Rwanda – Commission Transnationale https://transnationale.eelv.fr Un site utilisant Réseau Europe Ecologie Les Verts Wed, 04 Apr 2018 15:09:09 +0000 fr-FR hourly 1 Refonder une relation écologique avec le Rwandapour contribuer à une économie de paixdans les Grands Lacs https://transnationale.eelv.fr/2013/04/05/refonder-une-relation-ecologique-avec-le-rwandapour-contribuer-a-une-economie-de-paixdans-les-grands-lacs/ Thu, 04 Apr 2013 23:11:24 +0000 http://transnationale.eelv.fr/?p=3487 Lire la suite]]> par Karim Al Rifaï*
avec le groupe Afrique EELV

 

Le 7 avril 2013 marque le 19e anniversaire du déclenchement du génocide des Tutsis au Rwanda. L’occasion pour EELV de rappeler son attachement à ce que la France éclaire toutes les zones d’ombre qui planent encore sur son degré d’implication dans ces événements tragiques, en préparant notamment une commission d’enquête parlementaire sur la question. Mais l’action de notre pays ne doit pas s’arrêter là. Une fois cette démarche effectuée, la France et l’Union européenne doivent être en mesure de proposer un nouveau partenariat avec le Rwanda, en prenant l’initiative d’une politique de développement durable dans les Grands Lacs. A certains égards, le Rwanda offre en effet un terrain fertile à une politique de développement écologique : 92 % de la population y dispose d’une assurance maladie publique, et sa politique forestière vient d’être récompensée par l’ONU pour sa gestion locale, autonome et durable. Ce nouveau partenariat entre l’UE et le Rwanda doit engager des sommes considérables d’aide publique au développement, afin de pouvoir négocier en retour le retrait progressif de l’influence rwandaise dans les Kivus (RD Congo), où Kigali entretient depuis quinze ans une économie de guerre particulièrement meurtrière qui contribue à 20% de son PIB…

Le Rwanda, « pays des mille collines », est coincé par une géographie exigeante qui limite les projets de développement rural : des montagnes au Nord (qui s’élèvent de 3 500 à 4 500 m), des marais à l’Est dans la région de l’Akagéra et, ceinturant le Sud-Ouest, le massif forestier de Nyungwe (ultime berceau naturel qui alimente l’une des sources géologiques du Nil[1]).

Au-delà de ces contraintes géographiques, le Rwanda pourrait bénéficier d’une réelle intégration régionale en prolongeant les anciennes voies commerciales de la traite orientale sillonnées par les Arabes[2] et en profitant des anciens relais swahilis construits aux siècles derniers sur les côtes de l’océan Indien[3]. De par sa position centrale, le Rwanda pourrait être cette courroie de transmission entre l’ouest et l’est de l’Afrique orientale. C’est certainement un des desseins internationaux du Président Paul Kagamé élu depuis 2000, même si les voies utilisées posent question.

Avec ce Rwanda martyr du génocide des Tutsis de 1994, EELV, parti de gouvernement, pourrait proposer une politique de co-développement écologique fondée sur une conditionnalité réciproque, en tout cas sur de nouveaux principes bilatéraux.

Carte du Rwanda
Carte du Rwanda

 

1.    Une économie et une société en voie de reconstruction

Au début des années 2010, les données économiques restent cruelles au Rwanda : 84 % de la population vit avec moins de 1,50 euro par jour, 40 % des enfants souffrent de malnutrition chronique (surtout dans les campagnes), la diversification économique est faible, le chômage élevé, le budget national reste très dépendant de l’aide publique au développement (APD, qui représente 40 % du budget de l’Etat et 17 % du PIB en 2010), le taux d’investissement privé est faible, le secteur informel très important, l’accès aux mers nécessite entre 1200 et 2500 km sur des routes peu goudronnées qui font exploser le prix de la tonne transportée. Les difficultés macro-économiques sont légion : un marché étroit et peu doté en épargne nationale, une technologie et des capitaux insuffisants (d’où l’action du Rwanda au niveau régional et ses efforts d’intégration auprès de la Communauté d’Afrique de l’Est ou CAE[4]) et des industries à faible productivité. Mais, avec plus de 100 millions de consommateurs, la CAE représente un réel marché régional d’ouverture pour le Rwanda, à condition que les barrières tarifaires et non tarifaires soient abolies entre les pays… ce qui n’est pas encore fait.

En même temps, la croissance du pays est de 8,8 % en 2011. De 2000 à 2011, le revenu moyen par habitant a doublé, passant de 227 à 467 euros. Les conditions de vie, à Kigali, sont bien meilleures qu’auparavant, d’autant que l’Etat a fortement investi dans la santé. Qui sait par exemple que 92 % de la population rwandaise dispose d’une assurance maladie publique[5] et que, durant la décennie 2000, l’espérance de vie est passée de 48 ans à 52 ans ? Un effort a également été mis sur les services, secteur considéré comme créant rapidement des richesses[6].

