organisation ESR – Site de la commission recherche et enseignement supérieur https://recherche-enseignementsup.eelv.fr Les analyses et proposition de EELV sur l'ESR Mon, 16 Sep 2013 17:25:21 +0200 fr-FR hourly 1 Loi ESR : que faire d’un texte insatisfaisant ? https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2013/09/07/loi-esr-que-faire-dun-texte-insatisfaisant/ Sat, 07 Sep 2013 17:13:32 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2599

L’équipe de Marie Blandin a réalisé une petite fiche explicative permettant de comprendre l’action des parlementaires écolo sur la loi Fioraso

EDITO : Pouvoir de dire ou pouvoir d’agir ?

Nous faisons de la politique.

Le pouvoir d’agir induit par les mandats met parfois en tension la radicalité d’un discours de rejet et l’opérationalité d’un accord transitoire permettant des acquis. Voulons-nous garder un discours “pur” exempt de tout compromis ou voulons-nous, de là où nous sommes, faire bouger les choses, avancer vers une société plus écologiste ?

Les deux ! Nous sommes ambitieux ; mais confrontés à “l’exercice du pouvoir”, mus par la volonté de faire réellement bouger les décisions nous sommes amenés à préférer AGIR, même à la marge, même laborieusement, plutôt que de se contenter de conserver un confortable “pouvoir de dire”, dénonçant ce qui coince… au risque de laisser perdurer le pire, qui lui est antérieur.

Au parlement, l’examen de loi Fioraso sur l’enseignement supérieur et la recherche (ESR), permet d’illustrer l’utilisation des mécanismes du travail parlementaire et les modes d’arbitrages des décisions prises au risque de perdre l’image simpliste d’opposant. La posture particulière de Présidente de Commission, donne à la fois de la visibilité et des obligations démocratiques.

Marie Blandin

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Enseignement Supérieur et Recherche (ESR): une copie à revoir d’urgence https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2013/09/07/enseignement-superieur-et-recherche-esr-une-copie-a-revoir-durgence/ Sat, 07 Sep 2013 17:03:34 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2596 Voilà le bilan de l’année 2013 de la Commission ESR d’EELV, réalisé pour la Conférence-débat des Journée d’été des écologistes 2013

Paradoxalement, c’est le ministre de l’Intérieur qui a pris la mesure la plus concrète et positive de ce gouvernement en matière d’Enseignement Supérieur et de Recherche (ESR), en abrogeant dès mai 2012 la scandaleuse circulaire d’Hortefeu sur les étudiants étrangers. On peut également saluer l’annonce juste avant l’été d’une revalorisation de certaines tranches de bourses étudiantes – même si on reste encore très loin du revenu étudiant réclamé par les écologistes.

Pour le reste, le bilan de la première année du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche est franchement insuffisant, pour ne pas dire innacceptable, tant sur le fond que sur la forme. Sur la forme, car la ministre Fioraso se montre extrêmement peu ouverte aux apports des écologistes, avec qui elle entretient des rapports notoirement exécrables depuis ses années passées à  promouvoir à tout crin les nanotechnologies. Sur le fond, car l’action gouvernementale en matière d’ESR ne marque aucune rupture avec celle de la droite.

Cette tendance à la continuité était manifeste dès la préparation du budget à l’été 2012 :

  • le Crédit Impôt Recherche demeure une gabegie frisant les 6 milliards d’euros ;
  • les financements extra-budgétaires et les structures liées aux Programme d’Investissements d’Avenir lancé sous Sarkozy (Idex, Labex, SATT…) perdurent ;
  • le Glissement Vieillesse Technicité est toujours superbement ignoré dans les calculs de dotation publique, plaçant les Universités et les organismes dans une situation intenable ;
  • Aucune action concrète n’a été engagée pour réduire la précarité qui concerne au bas mot 50000 personnes – les 1000 postes annuels annoncés sont dérisoires et de plus ils sont destinés à des professeurs du secondaire qui enseignent dans le supérieur (PRAG) ;
  • La timide réduction du budget 2013 de l’Agence nationale pour la recherche (ANR) n’a pas réellement bénéficié aux organismes de recherche.

L’automne 2012 a vu se dérouler des Assises de l’ESR. EELV a directement contribué à cette réflexion, tout en en déplorant la forme choisie, qui limitait fortement les possibilités d’expression de la communauté. Le rapport qui en a été tiré était néanmoins riche en propositions pertinentes. Hélas, la loi Fioraso, débattue au printemps 2013, n’en a repris qu’une fraction dérisoire. De nombreuses améliorations ont été introduites dans le texte au cours de la discussion parlementaire, en premier lieu par les éluEs EELV : relations science-société, reconnaissance du doctorat, renforcement du poids des élus dans les conseils des nouvelles « communautés d’universités ». Malgré cela, le texte final, bien trop focalisé sur la valorisation économique de la recherche, ne répond pas aux problèmes de fond de l’ESR. Il rate complètement l’objectif de simplification puisqu’il laisse intactes les structures mises en place par la droite (et le nouveau Haut conseil à l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur – HCERES – ne fait pas exception: le changement est largement cosmétique). Il ne dit rien sur les moyens financiers ni humains. Et le droit d’accès automatique aux filières sélectives achève de marginaliser l’Université parmi les formations supérieures.

L’action gouvernementale en matière d’ESR est pour l’heure plutôt désespérante tant elle s’inscrit dans la continuité de l’action des gouvernements précédents. Les réformes qui permettront de libérer les énergies du système français de recherche, de garantir le dynamisme de la recherche amont, d’assurer la réussite du plus grand nombre et de faire davantage de place à la formation par la recherche restent à écrire. EELV est une force de proposition sur ces questions et doit impérativement être davantage écouté.

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Procédure de qualification des enseignants chercheurs : pour un débat serein https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2013/07/01/procedure-de-qualification-des-enseignants-chercheurs-pour-un-debat-serein/ Mon, 01 Jul 2013 16:45:15 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2588

Les parlementaires écologistes ont cherché, au cours du débat sur l’enseignement supérieur et la recherche, à porter, en étroite concertation avec les acteurs de la communauté universitaire, une vision de l’université différente de celle portée par le texte du gouvernement. Ils ont à ce titre déposé et défendu, pendant l’examen du texte, de nombreux amendements.

Au Sénat, le groupe écologiste a repris  un amendement d’appel pour la suppression de la procédure de qualification qui permet aux docteurs de candidater à des postes d’enseignants-chercheurs à l’Université. Cette proposition s’inscrivait dans un ensemble cohérent visant à revaloriser le doctorat et à revoir le mode de recrutement des enseignants-chercheurs.

Après 24 heures de débats en séance, dans un hémicycle quasi-désert, et par une conjonction assez improbable de votes, la délivrance par le Conseil National des Universités des qualifications a été supprimée (Alinéa 1 de l’article L. 952-6 du code de l’éducation) sans dispositif de substitution, les amendements allant dans ce sens ayant eux été rejetés.

