vie du parti – Europe Ecologie Les Verts Aquitaine https://aquitaine.eelv.fr Le site d'Europe Ecologie Les Verts Aquitaine Tue, 24 Apr 2018 09:51:43 +0200 fr-FR hourly 1 Discours de David Cormand au Conseil fédéral des 17 et 18 mars 2018 https://aquitaine.eelv.fr/2018/03/20/discours-de-david-cormand-au-conseil-federal-des-17-et-18-mars-2018/ Tue, 20 Mar 2018 13:41:43 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13544 Discours de David Cormand, Secrétaire national, au Conseil fédéral d’Europe Écologie – Les Verts samedi 17 mars 2018. Également en PDF. ...]]>

Discours de David Cormand, Secrétaire national, au Conseil fédéral d’Europe Écologie – Les Verts samedi 17 mars 2018. Également en PDF.

Chères amies, chers amis,

La période demande que nous exercions un devoir d’élucidation du monde plus encore qu’à l’accoutumée. Partout ou le regard se porte, la confusion semble en effet l’emporter sur la clarté. Pourtant des lignes se dessinent qui tracent le contour des périls que nous devons affronter.

Premier élément déterminant : la crise écologique ne se freine pas. Ni à l’échelle planétaire, ni sur le continent européen, ni même dans notre pays on semble avoir pris la mesure de ce qui se joue présentement. Le paradoxe c’est que les discours se verdissent, que les consciences semblent s’ouvrir aux réalités environnementales indépassables, mais que le poids de l’inertie semble l’emporter. La présidence Macron n’est pas davantage à la hauteur des enjeux écologiques que la présidence Hollande.

Je ne dis pas que rien ne se fait. Je dis que le virage n’a pas été pris qui permettrait à la France de mener des politiques publiques environnementales dignes de ce nom. Le cap pris n’est pas le bon : nous restons prisonniers du mythe que la croissance résoudra tout, alors que nous savons qu’il n’en est rien. Ni notre politique industrielle, ni notre politique de la recherche, ni même notre politique d’aménagement du territoire ne sont marquées du sceau de la prise de conscience environnementale.

De ce point de vue, la modernité promise par l’arrivée d’une nouvelle génération de dirigeants aux responsabilités n’est qu’un mirage. L’âge ne fait rien à l’affaire : un jeune productiviste ou un vieux productiviste ont en commun la même vision rétrograde du monde. On nous avait promis que Macron était empreint de la pensée de Ricœur. On n’en trouve guère trace dans son exercice du pouvoir. La politique n’a pas gagné en sens, ni en sensibilité. L’ordre marchand semble devoir demeurer premier : la santé de notre pays doit donc continuer à se mesurer à l’aune du CAC 40. Dangereuse cécité. Nous n’attendions certes pas une conversion totale à l’écologie. Mais nous étions en droit d’exiger que le pragmatisme dont se targue le pouvoir actuel le conduise à réviser l’actuel modèle au regard de la catastrophe en cours.

A qui trouverait que mon analyse est sévère, je demanderais de se pencher sur l’actuelle réforme de la SNCF. Au lieu de jeter en pâture les cheminots à l’opinion en alimentant les rumeurs sur leur statut qui serait la cause de tous les mots de l’entreprise, n’aurait-il pas été plus conforme d’ouvrir le grand débat sur la place de notre politique ferroviaire dans la transition écologique ? Pour qui se souvient des bus Macron et du deal avec les société d’autoroute qui porte sa marque, il n’y a malheureusement rien d’étonnant à ce que le sujet ne soit pas abordé. Une réforme qui menace les droits sociaux et n’engage pas la mue écologique de la SNCF nous semble archaïque. Pardon de le dire avec force, mais pas un écologiste ne peut y voir augure de progrès.

*

Le deuxième élément qui doit nous interpeller, a à voir avec la crise démocratique.

En France, l’éclatement du paysage politique classique n’a pas débouché sur un regain de confiance dans la politique. Certes le nouveau pouvoir a renouvelé les visages et les générations. Mais les mêmes élites semblent confisquer le pouvoir, la distance entre le peuple et ses mandataires continue à se creuser, et la tentation populiste progresse. La droite classique s’est choisi pour chef un matamore tribunicien qui chasse sur les terres de la droite extrême.

Parallèlement, Marine Le Pen a choisi de tendre la main en direction de la droite pour impulser un nouveau cycle politique basée sur l’idée d’une coalition des forces qui font de la mondialisation, de l’islamisme et du refus de l’Europe leur programme commun. Chacun·e observe ce jeu tactique qui vise à occuper le leadership de la radicalisation identitaire du pays.

Cette surenchère est une menace pour notre cohésion sociale : appelons un chat un chat, Laurent Wauquiez comme Marine Le Pen sont des incendiaires. Leurs propositions politiques sont des involutions, des reculs démocratiques qui faisant reculer l’idée de l’universalité des droits de l’humain portent en germe des reculs civilisationnels profonds. Au fond, c’est avec l’idéal des Lumières qu’ils entendent rompre, sans oser l’affirmer. La faiblesse sociale du macronisme, son incapacité à réformer dans la justice, son inégalité dans la répartition des revenus, en un mot sa politique qui consiste à donner davantage encore aux mains déjà pleines et aux territoires déjà privilégiés ne peut que braquer davantage les esprits qui se sentent déjà dépossédés de la maitrise de leur destin. De ce point de vue, l’orthodoxie libérale de Macron fait système avec les éructations nationaliste de Le Pen : Macron est aujourd’hui le rabatteur des extrêmes.

L’exemple italien doit nous mettre en garde. La politique de Matteo Renzi a au final renforcé la montée de la Lega et du Mouvement 5 étoiles. Mouvement 5 étoiles dont la plasticité est la condition même du succès. Ce mouvement twitter, déversoir de la colère populaire, agrégateur de contradictions, est une force populiste difficile à caractériser, mais qui remet profondément en cause l’état actuel de nos démocraties. Cette question est continentale.

*

Je veux prendre un moment pour aborder cette question des populismes. Vous avec en tête cette phrase célèbre de Gramsci : « Le vieux monde se meurt, le nouveau tarde à paraître, et dans ce clair-obscur surgissent les monstres ». Nous sommes dans ce clair-obscur. Et les monstres sont les populismes. Je ne me résous pas à ce que nous soyons condamné à nous joindre à la brutalisation des débats ambiants, à l’instrumentalisation des colères et des douleurs, à ajouter du bruit et de la fureur aux ruptures que notre société est en train d’affronter. La remise en question des contre-pouvoirs, des corps intermédiaires et la quête hégémonique de l’incarnation du tout, sans partage, sans remise en question ne me paraissent pas tracer des chemins d’espérances. Au contraire, ils concourent à l’incapacité de trouver les moyens d’agir collectivement pour inventer une nouvelle société.

*

Et cela m’amène à la troisième crise dont je souhaite vous entretenir, la crise européenne. Partout les nationaux-populistes ont le vent en poupe. Partout ils tentent d’imposer leurs thèmes et leur agenda dans le débat public. J’affirme que l’enjeu pour les prochaines européennes est de structurer une offre alternative suffisamment attractive pour faire entendre la voix d’une Europe écologiste et solidaire. L’initiative Macron-Merkel est restée à quai. Pas uniquement parce que les conditions politiques n’étaient pas remplies, mais également faute de carburant propulsif. Leur projet apparait pour ce qu’il est : une forme de statu quo opposant une fin de non-recevoir à celles et ceux qui réclament une autre Europe, plus sociale, plus généreuse, plus solidaire, et au fond, plus européenne.

Face à cette Europe de la déception, Jean-Luc Mélenchon ne propose pas de renverser la table, mais bel et bien de la quitter. Les positions européennes qu’il défend ressemblent davantage désormais à des positions anti-européennes qu’a des positions alter-européennes.

Entre la dérive libérale et le replis national, nous affirmons qu’une autre Europe est possible et nécessaire. En, cela nous nous opposons à la fois à ceux qui pensent que rien ne doit changer et à ceux qui pensent qu’il est trop tard pour changer. Je ne désespère pas de faire évoluer les insoumis, ni même les amis d’Emmanuel Macron sur ce point. Mais seule la réalité d’un rapport de force culturel, militant, politique et au final électoral nous permettra de montrer qu’en France les pro-européens veulent une autre Europe que celle qui se construit aujourd’hui, Europe libérale, Europe forteresse, et Europe de la crise climatique. Ne cédons donc rien de nos convictions. Plus que jamais l’idéal européen est notre étendard.

*

Jamais peut être, face à la conjonction des crises énoncées, le besoin d’une force écologiste et européenne n’a été aussi important. Car il s’agit de bâtir un nouveau rêve européen.

J’entends parfois que nous serions faibles, que nous serions petits, que nous nous sentirions seuls. J’ai au contraire le sentiment que beaucoup de citoyennes et de citoyens européens aspirent à autre chose, qu’ils espèrent ce « nouveau monde » que j’évoquais tout à l’heure et qui tarde à paraître. Alors, je vous le dis, mes amis des mauvais jours, c’est la nuit qu’il fait beau croire à la lumière. Rien n’est jamais écrit pour celles et ceux qui agissent avec la conviction tranquille et déterminée qu’il n’y a pas d’ordre immuable des choses.

Je sais que les temps sont rudes. Mais je vous demande de tenir bon. De nous serrer les coudes. d’affuter nos arguments, de donner de la voix dans les débats qui traversent le pays.

Les Assises de l’écologie participent de notre réarmement intellectuel et civique. A nous d’inventer des formes nouvelles et audacieuses pour parler au cœur du pays et avec lui construire un avenir écologique. A nous d’incarner un optimisme lucide en proposant les solutions que nous savons utiles pour préserver le vivant, renforcer les solidarités, redonner le sourire à notre démocratie et ainsi proposer un avenir désirable. A nous, aussi, de savoir rassembler, comme nous avons su le faire en posant la bonne question, la seule qui compte, à celles et ceux avec qui nous pouvons inventer une nouvelle aventure: « Je ne te demande pas d’où tu viens, mais où nous voulons aller ensemble ».

Je vous remercie.

*

Avant de demander à Didier-Claude Rod de venir me rejoindre, je souhaitais dire quelques mots pour rendre hommage à un camarade précieux et aimé qui nous a quitté. Guy Philippon n’est plus, et toutes celles et tous ceux qui l’ont connu mesurent la perte inestimable que son décès représente pour notre famille politique et au-delà pour les militants d’un monde meilleur.

Du PSU à EELV, Guy Philippon a toujours été un partisan du progrès social et de l’écologie. Débatteur intarissable, militant de terrain de son 20e arrondissement chéri, mémoire vive de l’écologie et de l’alternative, vigie bienveillante, initiateur et formateur, frère de lutte, il était tout cela pour nous. Je veux saluer sa mémoire comme on célèbre le parcours exemplaire d’un homme qui a vécu pour ses idées et pour les transmettre, nous les transmettre. Son exemple nous oblige, sa mémoire nous exhorte à continuer le combat.

]]>
Les assises décentralisées de l’écologie et des solidarités https://aquitaine.eelv.fr/2018/03/15/les-assises-decentralisees-de-lecologie-et-des-solidarites/ Thu, 15 Mar 2018 10:50:56 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13536 Les assises de l’écologie et des solidarités » se veulent être un processus ouvert à toutes les forces associatives, citoyennes, syndicales ou politiques qui partagent le constat : ...]]>

Les assises de l’écologie et des solidarités » se veulent être un processus ouvert à toutes les forces associatives, citoyennes, syndicales ou politiques qui partagent le constat :

  • que le système économique et social dominant produit, par sa nature même, une accentuation des inégalités sociales et entre les peuples, une accentuation de l’usure des ressources de la planète jusqu’à menacer les équilibres du vivant ;
  • que les forces politiques à la manœuvre actuellement en Europe et dans le monde sont majoritairement au service du système tel qu’il fonctionne ;
  • qu’il est temps d’engager entre nous toutes et tous une démarche de rassemblement en commençant par débattre et acter collectivement de ce qui nous rassemble et fait convergence entre nous; et de ce que fait encore débat; contribuant ainsi à l’élaboration d’un projet politique conduisant vers une société de l’après-croissance ;
  • que cette période de débats doit nous permettre de dessiner les formes d’un rassemblement, une « maison commune », marqué par un esprit de coopération et de co-construction, de respect des identités et de l’histoire de chacun, pour être capable d’agir ensemble pour la transformation écologique et sociale

Ces assises de l’écologie et des solidarités, si elles ont été initiées par EELV, ont vocation à être animées par un groupe de pilotage ouvert à toutes les forces qui souhaitent s’impliquer dans cette démarche et à devenir ainsi l’affaire de toutes et tous. Celui-ci sera installé début avril , dans la foulée de la soirée du 16 mars qui se veut être le coup d’envoi de ce processus.