Du point de vue des infrastructures, des projets de construction et de rénovation des centrales électriques de Rusumo et de Rusizi III, tout comme le goudronnage des grands axes routiers et la réhabilitation de la voie ferrée vers le Burundi et la Tanzanie, sont en cours. Le Rwanda a également les moyens de créer une électricité hydraulique, basée sur l’exploitation du méthane du lac Kivu, avec une réserve estimée de 60 milliards de m3.

En septembre 1997, le Président Kagamé a lancé sa « Vision 2020 »[7]. Il s’agit d’un plan de développement national d’ensemble qui intègre les volets économique, humain et d’intégration régionale (sortir de l’enclavement et afficher des gages aux pays fournisseurs d’aide au développement). Toutefois, une analyse à mi-parcours a montré que cette vision très libérale était assez mal partie. Notamment pour des raisons politiques et de répartition des revenus : selon un rapport de Human Rights Watch de décembre 2008[8], les investisseurs extérieurs sont découragés car le pouvoir judiciaire reste subordonné à l’exécutif et à une élite d’acteurs économiques, officieux et corrompus. Lesquels bénéficient également de l’importante économie de guerre entretenue par le Rwanda dans les Kivus voisins, en République démocratique du Congo (RDC). Plus récemment, au premier semestre 2012, un fonds de développement national a de surcroît été créé : le fonds Agaciro, qui sert de vitrine alléchante à la diaspora rwandaise en vantant les mérites d’une indépendance financière nationale, à un moment où la communauté internationale commence précisément à s’agacer de l’action rwandaise dans les Kivus.

 

Vue de Kigali
Vue de Kigali

 

2. Une économie encore dépendante de l’exploitation violente des Kivus

Créée par la Résolution n°1279 du Conseil de Sécurité de l’ONU le 30/11/1999, la Monusco (ex-MONUC)[9]est installée en RDC ; elle a pour vocation de garantir l’intangibilité des frontières et de garantir la sécurité des civils, notamment dans les Kivus frontaliers du Rwanda et du Burundi, où les violences sont les plus graves depuis 1996. Or malgré la présence des 17 000 casques bleus de la Monusco depuis 2002, ce retour de la paix est mis en échec par l’action conjuguée de plusieurs acteurs dont le Rwanda qui continue de soutenir des groupes rebelles (le CNDP, puis le M23) à l’est de la RDC.

Ainsi, entre avril et décembre 2012, ce sont au moins 200 000 personnes qui ont été déplacées dans les Kivus selon les rapports de l’IRIN (agence de presse de l’ONU), à cause des mouvements guerriers fomentés par le M23. Les responsables de ces milices impliqués dans des massacres récurrents de dizaines de villageois – Bosco Ntaganda, Sultani Makenga, Baudoin Ngaruye, Innocent Zimurinda, Innocent Kaina… – sont pour la plupart d’anciens soldats de l’Armée patriotique rwandaise (APR) de Paul Kagame qui a repris le Rwanda en plein génocide en 1994. Avec l’actuel président congolais Joseph Kabila, ils ont aussi participé à l’éradication des camps Hutus dans les Kivus en 1996. De ce fait, même s’ils ne sont pas tous rwandais, ils ont une créance symbolique très importante envers le régime rwandais, et le pouvoir congolais répugne également à les inquiéter.

De fait, selon un rapport élaboré en 2012 par de nombreuses ONG[10], les cycles de violence dans l’est de la RDC sont la conséquence d’un « manque de volonté politique de la part du gouvernement congolais[11] » et sont alimentés par le gouvernement rwandais. Avec pour principal enjeu le coltan. Ce minerai que l’on trouve à foison dans les Kivus et qui sert à la fabrication de presque tous les outils de communication électronique, le Rwanda en est le premier exportateur mondial. Exploité dans des conditions de guerre, avec des mineurs à la merci du fusil des miliciens qui tiennent le territoire, le coltan se rachète une virginité en transitant par le Rwanda où il devient du minerai légal (car acheté à un cours plus ou moins officiel). On le soupçonne également d’être une manne financière au maintien de toute une classe de corrupteurs au Rwanda.

Selon un rapport de l’ONU, les nouveaux gardiens de Bisié, l’un des sites les plus importants d’extraction du coltan situé au Nord-Kivu, obéiraient toujours à leurs parrains rwandais. Près de 80 % de la cassitérite et du coltan produits dans le Nord-Kivu vient de Bisié, soit 8 000 tonnes par an. La majorité des mineurs de Bisié y subsistent avec moins d’1,50 dollar par jour et sont, en général, fortement endettés. Selon une enquête de Global Witness, le racket et le vol rapporteraient au moins 120 000 dollars par mois aux principaux responsables militaires dans la région. D’une façon générale, on estime que les richesses prélevées militairement dans les Kivus contribuent pour au moins 20 % du PIB rwandais. C’est davantage que le montant actuel de l’APD.

