Tchad – Commission Transnationale https://transnationale.eelv.fr Un site utilisant Réseau Europe Ecologie Les Verts Wed, 04 Apr 2018 15:09:09 +0000 fr-FR hourly 1 Tchad, soutien à la société civile tchadienne suite à la journée « ville morte » https://transnationale.eelv.fr/2014/10/17/tchad-soutien-a-la-societe-civile-tchadienne-suite-a-la-journee-ville-morte/ Fri, 17 Oct 2014 18:54:06 +0000 http://transnationale.eelv.fr/?p=4138 Lire la suite]]> Communiqué de presse du
Collectif de Solidarité avec
les Luttes Sociales et Politiques en Afrique

Paris, 14 octobre 2014

Dans ce pays pétrolier, alors que la révision de la raffinerie est prévue entre le 15 octobre et le 30 novembre, « le litre d’essence se négocie aux tarifs faramineux de 1500 à 2000 Francs CFA le litre (2,25 à 3 euros) » selon le Mouvement du 3 février, en exil[1]. Malgré les risques de répression, la même société civile tchadienne[2] a lancé le jeudi 9 octobre, un appel à une « journée ville morte »[3], qui dénonce l’origine de la pénurie : « Cette pénurie n’est pas accidentelle, elle a été artificiellement créée par des proches du chef de l’Etat qui détournent les citernes destinée à alimenter les stations services agréées ». La radio FM Liberté qui relayait l’appel a été immédiatement fermée[4]. Un représentant de la société civile tchadienne, Eric Hervé Pando de l’Association Sociale des Jeunes pour la défense des Droits Humains (ASJDH) est à Paris pour présenter l’appel, la situation du Tchad, et les espoirs d’alternance démocratique.

Dans ce pays préféré de l’armée française en Afrique, jusqu’à ce jour, la liberté d’expression n’existe pas, la liberté de manifester n’existe pas. La dernière tentative à N’Djamena date du 11 juin 2001, et la manifestation des femmes devant l’ambassade de France s’était terminée par une dispersion à coup de grenades réelles faisant de nombreuses blessées.[5] Les journalistes principaux ont été contraints à l’exil et l’information circule surtout par des sites internet gérés à l’étranger[6].

Le gouvernement et l’armée française ont en 2013 tenté de réhabiliter le dictateur Idriss Déby au travers du conflit malien[7], juste avant que ne soit dénoncé le rôle prépondérant du Tchad dans la déstabilisation de la Centrafrique[8]. Le 1er août 2014, le poste de commandement de l’opération Barkhane de lutte contre le terrorisme dans le Sahel a été basé à N’Djamena. Le 19 juillet, en visite au Tchad, François Hollande n’a pas rassuré les démocrates tchadiens déjà affaiblis par la répression, laissant croire, qu’en contrepartie de l’aide sur Barkhane, l’Etat de droit et l’absence de démocratie seraient encore moins pris en compte[9]. Il n’a pas rencontré d’opposants laissant son conseiller Thomas Mélonio le faire très discrètement et sans engagement et le député Pouria Amirshahi s’exprimer en contrepoint[10].

Idriss Déby est au pouvoir depuis 24 ans. Alors que se multiplient depuis l’été, les interpellations sur la longévité des dictateurs africains en lien avec les questions du respect des constitutions et de la limitation du nombre de mandats, le 25 septembre, était organisée à N’Djaména une conférence de presse dénonçant la volonté d’Idriss Déby de s’imposer pour un cinquième mandat en 2016[11]. Juste avant, le 21 septembre, la société civile en lutte pour « l’alternance démocratique » dénonçait des menaces visant des personnalités qui prennent actuellement le risque de s’engager au grand jour[12].

Le gouvernement français doit montrer que la diplomatie française n’est pas soumise à une politique de défense décidée en collaboration avec des chefs d’Etat illégitimes.

Le Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique demande au gouvernement français de s’exprimer clairement et de prendre ses responsabilités, afin de faciliter la liberté d’expression et la liberté de manifester, l’établissement de l’Etat de droit et le respect de processus électoraux permettant la démocratisation du Tchad.

Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique

18 signataires : Forces vives tchadiennes en exil, Mouvement du 3 février (Tchad), Rassemblement National Républicain (RNR), Cà suffit comme cà ! (Gabon), Fédération des Congolais de la Diaspora (Congo-Brazzaville), Union des populations du Cameroun, Mouvement pour la Restauration Démocratique en Guinée Equatoriale (MRD), Union pour le Salut National Paris Ile-de-France (Djibouti), Alliance Républicaine pour le Développement (ARD, dans USN), Alliance Nationale pour le Changement Ile-de-France (ANC-IDF, Togo), Afriques en lutte, Amicale Panafricaine, Sortir du colonialisme, Survie, Ensemble, Parti de Gauche, Parti communiste français, Europe Ecologie les Verts.

Contact d’Eric Hervé Pando de l’Association Sociale des Jeunes pour la défense des Droits Humains (ASJDH) à Paris à partir du 11 octobre : asjdh44@yahoo.fr, Ndjaména : (+235) 66 29 78 78 / 77 29 78 78 / 99 29 78 78

[1] 8.10.14, Mouvement du 3 Fevrier : Tchad : pénurie d’essence dans un pays pétrolier, http://makaila.over-blog.com/2014/1…

[2] Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture Section du Tchad (ACAT-TCHAD), Association des Femmes pour le Développement et la Culture de la Paix au Tchad (AFDCPT), Association de Lutte Contre la Corruption et les Malversations Économiques au Tchad (ALCOMET), Association pour la Promotion des Libertés Fondamentales au Tchad (APLFT), Convention Tchadienne pour la Défense des Droits Humains (CTDDH), Association Tchadienne pour la Promotion et la Défense des Droits de l’Homme (ATPDH), Association Sociale des Jeunes pour la défense des Droits Humains (ASJDH), Mouvement Citoyen pour la Préservation des Libertés (MCPL), Tchad Non Violence (TNV), Ligue Tchadienne de Droits de l’Homme (LDTH), Collectif des associations et mouvements de jeunes du Tchad (CAMOJET)

[3] http://jeunestchad.mondoblog.org/?p=747, http://wuitamoutopona.over-blog.com… http://makaila.over-blog.com/2014/1…

[4] 8.10.14, La Radio Fm Liberté subit les foudres du HCC http://wuitamoutopona.over-blog.com…

[5] Tchad : Que retenir de la manifestation des femmes 10 ans après ?, http://www.journaldutchad.com/artic…

[6] Par exemple, Makaila Nguebla : http://makaila.over-blog.com, Eric Topona : http://wuitamoutopona.over-blog.com/

[7] 15.12.13, Tchad 2013 : la réhabilitation impossible d’un dictateur notoire, dossier d’information réalisé dans le cadre du Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique, http://www.electionsafrique.org/Tch…

[8] 5.3.14, Influence et implication d’Idriss Déby en Centrafrique de mi-2012 à janvier 2014, dossier d’information réalisé dans le cadre du Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique, http://www.electionsafrique.org/Inf…

[9] 23.7.14, La Lettre du Continent, n°687, Barkhane : Deby pose ses conditions

[10] 21.7.14, Pouria Amirshahi : « La France peut agir pour aider les démocrates. .. la diplomatie doit mieux assumer le droit d’asile offert aux opposants, ainsi que la conduite des programmes de renforcements de capacité des sociétés civiles (et donc pas seulement des États). » http://www.pouriaamirshahi.fr/2014/…

[11] 28.9.14, Les forces vives persistent et signent au Tchad : « Idriss Deby n’a pas droit à un 5ème mandat »

http://makaila.over-blog.com/2014/0…

[12] 21.9.14, Tchad : plusieurs ONG dénoncent le plan d’éxécution de leurs membres par le régime Deby

http://makaila.over-blog.com/2014/0…

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RCA : oui à la prolongation de l’intervention française, non à la lune de miel avec Idriss Déby https://transnationale.eelv.fr/2014/02/26/rca-oui-a-la-prolongation-de-lintervention-francaise-non-a-la-lune-de-miel-avec-idriss-deby/ Tue, 25 Feb 2014 22:06:34 +0000 http://transnationale.eelv.fr/?p=3645 Lire la suite]]> Intervention de François de Rugy au nom du groupe Ecologiste

