De la crise ukrainienne
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Position du Bureau de la Transnationale

Par le Traité de Budapest de 1994, l’Ukraine a accepté son désarmement nucléaire en contrepartie de son intégrité territoriale et de son indépendance. Ce traité est garanti par les Etats-Unis, le Royaume-Uni, mais également la Russie. La remise en cause brutale et unilatérale de ce traité par la Fédération de Russie est inacceptable. Cet acte rompt un équilibre fondé sur le principe de la dénucléarisation des nouveaux Etats issus de l’ancienne Union Soviétique en contrepartie de la reconnaissance mutuelle de leur indépendance et de leur intégrité territoriale. La Russie, par ses organes officiels, par son président même, objecte actuellement au droit international issu de ce traité une légitimité historique. L’action de la Russie déstabilise le cadre de paix européen qui repose sur le renoncement à la violence. Il s’agit d’une violation de la Charte des Nations Unies par un membre du Conseil de sécurité. Le droit international est remplacé par la loi du plus fort.

Par conséquent Europe Écologie-Les Verts condamne fermement l’attitude agressive du président russe Vladimir Poutine envers l’Ukraine depuis que la mobilisation majoritairement pro-démocratique des citoyens ukrainiens eût conduit son allié, l’ex-président Viktor Ianoukovitch, à quitter le pouvoir le 22 février 2014 après une répression sanglante. Le Président russe est manifestement effrayé par la perspective de voir une Ukraine plus démocratique s’installer à ses portes, qui pourrait avoir une influence contagieuse en Russie et remettre en cause son pouvoir autoritaire, largement corrompu et anti-démocratique.

Vladimir Poutine avait déjà pu tester en Syrie l’inertie et la pusillanimité de l’Occident. Il a pu les vérifier en procédant à l’invasion par ses troupes puis à l’annexion de la Crimée suite à un simulacre de référendum organisé dans cette république autonome d’Ukraine le 16 mars 2014. Celles-ci n’ayant entrainé que des sanctions insuffisantes de la part des Etats-Unis et de l’Union Européenne.

Face à la crise actuelle, et fidèle à son principe de résolution pacifique des conflits, Europe Ecologie-Les Verts se prononce pour un règlement négocié de la situation ukrainienne. Le spectre de la guerre civile et d’une intervention étrangère doit être repoussé par tous les participants de cette négociation.

La situation ukrainienne est en ce moment préoccupante au plus haut point. Les menées de soldats sans insignes, les provocations de la 5e colonne russe , loin d’être des manifestations spontanées de la population de l’Est de l’Ukraine, ainsi que la concentration de troupes russes aux frontières de l’Ukraine et les discours mensongers bellicistes des organes officiels russes font peser une menace de guerre civile et d’ingérence militaire étrangère en Ukraine, qui par bien des aspects sont déjà en oeuvre. Il n’est pas acceptable qu’un Etat exerce des pressions par la force sur un autre Etat souverain et entrave le processus de rétablissement d’une gouvernance politique légitime et démocratique, avec comme première étape la tenue d’une élection présidentielle le 25 mai prochain.

Les peuples sont acteurs de leur histoire, il appartient aux citoyens ukrainiens dans toutes leurs composantes et à eux seuls de trouver leur équilibre politique. Vladimir Poutine prétend que l’équilibre ukrainien soit fragile. Un équilibre précaire, qui peut être aisément remis en question par des éléments étrangers et par des manipulations politiques habiles à renforcer des dissensions. Les élections démocratiques permettent d’aller au-delà de cet équilibre dit instable.

Europe Ecologie-Les Verts recommande la bonne tenue, sans entraves extérieures, de l’élection présidentielle, mais également la tenue rapide d’élections législatives, dans le cadre du régime parlementaire issu de la négociation après la Révolution orange et inscrite dans la constitution de 2004. Elles permettront à toutes les sensibilités d’être rapidement représentées, y compris les citoyens ukrainiens qui ont pu prendre quelques distances avec le mouvement de Maïdan, tel qu’il a pu s’exprimer. Le vide institutionnel doit être vite comblé, et l’élection présidentielle en sera le premier pas. Europe Ecologie-Les Verts soutient le Parti Vert d’Ukraine (Партія Зелених України / Партия Зеленых Украины) dans cet effort.

Europe Ecologie-Les Verts salue l’accord de Genève signé par la Russie, l’Union Européenne, les Etats-Unis et le représentant légal de l’Ukraine le 17 avril 2014 qui constitue une première étape dans le règlement négocié de la situation ukrainienne. Les participants, qui aiment s’en réclamer, ne doivent pas dénaturer l’accord, mais au contraire chercher à l’appliquer de manière sincère. Europe Ecologie-Les Verts défend une démarche de désescalade du conflit, de désarmement des milices pro-russes, soutenues par la Russie, qui agitent l’Est de l’Ukraine, mais également de neutralisation des nationalistes de toutes parts et le désarmement des bandes armées qui alimentent les tensions en Ukraine. La désescalade doit aussi être militaire tant du côté russe que du côté de l’OTAN. Dans l’intérêt d’une solution pacifique, l’Ukraine devrait faire partie d’une zone démilitarisée.

La situation économique de l’Ukraine est fortement préoccupante. L’Etat ukrainien, par un cumul de déficits de plusieurs natures dû à la dictature de Ianoukovitch et de sa corruption, est menacé par une faillite. L’Union européenne se doit d’apporter une aide financière à la hauteur de l’enjeu dans le cadre d’un plan international. Des réformes seront sans doute nécessaires et doivent être accompagnées par l’Union européenne, qui aura à quitter le dogme de l’austérité et qui prendra en compte la dimension sociale sans laquelle les citoyens ukrainiens ne pourront les accepter.

C’est aussi l’occasion de promouvoir un partenariat avec et entre les pays de l’Europe orientale, sans exclusif. Il s’agit aussi de dépasser les tiraillements que connaissent les Etats situés entre les sphères géopolitiques de l’Union européenne et celle de la Russie, par leur appartenance fondamentalement européenne, leur volonté de participer au pôle de stabilité de l’Europe, leur volonté d’accéder à une plus grande prospérité et de renforcer leur liens historiques, économiques et humains de part et d’autre. Afin de ne pas briser ces liens multiples, il convient de chercher un nouvel équilibre renforçant les coopérations déjà existantes sur l’ensemble du continent.

L’Union Européenne, par sa politique de voisinage à l’Est, doit continuer d’œuvrer au renforcement des institutions politiques et au rétablissement économique de ses voisins immédiats, gage de prospérité et de paix sur le continent européen. Ces objectifs du partenariat oriental doivent être poursuivis tout en prenant en compte des objectifs de développement écologiquement soutenable et socialement équitable. Parmi ces objectifs, l’Union Européenne se doit de continuer et de renforcer la promotion du respect des droits humains et des procédures démocratiques avec ses partenaires. Ces objectifs méritent d’être également partagés par l’ensemble des Etats européens, y compris par les citoyens des pays concernés. Il s’agit là d’une oeuvre politique plus que d’une procédure technocratique.

Toutefois, ce partenariat ne peut exclure la Russie. La Russie et les membres de l’Union européenne sont d’ores et déjà engagés dans des coopérations économiques et des échanges dans plusieurs dimensions. La coopération dans le domaine spatial en est un exemple réussi. Il convient que ce soient les civils qui jettent des ponts entre Russie et pays membres de l’Union européenne et non les militaires.