Bosco Ntaganda, commandant en chef du mouvement rebelle kivuan M23
Bosco Ntaganda, commandant en chef du mouvement rebelle kivuan M23

 

3.     Un fort potentiel de développement écologique et solidaire des territoires

Pourtant, l’exploitation violente des ressources naturelles des Kivus est loin d’être la seule perspective de développement économique du Rwanda. La capitale Kigali, ville champignon fondée en 1907 par le colonisateur allemand Richard Kandt[12], est en plein essor économique : une forme de croissance est au rendez-vous, les services s’affinent et se coordonnent, les transports se perfectionnent, de nouvelles classes moyennes et supérieures investissent allègrement dans l’habitat et drainent, tout autour d’elles, une économie locale vivante (menuiseries, transport et entretien de matières premières, rénovation du mobilier d’intérieur avec un réel savoir-faire local entretenu par des ONG et des regroupements de villageois…). Nous avons là un des exemples de développement raisonné de toute la filière « bois » qui s’organise autour de coopératives gérées localement. Et ce, même si Kigali connaît aussi une révolution foncière avec une multiplication de plans cadastraux et de dates-butoirs administratives qui résultent d’une volonté politique de mainmise sur les sols, laquelle vise aussi la rentabilité et n’est que rarement à l’avantage des plus nécessiteux.

Le Rwanda, c’est aussi cet immense projet de reboisement de 1 000 hectares dans les collines du district de Nyaruguru et 500 autres hectares dans celui de Rulindo, au nord de Kigali. La perte des surfaces forestières, une véritable épidémie nationale, entraîne la carence en produits forestiers (surtout pour le bois de chauffe et le charbon) et accentue l’érosion des collines (les pluies diluviennes nettoient la partie riche des sols et les noient dans les rivières environnantes). Pour lutter contre ce fléau, l’Etat rwandais encourage la création de pépinières, développe des emplois, et permet la réapparition de revenus domestiques à travers la vente de bois de charbon issu du reboisement de parcelles familiales (où les femmes jouent un rôle majeur). Avec la plantation d’arbres, dans la région de Nyabimata, l’objectif est aussi de fixer les parcelles, d’assurer l’infiltration de l’eau dans les sols et d’augmenter leur fertilité. L’objectif d’autosuffisance alimentaire est primordial, surtout à destination des enfants. Cette politique récente prend heureusement le contre-pied de la bien mal nommée « villagisation » forcée, qui obligeait jusqu’au début des années 2000 un paysan à détruire sa maison pour aller s’installer dans une zone urbaine, ce qui avait poussé plus de 300 000 familles (soit 10 à 15 % de la population du Rwanda) à venir s’entasser dans des abris en plastique suburbains.

Le développement solidaire mis en œuvre au Rwanda, c’est aussi la préservation et le développement durable des écosystèmes locaux en faveur de la forêt[13], avec une prise en compte des valeurs sociales, économiques et environnementales, qui a valu au Rwanda un Prix de la Politique d’avenir délivré par l’ONU en 2011[14]. Cette stratégie nationale (ensuite déclinée au niveau local) prend également en considération les éléments de la finance forestière en offrant des solutions réglementaires et adaptées aux besoins locaux. Les objectifs sont de faciliter le développement raisonné du boisement, de promouvoir la restauration des terres dégradées et d’arrêter la dégradation des forêts. Ces actions passent par l’utilisation durable de bois de chauffage et la garantie de la promotion de ressources énergétiques renouvelables fournies à des prix abordables (cuisinières écoénergétiques, au biogaz ou solaires – autant d’expériences conduites localement par des ONG et des relais locaux). Dans le cadre du Protocole de Nagoya[15] de garantie de la diversité biologique, il s’agit aussi de gérer et de restaurer les zones humides dégradées, et notamment les nombreux écosystèmes aquatiques fragiles.

Enfin, en matière d’élevage, secteur ô combien important compte tenu de l’importance de la vache dans la culture des hauts plateaux d’Afrique orientale, des progrès ont été initiés afin qu’il devienne plus rentable, notamment au travers d’une alimentation raisonnée (patate douce, betterave…). Ces réussites locales assurent, pour les acteurs concernés, un avenir maîtrisé grâce aux bénéfices économiques et à des circuits logistiques simplifiés et courts. Toutefois, le chemin vers l’agriculture écologique est encore long. Selon Shem Michael Ndabikunze, directeur du Conseil agricole du Rwanda, « à l’heure actuelle, 53% des terres agricoles du Rwanda sont consolidées, ce qui signifie que les agriculteurs ont accès à des semences améliorées et des engrais subventionnés ». Autrement dit, l’importation de produits azotés et remplis de « vitamines » industrielles est encore bienvenue au Rwanda…

Champ de maïs au Rwanda
Champ de maïs au Rwanda

4. L’heure des conditionnalités réciproques

D’où l’utilité d’un plan de développement écologique pour le Rwanda, qui permettrait d’amplifier l’échelle des initiatives nationales de reboisement, de gestion de la filière bois et des forêts, d’élevage raisonné, d’autosuffisance alimentaire dans les campagnes, jusqu’à en faire la norme du pays. Or l’aide publique au développement est traditionnellement chargée de conditionnalités, notamment en termes de démocratie et de respect des libertés publiques. Si la France et l’Union européenne doivent prendre l’initiative d’un grand plan de développement écologique pour les Kivus et le Rwanda, comme EELV le propose depuis décembre 2012[16], cette conditionnalité ne peut être que réciproque compte tenu du passé de la France au Rwanda.