Débat sur la prolongation de l’intervention armée française en RCA

Assemblée Nationale, 25 février 2014

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, madame la présidente de la commission de la défense, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, chers collègues, avant toute chose, je souhaite à mon tour rendre hommage, au nom du groupe écologiste, au caporal Damien Dolet, mort hier en République Centrafricaine, ainsi qu’aux deux autres soldats français déjà morts en mission au tout début de l’intervention, Nicolas Vokaer et Antoine Le Quinio.

Le 5 décembre dernier, le Conseil de sécurité des Nations unies a mandaté la France pour intervenir militairement en Centrafrique ; le même jour, le Président de la République lançait l’opération Sangaris pour endiguer une crise tant humanitaire que sécuritaire. Enfin, le 9 décembre, en vertu de l’article 35 de la Constitution, vous êtes venu devant notre assemblée, monsieur le Premier ministre, accompagné de M. le ministre de la Défense, pour préciser les objectifs de notre engagement militaire. (…) Le groupe écologiste avait alors approuvé l’intervention militaire, pour des motifs qui conservent toute leur pertinence aujourd’hui.

Tout d’abord, la France a une part de responsabilité dans la faillite de l’État centrafricain. En effet, du temps de la colonisation, elle a délaissé ce pays au point de déléguer son exploitation à des sociétés concessionnaires privées. Ainsi, à l’indépendance, ce pays s’est trouvé dépourvu des moyens nécessaires à la construction d’un État souverain sur l’ensemble de son territoire.  Au-delà de cette responsabilité historique ancienne, l’envoi de militaires français en Centrafrique a été décidé dans un contexte d’extrême urgence, en ultime recours, alors que la crise menaçait de dégénérer en conflit ethnique et que 500 000 déplacés étaient en situation de détresse humanitaire. Enfin, si la France est intervenue, elle l’a fait dans la concertation, à la demande des organisations panafricaines, avec le soutien de l’Union européenne et sous le mandat que lui avait délivré le Conseil de sécurité des Nations unies.

Incontestablement, cette intervention était nécessaire et elle le demeure aujourd’hui. Pour autant, l’évolution de la situation en Centrafrique n’en est pas moins extrêmement préoccupante.

Malgré la présence de 1 600 soldats français – bientôt 2 000 – et de 6 000 militaires africains opérant dans le cadre de la MISCA, la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine, la crise centrafricaine a fait 2 000 morts, 100 000 réfugiés et un million de déplacés. Le risque d’une famine généralisée est réel et imminent. Les tensions confessionnelles sont à leur comble : les musulmans fuient Bangui pour rallier l’Est centrafricain, parfois le Tchad, et l’hypothèse d’une partition de l’État est une crainte de plus en plus crédible. Les chrétiens, dénonçant une campagne de communication trop véhémente contre les milices anti-balaka, se retournent contre les autorités de transition et les militaires français. Les rares administrations qui fonctionnent encore sont débordées, l’aide humanitaire est insuffisante et les exactions à Bangui, mais surtout en province, sont quotidiennes.

Pour les écologistes, ce bilan doit conduire la France à faire évoluer son intervention et ses moyens. Je voudrais ainsi saisir l’occasion de ce débat pour formuler quatre propositions.

La première consiste à doubler nos effectifs militaires présents sur le théâtre centrafricain, en une fois et pour un délai de quatre mois, soit le temps de rotation d’une mission extérieure. Aujourd’hui, nous augmentons le nombre de soldats envoyés sur place progressivement, comme le montre la récente décision du Président de la République d’augmenter de 400 hommes le dispositif Sangaris. Or de l’avis de nombreux experts militaires, cette tactique d’incrémentation est généralement inopérante dans la mesure où elle contribue à alimenter la résilience des groupes armés et échoue à produire un effet dissuasif massif.