Toutes les infos sur le site demainlecologie.fr

]]>
Intervention de politique générale de Davis Cormand au Conseil fédéral de décembre 2017 https://aquitaine.eelv.fr/2018/01/09/intervention-de-politique-generale-de-davis-cormand-au-conseil-federal-de-decembre-2017/ Tue, 09 Jan 2018 13:33:04 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13331 Cher.e.s ami.e.s, Profitons de ce temps de débat entre nous pour essayer de problématiser ensemble les enjeux tels que nous devons les aborder dans les temps qui viennent. D’abord un point de contexte tel que je le perçois, tout cela étant, bien entendu soumis à la discussion. ...]]>
Cher.e.s ami.e.s,
Profitons de ce temps de débat entre nous pour essayer de problématiser ensemble les enjeux tels que nous devons les aborder dans les temps qui viennent. D’abord un point de contexte tel que je le perçois, tout cela étant, bien entendu soumis à la discussion.
Après notre sortie du gouvernement en 2014, après la période compliquée jusqu’en 2017 et suite à la dernière séquence électorale encore plus complexe (et c’est le moins qu’on puisse dire !), il y a eu une sorte de “reboot” du paysage politique français. Avant, nous étions habitués au paysage bipolaire : la social démocratie d’un coté, la droite de l’autre. S’ajoutait à ce paysage l’Extrême Droite, mais qui était relativement isolée par un « cordon sanitaire » politique . Nous, écologistes, nous essayions d’exister tant bien que mal dans ce paysage là en affirmant une autonomie partidaire associée à des accords avec la « Gauche » au niveau local, et plus ou moins assumée au niveau national.
Mon sentiment est que depuis 2017, le paysage politique a considérablement évolué et s’est transformé en une sorte de « triangle des Bermudes » composé de trois angles :
– D’abord celui du « populisme de l’establishment », qui a fédéré dans un « cercle de la raison » ( selon la terminologie inventée par Alain Minc en 1995 pour désigner le projet politique d’Edouard Balladur ) une partie de gestionnaires du PS et de la droite autour d’Emmanuel Macron. Avec un pouvoir très incarné, très vertical. Je le qualifie de populiste il assume la remise en question des corps intermédiaires et donc les contre-pouvoirs: syndicats, médias, etc etc.
– Le second angle de ce triangle est celui d’« un populisme de Gauche assumé comme tel », et ce n’est donc pas un procès d’intention que je fais. Celui-là est incarné par la France Insoumise et Jean-Luc Mélenchon. Là encore, il y a l’affirmation d’une hégémonie politique qui entend se substituer aux autres Partis politiques, aux syndicats, aux médias et aux ONG.
– Et enfin le troisième angle c’est celui du « populisme extrémiste » incarné aujourd’hui par le Front National.
Mon impression est que tout ce qui essaie de se rapprocher de ce « Triangle des Bermudes » y est absorbé et y disparait. On voit bien qu’une partie de l’opinion publique et les observateurs mettent en demeure les uns et les autres de se positionner par rapport à ce triangle. D’ailleurs les 3 angles du triangle se « tiennent par la barbichette » car ils ont tous bien évidemment intérêt à ce que cette géométrie politique là perdure. Ils ont tous les 3 intérêts à continuer de bénéficier de ce paysage politique.
Je pense que notre enjeu en tant qu’écologistes est de résister à la tentation de nous positionner par rapport à ce triangle et d’assumer de porter un autre imaginaire. Ce n’est pas simple. Au niveau de Les Républicains, Il y a la tentation de Wauquier d’incarner un angle « trumpiste », populiste d’extrême droite pour déloger le Front National de sa situation actuelle. De l’autre côté, on a un PS qui ne sais plus ou il habite entre : “Est-ce qu’il faut être un peu Mélenchonisé ?” ou : “Est-ce qu’il faut aller avec Macron” ou encore « comment réinventer la social-démocratie », etc…  Je persiste à penser que vouloir se positionner par rapport à ce nouveau « champ de bataille » politique incarné par ce « triangle de Bermudes » est sans issue, sauf à assumer un choix de fusion avec l’angle du triangle dont nous sommes vraisemblablement le moins éloigné: La France Insoumise. Je n’ai pas le sentiment que cette option soit souhaitée dans notre Parti.
Le second sujet que je soumets a notre réflexion : c’est celui du gros travail mené avec le Comité d’initiative sur l’élaboration d’une proposition de méthode pour nous réinventer, nous fonder, nous refonder, nous métamorphoser, muter etc. Je crois qu’il y a une étape préalable qui manque encore dans notre démarche et qui est celle pourtant essentielle de la définition de « ce que nous sommes ». Qu’est ce qui fait que nous sommes ensemble, dans un parti écologiste, pour porter un imaginaire politique écologiste ? C’est à mon sens la première pierre de fondation qui nous permettra ensuite de discuter avec d’autres et de réfléchir à une recomposition qui dépasse, qui déborde, qui transcende le triangle des Bermudes évoqué précédemment.
L’écologie politique est en réalité à la croisée des chemin. D’une force politique « prédictive », qui alertait sur les risques que notre modèle de développement faisait courir à notre environnement et à la planète, nous sommes désormais dans un contexte où l’effondrement écologique, social, démocratique a commencé. Cela nous oblige à revisiter notre projet, notre vision et notre stratégie.
Une des pistes que nous devrions explorer c’est de réfléchir à un mouvement, à un parti de l’écologie politique, qui essaie d’articuler, de structurer les 3 leviers qui nous permettent d’agir sur le réel :
– En tant que militants politiques, le 1er levier c’est celui des résistances : c’est notre côté “zadiste”, le fait que nous nous opposons aux projets que nous  considérons incompatibles avec l’idéal et les valeurs qui sont les nôtres. Ce sont en fait des relations et des actions que nous nourissons en tant que militant.e.s mais que nous avons du mal à articuler réellement en tant que mouvement.
– Le deuxième levier est celui des utopiesou des utopies concrètes. C’est toutes celles et tous ceux qui inventent l’imaginaire de demain à une échelle souvent locale ou individuelle mais qui préfigurent la société désirable que nous voulons construire. Là encore, nous sommes nombreuses et nombreux à être impliqué.e.s sur ces chantiers, mais nous avons des difficultés à articuler ces initiatives avec notre activité en tant que Mouvement.
– et le 3e levier est celui sur lequel on a concentré l’essentiel de notre travail  collectif jusqu’à maintenant, c’est le levier institutionnel, celui de la régulation.
La manière de réinventer une forme parti, une forme mouvement, serait de réfléchir à comment on articule ces 3 niveaux d’interventions pour changer les choses. Car la résistance et l’utopie on besoins du levier institutionnelle pour remporter des victoires et massifier les possibles. Et de la même façon, le levier institutionnel est condamné à l’échec si celui-ci n’est pas accompagné par une société « en phase » et prête à mettre en oeuvre la radicalité des changements que nous savons utiles.
Autre réflexion qui peut-être la nôtre et je ne veux pas être trop sévère avec nous-mêmes, mais depuis quelques années j’ai le sentiment que si nous sommes courageux.ses et résilient.e.s dans l’action militante, nous avons été fainéant.e.s, insuffisant.e.s, nous n’avons pas mis assez d’énergie dans le fait de restructurer, de réinventer, une doctrine écologiste. En fait notre mouvement politique se nourrit via des sources diverses : artistiques, philosophiques, naturalistes, scientifique, sociologique, etc… Mais nous n’avons pas encore fait un travail suffisant de structuration de tout cela et nous n’interrogeons pas, ou qu’au coup par coup, l’ensemble des angles qui percutent la société, à la lumière de notre vision écologiste.
Ma conviction c’est qu’une force politique qui se dit à vocation majoritaire ne peut faire l’économie de ce travail de fond et si on a l’ambition de vouloir grandir, grossir, infuser, structurer le débat, il faut que nous revenions à ce travail fondamental que j’ai le sentiment que nous avons un peu oublié parce que l’on a confondu deux choses : la vision écologiste dont je viens de parler et ce qui constitue un programme. Et j’espère qu’on a tous conscience que l’objet d’un parti politique n’est pas seulement un programme et un projet mais que c’est beaucoup plus que cela.  C’est aussi un imaginaire politique, un récit politique sur une vision de la société qu’il nous faut porter. Nous avons été trop souvent dans une approche un peu scolaire ou technocratique de notre rôle en tant qu’intervenants politiques et pas assez les porteurs d’un imaginaire global. C’est d’ailleurs pour cela qu’il ne va pas de soi que nous devions fusionner avec d’autres forces politiques qui ont pu intégrer dans leurs programmes des items écolos, mais dont le projet global, l’imaginaire politique entre en contradiction, ou en dissonance, avec ce que nous considérons comme les fondamentaux de l’écologie politique. Je pense à l’écosophie, la non-violence, le refus de l’anthropocentrisme, la décroissance, etc etc.
Mais pour avoir une critique et des éléments de différenciation qui soient audibles par rapport à eux, encore faudrait-il que nous mêmes re-nourrissions ce récit.
Pour cela il y a un certain nombre de propositions de chantiers qui sont déjà dans nos esprits, dont celui de l’écologie que j’ai évoqué précédemment et je n’y reviens pas. Il y a également celui de l’économie. J’étais il y a quelques semaines en Midi Pyrénées ou Christelle de Crémiers a fait un exposé passionnant sur la post croissance en formulant quelque chose que l’on a toutes et tous a l’esprit sur le fait que ce qui est une des forces de l’écologie, c’est que c’est le pilier critique le plus radical du capitalisme. L’angle marxiste originel, si je puis dire, était celui de critiquer le capitalisme à travers ses conséquences sociales. La critique écologiste du capitalisme va plus loin : elle remet en cause le fondement même du capitalisme qui implique une croissance infinie dans un monde fini. Or, si les conditions sociales jugées acceptables ou non sont « négociables », la capacité de résilience de la nature ne l’est pas.
Je pense que nous partageons toutes et toute cette réflexion là, y compris dans l’objectif de nous positionner sur l’échiquier politique de façon radicalement anticapitaliste et antiproductiviste.  Cette entrée assez novatrice, centrée sous l’angle des limites de la planète est une façon de ré-interroger ce concept d’ « anticapitalisme » et de faire entendre un nouvel imaginaire.
Un mot sur la démocratie et sur l’Europe. On voit bien que ces deux termes se percutent. Vous l’entendez, il y a un débat dans la société très puissant sur l’Europe et on pourrait également de la même manière interroger d’autres échelons institutionnels. C’est en fait la question de notre rapport à la souveraineté, ou autrement dit, à la démocratie – qui est posée. Je pense que nous devons revisiter l’approche que nous avons de la souveraineté parce qu’aujourd’hui, à tous les échelons, il y a des vides de souveraineté. Le problème européen ce n’est pas l’Europe en soi, c’est son (dis)fonctionnement démocratique. On l’a vu avec le Glyphosate, ou finalement, les parlementaires qui sont les représentants des peuples européens ne sont pas souverains dans les faits puisque la décision ne se prend pas au niveau parlementaire. Et c’est vrai également pour les intercommunalités qui demeurent des émanations d’une démocratie de second niveau.
Réinterrogeons la valeur de la souveraineté mais non pas sous l’angle des clans nationalistes, parce que ce qui me fatigue dans le récit d’aujourd’hui c’est de dire : “comme l’Europe va mal“, il faut revenir à ce que serait le biotope naturel de la souveraineté à savoir l’Etat nation.
Si nous sommes effectivement en désaccord avec cette vision, encore faut-il nourrir le contre argumentaire ! Selon moi il y a au moins 3 idées a articuler : celle de la souveraineté, j’en ai parlé; Celle de la subsidiarité qui est un mot que nous utilisons souvent et qui permet d’articuler l’échelon européen avec les notions de régionalisme, de nationalisme et aussi l’échelon local. Et tout cela ne tient de façon collective qu’avec la troisième idée qui est celle de la solidarité. Car il ne s’agit pas que chacun nourrisse son développement dans son coin sans avoir une vision globale de l’ensemble. Bref, il s’agit de reconstruire une Démocratie désirable autour de ces 3 valeurs indissociables: souveraineté, subsidiarité et solidarité.
Enfin, il y a le quatrième chantier, celui de l’égalité. On voit bien qu’aujourd’hui qu’il y a un débat de plus en plus brutal dans la société sur les sujets du genre Charlie versus Mediapart ou là aussi il nous faut prendre de la hauteur et réinterroger les aprioris et résister à la mise en demeure qui nous est faite de « choisir un camp ». Il y a aussi le sujet des discriminations et des violences dont sont victimes les femmes. ces discriminations et violences s’entremêlent avec  d’autres liées à l’origine, la religion, la préférence sexuelle ou encore le lieu où on habite et l’accès qu’il permet – ou pas – à un emploi, à des services publics de qualité, à un logement digne, etc etc.
Notre plan de travail doit prévoir de re-questionner nos approches et traiter politiquement toutes ces différentes thématiques à travers le prisme écologiste.
Dernier point : « Et nous dans tout cela ? ». Je crois qu’il y a une tentation de nous replier dans une forme de « zone de confort », c’est à dire nous noyer comme on le fait d’habitude dans les procédures, dans les méthodes etc. Pourtant, la profonde mutation politique à l’œuvre doit nous prémunir de nous contenter de rester dans cette façon de faire qui est la nôtre depuis trop longtemps. Il va falloir pour le coup réinventer nos pratiques et nos façons de débattre pour pouvoir être plus aptes à appréhender notre avenir. Il y a un travail remarquable initié par le Comité d’initiative, et je le dis d’autant plus à l’aise – et peut-être que cela ne vous aura pas échappé – que la mise en œuvre au dernier CF de cette affaire, même si je l’ai soutenue sincèrement, ne m’a pas au départ transporté d’enthousiasme ! Je suis forcé d’admettre, et je le fais de bon coeur devant vous aujourd’hui, que le travail qui a été mené est vraiment remarquable, Il y a une façon de travailler avec Hélène Hardy et avec beaucoup d’autres d’entre vous qui fonctionne bien.
Mais j’en reviens a mon propos liminaire qui est de dire que la meilleure méthode et les meilleures intentions ne nous mènerons pas bien loin si on ne prend pas les choses dans l’ordre. Il faut aussi que chacune et chacun s’approprient sur 1) ce que nous sommes, 2) ce que nous voulons faire et 3) avec qui. Et pour pouvoir répondre à la dernière question, il faut commencer par répondre aux 2 premières. Cela ne peut être que le travail du comité de répondre a cela mais c’est un chantier que nous devons toutes et tous nous approprier.
Sur la période que vient, on ne va pas se mentir, car c’est évidemment un enjeu: Il y a une échéance qui va se dérouler en partie en même temps que notre réinvention et qui trotte dans les tètes : c’est celle du rendez-vous des européennes en 2019. Cela ne nous préoccupe pas forcement uniquement à cause des destinées ou des ambitions individuelles des uns ou des autres, mais parce que cela va être aussi un moment déterminant sur l’avenir de l’écologie politique en France. Est-ce que le triangle des Bermudes dont je parlais emporte tout et se structurera encore davantage à l’occasion des européennes ou est-ce que nous arriverons à construire un autre récit ? Et cela, nous ne pourrons pas le traiter 7 mois avant l’élection par je ne sais quel vote à l’arrache pour designer nos candidates et nos candidats ! C’est un sujet qui doit être anticipé, maturé pour qu’on sache vraiment ce qu’on veut faire et qu’on ne subisse pas l’échéance.
Il faut nous poser encore une fois des questions simples mais déterminantes : quel récit pour les Européennes ? Nous avons, avec le Bureau exécutif et Pascal Durand au nom des eurodéputés, rencontré le président de la République sur les échéances européennes. Première information confirmée depuis par le premier ministre : il y aura une liste nationale à la place des listes euro régionales pour la France. A priori, pas de listes transnationales, même si la France continue à soutenir cette idée. Ce que souhaite faire Macron, c’est construire un débat au moment des élections où, en gros, il y aurait 2 options : ceux qui sont pour l’Europe et je le dis entre nous : Dany va aider à promouvoir cette idée aux cotés d’Emmanuel Macron. Ce n’est pas un petit sujet pour nous. Et d’un autre coté il y a ceux qui sont contre : Mélenchon et les extrémistes de droite.
Si on laisse s’installer ce récit là, avant même que la bataille ait commencé, le champ de bataille nous sera défavorable.  Il faut donc que nous mettions notre énergie pour faire en sorte que l’alternative qui soit proposée au débat ne soit pas binaire, mais ternaire :
1 – l’option du statu quo, et j’affirme que ce que propose Macron en vrai c’est le statu quo ;
2- Il y a à ceux qui veulent sortir de ce statu quo européen par le bas : c’est la tentation de la souveraineté nationale ;
3- et il y a celles et ceux qui veulent sortir de ce statu quo par le haut par la mise en place d’une souveraineté européenne, par un nouveau rêve européen porté par des valeurs d’écologie de solidarité etc. Et nous devons être celles et ceux qui sont les chevilles ouvrières de ce 3e choix.
Si dès 2018, nous n’arrivons pas à installer dans les têtes cette troisième option, non seulement je pense que l’Europe sera sur de mauvais rails, mais de plus, nous serons hors course avant même d’avoir pris la ligne de départ. C’est ce qui nous est arrivé au fond au moment des présidentielles et ce n’est pas la faute du candidat qu’on a désigné : l’histoire était déjà écrite avant même qu’on choisisse ce que l’on allait faire en 2017. Ne retombons pas dans le même panneau. Cela nécessite d’être groupés, cela nécessite que l’on dise toutes et tous à peu près la même chose. Mettons nous d’accord sur un récit, sur une incarnation collective et ensuite on fonce car sinon, nous continuerons de subir.
Dernier point un peu provocateur, mais il faut arrêter avec les non-dits : Aujourd’hui, au Mans, il y a la naissance d’un mouvement politique, Génération.s. Dans sa charte fondatrice, ce mouvement écrit noir sur blanc qu’il se réclame de la charte des Verts mondiaux…. On peut sourire, ricaner, ou rire, mais objectivement c’est un fait politique. Discutons-en et après, collectivement, voyons comment nous appréhendons ce fait politique. Mais rien ne serait plus puéril et immature que de nier cette réalité et de faire semblant de l’ignorer.
Ce que nous ne pouvons pas ignorer non plus, c’est que le gars qui porte ce mouvement, c’est aussi celui qu’on a soutenu à la dernière présidentielle. Cela aussi, c’est un fait politique. On peut considérer aujourd’hui qu’il ne fallait pas le faire… Mais ce qui est important aujourd’hui, c’est de déterminer ensemble ce que nous portons collectivement. Les petites musiques des uns et des autres, les « je l’avais bien dit » ou les « on aurait dû faire autrement » sont très intéressantes mais ça ne donne pas à notre mouvement politique une direction collective. C’est de cela qu’il faut arriver à discuter et à débattre collectivement. Mon sentiment aujourd’hui, c’est qu’on n’est pas forcément parti pour faire cela, et c’est pour cela que je parlais de « zone de confort » tout à l’heure… Pour ma part, j’assumerai de porter de façon lucide ces débats. Nous avons du temps pour le faire, les européennes sont en mai 2019. Mais tout le temps du monde sera insuffisant si nous ne nous posons pas les bonnes questions et/ou si nous privilégions des débats de posture. C’est pourquoi je nous souhaite de vrais débats, constructifs, lucides et fructueux dans les jours et les mois qui viennent, à commencer par aujourd’hui.
Je vous remercie.
]]>
Vers des Assises de l’écologie https://aquitaine.eelv.fr/2017/12/06/vers-des-assises-de-lecologie/ Wed, 06 Dec 2017 13:26:36 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13250 Europe Écologie – Les Verts a adopté lors de son Conseil fédéral des 9 et 10 septembre une motion décidant de l’organisation d’Assises de l’écologie, afin de fonder les bases d’un nouveau parti de l’écologie en France. ...]]>