L’Union européenne pourrait ainsi demander au Rwanda d’arrêter d’encourager l’économie de guerre aux Kivus. Mais il faut que la contrepartie soit de taille, avec un investissement en APD permettant de compenser le manque à gagner de l’exploitation violente des Kivus pour le Rwanda : cela représente une mise d’environ 1 milliard d’euros par an. Cet effort d’APD serait consenti en échange d’une mise aux arrêts par le Rwanda des principaux responsables des massacres commis sur des civils dans les Kivus dans le courant des années 2000, et assorti d’une stratégie de reconversion des entrepreneurs de guerre rwando-kivuans de moindre importance dans des domaines profitables sur le plan économique et environnemental.

Au sein de l’Union européenne, la France pourrait être l’initiatrice de ce plan de développement écologique pour le Rwanda et les Kivus, en être en tout cas un des bailleurs et fournisseurs d’aide technique majeurs, s’impliquant à nouveau dans un pays qui lui a tourné le dos sur le plan politique et linguistique depuis près de vingt ans. Pour que cette démarche ait une chance d’aboutir, mais également pour des raisons éthiques évidentes, la France doit en même temps faire toute la lumière sur son action durant le génocide des Tutsis en 1994 : notamment en rendant accessibles toutes les archives de l’époque, en levant le secret défense sur les pièces refusées aux juges d’instruction dans les affaires judiciaires en cours, et en instaurant – par exemple sur proposition des députés écologistes – une véritable commission d’enquête parlementaire[17]. La date symbolique du 7 avril 2014, vingtième anniversaire du déclenchement du génocide qui sera commémoré dans un an exactement, pourrait être le moment idéal pour acter ce travail de vérité. Car sans vérité après un passé si traumatique, aucun travail de fond ne peut être enclenché, aucun partenariat plus respectueux de l’humain et des écosystèmes ne peut être réinventé.

Rwanda : champs au bord du lac Kivu
Rwanda : champs au bord du lac Kivu
* Karim Al Rifaï est inspecteur des finances publiques, ancien membre de la mission ministérielle d’évaluation des politiques publiques – Ministère des Affaires étrangères et européennes
Contact :  06 61 18 03 70  /  la_domerguie[a]hotmail.com


[1] Pour plus de découvertes et d’horizons lointains, consulter www.nyungwe.org/ ou http://rwanda.canalblog.com/albums/la_foret_de_nyungwe/index.html

[2] Lire le très documenté ouvrage d’Olivier Pétré-Grenouilleau Les Traites négrières (Folio histoire – 2009)

[3] Lire l’ouvrage d’Isidore Ndaywel è Nziem, Histoire générale du Congo (Duculot, Louvain, 1998)

[4] www.eac.int (site officiel)

[6] Mais au détriment de l’agriculture, secteur économique dont 80 % de la population dépend.

[7] www.minecofin.gov.rw/webfm_send/1699 (site officiel du gouvernement rwandais)

[9] Les contingents de la force internationale sont essentiellement installés dans la région des Grands Lacs et notamment dans les Kivus.

[10] Voir l’ouvrage collectif « Prendre position sur la réforme du secteur de la sécurité » www.pole-institute.org/documents/drc-ssr-report-french-20120416.pdf

[11] Ce « manque de volonté » serait la contrepartie de rétrocommissions versées lors de l’exportation, via le Rwanda, des minerais congolais (dont le coltan) extraits dans les Kivus contrôlés par les milices proches de Kigali.

[12] Dont la maison est devenue un musée d’histoire naturelle.

[13] cf. Sommet de la Terre en 1997 : www.earthsummit2012.org.

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Kivus : arrêter le cycle de la violence, construire une économie de paix https://transnationale.eelv.fr/2012/12/05/kivus-arreter-le-cycle-de-la-violence-construire-une-economie-de-paix/ Tue, 04 Dec 2012 23:56:41 +0000 http://transnationale.eelv.fr/?p=3304 Lire la suite]]> par Benjamin Bibas* avec le groupe Afrique EELV

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Notes Transnat n°7_Kivus

Depuis plus d’une quinzaine d’années, les trois provinces des Kivus (Nord-Kivu, Sud-Kivu, Maniema) à l’est de la République démocratique du Congo (RDC), mais aussi les régions voisines de l’Ituri et du Nord-Katanga, sont ensanglantées par un long conflit effroyable, qui a causé directement ou indirectement plusieurs millions de morts sans qu’il soit possible de les dénombrer exactement (3 ? 5 ? 8 ?…). Et les cas de viols, pratiqués massivement comme armes de guerre, sont plus nombreux encore. Il s’agit là d’un drame tout à fait majeur à l’échelle du continent et même de la planète, plus meurtrier que les guerres civiles au Biafra, au Soudan ou en Angola, probablement le conflit le plus grave depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