Etant donné le caractère contradictoire des votes successifs, il ne fait donc aucun doute que cette mesure tombera lors de la Commission Mixte Paritaire qui aura lieu ce mercredi. Pour permettre au débat sur les recrutements de reprendre dans des conditions apaisées, les écologistes appuieront cette mise en cohérence du texte et n’en feront pas un casus belli. Les très vives réactions suscitées par cette disposition témoignent de l’attachement de la communauté au caractère national du statut des enseignants-chercheurs, attachement pleinement partagé par les écologistes.

Néanmoins, le débat sur la qualification, et plus généralement sur le recrutement des enseignants-chercheurs, mérite d’être poursuivi au-delà de l’examen de ce texte. Cette procédure n’existe que pour remédier à une double faiblesse de notre système universitaire, qui peine à garantir la qualité de toutes les thèses et surtout à se départir de la tentation du localisme (un problème que la réforme Pécresse des comités de sélection a d’ailleurs dramatiquement aggravé). Les écologistes préfèrent traiter des causes plutôt que du symptôme, et proposent donc dès à présent, à tous les acteurs, d’avancer dans la réflexion sur ces questions, pour parvenir à une réponse plus complète que la seule suppression de la qualification.

Les écologistes rappellent leur engagement résolu en faveur d’un système d’enseignement supérieur et de recherche ouvert à toutes et tous et au caractère démocratique de son fonctionnement. Lors de la première lecture dans chaque chambre, les élus écologistes se sont battus pour ces valeurs et ont arraché de nombreuses avancées: réorientation de la mission de transfert au service de tous les acteurs de la société civile, défense du monopole de la délivrance des diplômes nationaux par les établissements publics, meilleure reconnaissance du doctorat, large ouverture des IUT et STS aux bacheliers technologiques et professionnels, strict encadrement des missions du HCERES  (instance d’évaluation qui remplace l’AERES tant critiquée) et valorisation des instances démocratiques de l’ESR, suffrage direct pour les élections au CA des communautés d’universités et établissements, refus de la mobilité forcée des personnels (article 43), participation des citoyens à la définition de la stratégie nationale de recherche, refus de faire des classes préparatoires l’horizon naturel de tous les bons bacheliers, encadrement du transfert de brevet, définition d’un cadre légal pour la recherche participative, limitation du recours aux ordonnances. Ils ont également dénoncé avec la plus grande vigueur l’absence de mesures fortes contre la précarité, l’érosion des moyens, le gaspillage du Crédit Impôt Recherche.

Isabelle Attard, Députée

Marie Blandin, Sénatrice

Corinne Bouchoux, Sénatrice

André Gattolin, Sénateur

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Enseignement supérieur et recherche : les député-e-s écologistes votent contre le projet de loi Fioraso https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2013/05/29/enseignement-superieur-et-recherche-les-depute-e-s-ecologistes-votent-contre-le-projet-de-loi-fioraso/ Wed, 29 May 2013 17:49:12 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2581 Le quinquennat précédent avait été marqué par l’adoption aux forceps et sans concertation d’une loi Pécresse qui a déstabilisé l’ensemble du système universitaire français, plongeant certaines universités dans une grande détresse financière.

La politique de recherche s’était traduite par une raréfaction des moyens de la recherche fondamentale et un mépris pour la communauté scientifique qui avaient suscité une mouvement profond et inédit des chercheurs.

C’est dire que la communauté universitaire et le monde de la recherche attendaient beaucoup de la loi sur l’enseignement supérieur présentée par Geneviève Fioraso.  On attendait de la ministre qu’elle renoue les fils du dialogue et propose un nouveau modèle universitaire pour notre pays.

Le dialogue a certes eu lieu, au travers d’Assises de la recherche riches en contribution. Mais la loi présentée au parlement n’a traduit que de manière très partielle, et bien souvent infidèle, les conclusions de ces travaux. Préparée dans le secret des cabinets ministériels, sans concertation préalable avec les parlementaires de la majorité, le texte de Madame Fioraso était, nous l’avions dit, décevant.

Les écologistes sont entrés dans le débat parlementaire à l’Assemblée animés d’une quadruple ambition :

  • l’ambition de la démocratisation de la gouvernance des futures communautés d’universités et établissements : nous demandions que les conseils d’administration soient au moins composés de 50% d’élus au suffrage direct et non d’une majorité de directeurs d’établissements et de personnalités extérieures. La question est fondamentale, car ces communautés se verront transférées de nombreuses compétences pouvant aller jusqu’à  la définition des formations dispensées ;
  • l’ambition de voir enfin clarifiée la question de l’évaluation. Nous souhaitions que soit créée une agence, composée pour moitié d’élus et pour moitié de nommés, dont la responsabilité aurait été de valider les procédures d’évaluation (et non de faire elle-même les évaluations). Force est de constater que le Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur n’a que très peu évolué dans ses missions et pas du tout dans sa composition : Il reste une copie très proche de l’ancienne AERES tant décriée par les scientifiques ;
  • l’ambition de conserver l’exclusivité de la délivrance de diplômes nationaux aux établissements universitaires. Or, la distinction entre master (diplôme national seulement délivré par les universités jusqu’à présent) et grade master (diplôme d’établissement délivré par de nombreux établissements publics comme privés) va disparaître et, sous couvert de communautés accréditées, des établissements privés risquent de pouvoir délivrer les diplômes nationaux ;
  • l’ambition d’assurer le développement et de la recherche en sciences humaines et sociales, et de la recherche fondamentale – laquelle constitue le terreau indispensable à toute recherche appliquée. Or, la question du lien entre enseignement et transfert vers le monde économique des résultats de la recherche n’a pas été éclaircie par la loi, bien au contraire.

Au final, les députés écologistes ressentent amertume et dépit, tant sur la méthode de préparation de cette réforme que sur le déroulement des débats – qui ont certes permis l’adoption de certains de nos amendements, mais ont traduit un refus incompréhensible de la ministre de répondre aux quatre interrogations centrales qui étaient les nôtres.

L’élaboration de ce texte comme son contenu ne sont pas à la hauteur des engagements qui avaient été les nôtres envers une communauté universitaire et un monde de la recherche qui avaient mis de grands espoirs dans l’alternance démocratique de 2012.

C’est la raison pour laquelle les député-e-s écologistes voteront contre ce projet de loi.

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Avis de Recherche: où est passée l’ambition d’un enseignement supérieur réellement démocratique et d’une recherche au service de la société ? https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2013/05/28/avis-de-recherche-ou-est-passee-lambition-dun-enseignement-superieur-reellement-democratique-et-dune-recherche-au-service-de-la-societe/ Tue, 28 May 2013 16:54:02 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2576 Tribune de Isabelle Attard, Barbara Pompili et François de Rugy, du 25/5/13

Alors que le projet de loi de Geneviève Fioraso est en cours d’examen à l’Assemblée, les députés écologistes lancent un cri d’alerte.

Le gouvernement présente un texte qui comporte, certes, une avancée : nous nous réjouissons de ce fameux article 2 sur la possibilité de dispenser des cours en anglais dans nos universités. Contrairement aux idées reçues nous sommes persuadés que la maîtrise de langues étrangères n’est pas un renoncement à notre culture. C’est bien au contraire l’ouverture de la boite des connaissances, c’est la liberté de travailler, de publier dans le monde entier, sans limite. Une telle mesure sera utile tant aux étudiants francophones qu’aux étudiants étrangers. Pour celles et ceux qui ne pratiquent pas parfaitement notre langue, c’est la possibilité d’apprendre à leur rythme tout en suivant leurs cours en anglais. Les doctorants étrangers venant terminer leur cursus en France, devraient par ailleurs pouvoir rédiger leur thèse en anglais sans avoir à en demander l’autorisation. Ces docteurs qui auront été immergés dans la culture française pendant des années seront nos meilleurs ambassadeurs.