Europe Écologie – Les Verts a adopté lors de son Conseil fédéral des 9 et 10 septembre une motion décidant de l’organisation d’Assises de l’écologie, afin de fonder les bases d’un nouveau parti de l’écologie en France.

Le Conseil fédéral des 2 et 3 décembre a adopté une feuille de route partagée par les représentant-es de l’ensemble des régions.

L’alerte écologiste a été entendue par la société, mais la tétanie politique implique de réfléchir avec toutes celles et ceux qui partagent le besoin d’une changement profond, à comment engager le grand virage écologiste et solidaire dont notre société a tant besoin.

Dès les premières semaines de 2018, différents chantiers seront ouverts et des processus décentralisés permettront, dans le respect des parcours de chacun-e (militant-e associatif, syndicalistes, intellectuel-le-s, artistes, entrepreneur-e-s…) de définir une nouvelle feuille de route commune.

À l’issue de ces débats seulement, viendra le temps de penser la constitution d’un nouveau mouvement politique, avec celles et ceux qui le souhaitent, fort d’une orientation politique claire et pleinement ancrée dans une société en pleine ébullition.

Ainsi, Europe Écologie – Les Verts, est prêt à se mettre à la disposition d’une dynamique écologiste, et à bâtir un nouvel outil pour relayer en politique, dans les institutions et dans la rue, la parole des écologistes.

Julien Bayou et Sandra Regol, porte-parole nationaux

]]>
Les écologistes, pour passer des mots aux actes https://aquitaine.eelv.fr/2017/11/21/les-ecologistes-pour-passer-des-mots-aux-actes/ Tue, 21 Nov 2017 16:06:19 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13215 l’édito de David Cormand Secrétaire national Chères amies, chers amis, À Bonn, les nombreuses délégations officielles et des acteurs de la société civile qui se sont réunis pour la COP23 ont pu à nouveau faire le constat de l’ampleur des dangers auxquels le changement climatique nous expose. ...]]>

l’édito de David Cormand
Secrétaire national

Chères amies, chers amis,

À Bonn, les nombreuses délégations officielles et des acteurs de la société civile qui se sont réunis pour la COP23 ont pu à nouveau faire le constat de l’ampleur des dangers auxquels le changement climatique nous expose.

Il y a quelques jours, 15 000 scientifiques alertaient le monde sur l’état de la planète. L’humanité approche du point de non retour au delà duquel l’inertie des processus engagés rendra l’effondrement inéluctable. Tous les voyants qui signalent l’atteinte à la vie sur terre clignotent : le nombre des vertébrés a été divisé par deux à l’échelle planétaire en 40 ans ; celui des insectes a baissé de 80% en 30 ans en Europe.

Dés 1972, les analyses du club de Rome avaient exposé l’incompatibilité entre, d’une part, un modèle de développement dont la prédation a été décuplée par la révolution industrielle et, d’autre part, la capacité de l’humanité à continuer de vivre dignement sur Terre. Ces analyses avaient alors été ignorées des « sachant‑es » et des « important‑es ».

20 ans plus tard, en 1992, au sommet de Rio, un premier appel de scientifiques mettait en garde sur la situation environnementale de la planète. Craignant pour leurs intérêts et comprenant bien dans quelle mesure cet appel remettait en question les bases de la logique capitaliste et productiviste, les lobbies se sont organisés pour faire diversion. Il s’agissait de moquer les écologistes les décrivant comme étant « animés par une idéologie irrationnelle qui s’oppose au développement scientifique et industriel ». Ce sera l’appel d’Heidelberg diffusé quelques semaines avant le début du sommet…

Puis, entre 2002, et le discours de Chirac sur « la maison brûle » et l’accord de Paris, en 2015, l’écologie a commencé à gagner dans les mots.

Mais elle peine à gagner dans les actes…

2017 est l’année qui voit de nouveau augmenter les émissions de gaz à effet de serre. En France, la transition énergétique, pourtant votée par les parlementaires, est reportée sine die. De nouveaux pesticides sont autorisés. On proclame des projets d’autoroute « d’utilité publique », comme le gouvernement l’a annoncé jeudi pour le Grand contournement Est de Rouen… Comment, à l’heure des sommets climat, des rapports alarmistes, et de l’urgence à agir, une autoroute peut-elle être « d’utilité publique » ?

Les intérêts particuliers et les lobbies ont mille visages : ils y a ceux, reconnaissables, des multinationales identifiées (Monsanto, Total,…), des politiques caricaturaux comme Donald Trump. Mais ces lobbies interviennent aussi de façon moins frontale et apprennent à reprendre les mots de l’écologie pour mieux esquiver les décisions et les actes. C’est le cas d’Emmanuel Macron qui utilise la tribune de la COP 23 pour faire l’apologie du nucléaire comme remède aux énergies fossiles. C’est le cas de Justin Trudeau, Premier ministre du Canada, au look tellement « cool », mais qui soutient l’exploitation des sables bitumineux et promeut le CETA.

Ce constat est à mon sens la démonstration que pour mettre en cohérence les discours et les actes, nous ne pouvons pas nous satisfaire de l’illusion des apparences. On entend parfois que désormais, l’écologie est partout. En réalité, dans les décisions majeurs, elle n’est nulle part. Pour que les transformations que nous savons indispensables soient mises en œuvre, il faut des écologistes qui pèsent à la fois dans la société mais aussi dans les institutions. Non pas simplement des femmes et hommes écologistes ici ou là, isolé‑es les uns des autres, maniant quelques leviers sans malheureusement peser sur la marche du monde. Mais des écologistes ensemble, renforcés par leur réflexion et leur action commune, et qui, parce qu’ils sont solidaires, parviennent à obtenir les victoires dont le climat et la Nature ont impérativement besoin.