 

ANALYSE

Ce conflit est un des prolongements directs du génocide des Tutsis de 1994 au Rwanda. A la fin du génocide, fuyant sous l’arrivée du Front Patriotique Rwandais, de nombreux membres du Gouvernement Intérimaire Rwandais ayant piloté le génocide ainsi que des miliciens y ayant participé se réfugient aux Kivus. En 1996, Paul Kagame, nouvel homme fort du Rwanda, prend prétexte de cette menace aux portes de son pays pour aller massacrer une partie des camps de réfugiés hutus au Sud-Kivu avec l’Armée patriotique rwandaise. Le conflit aux Kivus se poursuit en 1997 par l’avancée de l’Alliance des forces démocratiques pour la liberté (AFDL) de Laurent-Désiré Kabila face aux Forces armées zaïroises de l’ancien président Joseph-Désiré Mobutu, puis entre 1998 et 2002 par la lutte fratricide que se livrent les deux rébellions du Rassemblement Congolais pour la démocratie (RCD) affiliées respectivement au Rwanda et à l’Ouganda : le RCD-Goma et le RCD-KML. Alors qu’un accord de paix a été trouvé sur l’ensemble du territoire congolais en 2003, soutenu par l’ONU qui avait dépêché dès 1999 une force de 17 000 casques bleu agissant sous chapitre VII (la Monuc puis Monusco), la guerre se maintient pourtant encore et toujours près de dix ans après aux Kivus. Elle se nourrit notamment de l’incapacité du gouvernement congolais, malgré l’aide de la Monusco, à reconstruire son autorité sur l’ensemble du territoire national.

D.R.

L’enjeu de ce conflit est clair : sous couvert tantôt de faire la chasse aux derniers génocidaires hutus circulant à l’est de la RDC, tantôt de protéger les Tutsis congolais plus connus sous le nom de Banyamulenge, le Rwanda occupe directement ou, plus souvent, arme et soutient des milices qui entretiennent une économie de guerre aux Kivus. Celle-ci consiste en le pillage de divers minerais dont deux, le colombo-tantalite (coltan) et la cassitérite, sont indispensables à la fabrication de très nombreux composants informatiques produits par l’industrie asiatique avant d’être revendus assemblés en Occident sous forme de tablettes numériques et autres téléphones portables. Ces minerais transitent des Kivus aux ports africains de l’océan Indien (Dar Es Salaam, Mombasa…) en enrichissant une multitude d’intermédiaires organisés en réseaux, dont les têtes de pont se situent tantôt en Ouganda, au Burundi ou au Kenya, et plus souvent encore au sein de la hiérarchie militaire rwandaise[1]. Alors que le Rwanda reste un pays très pauvre (avec un revenu national par habitant inférieur à 600 dollars), il est devenu au cours des années 2000 le premier exportateur mondial de coltan, et on estime que les pillages militarisés issus du Kivus comptent pour plus de 20 % de son PIB. Un chiffre supérieur à ce qu’apporte au pays l’aide publique au développement (environ 17 % de son PIB).

Pour tenter de faire cesser l’hémorragie aux Kivus, il est donc nécessaire de comprendre l’importance économique stratégique que ces régions congolaises revêtent aux yeux du pouvoir rwandais, où dominent d’ex-combattants de l’Armée patriotique rwandaise majoritairement tutsie. Ces officiers sont d’anciens enfants qui ont fui le Rwanda indépendant à partir des années 1960 pour échapper aux multiples pogroms anti-Tutsis qui ont émaillé l’histoire du pays. Avec leurs familles, ils se sont réfugiés au Kenya, en Tanzanie, en Ouganda, trouvant à s’employer comme supplétifs d’armées nationales répugnant à aller réduire des rébellions dans les zones les plus hostiles de ces pays. Ils ne sont revenus au Rwanda qu’en 1994, reconquérant un pays ravagé par un génocide où nombre de leurs parents ont péri dans des conditions innommables. Ces survivants d’un peuple génocidé, estimant avoir été trahis par la communauté internationale qui a laissé massacrer les leurs en 1994, ont désormais la charge d’administrer et de redonner sa dignité à un des pays les plus pauvres de la planète.