Mais, au-delà de cette mesure intéressante, que de reculs, que de déceptions : Les Assises régionales et nationales de l’Enseignement supérieur et de la recherche ont permis l’audition de centaines d’organisations, syndicats et collectifs. Plus de 130 propositions ont été formulées afin notamment de lutter contre la précarité.

Quelques semaines et un projet de loi plus tard, que reste-t-il des propositions des assises pour la recherche ? Rien ou pas grand chose. Il reste surtout l’immense déception de ceux qui croyaient encore à cet exercice de démocratie participative après des années de vache maigre.

Nous, écologistes, ne nous étions pas toujours intégralement retrouvés dans le rapport final de Vincent Berger. Notre demande d’un « mieux de science « , garantissant la pluralité et la liberté des recherches, permettant à la société de questionner les scientifiques et aidant les citoyens à devenir des acteurs du développement des connaissances, n’avait pas été assez entendue. Cela aurait supposé un tissu de recherche dynamique, qui ne soit pas inféodé aux intérêts économiques, un accès pleinement ouvert aux connaissances et une démocratisation complète de l’accès à l’enseignement supérieur, hors de toute contrainte de ressource ou d’âge.

Il y avait pourtant dans les conclusions des Assises des demandes clairement formulées qui auraient permis d’ouvrir la voie à une véritable réforme de l’enseignement supérieur et de la recherche. On y trouvait une remise en cause du fonctionnement de l’AERES et une réforme en profondeur de l’ANR donnant enfin aux laboratoires la possibilité de travailler dans des conditions sereines. Nulle trace de ces deux remises en question dans le projet de loi.

Afin de simplifier le mille-feuille institutionnel, les Assises préconisaient de remplacer un grand nombre d’entités, type labex, RTRA, GIS, equipex, etc., par un groupement de coopération scientifique. Où est passé ce projet? Il était également prévu de supprimer le statut dérogatoire de « Grand Établissement ». Pourquoi ne pas l’avoir fait ?

Concernant les conditions d’études, le CROUS n’a pas été renforcé dans ses missions, Campus France continue de – mal – gérer l’accompagnement des étudiants étrangers et la création d’une allocation d’étude est reportée aux calendes grecques. Où sont passées les améliorations du statut des doctorants ? Plus de la moitié d’entre eux abandonnent en cours de thèse. Ce sont des centaines de milliers d’euros d’allocations et d’argent public qui partent en fumée chaque année par manque d’accompagnement et de suivi des recherches. Et comment justifier le maintien de la procédure de qualification, qui fait de la France le seul pays où le doctorat n’est pas suffisant pour devenir enseignant-chercheur ?

Par contre, le projet de loi innove en imposant à l’enseignement supérieur les missions de transfert de la recherche vers le monde économique. Cette mission n’a jamais fait l’objet d’un débat national et n’est pas apparue comme un sujet prépondérant au cours des Assises. Or, Ce transfert ne fait pas l’unanimité auprès de la communauté universitaire et nous sommes profondément opposés à la philosophie qui le sous-tend.

Nous sommes convaincus que le mode de gouvernance des communautés d’universités et établissements prévu dans ce projet de loi représente un grave recul de la démocratie universitaire. Nous pourrions en effet aboutir à des conseils d’administration composés à 60% de personnalités nommées et à 40% de représentants élus au suffrage indirect! De plus, par la création de ces communautés, des établissements privés pourront être accrédités indirectement à délivrer des diplômes nationaux. Est-ce vraiment ce que nous souhaitons ?

Disons-le tout net : si, depuis un an – et c’est bien normal dans une majorité pluraliste – certains projets gouvernementaux ont pu susciter insatisfactions ou doutes chez les écologistes, cette réforme universitaire nous inspire, en l’état, amertume et défiance.

Isabelle Attard, députée écologiste du Calvados, secrétaire de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et chef de file pour le projet de loi Enseignement supérieur et Recherche.

Barbara Pompili et François de Rugy, co-présidents du groupe écologiste à l’Assemblée nationale.

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Motion : la Loi Fioraso sur l’ESR n’est pas acceptable par EELV https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2013/05/26/motion-la-loi-fioraso-sur-lesr-nest-pas-acceptable-par-eelv/ Sun, 26 May 2013 12:45:20 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2562 La transition écologique que doivent réussir nos sociétés ne dépend pas uniquement de notre clairvoyance et de notre organisation collective : elle devra s’appuyer sur des connaissances inédites et une volonté permanente d’innovation, dans le domaine technique mais aussi sociétal ; et elle sera grandement facilitée par la capacité des citoyens à mieux appréhender la complexité du monde. Pour les écologistes, le développement des connaissances et l’accès du plus grand nombre à un enseignement de qualité sont donc des éléments clés des politiques publiques.

L’écologie politique se caractérise par un rapport singulier à la science : elle est à la fois le courant politique qui doit le plus à une analyse scientifique de l’état du monde, et le seul à remettre en cause l’automaticité du lien entre le développement de la techno-science et le progrès humain. La réponse écologiste à cette rupture n’est pas la négation de la démarche de recherche, mais au contraire la demande d’un « mieux de science », en garantissant la pluralité et la liberté des recherches, en permettant à la société de questionner les scientifiques et en aidant les citoyens à devenir des acteurs du développement des connaissances. Cette évolution suppose un tissu de recherche dynamique, qui ne soit pas inféodé aux intérêts économiques ; un accès pleinement ouvert aux connaissances ; et une démocratisation complète de l’accès à l’enseignement supérieur, hors de toute contrainte de ressource ou d’âge.

Les politiques menées ces dernières années ont hélas suivi des logiques très éloignées de ces principes. Pour Sarkozy, il s’agissait de garantir l’utilité économique des travaux de recherche, d’assurer l’efficience de la dépense publique par la mise en concurrence, et de disposer de davantage de leviers sur le quotidien de l’ESR en retirant leurs prérogatives aux instances collégiales au profit de structures aux responsables nommés. Tandis que les moyens des laboratoires publics étaient rabotés et redéployés en forme de financement sur projet (portés par l’Agence Nationale de la Recherche, ANR), peu propice à la prise de risque, le Crédit Impôt Recherche (CIR) offert aux entreprises a atteint la somme faramineuse de 5 milliards d’euros annuels. La légitimité des pairs a été battue en brèche par la création de l’Agence d’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur (AERES) et la mise en place de structures nouvelles (Laboratoires d’Excellence et Initiatives d’Excellence, financés par le Grand Emprunt sous une forme entièrement extra-budgétaire). Rien de durable n’a été fait pour assurer la réussite des étudiants ou réduire les énormes disparités entre filières ; pire, une concentration des moyens a été programmée sur quelques sites, menaçant de transformer toute une partie du pays en désert universitaire. Quant aux questions de participation citoyenne, elles n’ont jamais intéressé les ministres successifs.