« Au début, ils vous ignorent, ensuite ils vous raillent, puis ils vous combattent et enfin, vous gagnez. »

Aujourd’hui, les lobbies n’ignorent plus l’écologie. Ils ne s’en moquent plus. Ils la combattent. Ils la combattent pour faire perdurer un modèle économique de plus en plus fou, qui les enrichi toujours d’avantage au détriment de la Nature et de la grande majorité des humains.

C’est pour cela que nous sommes là. C’est le sens de notre engagement. Nous nous inscrivons dans cette lignée de femmes et d’hommes qui ont eu à affronter l’ignorance, le mépris, les moqueries, les combats, mais qui avec constance, cohérence et courage ont tenu allumée cette petite lumière, celle de l’écologie. Notre responsabilité est de tenir pour transformer cette petite lumière en victoire.

Elle est là, la nécessité d’un mouvement écologiste. Un mouvement de mobilisations citoyennes, mais aussi un mouvement pour agir, et assumer les décisions que nos dirigeant‑es n’assument pas. Un mouvement qui porte dans la société une pensée vivante, de plus en plus riche, et qui s’avère chaque jour plus pertinente.

David Cormand

Secrétaire national

Source : Les écologistes, pour passer des mots aux actes

]]>
Discours de David Cormand au Conseil fédéral d’EELV https://aquitaine.eelv.fr/2017/09/11/discours-de-david-cormand-au-conseil-federal-deelv/ Mon, 11 Sep 2017 14:09:00 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13061 David Cormand, Secrétaire national d’Europe Écologie Les Verts, a rappelé l’urgence d’agir contre le changement climatique et de se libérer du mythe de la croissance. Il appelle les écologistes à se mobiliser sur les sujets d’actualité : nucléaire, mobilité, ordonnances travail, agriculture et alimentation, et à se réinventer. ...]]>

David Cormand, Secrétaire national d’Europe Écologie Les Verts, a rappelé l’urgence d’agir contre le changement climatique et de se libérer du mythe de la croissance. Il appelle les écologistes à se mobiliser sur les sujets d’actualité : nucléaire, mobilité, ordonnances travail, agriculture et alimentation, et à se réinventer.

Vous pouvez télécharger le discours au format PDF.

 

Europe Écologie Les Verts

Conseil fédéral des 9 et 10 septembre 2017

Discours de David Cormand, Secrétaire national

L’écologie en première ligne

Chères amies, Chers amis,

Au moment où nous nous réunissons, nous avons une pensée solidaire pour nos ami-es antillaises et antillais qui ont été victimes de l’ouragan Irma, et qui se préparent à en affronter d’autres dans les jours qui viennent.

Nous pensons également à toutes celles et tous ceux qui sur notre planète sont victimes de l’effondrement climatique auquel nous assistons. Des moussons diluviennes au Bangladesh qui ont fait des centaines de morts, à l’Ouragan Harvey aux États-Unis en passant par des zones qui deviennent inhabitables du fait du réchauffement climatique, nous assistons sidérés aux résultats de l’acharnement avec lequel l’humanité rend notre planète inhospitalière.

Dans les témoignages qui nous sont parvenu des Antilles, une expression revient souvent « Nous avons vécu l’enfer sur terre ». La folie à laquelle nous assistons se résume à cette phrase.

Alors qu’il a fallut des millions d’années de hasards incroyables pour que la vie naisse sur notre petite planète perdue au milieu de l’Univers ; alors qu’il aura fallut ensuite d’autres millions d’années pour que la vie évolue et permette, en dépit de toutes les lois de la probabilité, à l’humanité de grandir grâce à l’environnement incroyablement propice qu’offrait Pachamama ; cette même humanité, en quelques générations, est en train de détruire les équilibres fragiles de la biosphère et ainsi condamner toute possibilité de continuer de vivre heureux sur Terre.

Il n’y a pas de sujet plus essentiel. Il n’y a pas d’urgence plus urgente. L’effondrement, c’est maintenant. Et il faut donc assumer de s’attaquer vraiment aux racines de ce mal qui nous menace.

* *

*

Le modèle dit de « développement » à l’oeuvre est la cause de ces désastres.

Hélas il aura fallut du temps, trop de temps, pour que la réalité du changement climatique soit reconnue par les pouvoirs politiques. Il aura encore fallut trop de temps pour admettre que ce changement climatique est directement lié à l’activité humaine telle qu’elle s’exerce aujourd’hui. Nous n’avons donc plus le temps maintenant de tergiverser pour agir.

Le temps des concours d’éloquence autour de la maison qui brûle est terminé. Ce n’est plus à la hauteur de l’urgence. Si le diagnostique que les écologistes portent depuis des décennies se vérifie, il est temps que les solutions que nous proposons soient mises en œuvre. Il n’est plus possible de se payer de mots, car bientôt il sera trop tard et le changement climatique à l’oeuvre et ses conséquences ne pourront plus être enrayés.

* *

*

Les obstacles devant nous pour agir sont difficiles à abattre car ils relèvent de la croyance et sont servis par de puissants lobbies. Parmi ces croyances : la croissance. La mythification de la croissance comme remède à nos problèmes est puissante. À gauche, à droite, au centre, dans les pays du Nord, dans ceux du Sud, toutes et tous entendent servir ce même dieu.

Et pourtant, derrière ce prétendu remède se cache l’une des causes de tous nos maux. La croissance est assise sur la consommation d’énergie. Elle est dopée depuis plus d’un siècle par l’usage des réserves de carbones contenues dans le sol pendant des millions d’années et qui se trouvent aujourd’hui dans l’atmosphère. Aujourd’hui, il faut toujours plus d’énergie et moins de travail pour, au final, moins de croissance. On dit parfois que nos sociétés prétendument civilisées ont renoncé aux sacrifices humains pour satisfaire leurs dieux.

Pourtant, nous sacrifions aujourd’hui la Terre et les espèces qui y vivent – plantes, animaux, humains – pour satisfaire cette idole.

Les lois de économie, qui ne sont votées par personne, prétendent que sans croissance, rien n’est possible. Alors que ce qui est impossible, c’est prétendre servir une croissance infinie dans un monde fini.

On taxe souvent les écologistes d’idéalistes ou d’utopistes. Mais les doux rêveurs sont ceux qui pensent que le monde peut continuer à être tel qu’il est, quand tout nous indique que nous sommes en train de basculer du bord du précipice. Les rêves de croissance transforment le monde en cauchemar.

Je pense au contraire que les écologistes sont en réalité de simples pragmatiques, et c’est là d’ailleurs que réside notre radicalité. Pour continuer à pouvoir vivre sur Terre, il faut prendre des décisions très pragmatiques et donc radicales, au sens étymologique du terme, la racine : laisser les hydrocarbure et le charbon dans le sol, puisque l’usage que nous en faisons détruit le climat et la biodiversité. En finir avec la croissance qui entend utiliser sans fin des ressources qui ne sont pas infinies. Partager le travail disponible puisque de plus en plus de tâches sont accomplies sans intervention humaine. Respecter le vivant puisque nous en sommes une partie. Nous commençons juste à découvrir que nous avons de nombreux points communs avec les animaux non-humains. Nous découvrons même que les arbres communiquent et s’organisent entre eux. Nous en sommes aux balbutiements de ces découvertes. Et nous risquons de tout détruire avant de commencer à connaitre vraiment cette incroyable histoire du vivant.

* *

*

C’est en cohérence avec ces réalités, avec ce que nous portons depuis longtemps que nous entendons porter le débat et des propositions dans les semaines et les mois qui viennent.

Vous aurez à débattre ce week-end sur les initiatives que nous prendrons sur plusieurs sujets majeurs :

– sur l’alimentation et l’agriculture. Des États généraux ont été organisés, hélas pilotés exclusivement par le ministre de l’agriculture. C’est une occasion de rappeler que l’agriculture meurt aujourd’hui du modèle qui lui a été imposé : accro au pétrole et à la chimie ; dépendante des géant de l’agro-alimentaire et de la distribution de masse.

Ces géants rêvent d’une agriculture sans paysans et sans sols. Leur modèle est en réalité une agriculture industrielle, sans vie. Nous défendons l’inverse : des paysans plus nombreuses et nombreux qui vivent de leurs productions sans en être les esclaves, des circuits courts qui rapprochent les consommateurs et leur assiette de celles et ceux qui font pousser ce qu’ils consomment.

Des paysans qui font vivre nos campagnes, qui font revenir dans nos villages l’activité qui y manque trop souvent. Dans paysan, il y a paysage. Nous sommes convaincus qu’un nouveau modèle qui construit et valorise une nouvelle relation des paysans et des agriculteurs à l’environnement au sens large est porteur de bonheur pour toutes et tous.

– sur les déplacements, avec les Assises de la mobilité qui vont se tenir à partir du 19 septembre.

Il faut saluer les déclaration des Ministres Hulot et Borne sur ce sujet. Si ce qui est annoncé est suivi d’effets, nous avons l’opportunité de sortir du culte de l’érections d’infrastructures pharaoniques : aéroports, lignes à grande vitesse, autoroutes, Lyon-Turin, canal Seine-Nord, et cætera et cætera… Ce que nous appelons les grand projet inutiles et imposés. Ils coûtent des milliards, fracturent nos paysages et les continuités biologiques, sont le plus souvent inutiles. Pire, ils sont réalisés au détriment des infrastructures dites de « transport du quotidien ».

La question de la mobilité est un enjeu majeur dans la lutte contre le changement climatique, elle est aussi déterminante pour le pouvoir d’achat – ou de vivre – de nos concitoyennes et concitoyens. C’est de cela dont on parle quand nous défendons les pistes cyclables, ou les trains Intercités et les trains de nuit.

– Sur le nucléaire, c’est l’heure des comptes. Là encore, les écologistes depuis des décennies alertent sur l’impasse et le danger que représente le nucléaire civile et militaire. Là encore, la croyance irrationnelle et prométhéenne dans la magie du nucléaire, servie par de puissants lobbies, aura occulté la réalité : le nucléaire est cher et dangereux. Et il produit de surcroît des déchets d’une durée de vie de plus de cent mille ans dont nous ne savons que faire. Le nucléaire est typiquement un faux ami du progrès. Il se donne l’apparence de la modernité alors même qu’il relève d’une technologie obsolète, couteuse et dangereuse. Comme Madoff, les promoteurs du nucléaire font de la cavalerie avec notre sécurité et avec notre argent puisqu’après la faillite d’Areva, ce sera bientôt le navire amiral EDF qui sera en danger.

La mise en route de l’EPR de Flamanville va être de nouveau reportée à après 2018 quand son lancement initial était prévu pour 2012. Son coût sera de plus de 11 milliards d’euros quand il était prévu à l’origine à moins de 3 milliards d’euros. Malgré ce report probable, l’enquête publique pour autoriser l’allumage de cette bombe à retardement est maintenue. On nage en plein délire. Dans aucun autre domaine relevant d’enjeux aussi majeurs en matière de sécurité et de finance, on tolérerait autant d’amateurisme.

Je veux dire aussi un mot de Cigéo, cette poubelle nucléaire irréversible à 25 milliards d’euros que l’ANDRA souhaite construire à Bure. Le 15 août dernier, un rassemblement d’opposition à ce projet à eu lieu. La répression violente et disproportionnée dont se sont rendues coupables les forces de l’ordre en utilisant des armes létales est scandaleuse. Je veux dire au pouvoir que nous ne tolèrerons pas que les militant-es écologistes soient pourchassés, visés par des grenades, blessés et parfois tués. Nous ne tolèrerons pas que nos pratiques militantes fassent l’objet d’un harcèlement violent de la part des autorités. Les écologistes ne sont pas des cibles.

Enfin, sur le nucléaire militaire, on voit avec l’actuelle escalade entre la Corée du Nord et les États-Unis que la menace est toujours présente. Chaque bombe atomique dans le monde est une épée de Damoclès suspendue sur l’humanité. Un monde sans arme nucléaire est non seulement souhaitable, c’est possible, et c’est ce que nous demandons.

– le Président de la République a prévu d’organiser un sommet international sur le climat et plus précisément sur la question du financement de la transition à Paris à l’automne. Ce sera l’heure de vérité pour la solidarité entre pays du Nord et pays du Sud, et l’occasion pour Emmanuel Macron de mettre fin à son double-discours sur la Taxe sur les transactions financières, qu’il propose dans les médias, mais refuse de mettre en œuvre quand nos partenaires européens nous le proposent. Nous nous mobiliserons à cette occasion auprès de la société civile écologiste pour que la parole des citoyennes et des citoyens soit entendue. Contrairement à la COP21 où l’intervention de la société civile avait été entravée par des assignations à résidences et des interdictions de manifestations, nous contribuerons à l’expression libre du plus grand nombre pour que le temps des belles paroles prenne fin et que nous passions aux actes.

* *

*

Les actes, parlons-en. Car depuis 3 mois qu’il est aux affaires, le nouveau gouvernement a agit. Ce qui m’interpelle le plus dans ces 100 premiers jours, c’est l’idéologie qui inspire les décisions qui ont été prises.