Dans ce contexte, la prise de Goma par le M23 le 20 novembre 2012 peut se lire comme un nouveau coup de force du pouvoir rwandais : face à un pouvoir congolais toujours aussi lointain (Kinshasa se situe à 1600 km de là) et à une armée congolaise toujours aussi désorganisée (des capitaines des FARDC dorment avec leurs familles dans des camps de réfugiés autour de Goma), Kigali fait donner une milice affiliée pour montrer qu’il est toujours le maître de la région. En quelques jours, mettant en scène une respectabilité politique du M23, il montre qu’il est capable de fédérer la plupart des opposants politiques au président congolais Joseph Kabila et, profitant de sa réélection très discutée en novembre 2011, menace de le faire tomber. Une réprobation internationale un peu plus forte qu’à l’accoutumée – même le Royaume-Uni et les Etats-Unis, traditionnels soutiens de Kigali, crient au scandale – provoque bien vite le retrait du M23 de Goma. Mais, en l’absence d’une réaction militaire de la Monusco prétextant qu’elle ne peut appuyer une armée congolaise en fuite, le Rwanda comprend qu’il garde en fait la main aux Kivus. Il peut ainsi continuer de protéger des chefs miliciens qui servent son pillage des ressources kivuanes comme Bosco Ntaganda du M23 ou Laurent Nkunda de l’ancienne milice du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), tous deux sous le coup de mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes contre l’humanité, mandats jusqu’ici restés inappliqués.

D.R.

 

PROPOSITIONS

Si la communauté internationale n’agit pas pour mettre fin à cette économie de guerre aux Kivus, ce cycle de violences généralisées lié à l’exploitation des ressources naturelles est sans fin. Pour enrayer cette dynamique du pire, la France et l’Union européenne pourraient prendre des initiatives militaires, judiciaires, humanitaires, économiques et législatives. Ces initiatives ont pour préalable la reconnaissance des responsabilités européennes et notamment françaises dans ce qui fut la cause initiale de l’embrasement des Kivus : le génocide des Tutsis au Rwanda.

Sur le plan militaire, la France devrait exiger au Conseil de sécurité de l’ONU une application effective du mandat des soldats de la Monusco, qui ont explicitement pour mission de protéger les civils quelle que soit l’aptitude à combattre des Forces armées congolaises ; l’Union européenne devrait en plus proposer l’envoi dans les Kivus d’une force de quelques centaines d’hommes à la compétence éprouvée et à la présence dissuasive, comme elle l’a fait ponctuellement pour libérer Bunia (Ituri) des milices en 2003 ou pour sécuriser les élections présidentielles de 2006 à Kinshasa.

Sur le plan judiciaire, la France devrait demander au Conseil de sécurité de l’ONU de donner mandat à la Monusco pour arrêter les suspects désignés par la CPI : il est choquant de constater que Bosco Ntaganda ait été vu plusieurs fois en train de jouer au tennis avec certains officiers de la Monusco ; il est en effet impératif de faire cesser le règne de l’impunité aux Kivus.

Sur le plan humanitaire, la France devrait demander au Conseil de sécurité de l’ONU de donner mandat à la Monusco pour qu’elle favorise le déploiement et protège des hôpitaux de campagne dont les personnels seraient spécifiquement formés pour soigner les femmes victimes de viols, tant sur le plan physique que psychologique, de la prise en charge d’urgence jusqu’à la réparation de ces dommages.

Sur le plan économique, l’Union européenne et la France devraient prendre l’initiative d’un grand plan de développement écologique pour les Kivus et le Rwanda : un plan suffisamment doté sur le plan monétaire pour inciter les intermédiaires congolais et rwandais à se détourner de l’exploitation militarisée des minerais ; un plan qui aurait pour finalité l’autosuffisance alimentaire des communautés kivuanes et rwandaises et s’appuierait sur des initiatives écologiques réussies dans la région (coopératives de producteurs kivuans de café relayées en Europe par Artisans du Monde, préservation et développement durable des écosystèmes locaux en faveur de la forêt au Rwanda[2]…) Ce plan de développement pour les Grands Lacs engloberait les aspects de droits humains, d’économie, de sécurité, de transport, de santé, d’éducation et bien sûr d’environnement. Il serait assorti d’une condition de retrait progressif de l’aide militaire du Rwanda aux milices opérant aux Kivus. Il aurait pour but de favoriser l’émergence progressive d’une économie de paix dans la région.

Sur le plan législatif, l’Union européenne et la France devraient œuvrer en faveur d’un mécanisme international de traçabilité du coltan et de la cassitérite, certifiant avant leur passage à l’usine que ces minerais n’ont pas été extraits en zones de conflit – ce mécanisme serait inspiré du « Processus de Kimberley » ayant cours dans l’industrie du diamant brut et assorti de lourdes sanctions pour les contrevenants[3] ; l’Union européenne et la France devraient également adopter une loi contre l’obsolescence programmée des produits informatiques, générant en aval de la filière des produits plus durables et en amont une demande nettement moins tendue en coltan et en cassitérite.

Pour être en mesure de formuler ces propositions et surtout de dialoguer sereinement avec le pouvoir rwandais, la France et l’Union européenne doivent reconnaître au plus vite leurs responsabilités dans le génocide tutsi de 1994 au Rwanda : pour l’Union européenne, celle d’avoir laissé faire ; pour la France, celle d’avoir au moins soutenu jusque très tard un régime rwandais qui s’apprêtait à commettre le pire… une responsabilité qui en tout état de cause reste à éclaircir (voir notre communiqué du 7 avril 2011[4]), si possible dès avant le 20e anniversaire du déclenchement du génocide, le 7 avril 2014.