Les personnels de l’ESR et les étudiants attendaient une rupture politique nette avec l’arrivée aux responsabilités d’une nouvelle majorité. Or, mis à part l’abrogation de la délirante circulaire Guéant sur les étudiants étrangers, aucun signe fort n’a été donné durant la première année du ministère Fioraso. Le budget 2013 n’a touché ni CIR ni aux structures porteuses du Grand Emprunt, et a à peine réduit les montants confiés à l’ANR. La ministre s’est bornée à organiser des Assises, dont le caractère représentatif laissait à désirer, mais dont les conclusions comportaient néanmoins nombre d’éléments pertinents : la lutte contre la précarité, la simplification du paysage de l’ESR, la pédagogie à l’université, l’aide sociale aux étudiants, le dialogue entre science et société, une meilleure reconnaissance du doctorat, la limitation stricte du financement sur projet, et bien sûr l’urgence des besoins humains et financiers.

Chacun espérait que ces conclusions formeraient l’ossature de la grande loi d’orientation qu’avait promis le candidat Hollande – à défaut de la loi de programmation dont le pays a besoin mais dont le principe a très tôt été écarté par le gouvernement. Las, la loi Fioraso, malgré quelques timides avancées, constitue surtout une énorme déception tant elle fait l’impasse sur les vrais problèmes, quand elle n’en crée pas de nouveaux. Les quatre objectifs affichés du texte sont la réussite de tous les étudiants ; un nouvel élan pour la recherche ; la réduction de la complexité institutionnelle et le rayonnement international. Pour atteindre ces objectifs, le projet propose de revoir les formations de premier cycle, la gouvernance des universités, et les modalités de transfert de la recherche vers le monde socio-économique. Le projet crée aussi de nouveaux regroupements d’établissements : les « communautés d’université et établissements », un conseil stratégique de la recherche chargé d’élaborer une stratégie de la recherche et remplace l’AERES par une nouvelle structure. Enfin, le projet accroît l’ouverture des universités à l’international.

Personne ne pense que les mesures proposées permettront d’atteindre les objectifs proclamés. En effet, le texte ne répond pas aux enjeux définis lors des Assises, passe des problèmes essentiels comme la précarité ou les conditions d’études par pertes et profis, et renforce les effets pervers des réformes du précédent gouvernement. Le fil conducteur, c’est de mettre la recherche – et par extension l’enseignement supérieur, qui doit s’appuyer sur la recherche – au service exclusif de la compétitivité des entreprises. Tous les enjeux liés à la nécessaire émancipation de la société sont occultés. Ce projet s’inscrit clairement dans une inspiration néo-libérale.

Un certain nombre de points positifs peuvent néanmoins être reconnus : les écologistes se réjouissent de la reconnaissance de la formation tout au long de la vie, de l’extension des possibilités d’enseignement et de recherche en langues étrangères, de la reconnaissance d’un rôle des régions, de l’introduction du principe de parité, le contrôle par l’administration de la gestion des ressources humaines dans les universités, ou encore de la diminution de certains pouvoirs des présidents d’université.

La priorité d’accès pour les bacheliers pro et technologiques dans les STS/IUT et la reconnaissance du doctorat ne sont mis en place que de manière trop limitée. Les évolutions pédagogiques, l’accompagnement des étudiants, le dialogue entre scientifiques et citoyens, la remise en cause de l’omniprésence des classes préparatoires, n’ont aucune place dans cette loi. Et la question de la précarité est totalement absente du texte.

Enfin et surtout, le mode de gouvernance des nouvelles « communautés d’université et d’établissements (CUE) », appelées à jouer un rôle absolument central (elles deviennent les interlocuteurs exclusifs de l’Etat), se caractérise par un recul démocratique choquant ; et la nouvelle agence d’évaluation n’est qu’un rhabillage de l’actuelle AERES, alors que le retour à une évaluation collégiale par les pairs élus est une revendication centrale de la communauté de l’ESR.

Face à ce texte, tous les syndicats, associations ou instances représentatives de l’ESR sont au mieux déçus, au pire franchement furieux. Même au PS, ce projet a suscité de fortes réticences.

Le conseil fédéral d’EELV :

  • rappelle son engagement en faveur d’une réelle démocratisation de l’enseignement supérieur, permettant à chacunE d’accéder au plus haut niveau de formation et de qualification ;
  • rappelle son attachement au caractère de service public de l’enseignement supérieur, qui doit être financé à la hauteur de ses besoins réels et s’approcher autant que possible de la gratuité pour ses usagers ;
  • rappelle son engagement en faveur d’une recherche publique indépendante de tous les pouvoirs, financée de manière pérenne, menée par des personnels disposant d’un statut stable, évaluée selon les principes de collégialité qui ont cours partout dans le monde, et interagissant de manière plus soutenue avec le monde associatif ;
  • déplore le peu de cas fait des conclusions des Assises de l’ESR pourtant convoquées par la ministre, et entend la déception de la très grande majorité des syndicats, associations et instances représentatives de l’ESR ;
  • déplore que le projet de loi Fioraso, malgré certaines avancées, accorde trop de place à la valorisation économique, ne règle en rien les problèmes récurrents de l’ESR français (complexité des structures, inégalités entre filières, manque d’investissement pédagogique, précarité), et ne soit pas accompagné d’une loi de programmation budgétaire ;
  • déplore que le travail parlementaire ait été limité par la procédure d’urgence adoptée par le gouvernement et par la restriction apportée au temps de débat à l’Assemblée nationale, alors que les parlementaires écologistes avaient élaboré plus de 130 amendements pour infléchir ce texte vers les valeurs portées par l’écologie politique ;
  • constate que le débat parlementaire en 1ere lecture a permis quelques avancées, notamment grâce à la forte mobilisation des députés EELV, mais que sur des points décisifs que sont l’évaluation et la gouvernance des structures, le texte n’apporte aucune avancée, voire est source de reculs;
  • affirme donc qu’en l’état, ce texte n’est pas acceptable par EELV.

Motion sur la Loi Fioraso sur l’enseignement supérieur et la recherche – Adoptée à l’unanimité par le Conseil Fédéral d’Europe Ecologie-Les Verts le 26 mai 2013

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Temps législatif programmé pour le projet ESR : une erreur ! https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2013/04/25/temps-legislatif-programme-pour-le-projet-esr-une-erreur/ Thu, 25 Apr 2013 16:49:08 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2557 Isabelle Attard, députée Europe Écologie-les Verts, a déclaré aujourd’hui sa grande surprise et sa profonde déception face à la décision de recourir à la procédure dite du « temps législatif programmé » pour l’examen à l’Assemblée nationale du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche.

La Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche avait initié à l’automne 2012 un temps de débat important avec l’ensemble des acteurs universitaires au travers d’Assises régionales puis nationales. Il est incompréhensible que la représentation nationale ne puisse, elle aussi, débattre pleinement d’un projet aussi important pour le futur de nos universités et de la recherche.

