limites de la planète est une façon de ré-interroger ce concept d’ « anticapitalisme » et de faire entendre un nouvel imaginaire.
Un mot sur la démocratie et sur l’Europe. On voit bien que ces deux termes se percutent. Vous l’entendez, il y a un débat dans la société très puissant sur l’Europe et on pourrait également de la même manière interroger d’autres échelons institutionnels. C’est en fait la question de notre rapport à la souveraineté, ou autrement dit, à la démocratie – qui est posée. Je pense que nous devons revisiter l’approche que nous avons de la souveraineté parce qu’aujourd’hui, à tous les échelons, il y a des vides de souveraineté. Le problème européen ce n’est pas l’Europe en soi, c’est son (dis)fonctionnement démocratique. On l’a vu avec le Glyphosate, ou finalement, les parlementaires qui sont les représentants des peuples européens ne sont pas souverains dans les faits puisque la décision ne se prend pas au niveau parlementaire. Et c’est vrai également pour les intercommunalités qui demeurent des émanations d’une démocratie de second niveau.
Réinterrogeons la valeur de la souveraineté mais non pas sous l’angle des clans nationalistes, parce que ce qui me fatigue dans le récit d’aujourd’hui c’est de dire : “comme l’Europe va mal“, il faut revenir à ce que serait le biotope naturel de la souveraineté à savoir l’Etat nation.
Si nous sommes effectivement en désaccord avec cette vision, encore faut-il nourrir le contre argumentaire ! Selon moi il y a au moins 3 idées a articuler : celle de la souveraineté, j’en ai parlé; Celle de la subsidiarité qui est un mot que nous utilisons souvent et qui permet d’articuler l’échelon européen avec les notions de régionalisme, de nationalisme et aussi l’échelon local. Et tout cela ne tient de façon collective qu’avec la troisième idée qui est celle de la solidarité. Car il ne s’agit pas que chacun nourrisse son développement dans son coin sans avoir une vision globale de l’ensemble. Bref, il s’agit de reconstruire une Démocratie désirable autour de ces 3 valeurs indissociables: souveraineté, subsidiarité et solidarité.
Enfin, il y a le quatrième chantier, celui de l’égalité. On voit bien qu’aujourd’hui qu’il y a un débat de plus en plus brutal dans la société sur les sujets du genre Charlie versus Mediapart ou là aussi il nous faut prendre de la hauteur et réinterroger les aprioris et résister à la mise en demeure qui nous est faite de « choisir un camp ». Il y a aussi le sujet des discriminations et des violences dont sont victimes les femmes. ces discriminations et violences s’entremêlent avec  d’autres liées à l’origine, la religion, la préférence sexuelle ou encore le lieu où on habite et l’accès qu’il permet – ou pas – à un emploi, à des services publics de qualité, à un logement digne, etc etc.
Notre plan de travail doit prévoir de re-questionner nos approches et traiter politiquement toutes ces différentes thématiques à travers le prisme écologiste.
Dernier point : « Et nous dans tout cela ? ». Je crois qu’il y a une tentation de nous replier dans une forme de « zone de confort », c’est à dire nous noyer comme on le fait d’habitude dans les procédures, dans les méthodes etc. Pourtant, la profonde mutation politique à l’œuvre doit nous prémunir de nous contenter de rester dans cette façon de faire qui est la nôtre depuis trop longtemps. Il va falloir pour le coup réinventer nos pratiques et nos façons de débattre pour pouvoir être plus aptes à appréhender notre avenir. Il y a un travail remarquable initié par le Comité d’initiative, et je le dis d’autant plus à l’aise – et peut-être que cela ne vous aura pas échappé – que la mise en œuvre au dernier CF de cette affaire, même si je l’ai soutenue sincèrement, ne m’a pas au départ transporté d’enthousiasme ! Je suis forcé d’admettre, et je le fais de bon coeur devant vous aujourd’hui, que le travail qui a été mené est vraiment remarquable, Il y a une façon de travailler avec Hélène Hardy et avec beaucoup d’autres d’entre vous qui fonctionne bien.
Mais j’en reviens a mon propos liminaire qui est de dire que la meilleure méthode et les meilleures intentions ne nous mènerons pas bien loin si on ne prend pas les choses dans l’ordre. Il faut aussi que chacune et chacun s’approprient sur 1) ce que nous sommes, 2) ce que nous voulons faire et 3) avec qui. Et pour pouvoir répondre à la dernière question, il faut commencer par répondre aux 2 premières. Cela ne peut être que le travail du comité de répondre a cela mais c’est un chantier que nous devons toutes et tous nous approprier.
Sur la période que vient, on ne va pas se mentir, car c’est évidemment un enjeu: Il y a une échéance qui va se dérouler en partie en même temps que notre réinvention et qui trotte dans les tètes : c’est celle du rendez-vous des européennes en 2019. Cela ne nous préoccupe pas forcement uniquement à cause des destinées ou des ambitions individuelles des uns ou des autres, mais parce que cela va être aussi un moment déterminant sur l’avenir de l’écologie politique en France. Est-ce que le triangle des Bermudes dont je parlais emporte tout et se structurera encore davantage à l’occasion des européennes ou est-ce que nous arriverons à construire un autre récit ? Et cela, nous ne pourrons pas le traiter 7 mois avant l’élection par je ne sais quel vote à l’arrache pour designer nos candidates et nos candidats ! C’est un sujet qui doit être anticipé, maturé pour qu’on sache vraiment ce qu’on veut faire et qu’on ne subisse pas l’échéance.