Sur la nouvelle « loi travail », bien entendu. Mais aussi avec la baisse des APL, avec la suppression des contrats aidées, avec les difficultés de la rentrée universitaire, avec le traitement inhumain réservé aux personnes réfugiées qui cherchent dans notre pays un peu de répits dans les terribles épreuves qu’ils traversent, avec la réforme de l’impôt sur la fortune et la réforme fiscale en générale et avec la suppression des emplois aidés.

Emmanuel Macron s’était définit comme un objet politique nouveau, non identifié, ne correspondant à aucune case. En réalité, au risque de lui déplaire, il est très très facile à ranger. La politique qu’il mène est identifiable. Il est en réalité très ordinaire. C’est la version aboutie du président « normal »… du dirigeant « normal ».

Il fait ce que font tous les dirigeants des pays occidentaux depuis 30 ans, qu’ils soient de gauche ou de droite : ils libéralisent, ouvrent à la concurrence, financiarisent l’économie, suppriment ce qui protège les plus fragiles. Dans son esprit, la vulnérabilité des plus faibles est le prix à payer, le sacrifice à assumer, sur l’autel de la modernisation de notre société.

Dans son esprit, refuser cette fatalité, c’est être « fainéant ». Pour Laurent Wauquiez, on s’en rappelle, c’est être des « assistés ». Les mêmes mots méprisants, la même idéologie, et au final, la même politique, contre celles et ceux qui, selon les critères du Président de la République, « ne sont rien ».

* *

*

Emmanuel Macron a parlé à Athènes lors de l’une des mises en scène de lui-même qu’il affectionne. Plutôt Narcisse que Jupiter, il a revendiqué la nécessité d’une réelle souveraineté européenne. Mais la souveraineté de qui ? Et pour quelle Europe ?

La souveraineté en acte, pour Emmanuel Macron, c’est celle des accords transnationaux dictés par les lobbys au nom de la dérégulation comme le CETA. C’est la souveraineté des intérêts des multinationales qui négocient les impôts qu’ils doivent payer en France, comme Google en ce moment. C’est la souveraineté des paradis fiscaux que l’on renonce à combattre à l’intérieur même des frontière de l’Union. C’est la souveraineté de la finance, lorsque la France renonce à mettre en œuvre la taxe sur les transactions financières. Cette souveraineté des puissants n’est pas la nôtre. Et cette Europe là n’est pas celle que nous voulons.

La souveraineté que nous souhaitons, c’est celle des peuples européens, libres de déterminer les valeurs et les politiques qui doivent être menées en Europe. Nous voulons un nouveau rêve européen qui nous réconcilie avec l’idéal trans-national et fédéral qui est le nôtre.

* *

*

Dans le grand chambardement politique qui marque une fin de cycle, pour l’écologie, tout commence. Nous sortons du temps de l’alerte pour entrer résolument dans le temps de l’action. Les idées que nous portons doivent s’épanouir dans la société pour offrir un imaginaire politique nouveau. Nous ne nous résignons pas à l’accompagnement du monde tel qui va et se rapproche du chaos.

Nous ne pensons pas d’avantage que la réponse aux enjeux de la période réside dans le populisme qui constitue un exutoire qui soulage sur le moment mais n’offre pas de perspective solide et durable.

C’est pourquoi notre mouvement politique doit se réinventer pour être disponible, aidant et utile dans ce moment de recomposition. C’est aussi la tâche qui est la nôtre et que nous devons construire en lien avec toutes celles et tout ceux pour qui l’avenir de la planète constitue l’enjeu majeur pour l’humanité. Plus que jamais, les écologistes seront aux rendez-vous des responsabilités et des idéaux qui nous animent.

Les questions auxquelles nous avons à répondre sont simples: Que voulons nous faire ensemble ? Pour quelles objectifs ? Quels moyens nous nous donnons pour y parvenir ?

Beaucoup de militantes et écologistes répondent au quotidien à ces questions et agissent. Notre ambition est d’être à la hauteur de leurs engagements.

Au travail.

Je vous remercie.

Source : Discours de David Cormand au Conseil fédéral d’EELV

]]>
Journées d’été – Discours d’ouverture de David Cormand https://aquitaine.eelv.fr/2017/08/25/journees-dete-discours-douverture-de-david-cormand/ Fri, 25 Aug 2017 14:47:14 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13036 Lors des Journées d’été des écologistes à Dunkerque, le 24 août 2017, David Cormand, Secrétaire national, a prononcé le discours d’ouverture. Vous le retrouverez ici et en PDF. ...]]>

Lors des Journées d’été des écologistes à Dunkerque, le 24 août 2017, David Cormand, Secrétaire national, a prononcé le discours d’ouverture. Vous le retrouverez ici et en PDF.

 

Journées d’été des écologistes – Dunkerque – 24 août 2017

Discours d’ouverture de David Cormand, Secrétaire national

SORTIR DE LA RÉGRESSION, ENTRER EN RENAISSANCE

Bienvenue à ces 31e Journées d’été des écologistes placées sous le signe de la réinvention et de l’Europe. Un grand merci aux militantes et aux militants qui ont permis de les organiser ici à Dunkerque.

Ce n’est pas une simple formule de politesse.

Mon merci est d’autant plus vif que notre formation politique semble en grande difficulté. Quand nous réalisons des scores importants, que le monde politique bruisse de nos possibilités de succès, il est plus facile de se réunir, porté par l’enthousiasme et la promesse d’une réussite à portée de main. Mais chacun voit bien que la période n’est pas des plus faste pour nous autres, réunis au sein d’Europe Écologie Les Verts.

En ouverture de nos journées de réflexion, je veux dire cependant aux esprits malveillants, qui nous prédisent le pire avec un sourire au coin de la bouche, que le scénario des mois à venir n’est pas écrit.

Mon sentiment, et je voudrais vous faire partager cette intuition politique, est que la France n’en a pas fini avec les écologistes. Il ne dépend que de nous de redevenir une force qui compte parce que nous aurons su devenir une force qui rassemble. Voilà l’enjeu des temps qui viennent : faire sens pour faire nombre, faire nombre pour faire force, faire force pour conduire le changement à construire .

Le paradoxe qui nous blesse est celui-ci : la prise de conscience grandissante des enjeux écologiques n’a pas débouché mécaniquement sur le renforcement du mouvement politique qui depuis trente ans s’est forgé pour alerter l’opinion, éveiller les consciences et convaincre de la nécessité de mener les changements décisifs, non seulement des politiques publiques mais bel et bien dans nos modes de vie.

D’où vient notre faiblesse ? D’abord de nous-mêmes. Nous connaissons toutes et tous notre capacité incroyable à nous déchirer ad-nauseam autour d’enjeux internes qui n’intéressent que nous, et encore… Nous consacrons trop d’énergie à discuter entre nous, et pas assez à tenter de convaincre en dehors de nos cercles.

Sur quoi nous déchirons nous le plus souvent ? Pas sur nos valeurs : nous sommes certainement le parti le plus idéologiquement homogène. Pas sur notre projet : le travail assidu mené depuis des années a généré un socle programmatique solide et cohérent. Nous nous déchirons à belles dents dès que ressurgit la question des alliances et de notre rapport au pouvoir. Les épithètes de droitiers ou gauchistes dont nous aimons nous affubler ne font que décrire notre incapacité à produire une grille de lecture nouvelle du champ politique et à nous déterminer librement, non pas selon des cosmogonies anciennes, mais en fonction des impératifs de la période et des temps qui viennent.

Comment lire le cycle qui s’ouvre ? Ce qui me semble le plus marquant, c’est une forme de modernisation régressive caractérisée par des atteintes sans précédent portée aux écosystèmes, des menaces permanentes sur les acquis sociaux issus des luttes ouvrières, une fatigue démocratique intense illustrée par la désaffection électorale, et le triomphe de l’obsession identitaire.

Je pèse mes mots, mais la conjonction de ces crises est porteuse de dé-civilisation, c’est-à-dire du délitement de l’envie de faire société ensemble.

Face à la grande régression en cours, l’écologie politique est le mouvement, qui, partant de notre communauté de destin avec les écosystèmes, propose un avenir basé sur une socialisation solidaire et économe en ressources.

En d’autres termes quand d’autres plaident le chacun pour soi qui passe par la prédation sur la Nature et l’isolement, nous plaidons pour la mise en commun et l’ouverture.

Malheureusement, chacun voit bien de quel côté pèse actuellement la balance des pulsions du monde. Les attentats de Barcelone et le meurtre de Charlottesville disent un état du monde ou la haine chemine à dos de fantasmes : califat intégriste pour les uns, suprématie blanche pour les autres.

La domination et la désolation est leur programme commun, basé sur la nostalgie d’un âge d’or fictif, vendu par des bonimenteurs frelatés, mais qui savent manipuler les esprits blessés.

Et je ne parle pas des multiples guerres et conflits qui jettent sur les routes du globe des migrants qui, dans une trop grande indifférence, vivent la violence la plus abjecte pour avoir la chance d’échapper au sort qui les attend. La raréfaction des ressources, les changements climatiques, l’inégale répartition des richesses, les conflits confessionnels ou ethniques sont autant de raisons, parfois enchevêtrées, qui engendrent des crise migratoires majeures. Et que fait l’Europe, que fait notre Europe ? Elle ferme les yeux en même temps que ses portes, reniant tout ce qu’elle est et se soumettant sans le dire aux diktats des populistes xénophobes, qui prétendent dire le sentiment des peuples quand ils ne font qu’attiser le feu de leur colère.

La France ne déroge pas à la règle : l’accueil des migrants n’est pas digne de notre pays, ni à Calais, ni à la porte de la Chapelle… alors je veux remercier celles et ceux qui agissent et parfois désobéissent. Elles sont et ils sont la meilleure part de nous-même parce qu’ils nous rappellent à nos devoirs de civilisation. Parmi eux je ne veux en distinguer aucun et nous devons tous les soutenir, mais que soit salué ici Damien Carême qui choisi de prendre sa part avec les habitant-e-s de la commune dont il est le Maire, Grande-Synthe, pour un accueil digne des réfugiés, et Cedric Herrou, injustement condamné pour avoir porté secours à des migrants. Votre combat est juste et nous le faisons nôtre.

Comment nous autres écologistes pouvons combattre la grande régression en cours ? Le jour du dépassement, ou nous avons consommé la totalité des ressources de la planète est chaque année plus précoce.

Changement climatique qui s’emballe, incendies de plus en plus nombreux jusqu’au Groenland, déchets d’origine pétrochimique qui s’amoncèlent dans la nature, pollution des océans et raréfaction des ressources halieutiques, alertes sanitaires d’origine environnementales, extinctions massives d’espèces et disparition des animaux sauvages dont le nombre a chuté de moitié depuis 40 ans à l’échelle de la planète: face à cet effondrement, il n’y a plus de concept de « développement durable » qui tienne. Nous n’en sommes plus là. Il y a la nécessité d’une rupture avec cet ordre destructeur du monde. Nous n’en sommes plus au besoin d’inflexions, mais à l’exigence de transformation radicale de nos modèles de production et de consommation.

Les premiers jours de la présidence Macron sont marqués non pas par une conversion à la nécessité d’adapter l’ensemble des politiques publiques à la crise écologique majeure que nous traversons, mais au contraire par la continuation et la perpétuation de recettes libérales traditionnelles. Il avait promis de tout changer pour, en réalité, ne rien changer. Son intelligence a été d’épouser la critique des élites alors qu’il en est le meilleur représentant.

Après une présidence molle, la France a cédé à la tentation de l’homme fort. On a parlé de présidence jupitérienne, je parlerai davantage de césarisme soft : concentration des pouvoirs entre quelques mains, ultra-incarnation, hyper-communication ou l’on va jusqu’à mettre en scène la virilité du pouvoir dans une poignée de main. Mais le macronisme peut bien symboliquement secouer Trump, il n’échappe pas au mouvement de la modernité régressive dont je parlais à l’instant. En témoigne la calamiteuse loi travail, qui détricote sans véritable débat des pans essentiels de notre pacte social.

La difficulté est que la réponse écologiste à l’effondrement qui vient ne répond pas seulement à des enjeux techniques, programmatiques. La portée du virage nécessaire exige également un changement de paradigme dans les esprits, dans le rapport que l’humanité nourrit à elle-même et à son environnement, à la Nature. C’est l’ensemble de notre relation au vivant, aux rapports sociaux, à notre conception de l’épanouissement individuel et collectif qu’il nous faut revisiter.

La tâche est immense. Nous ne pourrons donc pas faire l’économie d’un travail de fond pour la conquête d’une majorité culturelle, une majorité d’idées autour d’un nouvel imaginaire politique. L’écologie est cette grande idée qui revisite la relation de l’humanité au Monde. Elle n’est pas soluble dans les autres traditions politiques qui ont structuré l’histoire. Cela ne signifie pas qu’elle soit à part, qu’elle ne peut pas dialoguer avec les autres corpus. Mais elle compose un imaginaire singulier qui réinvente la société. À nous, donc, de diffuser nos idées.