Alors que la communauté universitaire a déjà commencé à exprimer ses inquiétudes sur le projet de loi, il semblerait nécessaire que la Ministre prenne au contraire le temps du débat et de l’explication de texte. Un débat tronqué au Parlement ne pourra que renforcer les oppositions naissantes à l’extérieur. La recherche et l’enseignement supérieur en France, mis à genoux par cinq années de politiques sarkosystes, méritent mieux. Les chercheurs, les universitaires, les personnels et les étudiants ont besoin d’une loi forte et ambitieuse qui leur redonnent espoir dans notre système et leur permette d’envisager sereinement leur avenir.

Le Gouvernement ne peut pas considérer que le débat s’est arrêté avec la clôture des Assises. Beaucoup de propositions intéressantes qui y ont été formulées ont malheureusement été écartées du projet de loi. Les députés écologistes, qui sont toujours restés au contact de la communauté universitaire, estiment qu’ils ont beaucoup à apporter au texte et regrettent de ne pouvoir disposer du temps nécessaire pour exposer leurs propositions. En ayant recours au temps programmé dès la première lecture, c’est l’opposition qui disposera du plus large temps de parole, alors que des propositions vraiment constructives auraient pu être portées, au sein de la majorité, notamment par les écologistes.

« Le texte, en l’état, présente de nombreuses lacunes. Il n’est pas à la hauteur du changement de direction qu’appellent de leurs vœux les acteurs du monde académique afin que l’enseignement supérieur et la recherche sortent enfin des difficultés auxquelles ils sont confrontés. Les écologistes travaillent ces questions depuis longtemps. Nous avons de nombreuses propositions constructives à présenter à la Ministre et à la représentation nationale. Il est dommage que l’on ne nous accorde pas le temps nécessaire pour présenter et débattre de ces solutions. Le risque est d’aboutir à un texte qui ne sera pas satisfaisant, qui sera difficilement acceptable pour les parlementaires et qui risque d’être rejeté par les acteurs. » a déclaré Isabelle Attard pour le groupe des écologistes.

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Contribution de EELV aux Assises de l’ESR – Septembre 2012 https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/09/18/contribution-de-eelv-aux-assises-de-lesr-septembre-2012/ https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/09/18/contribution-de-eelv-aux-assises-de-lesr-septembre-2012/#comments Tue, 18 Sep 2012 17:57:24 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2492 Tout au long des campagnes électorales de 2012, EELV avait rappelé que la tenue de larges Etats Généraux de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (ESR) était indispensable afin de restaurer la confiance de la communauté académique et de prendre le temps d’une concertation ouverte aux étudiants et à toute la société. Nous avions également souligné l’importance cruciale de signaux forts sur le plan budgétaire et/ou organisationnel lors des premiers mois de la nouvelle mandature, afin de marquer une ambition nouvelle et la volonté de rompre avec les politiques antérieures. L’absence de tels signes et le calendrier précipité des assises, qui obère leur ouverture à l’ensemble de la société, sont regrettables, pour ne pas dire inquiétants. Les écologistes souhaitent néanmoins jouer leur rôle de force de proposition, et seront particulièrement attentifs aux suites concrètes qui seront données à ces assises.

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1 – Agir pour la réussite de tous les étudiants

La réussite du plus grand nombre dans l’enseignement supérieur est à la fois un facteur de justice sociale et une condition de l’émergence d’une société durable. Or, le système d’ES français souffre de longue date de deux faiblesses : il reste figé dans une dualité qui contribue à perpétuer les inégalités sociales et à écarter les jeunes des formations les plus longues et de la recherche ; et les fortes sommes dépensées pour les filières sélectives cachent un sous-investissement chronique dans la formation de la majorité des étudiants. Une ambition nouvelle passe par des moyens nouveaux : il est impératif d’amener le financement moyen par étudiant et le taux d’encadrement (pédagogique comme administratif) au niveau des pays comparables les plus performants, et d’engager une politique sociale ambitieuse permettant à tous les jeunes de réussir, quelle que soit leur origine sociale.

La précarité est un obstacle majeur à la réussite éducative. L’heure est à un changement de paradigme avec la mise en place d’une véritable allocation d’autonomie pour tous les étudiants. Basée sur le principe d’un « crédit temps formation » de 16 semestres à prendre tout au long de la vie (en formation supérieure, initiale ou continue), elle serait composée d’une part incompressible versée à tous et d’une part variable indexée sur les revenus. Dans le même temps le développement du bâti social universitaire doit être amplifié pour atteindre 25000 livraisons (rénovations + constructions neuves) par an, dans le respect de standards écologiques élevés (consommation d’énergie, proximité des transports urbains…). La hausse des frais d’inscription, qui constitue une imposition différée et par définition non-progressive, est antinomique avec le principe d’accès du plus grand nombre au supérieur : quel que soit son niveau, l‘enseignement a vocation à être gratuit pour ses usagers.

La question de la réussite ne doit pas être réduite au taux d’obtention d’une licence en 3 ans. De ce point de vue, le système des compensations pour réduire les taux d’échec est d’ailleurs une mesure démagogique qui ne fait que masquer les problèmes en dévalorisant le diplôme de Licence. L’université est la seule voie de formation qui ne sélectionne pas pleinement ses étudiants : elle accueille donc aussi, dans les faits, tous les recalés des voies sélectives. Les parcours différenciés devraient y être la règle plutôt que l’exception, avec la mise en place de formations et de passerelles adaptées à la réalité de la diversité des publics (DAEU, stages d’été ou année préparatoire à la licence…). Les licences devraient devenir plus pluridisciplinaires, jusqu’à intégrer des matières mineures dans des domaines radicalement différents de la « majeure » (sciences humaines pour les cursus de science dure et vice-versa). Un travail sur la pédagogie est incontournable, notamment pour privilégier le travail personnel et en petits groupes des étudiants. L’évaluation des enseignements par les étudiants doit devenir systématique. Mais à côté de toutes ces évolutions internes, il revient aux tutelles de dégager les moyens d’améliorer l’encadrement (y compris administratif), d’accompagner les projets innovants, de valoriser la diversité des missions des enseignants-chercheurs et d’assurer aux bacheliers professionnels et techniques des quotas de places suffisants dans les BTS et les IUT.

L’accès à des logements de qualité, aux équipements sportifs et aux activités culturelles, sont d’autres facteurs importants de réussite pour les étudiants. Les bibliothèques et des espaces de travail adaptés doivent être enfin de qualité et en nombre suffisant. L’université doit également s’ouvrir plus largement au cours de l’année et à la diversité des publics pour devenir un lieu de formation tout au long de la vie, en intégrant les démarches de VAE, en accueillant des activités d’éducation populaire. Il faut faire des campus des lieux exemplaires en matière écologique.

Enfin, les étudiants doivent être des acteurs de leur formation. Leur représentation doit être renforcée dans les conseils et être de droit dans les jurys ; l’engagement associatif doit être valorisé dans les maquettes des formations, et les maisons étudiantes partout mieux soutenues.