Il faut nous poser encore une fois des questions simples mais déterminantes : quel récit pour les Européennes ? Nous avons, avec le Bureau exécutif et Pascal Durand au nom des eurodéputés, rencontré le président de la République sur les échéances européennes. Première information confirmée depuis par le premier ministre : il y aura une liste nationale à la place des listes euro régionales pour la France. A priori, pas de listes transnationales, même si la France continue à soutenir cette idée. Ce que souhaite faire Macron, c’est construire un débat au moment des élections où, en gros, il y aurait 2 options : ceux qui sont pour l’Europe et je le dis entre nous : Dany va aider à promouvoir cette idée aux cotés d’Emmanuel Macron. Ce n’est pas un petit sujet pour nous. Et d’un autre coté il y a ceux qui sont contre : Mélenchon et les extrémistes de droite.
Si on laisse s’installer ce récit là, avant même que la bataille ait commencé, le champ de bataille nous sera défavorable.  Il faut donc que nous mettions notre énergie pour faire en sorte que l’alternative qui soit proposée au débat ne soit pas binaire, mais ternaire :
1 – l’option du statu quo, et j’affirme que ce que propose Macron en vrai c’est le statu quo ;
2- Il y a à ceux qui veulent sortir de ce statu quo européen par le bas : c’est la tentation de la souveraineté nationale ;
3- et il y a celles et ceux qui veulent sortir de ce statu quo par le haut par la mise en place d’une souveraineté européenne, par un nouveau rêve européen porté par des valeurs d’écologie de solidarité etc. Et nous devons être celles et ceux qui sont les chevilles ouvrières de ce 3e choix.
Si dès 2018, nous n’arrivons pas à installer dans les têtes cette troisième option, non seulement je pense que l’Europe sera sur de mauvais rails, mais de plus, nous serons hors course avant même d’avoir pris la ligne de départ. C’est ce qui nous est arrivé au fond au moment des présidentielles et ce n’est pas la faute du candidat qu’on a désigné : l’histoire était déjà écrite avant même qu’on choisisse ce que l’on allait faire en 2017. Ne retombons pas dans le même panneau. Cela nécessite d’être groupés, cela nécessite que l’on dise toutes et tous à peu près la même chose. Mettons nous d’accord sur un récit, sur une incarnation collective et ensuite on fonce car sinon, nous continuerons de subir.
Dernier point un peu provocateur, mais il faut arrêter avec les non-dits : Aujourd’hui, au Mans, il y a la naissance d’un mouvement politique, Génération.s. Dans sa charte fondatrice, ce mouvement écrit noir sur blanc qu’il se réclame de la charte des Verts mondiaux…. On peut sourire, ricaner, ou rire, mais objectivement c’est un fait politique. Discutons-en et après, collectivement, voyons comment nous appréhendons ce fait politique. Mais rien ne serait plus puéril et immature que de nier cette réalité et de faire semblant de l’ignorer.
Ce que nous ne pouvons pas ignorer non plus, c’est que le gars qui porte ce mouvement, c’est aussi celui qu’on a soutenu à la dernière présidentielle. Cela aussi, c’est un fait politique. On peut considérer aujourd’hui qu’il ne fallait pas le faire… Mais ce qui est important aujourd’hui, c’est de déterminer ensemble ce que nous portons collectivement. Les petites musiques des uns et des autres, les « je l’avais bien dit » ou les « on aurait dû faire autrement » sont très intéressantes mais ça ne donne pas à notre mouvement politique une direction collective. C’est de cela qu’il faut arriver à discuter et à débattre collectivement. Mon sentiment aujourd’hui, c’est qu’on n’est pas forcément parti pour faire cela, et c’est pour cela que je parlais de « zone de confort » tout à l’heure… Pour ma part, j’assumerai de porter de façon lucide ces débats. Nous avons du temps pour le faire, les européennes sont en mai 2019. Mais tout le temps du monde sera insuffisant si nous ne nous posons pas les bonnes questions et/ou si nous privilégions des débats de posture. C’est pourquoi je nous souhaite de vrais débats, constructifs, lucides et fructueux dans les jours et les mois qui viennent, à commencer par aujourd’hui.
Je vous remercie.
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Discours de David Cormand au Conseil fédéral d’EELV https://aquitaine.eelv.fr/2017/09/11/discours-de-david-cormand-au-conseil-federal-deelv/ Mon, 11 Sep 2017 14:09:00 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13061 David Cormand, Secrétaire national d’Europe Écologie Les Verts, a rappelé l’urgence d’agir contre le changement climatique et de se libérer du mythe de la croissance. Il appelle les écologistes à se mobiliser sur les sujets d’actualité : nucléaire, mobilité, ordonnances travail, agriculture et alimentation, et à se réinventer. ...]]>