La mesure que nous proposons porterait le nombre de soldats français sur le terrain à 4 000 et permettrait d’endiguer l’amplification de la violence en maillant le territoire, en protégeant les civils de façon plus efficace et en veillant au cantonnement des groupes armés. En effet, la Centrafrique est un pays de 623 000 kilomètres carrés, une superficie largement supérieure à celle de la France, et Bangui, la capitale, où sont stationnées la majorité de nos troupes, compte plus d’un million d’habitants.

Les experts militaires considèrent qu’en théorie, pour une mission de stabilisation telle que celle menée actuellement par la France en Centrafrique, il faudrait un ratio d’environ vingt soldats pour 1 000 habitants. En dessous de ce seuil, jamais une mission de cette nature n’a été correctement remplie. Si l’on additionne les 1 600 soldats français actuels et les 6 000 soldats africains, dont le niveau d’opérationnalité est très inférieur aux standards européens, on atteint péniblement un ratio de 7,6 soldats pour mille habitants. Souvenons-nous qu’en novembre 2013, alors que le niveau de tension était moindre, le Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, avait plaidé en faveur de l’envoi de 9 000 Casques bleus en Centrafrique.

Certes, l’action militaire ne résoudra pas tout. Mais elle constitue le préalable à la canalisation des violences et à la reprise de l’aide. Elle est la condition sine qua non à la transition politique.

À cet égard, une nouvelle présidente, Mme Catherine Samba-Panza, a été élue présidente du Conseil national de transition à la fin du mois de janvier. Elle devient temporairement l’interlocutrice de la communauté internationale et le dépositaire légitime de l’autorité en République centrafricaine. Il faut noter qu’elle demande d’ailleurs la poursuite de l’intervention française et internationale. Son gouvernement a par ailleurs annoncé la tenue rapide d’élections. Mais le paradigme électoral souffre de certaines limites qu’il convient de ne pas occulter. La reconstruction du tissu social, la sauvegarde de la souveraineté territoriale et la restauration de l’État appellent une transition politique qui s’inscrit dans la durée. Reconstruire les structures étatiques est un défi posé à la communauté internationale en République centrafricaine, comme il se pose dans d’autres pays : nous l’avons vu au Mali. L ’Organisation des nations unies doit relever ce défi de façon plus opérationnelle qu’elle ne le fait aujourd’hui.

Notre deuxième proposition consiste à interpeller davantage nos partenaires européens afin qu’ils apportent un soutien militaire et financier plus significatif à cette intervention qu’ils soutiennent politiquement et diplomatiquement. Si la France augmentait significativement ses effectifs en République centrafricaine, on peut estimer que cela créerait un effet d’entraînement à l’échelle européenne. Cela placerait les États membres face leurs responsabilités, la France ayant mis toutes ses capacités en jeu. Tout échec éventuel de l’intervention serait alors aussi la conséquence directe d’une absence de solidarité européenne.

Si, le 20 janvier, les vingt-huit ministres des affaires étrangères de l’Union européenne ont bien approuvé l’envoi de soldats européens en Centrafrique, la contribution de chaque pays reste encore indéterminée, et surtout très faible, puisqu’il ne s’agit que de 500 soldats. L’Allemagne et le Royaume-Uni ont refusé d’envoyer des troupes au sol. La Belgique, la Pologne et la Hongrie ont promis des renforts, sans donner de garanties quantitatives. L’Estonie a annoncé l’envoi de cinquante-cinq soldats… Une fois de plus, l’Union européenne se condamne à être un nain politique sur la scène internationale.