Benjamin Bibas avec le groupe Afrique EELV,

le 4 décembre 2012
mise à jour le 23 janvier 2013

* Benjamin Bibas, co-responsable du groupe Afrique EELV, est journaliste et documentariste. Ses diverses émissions sur la justice pénale internationale et les industries extractives, notamment pour France Culture, l’ont amené à investiguer dans plusieurs territoires de la RD Congo.
Contact : benjamin.bibas[a]noos.fr  /  T. + 33 6 80 08 06 82

D.R.
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Faire la lumière sur l’implication de la France dans le génocide rwandais pour renouer des relations décentes avec l’Afrique https://transnationale.eelv.fr/2012/01/17/faire-la-lumiere-sur-limplication-de-la-france-dans-le-genocide-rwandais-pour-renouer-des-relations-decentes-avec-lafrique/ Tue, 17 Jan 2012 17:05:47 +0000 http://transnationale.eelv.fr/?p=3024 Lire la suite]]> Europe Ecologie les Verts
Communiqué – le 16 janvier 2012

Les conclusions du rapport d’étude balistique commandé par les juges Marc Trévidic et Nathalie Poux dans leur enquête sur l’attentat du 6 avril 1994 qui a coûté la vie aux présidents rwandais Juvénal Habyarimana et burundais Cyprien Ntaryamira et précipité le début du génocide des Tutsis au Rwanda, sont sans appel : les missiles qui ont détruit l’appareil du président Habyarimana ont été tirés du camp militaire de Kanombe, tenu par les loyalistes hutus, et non depuis la colline voisine de Masaka, tenue à l’époque par le Front patriotique rwandais (FPR). Si ces conclusions invalident l’orientation donnée à l’enquête depuis 1998 par le juge Jean-Louis Bruguière, qui avait délivré en 2006 des mandats d’arrêt à l’encontre de neuf responsables du FPR dont l’actuel président rwandais Paul Kagamé, elles éclairent aussi d’un jour cru l’absolue préméditation du génocide par les extrémistes hutus au sein d’un gouvernement très activement et militairement soutenu par la France, notamment à partir de 1990.

Depuis 18 ans, la polémique qui entoure cet attentat sert d’écran de fumée pour masquer d’autres questions et responsabilités importantes. Ce rapport d’expertise est un premier pas dans la recherche de la vérité historique sur le génocide des Tutsis, mais aussi sur la question de l’implication de la France dans cette tragédie. Il est aujourd’hui nécessaire d’aller au bout de cette démarche, en déclassifiant toutes les archives liées à cette période, en faisant tomber les protections dont bénéficient certains présumés génocidaires résidant en France, en instaurant enfin une commission d’enquête parlementaire sur la coopération franco-rwandaise de 1990 à 1994, ainsi qu’EELV le demande depuis le 7 avril 2011 (voir notre communiqué « Rwanda : l’Etat français doit regarder son passé en face » : )

Un changement de majorité politique en France doit être l’occasion de prendre ces décisions. EELV appelle donc ses partenaires de la gauche et de l’écologie parlementaires à s’engager dès maintenant sur une position claire et unifiée en vue de faire toute la lumière sur le rôle joué par la France avant, pendant et après le génocide au Rwanda… Cet engagement commun serait pour notre pays un premier pas dans la refondation de relations avec l’Afrique qui soient respectueuses des êtres humains et plus largement des êtres vivants.

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Rwanda : l’Etat français doit regarder son passé en face https://transnationale.eelv.fr/2011/09/23/rwanda-letat-francais-doit-regarder-son-passe-en-face/ https://transnationale.eelv.fr/2011/09/23/rwanda-letat-francais-doit-regarder-son-passe-en-face/#comments Fri, 23 Sep 2011 13:38:46 +0000 http://transnationale.eelv.fr/?p=2969 Lire la suite]]> Le voyage en France du président rwandais Paul Kagamé s’est achevé mardi 13 septembre.

Pour autant, alors que les affaires semblent reprendre entre les deux pays après plus de quinze ans de relations glaciales, Europe Ecologie les Verts (EELV) estime que toute la lumière n’a pas été faite sur l’implication de la France au côté du régime qui a mené le génocide des tutsis au Rwanda entre avril et juillet 1994.

Le 7 avril dernier, à l’occasion du 17e anniversaire du déclenchement du génocide, EELV publiait le communiqué ci-dessous, en réponse à l’ « Appel citoyen France-Rwanda » qui, un an plus tôt, demandait aux partis politiques de « prendre une position publique sur la nécessité de faire ce travail historique et de s’engager en faveur d’une recherche de vérité et de justice » sur « les graves erreurs d’appréciation » de la France au Rwanda en 1994.