David Cormand, Secrétaire national d’Europe Écologie Les Verts, a rappelé l’urgence d’agir contre le changement climatique et de se libérer du mythe de la croissance. Il appelle les écologistes à se mobiliser sur les sujets d’actualité : nucléaire, mobilité, ordonnances travail, agriculture et alimentation, et à se réinventer.

Vous pouvez télécharger le discours au format PDF.

 

Europe Écologie Les Verts

Conseil fédéral des 9 et 10 septembre 2017

Discours de David Cormand, Secrétaire national

L’écologie en première ligne

Chères amies, Chers amis,

Au moment où nous nous réunissons, nous avons une pensée solidaire pour nos ami-es antillaises et antillais qui ont été victimes de l’ouragan Irma, et qui se préparent à en affronter d’autres dans les jours qui viennent.

Nous pensons également à toutes celles et tous ceux qui sur notre planète sont victimes de l’effondrement climatique auquel nous assistons. Des moussons diluviennes au Bangladesh qui ont fait des centaines de morts, à l’Ouragan Harvey aux États-Unis en passant par des zones qui deviennent inhabitables du fait du réchauffement climatique, nous assistons sidérés aux résultats de l’acharnement avec lequel l’humanité rend notre planète inhospitalière.

Dans les témoignages qui nous sont parvenu des Antilles, une expression revient souvent « Nous avons vécu l’enfer sur terre ». La folie à laquelle nous assistons se résume à cette phrase.

Alors qu’il a fallut des millions d’années de hasards incroyables pour que la vie naisse sur notre petite planète perdue au milieu de l’Univers ; alors qu’il aura fallut ensuite d’autres millions d’années pour que la vie évolue et permette, en dépit de toutes les lois de la probabilité, à l’humanité de grandir grâce à l’environnement incroyablement propice qu’offrait Pachamama ; cette même humanité, en quelques générations, est en train de détruire les équilibres fragiles de la biosphère et ainsi condamner toute possibilité de continuer de vivre heureux sur Terre.

Il n’y a pas de sujet plus essentiel. Il n’y a pas d’urgence plus urgente. L’effondrement, c’est maintenant. Et il faut donc assumer de s’attaquer vraiment aux racines de ce mal qui nous menace.

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Le modèle dit de « développement » à l’oeuvre est la cause de ces désastres.

Hélas il aura fallut du temps, trop de temps, pour que la réalité du changement climatique soit reconnue par les pouvoirs politiques. Il aura encore fallut trop de temps pour admettre que ce changement climatique est directement lié à l’activité humaine telle qu’elle s’exerce aujourd’hui. Nous n’avons donc plus le temps maintenant de tergiverser pour agir.

