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Régionales, la victoire en déchantant ?

lundi 19 avril 2004

Les élections de mars 2004 ont été une divine surprise pour la gauche et un soulagement : non, les Français n’avait pas renié définitivement la gauche parlementaire lors du scrutin de 2002. La victoire très net de la gauche au second tour l’atteste. Ce n’est pas tant le chiffre de 20 régions à gauche qui est important que le fait que la gauche seule puisse totaliser plus de 50% des suffrages, la majorité absolue, avec une participation électorale très bonne et malgré la présence au second tour du Front National.

Ainsi nous voici rassurés. Mais cette réussite va probablement réveiller la droite et risque d’assoupir la gauche, bercée par l’illusion d’une sympathie retrouvée. Nous ne devons pas ignorer que ce vote majoritaire peut avoir une autre signification que celle retenue par les analystes politiques et les médias : les Français ayant encore en mémoire la situation inédite du 21 avril ont pu voter a gauche "par mauvaise conscience" et par prudence.

Par prudence en évitant de donner à la droite parlementaire le sentiment qu’elle avait les mains libres. L’excès d’assurance du gouvernement Raffarin, sa trop grande confiance dans la "stratégie de communication" avait en effet de quoi inquiéter toutes les catégories sociales sans exception.
Par mauvaise conscience, car beaucoup de français avaient le sentiment que la "raclée" du 21 avril, excluant la gauche du second tour des présidentielles, réduisant cette élection majeure à un duel sans surprise entre deux vieux routards de la politique, avec un résultat "à la Soviétique", cette raclée était injuste et dévaluait la démocratie. Il fallait donc "corriger" cette anomalie, envoyer un message aux hommes politiques pour leur faire comprendre qu’il s’agissait d’un accident, une erreur de casting.

Hors, manifestement, ce message n’a pas été perçu. Nous avons voulu voir dans ce résultat la condamnation pure et simple de la politique de Raffarin et rien d’autre. Le risque est donc grand que les partis de gauche s’endorment sur leur succès, qu’ils se satisfassent d’une approche contestataire de la politique gouvernementale et renoncent à reconsidérer leur conception de la politique.

Le risque est grand que le parti socialiste en vienne à considérer que finalement la 5iéme république, ce n’est pas si mal et renonce à vouloir modifier la constitution, comme autrefois, il avait renoncé à la proportionnelle pour les élections législatives.
Le risque est grand de voir nos partenaires adopter un discours de façade sur le développement durable mais continue d’arbitrer au détriment de l’urgence écologique, au nom de l’urgence sociale.
Il a suffi d’un tour de scrutin pour voir dans deux régions, (Champagne-Ardenne et Midi-Pyrénées) le parti socialiste et le parti communiste, comme deux larrons en foire, renouer avec le sectarisme et la morgue pour écarter sans ménagement les Verts de la majorité régionale qui se dessinait déjà.
Il a suffi d’un tour de scrutin et d’un succès certes honorable pour voir le parti communiste renouer en Ile de France avec les pratiques de négociation en force, quitte à écraser au passage les petits partis (PRG et Chevènementistes) dont la participation régionale est devenue symbolique.
Les Verts sont attachés à des accords équitables, respectueux de chaque partie, toute autre solution favorise inévitablement les rancœurs et les batailles de chiffonniers qui écœurent les électeurs.
Mais nous sommes plus encore attachés à une véritable révolution mentale à gauche face aux défis planétaires.
Nous ne pouvons ignorer que la droite a pris la mesure de la "sanction populaire", elle corrigera sa politique pour s’efforcer de la rendre plus présentable. Si la gauche souhaite ne pas laisser passer sa chance en 2007, il lui faudra tirer partie des évolutions programmatiques consenties dans certaines régions, au-delà de l’accord électoral. Enfin il lui faudra définir une véritable alternative idéologique au pseudo-liberalisme anglo-saxon.
L’institution européenne est devenue l’origine principale de notre législation nationale. Les Elections européennes de juin sont donc déterminantes pour notre avenir, autant que des élections législatives nationales.

Si les Verts à l’échelle nationale donne encore l’impression d’un petit parti, handicapé par son déficit d’élus, il en est autrement au parlement de Strasbourg ou notre organisation européenne unifiée constitue l’un des principaux partis en nombre de représentants (également par le nombre d’électeurs que nous représentons) et sur de nombreux sujets, nous avons déjà pu infléchir les décisions de Bruxelles.

Ces élections seront l’occasion pour les Verts, seuls cette fois, et dans le cadre d’un véritable parti Vert européen, d’offrir aux électeurs leur projet pour l’Europe et de peser un peu plus sur le destin de notre société.