Cinq mois plus tard, et alors que s’engagent des campagnes présidentielles et législatives en France, celui-ci vaut pour nous engagement de gouvernement.

https://www.eelv.fr/actualites/communiques/6738-rwanda-l-etat-francais-doit-regarder-son-passe-en-face/

Communiqué de presse du 7 avril 2011

Rwanda : l’Etat français doit regarder son passé en face
Le 7 avril 2010, jour du seizième anniversaire du début du génocide tutsi au Rwanda, une soixantaine d’organisations et de personnalités françaises lançait un « Appel citoyen France-Rwanda » pour « faire toute la lumière » sur « les graves erreurs d’appréciation », les « erreurs politiques » et la « forme d’aveuglement » ayant caractérisé le comportement de la France durant le génocide, selon le discours prononcé le 25 février 2010 par Nicolas Sarkozy, premier Président français se rendant en visite au Rwanda depuis les massacres. Le texte, signé entre autres par quatre parlementaires ou hauts responsables d’Europe Ecologie Les Verts (EELV), se fondait sur les travaux de la mission d’information parlementaire de 1998 et sur ceux de nombreux chercheurs et ONG pour poser notamment la question : « Comment les autorités politiques et militaires françaises ont-elles pu soutenir, par des conseils militaires, la fourniture d’armes, et l’engagement direct de troupes, un régime qui avait fait du racisme anti-tutsi un point central de son identité et de son action ? ». « Il est essentiel d’apporter des réponses claires à ces questions et de préciser la responsabilité de ces autorités », poursuivait l’appel, avant de demander aux partis politiques de « prendre une position publique sur la nécessité de faire ce travail historique et de s’engager en faveur d’une recherche de vérité et de justice ».

En France, le Président de la République est le chef des armées. Sur le théâtre des conflits, la politique étrangère de la France est menée en premier lieu depuis l’Elysée. En 1994, un président vieillissant et malade, ancien ministre des colonies qui avait confié la gestion des affaires africaines à son fils, a cru bon soutenir jusqu’au bout, militairement et politiquement, un régime extrémiste qui avait commencé d’exterminer une partie du peuple rwandais. Dans l’extrême centralisme qui préside aux institutions françaises, et même en période de cohabitation, ce choix a entraîné tout l’appareil d’Etat, sauf le Parlement qui ne fut jamais consulté sur la présence et le rôle des militaires français au Rwanda. L’envoi de matériel militaire à des responsables génocidaires, leur réception à Paris plusieurs semaines après le début des tueries, l’exfiltration de nombre d’entre eux au Zaïre via l’opération militaire Turquoise sous couvert humanitaire entre juin et août 1994, les incroyables votes à l’ONU visant notamment à effacer les traces de la responsabilité française, comme celui d’avril 1994 sur la diminution des effectifs des Casques bleus ou celui de novembre 1994 sur la création du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) dont le statut a été très habilement négocié par le représentant français à l’ONU… Tous ces faits laissent penser que l’Etat français pourrait être complice de génocide, au sens donné à ce terme par la jurisprudence du TPIR : un accusé qui « a sciemment et volontairement aidé (…) d’autres personnes à commettre le génocide, sachant que (…) ces personnes commettaient le génocide, même si l’accusé n’avait pas lui-même l’intention spécifique de détruire en tout ou en partie le groupe (…) visé comme tel.»

Evidemment, cette hypothèse reste à prouver par un large travail documentaire. Trois initiatives significatives pourraient y aider :

 

– sur le plan judiciaire, l’arrêt des freins manifestement politiques qui retardent l’instruction des neuf plaintes contre X déposées pour la plupart depuis six ans par des victimes tutsi devant le Tribunal aux armées de Paris pour « complicité de génocide et complicité de crime contre l’humanité », concernant l’opération Turquoise ;

 

– sur le plan historique, l’ouverture aux chercheurs de l’ensemble des archives de l’Elysée, du Quai d’Orsay, du ministère de la Défense et des autres ministères, liées à la gestion du dossier Rwanda en 1994 ;

 

– sur le plan politique, l’instauration d’une commission d’enquête parlementaire relative à la politique française durant le génocide rwandais, aux moyens d’action bien plus conséquents que la seule mission d’information de 1998 – les conclusions de cette mission d’enquête pourraient porter également sur la revalorisation du  rôle du Parlement en matière militaire.

Dix-sept ans après le début du génocide, EELV demande au gouvernement actuel de mettre en oeuvre ces initiatives, et s’engage à les mettre en oeuvre dès que ses responsabilités gouvernementales le lui permettront. Quand il aura abouti, ce travail documentaire devra faire l’objet d’une communication solennelle, par exemple lors d’une prochaine date anniversaire du génocide tutsi. Lorsque des événements violents ne sont pas pensés, en effet, ils ont tendance à se répéter : toute l’histoire coloniale de la France est là pour l’attester. Il est grand temps pour l’Etat français de regarder en face sa responsabilité dans le génocide rwandais.

Europe Ecologie  Les Verts

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