Le temps des concours d’éloquence autour de la maison qui brûle est terminé. Ce n’est plus à la hauteur de l’urgence. Si le diagnostique que les écologistes portent depuis des décennies se vérifie, il est temps que les solutions que nous proposons soient mises en œuvre. Il n’est plus possible de se payer de mots, car bientôt il sera trop tard et le changement climatique à l’oeuvre et ses conséquences ne pourront plus être enrayés.

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Les obstacles devant nous pour agir sont difficiles à abattre car ils relèvent de la croyance et sont servis par de puissants lobbies. Parmi ces croyances : la croissance. La mythification de la croissance comme remède à nos problèmes est puissante. À gauche, à droite, au centre, dans les pays du Nord, dans ceux du Sud, toutes et tous entendent servir ce même dieu.

Et pourtant, derrière ce prétendu remède se cache l’une des causes de tous nos maux. La croissance est assise sur la consommation d’énergie. Elle est dopée depuis plus d’un siècle par l’usage des réserves de carbones contenues dans le sol pendant des millions d’années et qui se trouvent aujourd’hui dans l’atmosphère. Aujourd’hui, il faut toujours plus d’énergie et moins de travail pour, au final, moins de croissance. On dit parfois que nos sociétés prétendument civilisées ont renoncé aux sacrifices humains pour satisfaire leurs dieux.

Pourtant, nous sacrifions aujourd’hui la Terre et les espèces qui y vivent – plantes, animaux, humains – pour satisfaire cette idole.

Les lois de économie, qui ne sont votées par personne, prétendent que sans croissance, rien n’est possible. Alors que ce qui est impossible, c’est prétendre servir une croissance infinie dans un monde fini.

On taxe souvent les écologistes d’idéalistes ou d’utopistes. Mais les doux rêveurs sont ceux qui pensent que le monde peut continuer à être tel qu’il est, quand tout nous indique que nous sommes en train de basculer du bord du précipice. Les rêves de croissance transforment le monde en cauchemar.

Je pense au contraire que les écologistes sont en réalité de simples pragmatiques, et c’est là d’ailleurs que réside notre radicalité. Pour continuer à pouvoir vivre sur Terre, il faut prendre des décisions très pragmatiques et donc radicales, au sens étymologique du terme, la racine : laisser les hydrocarbure et le charbon dans le sol, puisque l’usage que nous en faisons détruit le climat et la biodiversité. En finir avec la croissance qui entend utiliser sans fin des ressources qui ne sont pas infinies. Partager le travail disponible puisque de plus en plus de tâches sont accomplies sans intervention humaine. Respecter le vivant puisque nous en sommes une partie. Nous commençons juste à découvrir que nous avons de nombreux points communs avec les animaux non-humains. Nous découvrons même que les arbres communiquent et s’organisent entre eux. Nous en sommes aux balbutiements de ces découvertes. Et nous risquons de tout détruire avant de commencer à connaitre vraiment cette incroyable histoire du vivant.

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C’est en cohérence avec ces réalités, avec ce que nous portons depuis longtemps que nous entendons porter le débat et des propositions dans les semaines et les mois qui viennent.

Vous aurez à débattre ce week-end sur les initiatives que nous prendrons sur plusieurs sujets majeurs :

– sur l’alimentation et l’agriculture. Des États généraux ont été organisés, hélas pilotés exclusivement par le ministre de l’agriculture. C’est une occasion de rappeler que l’agriculture meurt aujourd’hui du modèle qui lui a été imposé : accro au pétrole et à la chimie ; dépendante des géant de l’agro-alimentaire et de la distribution de masse.

Ces géants rêvent d’une agriculture sans paysans et sans sols. Leur modèle est en réalité une agriculture industrielle, sans vie. Nous défendons l’inverse : des paysans plus nombreuses et nombreux qui vivent de leurs productions sans en être les esclaves, des circuits courts qui rapprochent les consommateurs et leur assiette de celles et ceux qui font pousser ce qu’ils consomment.

Des paysans qui font vivre nos campagnes, qui font revenir dans nos villages l’activité qui y manque trop souvent. Dans paysan, il y a paysage. Nous sommes convaincus qu’un nouveau modèle qui construit et valorise une nouvelle relation des paysans et des agriculteurs à l’environnement au sens large est porteur de bonheur pour toutes et tous.