L’Union européenne a pourtant les moyens de soutenir la France en Centrafrique : elle dispose de deux groupements tactiques de haut niveau, les fameux battlegroups que les Britanniques refusent de mettre à disposition de leurs partenaires. Elle peut également assurer des missions de formation, à l’instar de ce qu’elle fait actuellement au Mali. Elle peut enfin contribuer à alléger la charge financière de l’opération pour la France. Rappelons que l’opération Serval au Mali, que toute l’Europe a approuvée, a déjà coûté à la France près de 500 millions d’euros. La stabilité de l’Afrique est partie prenante de la sécurité européenne et la France ne saurait indéfiniment en assumer seule le coût humain et budgétaire.

Pour le groupe écologiste, le troisième impératif est de rééquilibrer les relations avec nos partenaires africains en privilégiant un dialogue avec les organisations régionales et en réduisant notre dépendance vis-à-vis du Tchad en Afrique centrale.

La Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale et la Communauté économique des États de l’Afrique centrale constituent aujourd’hui des structures qui doivent être davantage associées à notre politique africaine. Les initiatives fructueuses de la CEEAC dans la lutte contre les menaces maritimes dans le golfe de Guinée prouvent d’ailleurs que ces organisations peuvent mener des actions efficaces contre l’insécurité.

En revanche, la fragilité démocratique et politique des régimes en place implique de niveler notre coopération bilatérale avec les États d’Afrique centrale que sont le Cameroun, le Gabon, la Guinée Équatoriale, la République centrafricaine, les Congo et le Tchad pour ne pas dépendre lourdement de l’un d’entre eux.

Concernant le Tchad, le groupe écologiste s’étonne qu’aucune voix politique, à l’exception de celle de notre collègue Noël Mamère, ne se soit élevée pour questionner la lune de miel franco-tchadienne, qui n’est pas nouvelle mais qui semble avoir été réaffirmée depuis un an. En effet, le déclenchement simultané des opérations Serval au Mali et Sangaris en Centrafrique, dont le Tchad constitue le premier soutien africain, a placé la France dans une position de relative dépendance vis-à-vis de N’Djamena, faisant du président Idriss Déby le nouveau pivot de notre politique en Afrique centrale.

Cette orientation n’est pas sans susciter de nombreuses interrogations. Tout d’abord, il faut rappeler que le Tchad est en partie responsable de la déstabilisation de la Centrafrique. Sans la complaisance, voire le soutien actif du président tchadien Idriss Déby, les rebelles de la Séléka, dont un tiers sont eux-mêmes tchadiens, n’auraient pu s’emparer du nord-est centrafricain puis de Bangui. Et cette proximité, fondée sur des intérêts économiques et une appartenance religieuse commune, continue de faire des dégâts puisque les nombreux actes de collusion entre soldats tchadiens de la mission africaine et ex-rebelles de la Séléka alimentent les tensions. De par ses nombreuses imbrications et ingérences récentes en Centrafrique, le Tchad ne peut y être vu comme un État impartial.

Ensuite, il convient d’évaluer ce partenariat à la lumière des méthodes autoritaires, répressives et inégalitaires, du président Déby, qui continue de s’attirer les foudres des associations de défense des droits de l’homme. La contestation des quatre dernières élections par l’opposition, la disparition des opposants au régime comme M. Saleh ou encore le système de corruption généralisée qui mine ce pays mériteraient certainement que la France prenne davantage ses distances avec le pouvoir en place.

Par ailleurs, on peut s’interroger sur le coût stratégique d’un tel partenariat dans la mesure où cette position de relative dépendance vis-à-vis du Tchad lui confère davantage de poids dans la conduite des opérations, alors même que ce relais a des intérêts évidents à faire valoir en Centrafrique. Au premier jour du désarmement, les autorités tchadiennes n’ont d’ailleurs pas hésité à faire entendre une voix discordante de celle de la France, alertant sur le risque d’une opération qui ciblerait majoritairement les populations musulmanes. Depuis cette date, force est de constater que l’objectif du désarmement érigé en priorité par la France a été relégué au second plan.