2 – Donner une nouvelle ambition pour la recherche

En forçant les chercheurs à faire le choix de la concurrence plutôt que de la coopération, en concentrant les moyens sur un nombre toujours plus réduit d’équipes et de sites, en obligeant les chercheurs à mendier des moyens auprès de sources de financements toujours plus nombreuses et complexes, et en multipliant les strates de décision, les réformes des dernières années ont durement frappé le potentiel de recherche français. Une ambition nouvelle pour la recherche consiste à rendre aux scientifiques l’autonomie nécessaire à la conduite de leurs travaux tout en créant les conditions d’un nouveau dialogue avec la société.

Comme pour l’enseignement supérieur, cette ambition suppose des moyens nouveaux, l’ordre de 1 G€ d’accroissement chaque année. Ces moyens peuvent être obtenus sans impacter le budget de l’Etat, au moins en 2013 et 2014, grâce à une réforme du Crédit d’impôt recherche (CIR). Si son intérêt est réel pour la recherche dans les PME, sa forme actuelle donne aussi aux grands groupes un effet d’aubaine énorme qui ne profite en rien à la production ou à l’emploi scientifique du pays. Il convient de plafonner le CIR à un montant de quelques millions d’euros par groupe ou holding, de le conditionner fortement au recrutement de docteurs, et de moduler son montant en fonction de l’adéquation des projets engagés avec la transition écologique.

La dérive du tout-projet doit être stoppée nette : les laboratoires bénéficiant d’un label reconnu d’unité de recherche doivent recevoir de leurs tutelles (organismes nationaux de recherche, établissements d’enseignement supérieur et de recherche…) des dotations suffisantes pour que les personnels de recherche puissent accomplir leur mission, et ce pour la durée de leur labellisation. Une réduction drastique du budget attribué à l’ANR doit être plus que compensée par une augmentation des fonds destinés aux recherches développées dans les organismes nationaux et les établissements d’ESR. Sur des thématiques identifiées comme étant d’intérêt majeur (santé – environnement, biodiversité, études sur les rapports sociaux de sexe, écotoxicologie, systèmes complexes, énergies renouvelables…), la constitution de réseaux d’acteurs sera accompagnée de crédits ad hoc dont la gestion sera déléguée aux réseaux constitués autour de ces thématiques.

Recruter sur des postes permanents plutôt que multiplier les contrats précaires est à la fois juste socialement et efficace du point de vue scientifique, car cela permet la prise de risque, l’expérimentation, la résistance aux modes du moment. Plusieurs milliers d’emplois stables doivent ainsi être créés chaque année dans tous les métiers de la recherche (ingénieurs, techniciens, administratifs, responsables de plate-formes mutualisées). Le coût est faible, car les emplois existent déjà budgétairement : il s’agit seulement de les transformer en postes permanents. Cela permettra de stabiliser les jeunes précaires accumulés ces dernières années et de libérer le temps de travail destiné à la recherche, entre autres en systématisant la décharge d’enseignement pour les Maîtres de conférence recrutés depuis moins de cinq ans.

Une grande part de la recherche effectuée en France repose sur les milliers de doctorants que comprend le pays. Il faut leur garantir un financement adéquat dans toutes les disciplines. En outre, le nombre de docteurs produits par le pays est notoirement insuffisant au regard des besoins de la société et ce déficit est encore accentué par la non reconnaissance du diplôme dans les grilles de la fonction publique comme dans les conventions collectives des entreprises. Le nombre d’allocations de recherche doctorale doit être progressivement augmenté et le doctorat doit être valorisé dans le public comme dans le privé.

La question de la culture scientifique et technique (CST) doit être entièrement repensée pour promouvoir la compréhension et le débat pluridisciplinaire sur les enjeux de notre monde, bien au-delà de ce que promeut Universcience dont le rôle doit être réenvisagé, notamment en clarifiant les circuits de financement de la CST avec un pilotage interministériel garant de cette mission de service public. Il faut faire découvrir et comprendre la démarche scientifique dès le plus jeune âge, par exemple avec des classes scientifiques mises en place sur le format des classes vertes. La protection du patrimoine scientifique doit recevoir les moyens nécessaires. Les actions de CST réalisées par les enseignants et les personnels de recherche (visites de laboratoires et de collections, interventions dans les classes, journées « grand public »…) doivent être davantage prises en compte dans l’évaluation de leurs activités et l’évolution des carrières.

Les partenariats des laboratoires publics n’ont aucune raison de se limiter au monde des entreprises, encore moins dans la configuration du subornation qui prévaut de plus en plus fréquemment. Il revient à l’Etat d’introduire parmi les missions des établissements de recherche, organismes et universités, l’impératif de l’ouverture vers d’autres pans de la société et en particulier vers le monde associatif. Le dispositif des Partenariats Institutions-Citoyens pour la Recherche et l’Innovation créé en 2005 par le conseil régional d’Île-de-France pourra servir de modèle de dispositif permettant d’encourager les recherches partenariales entre le monde citoyen et celui de la recherche académique. Les laboratoires qui s’engageront sur cette voie pourront bénéficier d’un label et de financements spécifiques. D’autres initiatives (boutiques de sciences…) devront être encouragées sur les campus universitaires pour que les sciences et la démarche scientifique soient enfin accessibles à des publics diversifiés. Le développement de la recherche participative doit être intégré au Code de la recherche.

Si l’autonomie méthodologique des chercheurs doit être strictement respectée, les grandes orientations scientifiques et techniques devraient, elles, faire l’objet de véritables débats publics. Les conclusions tirées par les responsables politiques s’appliqueraient particulièrement aux EPIC. La responsabilité de ces débats pourrait être confiée à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) si celui-ci ne souffrait d’une très insuffisante ouverture vers la société dans toute sa diversité. L’OPECST devrait donc être transformé en Office national indépendant, fonctionnant sur fonds uniquement publics, qui aurait une mission de veille permanente et d’animation du débat sur toutes les questions scientifiques et / ou technologiques ayant un possible impact sociétal. A cet égard, le fonctionnement du Board of Technology au service du Parlement et du Gouvernement danois pourrait être une source utile d’inspiration.

Enfin, les connaissances nouvelles résultant du travail permis par les dépenses publiques (européenne, nationale, collectivités territoriales) doivent entrer dans le domaine des biens communs. Il n’est pas acceptable que les éditeurs privés soient seuls dépositaires de ces productions, limitant de facto leur accessibilité au plus grand nombre. La publication en accès libre doit devenir une règle.

3 – Une nouvelle structuration de l’ESR

Les réformes menées ces dernières années ont abouti à une complexification inédite du paysage de l’ESR français, avec pour conséquences principales une dépossession des attributions des instances comprenant une proportion importante d’élus et pour les équipes de recherche la course permanente à des financements de trop court terme pour autoriser des recherches audacieuses. Il est urgent de redonner une lisibilité à notre système d’ESR en le simplifiant, d’améliorer la dimension collégiale de son fonctionnement, et de sortir d’un système contre-productif opposant université et classes préparatoires/grandes écoles.

Si les universités doivent voir leur rôle propre renforcé pour tendre à devenir des partenaires à part entière des organismes nationaux de recherche, ceux-ci doivent être réinstallés dans leur rôle majeur d’opérateurs de recherche : ils restent pertinents dans leur capacité à impulser et à mettre en cohérence les activités de recherche à l’échelle nationale, les diverses alliances ayant vocation à se limiter à une coordination souple et non institutionnalisée.