– sur les déplacements, avec les Assises de la mobilité qui vont se tenir à partir du 19 septembre.

Il faut saluer les déclaration des Ministres Hulot et Borne sur ce sujet. Si ce qui est annoncé est suivi d’effets, nous avons l’opportunité de sortir du culte de l’érections d’infrastructures pharaoniques : aéroports, lignes à grande vitesse, autoroutes, Lyon-Turin, canal Seine-Nord, et cætera et cætera… Ce que nous appelons les grand projet inutiles et imposés. Ils coûtent des milliards, fracturent nos paysages et les continuités biologiques, sont le plus souvent inutiles. Pire, ils sont réalisés au détriment des infrastructures dites de « transport du quotidien ».

La question de la mobilité est un enjeu majeur dans la lutte contre le changement climatique, elle est aussi déterminante pour le pouvoir d’achat – ou de vivre – de nos concitoyennes et concitoyens. C’est de cela dont on parle quand nous défendons les pistes cyclables, ou les trains Intercités et les trains de nuit.

– Sur le nucléaire, c’est l’heure des comptes. Là encore, les écologistes depuis des décennies alertent sur l’impasse et le danger que représente le nucléaire civile et militaire. Là encore, la croyance irrationnelle et prométhéenne dans la magie du nucléaire, servie par de puissants lobbies, aura occulté la réalité : le nucléaire est cher et dangereux. Et il produit de surcroît des déchets d’une durée de vie de plus de cent mille ans dont nous ne savons que faire. Le nucléaire est typiquement un faux ami du progrès. Il se donne l’apparence de la modernité alors même qu’il relève d’une technologie obsolète, couteuse et dangereuse. Comme Madoff, les promoteurs du nucléaire font de la cavalerie avec notre sécurité et avec notre argent puisqu’après la faillite d’Areva, ce sera bientôt le navire amiral EDF qui sera en danger.

La mise en route de l’EPR de Flamanville va être de nouveau reportée à après 2018 quand son lancement initial était prévu pour 2012. Son coût sera de plus de 11 milliards d’euros quand il était prévu à l’origine à moins de 3 milliards d’euros. Malgré ce report probable, l’enquête publique pour autoriser l’allumage de cette bombe à retardement est maintenue. On nage en plein délire. Dans aucun autre domaine relevant d’enjeux aussi majeurs en matière de sécurité et de finance, on tolérerait autant d’amateurisme.

Je veux dire aussi un mot de Cigéo, cette poubelle nucléaire irréversible à 25 milliards d’euros que l’ANDRA souhaite construire à Bure. Le 15 août dernier, un rassemblement d’opposition à ce projet à eu lieu. La répression violente et disproportionnée dont se sont rendues coupables les forces de l’ordre en utilisant des armes létales est scandaleuse. Je veux dire au pouvoir que nous ne tolèrerons pas que les militant-es écologistes soient pourchassés, visés par des grenades, blessés et parfois tués. Nous ne tolèrerons pas que nos pratiques militantes fassent l’objet d’un harcèlement violent de la part des autorités. Les écologistes ne sont pas des cibles.

Enfin, sur le nucléaire militaire, on voit avec l’actuelle escalade entre la Corée du Nord et les États-Unis que la menace est toujours présente. Chaque bombe atomique dans le monde est une épée de Damoclès suspendue sur l’humanité. Un monde sans arme nucléaire est non seulement souhaitable, c’est possible, et c’est ce que nous demandons.

– le Président de la République a prévu d’organiser un sommet international sur le climat et plus précisément sur la question du financement de la transition à Paris à l’automne. Ce sera l’heure de vérité pour la solidarité entre pays du Nord et pays du Sud, et l’occasion pour Emmanuel Macron de mettre fin à son double-discours sur la Taxe sur les transactions financières, qu’il propose dans les médias, mais refuse de mettre en œuvre quand nos partenaires européens nous le proposent. Nous nous mobiliserons à cette occasion auprès de la société civile écologiste pour que la parole des citoyennes et des citoyens soit entendue. Contrairement à la COP21 où l’intervention de la société civile avait été entravée par des assignations à résidences et des interdictions de manifestations, nous contribuerons à l’expression libre du plus grand nombre pour que le temps des belles paroles prenne fin et que nous passions aux actes.