Et soyons persuadés d’une chose : ce n’est pas aux Français-e-s de se rapprocher des écologistes. C’est aux écologistes que revient de se rapprocher des Françaises et des Français. Donnons moins de leçons et plus d’exemples.

Soyons simples. Proches. Solidaires. Pédagogiques. Quittons la morgue de nos certitudes pour nous mettre au diapason des préoccupations de la vie quotidienne de nos compatriotes.

La nouvelle force écologiste à construire doit rassembler largement.

Premièrement, nous devons d’avantage accueillir les jeunesses en notre sein. Les idées neuves qui sont les nôtres doivent irriguer la société en s’appuyant sur les nouvelles générations. Il est essentiel de parvenir à construire un lien fort entre les écologistes et les jeunesses, qui posent par exemple dans leurs propres termes la question du rapport au travail, la question des identités, ou la question de l’engagement. A nous d’offrir un débouché à leurs attentes et un mouvement à leurs espoirs.

Deuxièmement, nous devons construire une écologie populaire. C’est-à-dire une écologie qui embrasse les questions des dominations liées à la classe, au genre, à la race, non pas pour les perpétuer, mais pour les dépasser. Le mouvement à construire est celui de la justice environnementale, un mouvement qui agit pour que l’écologie ne soit pas réservée à une élite qui a les moyens de bien s’alimenter et de se préoccuper de la planète.

Troisièmement nous devons participer à la reconquête européenne. Nous devons assumer notre identité politique pro-européenne en proposant un nouveau rêve européen. Ne laissons pas aux ultra-libéraux et aux nationalistes le monopole du discours sur l’Europe. A nous de faire entendre la voix d’une Europe davantage préoccupée par les humains que par les marchés. L’Europe n’appartient pas à monsieur Juncker et à ses amis partisans de la fraude fiscale généralisée, mais aux millions de personnes qui ont besoin de l’Europe pour construire une vie meilleure.

Notre mouvement doit demeurer à la pointe de ces combats. C’est celui de la société ouverte, cosmopolite, contre le repli xénophobe sur une identité unique fantasmée ; c’est celui de l’émancipation par l’être plutôt que par l’avoir; c’est la politique au service du long terme contre la prison de l’instant. C’est, au fond, la recherche de l’harmonie avec la vie qui nous entoure et dont nous sommes partie prenante.

Confrontés à la dureté de ce combat, certains parmi nous rechercherons, parfois avec sincérité, des raccourcis de commodité. On nous dira, rangeons nous derrière tel ou telle. Mais nous devrons nous prémunir de l’aventurisme qui consisterait à nous ranger sans condition sous une bannière momentanément plus porteuse. Les écologistes sont convaincus que la fin est dans les moyens, comme l’arbre est dans la graine. Voila pourquoi dans la période nous ne cherchons ni homme ni femme providentiel-le. Car comment construire le mouvement du commun autour de la volonté d’un seul ?

L’expérience du Vénézuela qui fascine tant certains devrait nous vacciner contre toute forme de recours à l’incarnation révolutionnaire. Nous ne cherchons ni César ni tribun. Pour Dieu, je laisse chacun s’en remettre à sa propre conscience.

Nous cherchons une solution collective à nos problèmes communs. Faisons émerger une nouvelle génération capable de peser sur le cours des choses, moins préoccupée de son destin politique personnel que de l’avenir de notre société.

Ces JDE sont celle de la réinvention. Nous vivons une fin de cycle. Mais cette fin de cycle doit être pour l’écologie politique un moment de renaissance. Dans ce grand chamboulement, notre responsabilité est de donner une grille d’analyse du monde qui permette de dépasser les peurs, les préjugés, les colères. Notre responsabilité est désormais également d’assumer de manière décomplexée nos solutions. Nous avons ces dernières années beaucoup échoué. Pas du fait d’analyses inopérantes ou d’un projet déficient, mais par notre incapacité à porter de manière solidaire et populaire notre projet politique.

Nous devons fondamentalement nous poser la question de la façon de porter ce message politique de transformation de la société. Convaincre doit être notre obsession.

Nous n’avons plus le temps de nous payer le luxe d’être médiocres quand nous savons que notre mission est si belle, si impérative, si essentielle et qu’en vérité elle nous dépasse et nous engage à nous transformer enfin pour parvenir à entrainer les grands nombres qui changent l’Histoire.

Je forme le voeu que ces JDE soient la première pierre d’un nouveau cycle où nous changeons vraiment pour pouvoir transformer le monde; où nous soyons réuni-e-s pour pouvoir rassembler; où nous soyons humbles pour enfin devenir ambitieux.

Je vous remercie.

Source : Journées d’été – Discours d’ouverture de David Cormand

]]>
Journées d’été d’Europe Ecologie – les Verts à Dunkerque du 24 au 26 août 2017 https://aquitaine.eelv.fr/2017/08/02/journees-dete-deurope-ecologie-les-verts-a-dunkerque-du-24-au-26-aout-2017-connectez-vous/ Wed, 02 Aug 2017 08:30:04 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=13018 Comme chaque année, le programme des plénières, forums et ateliers couvrira un grand nombre de thématiques qui vous tiennent à cœur : nous sommes impatient-e-s de vous retrouver nombreuses et nombreux cet été à Dunkerque pour ces 31e journées d'été des écologistes. ...]]>

Comme chaque année, le programme des plénières, forums et ateliers couvrira un grand nombre de thématiques qui vous tiennent à cœur : nous sommes impatient-e-s de vous retrouver nombreuses et nombreux cet été à Dunkerque pour ces 31e journées d’été des écologistes.

Les deux premiers jours seront principalement consacrés à l’avenir de l’écologie politique et au début du quinquennat du président Macron, et notamment à la politique environnementale du ministre Nicolas Hulot.

Des ateliers thématiques se tiendront notamment sur le climat, la biodiversité, la condition animale, l’agriculture, la santé, les pesticides, le travail, les fractures sociales, la décroissance,, l’éducation, la publicité, le processus de paix au Pays basque, le harcèlement, le revenu universel, le désarmement nucléaire, les personnes réfugiées, la moralisation de la vie politique, Cigéo, la réduction des déchets, les grands projets inutiles et imposés, la déradicalisation, le populisme…

Y seront présent-e-s : David Cormand, Benoît Hamon, Brigitte Gothière, Alain Bougrain-Dubourg, Barbara Romagnan, Valérie Cabanes, François Gemenne, Emmanuel Druon, Benoît Hartman, Guillaume Duval, Philippe Frémeaux, Olivier Razemon, Eric Piolle, Laurence Abeille, Esther Benbassa, Corinne Bouchoux, André Cicollella, Yves Cochet, Jean Desessard, Karima Delli, Pascal Durand, Yannick Jadot, Eva Joly, Michèle Rivasi, Eva Sas… et bien d’autres !

Et comme à l’accoutumée, de nombreuses associations et ONG seront représenté-e-s lors de ces Journées :  évidemment notre partenaire, la Fondation de l’écologie politique, mais également la Ligue de protection des oiseaux (LPO), le WWF, Résistance à l’agression publicitaire (RAP), L214, Ethic Ocean, le Réseau action climat (RAC), Négawatt, Médecins sans frontières, la Croix rouge, l’Auberge des migrants, la Fédération des établissements scolaires innovants (FESPI), l’Institut Momentum, le Comité de liaison des énergies renouvelables (CLER), France nature environnement (FNE)…

Tout savoir sur les Journées d’été

S’inscrire

]]>
Climat : l’heure n’est plus aux constats https://aquitaine.eelv.fr/2017/07/18/climat-lheure-nest-plus-aux-constats/ Tue, 18 Jul 2017 11:56:18 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=12988 Analyse par David Cormand, Secrétaire national, du Plan climat présenté par Nicolas Hulot le jeudi 6 juillet. Vous pouvez retrouver cette analyse en format PDF. ...]]>

Analyse par David Cormand, Secrétaire national, du Plan climat présenté par Nicolas Hulot le jeudi 6 juillet. Vous pouvez retrouver cette analyse en format PDF.

 

Nicolas Hulot a présenté le plan de la France pour le climat. Cette feuille de route avait vocation à tracer les grandes lignes du quinquennat en matière de lutte contre le changement climatique. Après la nomination de Nicolas Hulot au poste de Ministre d’État de la Transition écologique et solidaire puis l’intervention d’Emmanuel Macron suite à la décision de Donald Trump de sortir les États-Unis des accords de la COP 21, la présentation de ce plan était très attendue.

À sa lecture, on reste sur notre faim.

Bien entendu, le tableau qui est dressé de la situation est fidèle à la réalité. Nicolas Hulot a parfaitement rappelé les enjeux en n’omettant pas de relier la question du changement climatique à la dimension sociale et économique, non plus que les enjeux du climat pour la paix et le développement dans le monde.

Mais à la vérité, depuis le discours de Jacques Chirac, déjà inspiré par Nicolas Hulot, en 2002 au quatrième Sommet de la Terre de Johannesburg: « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs », puis le Grenelle de l’environnement voulu par Nicolas Sarkozy en 2007 dont les conclusions prometteuses, par la suite en grande partie abandonnées, avaient été rendues aux côtés d’Al Gore, jusqu’au « selfie » d’Emmanuel Macron d’il y a quelques semaines avec Arnold Schwarzenegger, en passant par le discours de la première Conférence environnementale de François Hollande de 2012 et les discours solennels qui avaient conclus la COP 21 à Paris en 2015, nous sommes désormais habitués aux rituels qui habillent ces moments où « le politique » est censé prendre rendez-vous avec l’avenir.

Depuis 25 ans et le Sommet de la Terre de Rio, la prise de conscience écologique est là et progresse. Plus grand monde ne conteste que la trajectoire actuelle nous conduit vers l’effondrement de notre civilisation telle que nous la connaissons.

Le problème aujourdhui est que nous ne pouvons plus nous payer de mots. Les cérémonies affectées ne font pas l’action. Les raouts internationaux où nos dirigeant-e-s se couvrent de l’onction de la bonne conscience sans que des engagements concrets ne soient pris ne sont pas à la hauteur des enjeux. En un mot, les paroles ne font pas les actes.

Il convient d’assumer que la « transition écologiste de la société » implique des ruptures avec nos modes de production et de consommation. Mais aussi avec ce que notre société a construit comme modèle d’émancipation.

Par exemple, la définition même de « ceux qui réussissent » par opposition à « ceux qui ne sont rien », telle qu’elle est conçue par le Président Macron qui souhaite que « les jeunes Français aient envie de devenir milliardaires », variante de la formule de Jacques Séguéla « Si à 50 ans, on n’a pas de rolex, c’est qu’on a raté sa vie », constitue une contradiction fondamentale avec la société de la sobriété que nous devons inventer pour éviter le chaos.

Nicolas Hulot, dans son film Le syndrome du Titanic, et depuis, l’a rappelé. Nous devons passer d’une société où l’imaginaire de la réussite et de l’émancipation passerait par l’abondance et la capacité à accumuler des biens matériels à une société où la sobriété permet au plus grand nombre d’avoir droit au bonheur sur une planète préservée, c’est à dire un modèle de société où la Terre est apte à accueillir la survie de l’humanité.

Cette conception de notre avenir, c’est celle des écologistes. C’est d’ailleurs ce qui distingue l’imaginaire de l’écologie politique de toutes les autres offres politiques. C’est aussi ce qui implique que l’écologie politique n’est réductible à aucune autre « idéologie », même si il peut y avoir des convergences possibles.

*                  *

*

Mais revenons-en aux annonces de Nicolas Hulot. Le plan climat tel quil est présenté se découpe en 6 axes :
– rendre irréversible la mise en oeuvre de l’Accord de Paris ;
– améliorer le quotidien des Français-e-s ;
– en finir avec les énergies fossiles et s’engager dans la neutralité carbone ;
– la France, n°1 de l’économie verte avec l’Accord de Paris ;
– encourager le potentiel des écosystèmes et de l’agriculture ;
– intensifier la mobilisation internationale sur la diplomatie climatique.

*

Sur le premier axe, rendre irréversible la mise en oeuvre de l’Accord de Paris implique effectivement de faire entrer dans le droit la question climatique. Pascal Canfin et Cécile Duflot avaient proposé de faire entrer la lutte contre le changement climatique dans la Constitution. C’était le sens d’une proposition de loi proposée à l’Assemblée nationale en décembre 2016 par Cécile Duflot. De la même façon que « le principe de précaution » a été introduit dans la Constitution par Jacques Chirac, l’introduction dans la Constitution de l’impératif climatique serait une mesure à la fois concrète et symbolique facilitant l’irréversibilité de la lutte contre le changement climatique. Cette proposition n’a hélas pas été retenue. Non plus que l’instauration d’une responsabilité objective quant à l’application du principe de précaution, ce qui éviterait ainsi à des victimes précaires de se retrouver sans bouclier de protection face aux pollueurs. D’une manière plus générale, la loi est l’un des leviers qui permet d’imposer de nouvelles pratiques de façon immédiate et concrète. Aucune annonce précise de modifications législatives n’a été faite. C’est pourtant le premier pouvoir dont dispose une nouvelle majorité.