L’unité de base de la recherche reste un laboratoire, souvent une Unité mixte. Plutôt que de mettre en place de lourdes structures institutionnelles intervenant dans tous les domaines (projets de recherche mais aussi bâti, formation…), il faut privilégier une logique de réseaux de coopération scientifique conjuguant financement propre et mutualisation concertée. Les Labex récemment créés devront se conformer à cette logique et en aucune manière se substituer aux unités de recherche.

La loi appelée à remplacer la LRU devra assurer la représentation directe et majoritaire des personnels et étudiants dans toutes les instances de décision, dans les établissements d’ES, leurs structures de fédération ou les organismes. Il n’est pas d’autonomie de gestion s’il faut gérer la pénurie. L’autonomie n’a de sens que pour se mettre au service de la pédagogie et de la recherche. Une dimension de programmation budgétaire pluriannuelle est donc indispensable au futur texte de loi, accompagné de mécanismes assurant la bonne prise en compte des évolutions de la masse salariale.

Le système des classes préparatoires est à la fois coûteux, générateur de souffrance pour de trop nombreux jeunes, et facteur de reproduction des inégalités sociales. Il faut mettre fin à cette singularité française en sachant prendre le meilleur dans chaque filière : l’encadrement pédagogique doit être plus large et plus disponible et les enseignements à caractère pluri-disciplinaires pleinement intégrés aux cursus. Le remplacement des concours d’entrée aux « grandes écoles » par une sélection sur dossier rendra la notion même de classe préparatoire obsolète. Les écoles devraient systématiquement être intégrées à des universités structurées de manière confédérale : elles y conserveront leur autonomie pédagogique, mais la mutualisation avec les cursus de Master pourra ainsi se développer, avec un effet positif sur l’accès à la recherche. La tutelle de l’ensemble des formations du supérieur doit revenir au MESR, afin de permettre une action cohérente sur les différentes filières.

Malgré tous les effets d’annonce des Initiatives d’Excellence (Idex), le gain budgétaire promis aux lauréats reste si faible (260 M€/an pour les huit projets réunis !) qu’il pourraient facilement être compensé par une loi de programmation budgétaire – pour peu qu’elle soit ambitieuse. En outre, les Idex souffrent de défauts originels rédhibitoires : leur mode de préparation et de gouvernance anti-démocratique et leurs périmètres réduits. En cela, ils s’opposent à toute logique désirable de coopération et d’ouverture. Quant à la structuration de site, elle est parfaitement réalisable à travers des PRES revisités. Les Idex doivent donc être supprimés.

Les autres innovations introduites dans le cadre des Investissements d’avenir sont à examiner au cas par cas. Les SATT (Sociétés – de droit privé – d’accélération du transfert de technologies) complexifient encore le paysage institutionnel du soutien à l’innovation : elles devraient être abandonnées ; certains IRT (Instituts de recherche technologique) pourraient en revanche mériter d’être confortés si tant est qu’ils permettent au pays d’avancer vers les développements technologiques nécessaires à la transition écologique. Il faut prendre acte des équipements d’excellence (Equipex) financés en veillant à ce qu’ils ne phagocytent pas les moyens de leurs structures d’accueil.

La politique nationale de l’ESR ne doit laisser aucun territoire ou population à l’écart. Dans l’acte III de la décentralisation, la compétence ESR doit devenir partagée entre un niveau national restant prépondérant et un niveau régional complémentaire, parfaitement adapté à l’accompagnement des projets d’intérêt général proposés par les acteurs locaux ou à la gestion du bâti universitaire. Cette dévolution de compétence aux régions devra s’accompagner des transferts financiers appropriés et de la création d’un système de péréquation entre régions riches et moins riches. L’Île-de-France – plus de 40% des forces vives de la recherche – représente à l’évidence un cas extrême qui appelle un traitement spécifique. Dans le cadre du « Grand Emprunt », le seul milliard d’euros directement consommable a été attribué au projet Saclay de façon régalienne. Cette somme pourrait être remise dans un pot commun dont la gestion serait assurée conjointement par l’Etat et le conseil régional d’Île-de-France, pour des projets d’ESR répartis dans les divers territoires franciliens.

L’évaluation de toute activité financée sur fonds publics est légitime ; encore faut-il que les évaluateurs soient eux-mêmes reconnus comme légitimes par leurs pairs et que leurs évaluations visent à l’amélioration hors de tout jugement lapidaire. L’Aéres, au coût démesuré et qui ne répond à aucun de ces critères, doit être supprimée. L’évaluation des organismes et des universités pourrait être confiée à un HCST rénové et opérationnel (avec une participation étudiante sur les questions touchant à l’enseignement supérieur) ; et aux niveaux institutionnels inférieurs, les organismes nationaux de recherche savent convoquer les comités d’évaluation appropriés.

 

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Concevoir le nouveau paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/09/18/concevoir-le-nouveau-paysage-de-lenseignement-superieur-et-de-la-recherche/ https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/09/18/concevoir-le-nouveau-paysage-de-lenseignement-superieur-et-de-la-recherche/#comments Tue, 18 Sep 2012 17:48:29 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2489 Contribution de EELV aux Assises de l’ESR – Septembre 2012 – Thématique 3 Concevoir le nouveau paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche

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Les réformes menées ces dernières années ont abouti à une complexification inédite du paysage de l’ESR français, avec pour conséquences principales une dépossession des attributions des instances comprenant une proportion importante d’élus et pour les équipes de recherche la course permanente à des financements de trop court terme pour autoriser des recherches audacieuses. Il est urgent de redonner une lisibilité à notre système d’ESR en le simplifiant, d’améliorer la dimension collégiale de son fonctionnement, et de sortir d’un système contre-productif opposant université et classes préparatoires/grandes écoles.

Une réorganisation et une simplification nécessaires

Notre système d’enseignement supérieur aboutit à une reproduction des élites qui repose largement sur la filière classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) – Grandes écoles très largement à l’écart du système universitaire. Cette dualité est un handicap majeur pour le dynamisme de la société française. Ne pas s’y attaquer serait une erreur monumentale.

Pour cela, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche doit voir ses prérogatives élargies de manière à être le lieu de décision pour l’ensemble du supérieur, et pas seulement pour le monde académique. La tutelle des classes préparatoires aux grandes écoles – CPGE et celle de l’ensemble des « grandes écoles » lui seront donc confiées (les tutelles d’autres ministères renvoient à une époque où chaque école formait les cadres desdits ministères, un temps plus que révolu), et les procédures d’habilitation des écoles privées seront revues pour assurer une meilleure coordination.

Les Pôles de recherche et d’enseignement supérieur (Pres) créés dans le cadre de la loi de programmation de 2006 ont ouvert des pistes intéressantes. Sont autorisées des mutualisations entre établissements qui peuvent à la fois être souples et adaptées aux contextes locaux. Les Pres fournissent un cadre certes imparfait – notamment sous statut d’EPCS imposé par le MESR dans le cadre du plan campus : statut anti-démocratique, risques de coupure enseignement / recherche, de « balkanisation » des licences, particulièrement lors des liens avec les IDEX – ; mais qui sous réserve d’aménagements peut se prêter aux nécessaires rapprochements entre classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) et universités, de même qu’à l’intégration progressive des écoles, « grandes » ou moins prestigieuses. Les PRES pourraient donc être revisités et réorientés vers des actions de rapprochement profitables à tous, dans un cadre universitaire qui constitue la référence universelle en matière d’enseignement supérieur.