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Les actes, parlons-en. Car depuis 3 mois qu’il est aux affaires, le nouveau gouvernement a agit. Ce qui m’interpelle le plus dans ces 100 premiers jours, c’est l’idéologie qui inspire les décisions qui ont été prises.

Sur la nouvelle « loi travail », bien entendu. Mais aussi avec la baisse des APL, avec la suppression des contrats aidées, avec les difficultés de la rentrée universitaire, avec le traitement inhumain réservé aux personnes réfugiées qui cherchent dans notre pays un peu de répits dans les terribles épreuves qu’ils traversent, avec la réforme de l’impôt sur la fortune et la réforme fiscale en générale et avec la suppression des emplois aidés.

Emmanuel Macron s’était définit comme un objet politique nouveau, non identifié, ne correspondant à aucune case. En réalité, au risque de lui déplaire, il est très très facile à ranger. La politique qu’il mène est identifiable. Il est en réalité très ordinaire. C’est la version aboutie du président « normal »… du dirigeant « normal ».

Il fait ce que font tous les dirigeants des pays occidentaux depuis 30 ans, qu’ils soient de gauche ou de droite : ils libéralisent, ouvrent à la concurrence, financiarisent l’économie, suppriment ce qui protège les plus fragiles. Dans son esprit, la vulnérabilité des plus faibles est le prix à payer, le sacrifice à assumer, sur l’autel de la modernisation de notre société.

Dans son esprit, refuser cette fatalité, c’est être « fainéant ». Pour Laurent Wauquiez, on s’en rappelle, c’est être des « assistés ». Les mêmes mots méprisants, la même idéologie, et au final, la même politique, contre celles et ceux qui, selon les critères du Président de la République, « ne sont rien ».

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Emmanuel Macron a parlé à Athènes lors de l’une des mises en scène de lui-même qu’il affectionne. Plutôt Narcisse que Jupiter, il a revendiqué la nécessité d’une réelle souveraineté européenne. Mais la souveraineté de qui ? Et pour quelle Europe ?

La souveraineté en acte, pour Emmanuel Macron, c’est celle des accords transnationaux dictés par les lobbys au nom de la dérégulation comme le CETA. C’est la souveraineté des intérêts des multinationales qui négocient les impôts qu’ils doivent payer en France, comme Google en ce moment. C’est la souveraineté des paradis fiscaux que l’on renonce à combattre à l’intérieur même des frontière de l’Union. C’est la souveraineté de la finance, lorsque la France renonce à mettre en œuvre la taxe sur les transactions financières. Cette souveraineté des puissants n’est pas la nôtre. Et cette Europe là n’est pas celle que nous voulons.

La souveraineté que nous souhaitons, c’est celle des peuples européens, libres de déterminer les valeurs et les politiques qui doivent être menées en Europe. Nous voulons un nouveau rêve européen qui nous réconcilie avec l’idéal trans-national et fédéral qui est le nôtre.

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Dans le grand chambardement politique qui marque une fin de cycle, pour l’écologie, tout commence. Nous sortons du temps de l’alerte pour entrer résolument dans le temps de l’action. Les idées que nous portons doivent s’épanouir dans la société pour offrir un imaginaire politique nouveau. Nous ne nous résignons pas à l’accompagnement du monde tel qui va et se rapproche du chaos.

Nous ne pensons pas d’avantage que la réponse aux enjeux de la période réside dans le populisme qui constitue un exutoire qui soulage sur le moment mais n’offre pas de perspective solide et durable.

C’est pourquoi notre mouvement politique doit se réinventer pour être disponible, aidant et utile dans ce moment de recomposition. C’est aussi la tâche qui est la nôtre et que nous devons construire en lien avec toutes celles et tout ceux pour qui l’avenir de la planète constitue l’enjeu majeur pour l’humanité. Plus que jamais, les écologistes seront aux rendez-vous des responsabilités et des idéaux qui nous animent.

Les questions auxquelles nous avons à répondre sont simples: Que voulons nous faire ensemble ? Pour quelles objectifs ? Quels moyens nous nous donnons pour y parvenir ?

Beaucoup de militantes et écologistes répondent au quotidien à ces questions et agissent. Notre ambition est d’être à la hauteur de leurs engagements.

Au travail.

Je vous remercie.

Source : Discours de David Cormand au Conseil fédéral d’EELV

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