Article paru dans Le + du Nouvel Obs, 13 juillet 2011
L’Assemblée nationale a voté la prolongation de l’intervention militaire en Libye jeudi après-midi. Au sein du parti Europe Ecologie – Les Verts, tous les parlementaires n’étaient pas d’accord. Qu’est-ce qui divisait les députés ? Réponse avec Jean-Philippe Magnen, délégué à l’international du Bureau exécutif de EELV.
Les parlementaires se sont exprimés jeudi après-midi à l’Assemblée et au Sénat sur la prolongation de l’intervention militaire en Libye et la position reste très partagée au sein d’EELV. En raison des attaques que le régime de Kadhafi continue de mener contre la population, en violation de la résolution 1973 du Conseil de sécurité des Nations Unies et de l’enlisement depuis la décision prise il y a quatre mois d’intervenir militairement. Avant de prendre position, les députés et sénateurs écologistes ont posé un certain nombre de questions au gouvernement sur les conditions de cette intervention.
C’est une question très complexe car il faut, parallèlement à cette intervention, engager la voix diplomatique et politique, celle que nous avons toujours privilégiée. Négocier un cessez-le-feu n’est pas réaliste aujourd’hui par rapport à la situation sur place et sachant également que Kadhafi est sous mandat d’arrêt international.
La position des écologistes n’est pas d’être contre une prolongation de l’intervention militaire. Nous demandons au gouvernement français d’engager une concertation au niveau européen et qu’il y ait un respect des résolutions 1970 et 1973 de l’ONU adoptées à l’unanimité.
Nous ne sommes pas non plus pour une continuation aveugle de l’intervention et nous ne sommes surtout pas pour un arrêt brutal. A propos de questions aussi complexes, au sein de notre parti, soit nous pouvions prendre une décision unanime et il y avait un vote au sein de notre bureau fédéral, soit, comme aujourd’hui, nous avions des positions différentes entre nos parlementaires. Mais cela ne semble pas handicapant. De mon point de vue, je pense que nous n’avons pas d’autres alternatives que celle de poursuivre cette intervention, qui a pour objectif premier de protéger la population civile contre un régime accusé de crimes contre l’humanité.
Il nous faut cependant à ce stade réclamer des engagements très forts de la part du gouvernement français vis-à-vis de l’Union européenne et de la conférence à entamer sur le plan international sous l’égide de l’Union européenne avec la participation de l’Union africaine et de la Ligue arabe. Et en sortir, par voie diplomatique, une position que nous privilégions depuis le début, malgré notre choix de dire oui à l’intervention militaire il y a quatre mois.
L’enlisement est un risque réel. Mais ceux qui prônent l’arrêt immédiat prennent aussi un risque. Ceux qui disent oui prennent le risque de l’enlisement et de l’inefficacité de l’intervention militaire. Malgré tout, lorsque cette décision a été prise, il y avait le risque que Kadhafi massacre la population de Benghazi. Et nous sommes dans un conflit avec quelqu’un d’irrationnel, de dictatorial, il fallait agir. Mais il y a risque d’enlisement, risque d’incapacité à engager une discussion diplomatique si les combats s’arrêtent et donc renforcement de Kadhafi.
Des rebelles libyens près de Tripoli, 6 juillet 2011 COLIN SUMMERS / AFP
La France doit faire en sorte de relancer la diplomatie au niveau européen, parce qu’il y a aujourd’hui une absence absolument criante de politique européenne de défense et la position atlantiste actuelle de la France ne va pas dans le sens de l’histoire, pour doter l’Europe d’une capacité politique.
JP Magnen