La création d’une « Assemblée du futur », par l’évolution du Conseil économique social et environnemental (CESE) est une piste intéressante. Mais si cette assemblée ne devait pas avoir de pouvoir législatif, alors elle ne sera qu’une assemblée consultative dont l’amélioration du fonctionnement peut être utile mais aura à court terme peu d’impact sur les lois. De la même façon, il est vital de « mobiliser la société », en facilitant le rôle d’acteurs de la société civile. Mais il convient de structurer de façon pérenne les réseaux qui existent déjà dont la massification de l’action doit être garantie par des engagements pluriannuels.

L’un des moyens d’être concret est aussi de légiférer pour sanctuariser les espaces naturels et agricoles qui constituent d’une part des « puits de carbone » et limitent d’autre part l’étalement urbain qui augmente les déplacements et donc les émissions de gaz à effet de serre. Or on constate aujourd’hui que la prédation sur les sols par l’urbanisation qui conduit à l’artificialisation de l’équivalent de la surface d’un département tous les 7 ans en France constitue une menace non seulement pour la biodiversité mais aussi pour le climat.

*

Sur le second axe, et l’amélioration du quotidien des Français-e-s, notons que le lien entre la question environnementale et les préoccupations sociales constituent un des fondamentaux d’une conception pleinement écologiste des enjeux.

Concernant la mobilité, si une aide pour faciliter le remplacement d’un véhicule individuel polluant par un véhicule plus vertueux d’un point de vue écologique est une bonne chose, il convient dans le même temps de veiller à la juste évaluation des pollutions produites par les véhicules, et notamment les voitures. À cet égard, les récents scandales qui visent les constructeurs automobiles, notamment dénoncés par la députée européenne Karima Delli, qui ont menti sur les émissions de leurs moteurs doivent avoir des conséquences en matière de contrôles renforcés de ces constructeurs mais aussi en matière de sanctions. Enfin, quel que soit le modèle de véhicule individuel motorisé, cela représente une dépense très importante pour les foyers dépendant de ce mode de transport. Des investissements doivent être massifiés pour faire évoluer nos déplacements individuels motorisés vers des déplacements collectifs ou doux. Cela passe par la contractualisation avec les territoires du développement de liaisons ferroviaires du quotidien, lignes de tramway, métros ou bus à haut niveau de service. Cela passe aussi par une politique d’accompagnement pour encourager les déplacements à pied ou à vélo pour tous les trajets inférieurs à dix kilomètres. Une réflexion sur l’intégration par les grandes métropoles des enjeux du changement climatique a été menée depuis de nombreuses années, en lien avec les COP, par le sénateur Ronan Dantec. Enfin, pour la voiture, il convient d’en favoriser un usage collectif ou partagé. La véritable « mobilité propre accessible à tous » ne peut pas être centrée sur l’usage individuel de la voiture, que cela soit d’un point de vue écologique ou social.

Dans cet axe, rien n’est dit de la remise en question des infrastructures de transport très coûteuses que les écologistes appellent les « GPII » (grands projets inutiles et imposés) : LGV, autoroutes, aéroport de Notre-Dame des Landes, liaison Lyon-Turin, canal Seine-Nord… Si des déclarations récentes qui remettent en question ces projets sont bienvenues, il faut élaborer rapidement une stratégie globale de modernisation et de sécurisation des réseaux existants, de transfert modal de la route vers les alternatives (pour les voyageurs et pour le fret), de développement des transport du quotidien de proximité dans les zones denses. Concernant plus spécifiquement le fret, une stratégie de modernisation de l’hinterland des ports pour concevoir leur développement de manière non extensives en terme d’espace et afin de favoriser le transport des marchandises de manière alternative à la route doit être élaborée.
La question de la précarité énergétique est maintenant connue et les problématiques identifiées. Nous n’en sommes plus au temps des diagnostiques. Il faut maintenant massifier le financement des travaux en priorisant les logements sociaux et les copropriétés dégradées. La somme de 4 milliards d’euros sur 5 ans annoncée, pour plus de 7 millions de logements ou bâtiments concernés, est notoirement insuffisante. Pourtant le chantier de l’efficacité énergétique a non seulement pour effet de faire gagner du pouvoir d’achat aux foyers via les économies effectuées, mais il crée aussi de l’emploi non délocalisable en fournissant de l’activité aux PME du bâtiment sur les territoires.

Permettre aux foyers qui souhaitent consommer leur propre énergie de pouvoir le faire est une très bonne initiative. Il faut aller plus loin en facilitant l’investissement citoyen en faveur de la production d’énergie renouvelable. C’est par l’investissement citoyen que l’Allemagne a rapidement développé sa production d’énergie d’origine renouvelable. De la même manière, il convient d’accompagner et d’encourager les collectivités locales qui le souhaitent à se lancer dans la production et la distribution d’énergie électrique ou de réseaux de chaleurs via des régies publiques locales. En matière de sobriété énergétique, relocaliser la production énergétique à proximité des lieux de consommation est un enjeu majeur. Une législation relative à la simplification de l’implantation d’unité de production d’énergie renouvelable est donc à prévoir. Celle-ci a jusqu’à présent été largement entravée par les lobbies.

La question de l’économie circulaire est abordée de manière ambitieuse. Elle implique là encore de légiférer sur la conception en amont des biens de consommation en vue de leur réutilisation ou de leur recyclage. De la même manière, la lutte contre l’obsolescence programmée des matériels électroménagers, informatique ou de téléphonie par exemple doit déboucher là encore sur une législation adaptée pour que ce qui est aujourd’hui la norme soit interdit. Le rapport rendu par Pascal Durand au Parlement européen début juillet 2017 va dans ce sens et propose des pistes de réflexion. Quant aux collectivités, elles doivent pouvoir déployer des stratégies zéro-déchet, reposant d’une part sur un financement étatique ainsi que suggéré, mais également sur la sortie de l’incinération (dont les émissions polluantes ont un effet cocktail sur le climat et la santé) et un partenariat avec les acteurs non lucratifs de l’économie circulaire, afin que nos déchets-ressources puissent profiter à toutes et tous et créer de l’emploi. C’est le sens du premier plan local pour l’économie circulaire porté à Paris par Antoinette Guhl. Selon le club de Rome, l’économie circulaire permettrait de réduire de 70% les émissions de gaz à effet de serre en Suède.

*

Sur le troisième axe, il est vital de comprendre que depuis la révolution industrielle, notre civilisation est accro aux fossiles : charbon, gaz, pétrole. Ces ressources longtemps très bon marché au regard des services rendus et de leur commodité d’usage ne sont non seulement pas infinies, mais surtout chacun a compris que leur combustion est le principal responsable du changement climatique. Pour maintenir le réchauffement climatique en deçà de la limite des 2 degrés, et idéalement 1,5 degré, il faut laisser dans le sol l’immense majorité de ces ressources. Par ailleurs, notre « temps de réaction » pour stopper nos émissions de gaz à effet de serre est très réduit : trois ans seulement, selon Christiana Figueres, ancienne secrétaire de la Convention des Nations-Unies pour le climat. Il faut donc agir maintenant.

Concernant la production électrique, la proposition qui consiste à sortir du charbon en France est une bonne décision. Il n’y a toutefois plus que 4 centrales à charbon en France. Il faut donc trouver d’autres gisements de carbone à colmater, et interdire progressivement le financement par les entreprises et banques françaises de projet charbon à l’étranger.

L’interdiction de tout nouveau projet d’extraction d’hydrocarbures conventionnels ou non va dans la bonne direction, mais le gouvernement devrait préciser ce qu’il en est des permis d’exploration déjà accordés.

La fiscalité carbone est un moyen qui permet d’entrainer des pratiques moins émettrices dans les différents domaines comme l’industrie et les transport par exemple. Mais les moyens de collecter cette fiscalité restent à préciser car elle a donné lieu par le passé à des effets pervers, des fraudes, voire de la spéculation… Par ailleurs, il n’y a pas eu de communication des montants de cette fiscalité ni du calendrier de la montée graduelle du prix de la tonne de CO2. La convergence de la fiscalité de l’essence avec le diesel est une bonne nouvelle également, elle aura surtout un impact sur les rejets de particules fines liés à la combustion du diesel. Mais là encore, il n’y a pas de précisions sur les échéances. Sur le moyen terme, l’annonce, qui figurait déjà dans le programme d’Emmanuel Macron, de la fin de la vente de voitures disposant d’un moteur à explosion en 2040 doit être accompagnée d’un échéancier et du détail de la stratégie permettant d’atteindre cet objectif. Enfin, il est illusoire de concevoir le remplacement du parc automobile actuel par un parc automobile équivalent dont le fonctionnement serait électrique car cela pose d’autres problèmes environnementaux majeurs (production d’électricité en très forte hausse, stockage, composition des batteries…)

L’objectif global de la neutralité carbone en 2050 implique des mesures très concrètes dès les 5 prochaines années. Il nécessite un plan massif d’économie d’énergie dans le logement, les déplacements, l’agriculture et l’industrie.

Difficile de se faire une idée sur le volontarisme réel sans connaître « la stratégie bas carbone » de la France dont l’annonce est prévue fin 2018 (dans un an et demi!). L’association « Négawatt » a déjà produit un tel scénario. L’ADEME également avec un plan 100% électricité renouvelable en 2050. Ces scénarios remplissent l’objectif sans l’apport du nucléaire. La question nucléaire est un angle mort de la présentation du Plan climat effectué par Nicolas Hulot… Pourtant, il est illusoire que la France puisse mener de front les investissements nécessaires dans l’efficacité énergétique et dans la production d’énergie renouvelable tout en maintenant son tropisme nucléaire. Ce plan doit donc prendre en compte la sortie progressive du nucléaire et la fin des investissements sur de nouveaux réacteurs, ou sur les anciens dont le coût de sécurisation est très élevé pour une fiabilité aléatoire, qui captent les ressources disponibles, qu’elles soient financières ou en matière de recherche et développement, au détriment des énergies renouvelables. La question des réacteurs nucléaires de troisième génération conçus par AREVA, les EPR, est également occultée. Pourtant, l’avenir de l’acteur énergétique historique EDF est aujourd’hui complètement lié à cette technologie peu maîtrisée (délais et coût de construction explosés, défaillances dans la conception et la réalisation des cuves de réacteurs, modèle économique non viable avec un coût de production de mWh bien supérieur à celui du renouvelable). Du point de vu économique, les prévisions du coût du mWh d’origine éolien off-shore est de 50 euros en 2030. Le prix de vente du mWh issu des EPR d’Hinkley Point en Grande-Bretagne à partir de la fin des années 2020 et pour plusieurs décennies est de plus de 100 euros. L’entêtement nucléaire de la France pose non seulement des problème de sécurité et de stockage des déchets, mais aussi hypothèque tout investissement sérieux en direction du renouvelable et ainsi le développement de filières économiques pérennes orientées vers les marchés d’avenir. D’ores et déjà, après la vente d’Alstom et le dépeçage d’AREVA, la France ne dispose plus d’acteur industriel majeur de la production d’éoliennes.

Enfin, il convient aussi de bien définir la manière dont on comptabilise les « puits de carbone » dans l’évaluation globale de ce qui est appelé « la neutralité carbone », c’est à dire ce qui permet de « compenser » les émissions carbones : les forêts ou le captage et stockage de CO2 par exemple.

*

Sur le quatrième axe, qui concerne « l’économie verte », il faut d’abord lever l’ambiguïté sur ce terme que l’on nomme aussi parfois « la croissance verte » pour préciser qu’il ne peut y avoir de victoire contre le changement climatique (et pour la préservation de l’environnement en général) en misant exclusivement sur les changements des process. Il y a aussi la nécessité de changer notre relation à ce que l’on nomme « la croissance », comprise comme étant celle du PIB aujourd’hui indexée sur l’usage de carbone. Ce modèle est destructeur pour l’environnement, mais aussi pour l’emploi. Il manque dans le Plan climat présentée la mise en oeuvre et la prise en compte de nouveaux indicateurs de richesse tels qu’Eva Sas en avait développé le concept dans la loi qu’elle a fait adopter en 2015.

Sur le fait d’accueillir des chercheurs, c’est une idée intéressante en s’assurant que cela contribue au renforcement d’un réseau de recherche et d’universités déjà existant dans notre pays. Encore faut-il que le financement de la recherche française soit considérablement augmenté.