Enfin, même d’un point de vue budgétaire, la décision de faire du Tchad le premier relais de la France dans la sous-région ne va pas de soi. Car ce réchauffement des relations franco-tchadiennes a pour corollaire un choix : celui de faire du dispositif Épervier, situé à N’Djamena, le point d’appui des opérations menées en République Centrafricaine au mépris de toute logique économique. Traditionnellement la grande base militaire de la France en Afrique centrale est celle de Libreville, au Gabon, où la France dispose d’un contingent de 900 hommes et dont le financement est assuré par l’enveloppe de 800 millions d’euros dédiée aux forces permanentes stationnées en Afrique. À l’inverse, le dispositif Épervier, bien que déployé depuis 1986, reste considéré comme une force temporaire, et est donc financé par la dotation OPEX de 450 millions d’euros, déjà largement mise à contribution par les opérations Serval au Mali et Sangaris en République centrafricaine. De toute évidence, ce choix de financement inadapté risque de générer des surcoûts OPEX importants.

Pour toutes ces raisons, le groupe écologiste ne partage pas les conclusions d’une délégation parlementaire au Tchad qui estimait devoir exprimer la reconnaissance de l’Assemblée nationale aux autorités tchadiennes. Sans que cela remette en cause notre soutien à l’intervention en République centrafricaine, nous considérons que ces questions ne doivent pas devenir l’angle mort de la stratégie française en Afrique. De l’avis de nombreux observateurs, les services français doivent d’ailleurs tirer les conclusions de la non-anticipation de la crise centrafricaine et rompre définitivement avec la tradition des questions taboues. C’est à ce prix que nous parviendrons à bâtir une nouvelle politique africaine, pleinement respectueuse de la souveraineté et des intérêts de nos partenaires.

En définitive, monsieur le Premier ministre, chers collègues, c’est avec beaucoup de questions mais également avec beaucoup d’attentes et d’espérance que le groupe écologiste votera pour la prolongation de l’intervention en Centrafrique, en appelant de ses vœux davantage de responsabilité et de solidarité de la part de la France, de l’Europe et de toux ceux qui peuvent concourir à la sécurité et à la paix en République centrafricaine.

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Apaiser la souffrance des Tchadiens https://transnationale.eelv.fr/2013/07/16/apaiser-la-souffrance-des-tchadiens/ Tue, 16 Jul 2013 13:07:35 +0000 http://transnationale.eelv.fr/?p=3538 Lire la suite]]> Communiqué EELV

Au lendemain du défilé sur les Champs-Elysées de soldats tchadiens, maliens et français ayant combattu ensemble lors de l’opération Serval au Mali, Europe Ecologie les Verts (EELV) constate le lourd tribut payé par l’armée tchadienne : probablement plusieurs centaines de morts lors d’âpres combats dans des espaces désertiques où l’armée française n’a pas voulu se risquer. EELV apporte son soutien aux familles de ces soldats, qui en nombre réclament encore le retour de la dépouille de leur parent mort au combat. EELV souhaite qu’en temps venu le déroulement peu connu de cette guerre soit mieux documenté, afin de déterminer s’il a donné lieu à des violations des dispositions du Protocole additionnel aux Conventions de Genève de 1977 sur les droits des combattants d’une armée non régulière.

EELV s’inquiète aussi du sort d’autres victimes, de plus en plus nombreuses au Tchad depuis que le président Idriss Déby a décidé de réprimer la grogne suscitée dans son pays par la dureté de la guerre au Mali. Depuis le 1er mai, on ne compte plus les arrestations arbitraires et expulsions de députés, militaires, écrivains, journalistes… Plusieurs cas de torture et d’assassinats sont également répertoriés. Dans ce moment d’une extrême dureté, EELV apporte son soutien au peuple tchadien et condamne les violations des droits humains dont il fait l’objet.

La France devrait appeler le Tchad au respect des droits humains. Outre les nécessaires relations au plus haut niveau de l’Etat, elle devrait recevoir des membres tchadiens de l’opposition et de la société civile, afin de favoriser dans ce pays un dialogue national apte à faire baisser le niveau de violence politique. Le combat commun des soldats français, maliens et tchadiens pour le retour de la démocratie au Mali perdrait en effet tout son sens s’il se soldait durablement par un durcissement de la dictature au Tchad.

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