La question de la finance verte – et responsable – est évidemment un enjeu de fond pour dé-financiariser notre économie en permettant que les flux financiers soient régulés et orientés vers une économie réelle et soutenable. De ce point de vue, on peut s’interroger sur l’opposition, dans une autre vie, du désormais Président de la République à la séparation entre les banques de guichet et les établissement financiers. De la même façon, il y a un très grand angle mort dans l’intervention de Nicolas Hulot sur la taxation des transaction financières (TTF). Or, il ne peut y avoir de régulation de la financiarisation, et donc de capacité à réorienter la finance de façon réelle, sans cette première étape. Jusqu’à présent, et malgré l’engagement d’Emmanuel Macron devant les ONG il y a quelques semaines, la France fait partie des pays qui bloquent sa mise en oeuvre au niveau européen. Cette position doit évoluer. L’objectif doit être de collecter plusieurs dizaines de milliards d’euros pour alimenter la transition en Europe et dans les pays en voie de développement.

La publicité faites par les investisseurs de critères environnementaux est une mesure intéressante mais qui semble cosmétique car pas au niveau des enjeux dans les délais qui nous sont imposés. Il faut des mesures contraignantes et éventuellement des sanctions. La question de la lutte contre l’évasion fiscale qui prive la collectivité de ressources indispensables au financement de la transition de nos modèles de production et de consommation ne peut pas être éludée. Les travaux d’Eva Joly démontrent la très grande permissivité de l’Union européenne et même la protection dont bénéficient certains grands groupes et États bénéficiant de cette évasion fiscale.

Un grand manque dans cette partie : la réflexion sur les traités de libres échanges (CETA avec le Canada, TAFTA avec les États-Unis, JEFTA avec le Japon, APE avec les pays en développement…). Ces traités de libre échange ne sont pas conçus pour répondre aux enjeux climatiques. Au contraire, la logique économique dont ils répondent vise à favoriser la croissance, sans définition de celle-ci d’un point de vue écologique ou sociale. L’opacité qui entoure les négociations autour de ces traités renforce leur caractère peu compatible avec l’intérêt collectif sans même parler de l’aspect démocratique, comme Yannick Jadot et Danielle Auroi notamment, l’ont mis en lumière. L’interruption de toutes ces négociations, et le passage au crible de ces traités avec des critères revisités autour d’enjeux environnementaux et sociaux débattus publiquement est une décision immédiate qui peut et doit être prise. Autre manque, la mise en place d’un outil financier relatif au « désinvestissement carbone » qui vise à abandonner les investissement dans les domaines de l’exploitation et de l’utilisation des ressources carbone d’origine fossile.

*

Le cinquième axe curieusement intitulé « renforcer le potentiel des écosystèmes et de l’agriculture » doit viser à une métamorphose profonde du modèle agricole actuel tel qu’il a été encouragé depuis le milieu du siècle dernier. Accro au pétrole et à ses dérivés chimique, ce modèle entraîne une très grande prédation sur les sols et le vivant pour des rendements de plus en plus fragiles et dont les effets directes et induits sont néfastes à la biodiversité et à l’équilibre des écosystèmes. Il ne faut pas omettre de la réflexion le modèle économique de distribution et de consommation que ce modèle agro-alimentaire implique : sur-emballage, grande-surfaces qui elles-mêmes, par le développement des centres commerciaux en périphérie des agglomérations, accélèrent l’artificialisation des sols, l’étalement urbain et contribuent à augmenter les déplacements motorisés.

Rendez-vous est pris dès juillet 2017 pour des États généraux de l’alimentation. L’initiative est positive. Il conviendra d’évaluer les décisions à l’issue de ses travaux. Mais d’ores et déjà, il est nécessaire d’imposer des clauses de distance parcourue par les aliments ainsi que des critères qualitatifs de production comme le bio dans les marchés publics dans la lignée de l’amendement présenté par Brigitte Allain aux côtés de Joël Labbé et adopté en 2016. La réduction maximum des engrais azotés doit conditionner les aides en faveur des agriculteurs.

Aucune stratégie n’est par ailleurs annoncée pour limiter les émissions de méthane, pourtant 28 fois plus polluants que le dioxyde de carbone, largement issus de l’élevage et de l’agriculture intensives (ou encore de la manière dont il faut protéger les déchets). Diminuer la consommation carnée, par exemple dans les cantines comme dans le 2e arrondissement de Paris avec Jacques Boutault, est non seulement une nécessité pour le bien être animal (sujet sur lequel la députée Laurence Abeille est souvent intervenue), un enjeu de santé publique, mais également un élément majeur de la lutte contre le changement climatique. Or, le poids des lobbies agricoles joue à plein et freine depuis des années la mise en oeuvre de stratégies ambitieuses en la matière.
Le changement du modèle agricole aura aussi un impact sur l’emploi avec l’augmentation du nombre de paysans et favorisera un modèle économique plus viable. Il faut avoir à l’esprit que l’agriculture telle qu’elle est pratiquée fait ses premières victimes chez les agriculteurs : revenus en baisse, surendettement, suicides, maladies professionnels, surmenage, accidents du travail.

L’adaptation au changement climatique doit inclure, outre les secteurs de l’économie, du tourisme et de l’industrie évoqués, la résilience des territoires face aux crues et épisodes climatiques extrêmes, la recherche sur l’évolution de la faunes et de la flore liée aux impacts climatiques nouveaux pour permettre de préserver tant que possible la biodiversité fragilisée par ces évolutions brutales. La protection des littoraux et traits de côte, particulièrement sensibles aux changement climatique, tout comme les massifs montagneux doit être accentuée.

La lutte contre la déforestation est une initiative urgente. Elle doit se décliner par l’interdiction de l’importation de bois issus des forêts tropicales et primaires. Mais également de l’importation et l’usage des produits issus de cette déforestation comme l’huile de palme et le soja. Il s’agit là d’un objectif précis indiqué dans le Plan climat et cela constitue une très grande avancée.

*

Le sixième axe qui concerne l’intensification de la mobilisation internationale sur la diplomatie climatique est un enjeu majeur.

Pour ce qui concerne le soutien aux acteurs non gouvernementaux, il est à souhaiter que la mobilisation de ces acteurs et de ses militants ne soient plus entravée par la police comme cela a été le cas en France lors de la COP 21. De ce point de vue, la loi sécurité envisagée, qui intègrerait dans le droit commun des dispositifs de l’état d’urgence pose question. On a assisté ces dernières années à la criminalisation des militant-e-s écologistes qui constituent la dimension citoyenne de l’engagement non-gouvernemental.

L’accompagnement des pays en développement dans la lutte contre le changement climatique via le fond vert est à pérenniser. Il convient aussi d’avancer sur les transferts de technologies et des partenariats de recherche et développement pour permettre aux pays du sud d’accélérer la conversion de leur économie et de leurs activités.

Il manque dans cette partie, ou dans celle relative à l’adaptation au changement climatique, la question spécifique des migrations climatiques qui ont largement commencé mais qui vont hélas s’accentuer. On a constaté la défaillance de l’Europe et de la France dans le domaine de l’accueil des réfugiés. Le phénomène des migrations massives constitue un défi à la fois pour l’appréhender dans les pays ou les zones directement touchées mais aussi dans notre pays et en Europe pour que non seulement l’accueil des réfugiés soit effectué dans des conditions dignes, mais aussi pour mettre à profit ces situations pour en faire des moments de formation et de transmission qui visent à faciliter le retour des populations dans des zones qui sont touchées par une modification profonde du climat et/ou auront été touchées par des conflits.

*                  *

*

En conclusion, si le sens global des annonces du plan climat est positif, on peut regretter des manques dengagements précis, concrets et fixés dans le temps.

Il y a par ailleurs, comme indiqué, des manques importants : la fiscalité (TTF, taxe carbone non précisée, conditionnement du CICE, lutte contre l’évasion fiscale…), la question du nucléaire qui, en France, n’est pas neutre quand on envisage une transition énergétique radicale ; la question de la position de la France vis à vis des traités internationaux – notamment de libre échange – dont on perçoit mal la cohérence avec les objectifs affichés dans ce plan ; la stratégie concernant les grands projets d’infrastructures dont il est dit qu’il seront évalués mais sans précisions sur les choix et les critères ni vers quels types d’infrastructures existantes les moyens disponibles seront transférés.

Les leviers dont dispose l’État dans sa stratégie de lutte contre le changement climatique sont de 3 ordres : fiscal, réglementaire et financier par le biais de l’investissement. Le plan dévoilé n’indique pas la manière dont seront actionnés ces trois leviers, dans quelle proportion ni à quelle échéance.

D’un point de vu diplomatique, Emmanuel Macron a annoncé la tenue d’un sommet en décembre, en France, pour faire suite à la décision de Donald Trump de sortir les États-Unis de l’Accord de Paris qui serait notamment centré sur la question du financement de la transition. Il convient de pouvoir connaître et débattre du mandat de la France dans ce domaine. Car comme écrit plus haut, en la matière, la position du Président est, jusqu’à maintenant, dans le meilleur des cas ambiguë, dans le pire des cas, contradictoire.

*                  *

*

De retour de lespace, Thomas Pesquet témoignait du sentiment de fragilité que renvoie la Terre vue de lespace : bulle de vie perdue au milieu de l’immensité de l’univers. Les découvertes toutes récentes sur Mars montre qu’à la surface de la planète rouge, un cocktail toxique condamne toute forme de vie. Ces découvertes nous montrent, s’il en était besoin, les chemins infiniment périlleux que la nature a dû suivre pour rendre la vie sur terre possible. Plus périlleux encore, celui qui a permis la naissance et le développement de l’humanité. Nous en sommes là. Nous sommes les quelques générations qui par leurs décisions feront en sorte que notre humanité survive ou disparaisse.

La lutte contre le changement climatique est le premier défi que l’espèce humaine dans sa globalité doit relever pour perdurer dans un environnement vivable.

Ce défis exigent des choix. Il apparaît avec force et acuité que l’écologie nest décidément pas un enjeu de communication. Cest un enjeu de civilisation.

Il pleut au Groenland « et en même temps » notre pays envisage de construire un nouvel aéroport à Notre Dame des Landes où les écologistes étaient présent-es ce week-end encore pour rappeler que nos choix doivent être cohérents avec l’ambition que l’on nourrit pour notre avenir. Pour la lutte contre le changement climatique, il n’y a plus de « et en même temps » possibles…

Il y a des choix rapides qui doivent être fait, et la nature ne négocie pas.

Nicolas Hulot a fixé des objectifs. Il a la lourde tâche d’être un écologiste dans un gouvernement qui ne l’est pas. Nous sommes dans un rapport de bienveillance avec le travail difficile qu’il a entrepris, lucides et sans naïveté sur ses marges de manœuvre, et déterminés à peser avec franchise pour que ce qui devra et pourra être fait pendant ce quinquennat soit le plus ambitieux possible.

David Cormand,
Secrétaire national,
le 8 juillet 2017

Source : Climat : l’heure n’est plus aux constats

]]>
Les Verts européens et mondiaux tourné-es vers l’avenir https://aquitaine.eelv.fr/2017/03/30/les-verts-europeens-et-mondiaux-tourne-es-vers-lavenir/ Thu, 30 Mar 2017 08:59:43 +0000 http://aquitaine.eelv.fr/?p=12790 Le 20e Congrès du Parti vert européen et le 5e Congrès des Verts mondiaux s’est déroulé à Liverpool du jeudi 30 mars au dimanche 2 avril 2017. ...]]>

Le 20e Congrès du Parti vert européen et le 5e Congrès des Verts mondiaux s’est déroulé à Liverpool du jeudi 30 mars au dimanche 2 avril 2017.

Les Français-es y étaient représenté-es nombreuses-eux, avec David Cormand, Secrétaire national, Marine Tondelier et Marie Toussaint pour le Bureau exécutif, cinq délégué-es au Parti vert européen (Jocelyne Le Boulicault, Robert Aarsse, Magali Deval, Mathieu Béchu et Samy Khaldy ; Cécile Franchet excusée), Gwendoline Delbos-Corfield, membre du Comité exécutif du PVE, Brigitte Brozio au titre du conciliation committee du PVE, Marie-Cécile Seigle-Vatte qui y portait la résolution « Pillar of social rights », Mélanie Vogel pour le groupe de travail sur le futur de l’Europe, Lise Deshautel côté eurodéputé-es, Benjamin Bibas et Françoise Alamartine pour la représentation d’EELV auprès des Verts mondiaux, de nombreuses/eux curieuses/eux ou délégué-es d’autres délégations (Ximena Kayser-Morris, Timur Delahaye, Ghizlaine Guessous, Christine Surdon, Françoise Kiéfé…), les sénateurs Jean Desessard et André Gattolin, des Jeunes écologistes (Malcy Cathelineau, James Cleaver, Noaïma Henry, Anton Sauvestre, Antoine Tifine et Marina Verroneau) ainsi que Marie Pochon, co-porte-parole de la FYEG (Fédération des jeunes verts européns).

lire la suite : https://eelv.fr/les-verts-europeens-et-mondiaux-tourne-es-vers-lavenir/

]]>