La multiplicité des structures créées depuis 2006 a cependant abouti à un paysage où la complexité confine désormais à l’illisibilité. Simplifier est donc un impératif incontournable. Mais cela ne peut se faire par l’imposition top-down de la création de méga-établissements dont le projet d’université de Paris-Saclay n’est que l’avatar le plus caricatural et dont l’objet commun – faire monter des universités françaises dans le classement de Shanghai (qui avec ses paramètres ne mesure que ce qu’il peut mesurer) – n’a rien à voir avec la qualité des formations prodiguées. Rappelons enfin que le système français de recherche continue de figurer parmi les plus performants au monde et que le principal organisme français de recherche, le CNRS, demeure une référence internationale.

Les superstructures nées ou à naître dans le cadre des « Investissements d’avenir » de la présidence Sarkozy sont à revoir. En particulier, les huit Idex (Initiatives d’excellence) retenues ne peuvent tenir lieu de politique soutenable en matière d’ESR. Outre les dérives insupportables constatées par exemple à Toulouse, tous les Idex souffrent peu ou prou de la définition d’un périmètre d’excellence (« péridex ») qui aboutit à laisser de côté une grande part des forces vives de recherche et d’enseignement des établissements impliqués. Autre perversion induite par le système, le transfert automatique et durable d’une fraction importante des ressources attribuées par le ministère aux établissements parties prenantes vers une partie restreinte de leurs acteurs. Et cela au moment où nombre d’universités sont déjà en très grande difficulté financière. Puisque par ailleurs des régions entières sont restées sans lauréats aux deux phases de sélection des Idex, et que même au sein des régions mieux pourvues, les exclus sont majoritaires, il apparaît indispensable de revenir sur le principe même de cette politique. La signature des conventions Idex doit donc être suspendue.

Les autres innovations introduites dans le cadre des Investissements d’avenir sont à examiner au cas par cas. Les Equipex sont issus d’un travail du terrain, et devraient à ce titre être financés. En revanche certains grands projets financés au titre des investissements d’avenir seront gelés et leur pertinence remise en débat : ITER, ASTRID (conférence de citoyens?). Les Labex apparaissent d’abord comme un outil de déstructuration, et les financements au final assez modestes. Ils seront supprimés en temps que structures, la dotation correspondante étant distribuée aux organismes afin d’assurer la continuité des travaux éventuellement engagés. Les Unités mixtes de recherche (UMR) doivent être confortées dans leur forme actuelle, ayant comme tutelles au moins une université et un organisme national de recherche.

Les moyens dédiés aux Idex et au plan campus feront l’objet d’une remise à plat globale, dans le cadre de la définition d’universités confédérales de dimension régionale. La création des fondations (FCS) prévues, et notamment celles liées à certains projets d’Idex, sera également suspendue. Les SATT (Sociétés – de droit privé – d’accélération du transfert de technologies), outils de mise en concurrence et de pilotage de la recherche et de l’enseignement par l’industrie, doivent être abandonnées ; certains Instituts de recherche technologique – IRT pourraient en revanche mériter d’être confortés si tant est qu’ils permettent au pays d’avancer vers les développements technologiques nécessaires à la transition écologique. Il faut prendre acte des équipements d’excellence (Equipex) financés en veillant à ce qu’ils ne phagocytent pas les moyens de leurs structures d’accueil.

Des moyens sur la durée : la clé de la réussite

Un audit global de l’ensemble des lignes de la Mission interministérielle recherche enseignement supérieur (MIRES) devra être immédiatement lancé afin d’y voir enfin clair sur l’état réel des comptes publics après des années de voltige budgétaire et d’annonces jamais suivies d’effets.

Un financement pérenne majoritaire, et des postes permanents, en enseignement comme en recherche, sont indispensables. Le financement sur projets, qui a pris en recherche ces dernières années des proportions insupportables, induisant une lourdeur de gestion et une précarité croissantes, doit être ramené à un niveau minoritaire. Ces appels à projets devront prioritairement financer des axes de recherche en direction de la reconversion écologique de la société.

Ces moyens peuvent être obtenus sans impacter le budget de l’Etat, par une réforme du Crédit d’impôt recherche (CIR). Si son intérêt est réel pour la recherche dans les PME, sa forme actuelle donne aussi aux grands groupes un effet d’aubaine énorme qui ne profite en rien à la production ou à l’emploi scientifique du pays. Il convient de plafonner le CIR à un montant de quelques millions d’euros par groupe ou holding, de le conditionner fortement au recrutement de docteurs, et d’introduire une modulation de son montant en fonction de l’adéquation des projets engagés avec la transition écologique.

Certaines mesures pourront ainsi être mises en œuvre immédiatement :

  • création de plusieurs centaines de postes statutaires, autant pour les enseignants, enseignants-chercheurs et chercheurs que les personnels Biatoss, marquant le démarrage d’un plan de résorption de la précarité qui s’étendra sur la mandature (5.000 postes), la progressivité étant nécessaire pour assurer la richesse du vivier de recrutement et limiter les effets d’accordéon démographique. Les crédits prévus pour des CDD pourront être réaffectés au financement de cette mesure, en réduisant considérablement la portée budgétaire ;

  • réévaluation des dotations récurrentes des organismes de recherche compensant les diminutions des budgets 2011 et 2012 (et d’ors et déjà annoncées pour 2013…) ;

  • retour d’une partie des crédits non engagés vers les établissements et organismes, amorçant ainsi la décrue des montants gérés par cette agence, le reliquat des crédits devant être réservé à des recherches réellement émergentes (projets blancs bottom up) ou pour lesquelles existent encore des lacunes thématiques au niveau national (santé – environnement, biodiversité, études sur les rapports sociaux de sexe, écotoxicologie, systèmes complexes, énergies renouvelables…), et permettant le financement de projets de taille modeste, au suivi administratif allégé ;

  • transformation des diverses « Primes » non encore attribuées en augmentation du nombre de promotions dans les différents échelons, et revalorisation des salaires (perte de 10% de pouvoir d’achat en 10 ans dans la fonction publique).

L’ESR en lien avec les territoires, des Régions à l’Europe

La politique de l’ESR telle qu’elle sera issue de la future loi devra à l’évidence s’inscrire en cohérence avec la nouvelle étape de décentralisation prévue par le programme du Gouvernement. D’ores et déjà, les régions et un certain nombre d’autres grandes collectivités territoriales ont anticipé le mouvement en s’impliquant en matière d’ESR dans le cadre de leur clause générale de compétence qu’il faut confirmer. Parfaitement illustratif est le rôle croissant des collectivités, au premier rang desquelles les régions, dans le financement des opérations inscrites dans les CPER successifs et en particulier dans les derniers Contrats de projets Etat-Régions 2007-2013. Dans l’acte III de la décentralisation, la compétence ESR doit devenir partagée entre le niveau national qui restera prépondérant (grands organismes nationaux et des diplômes définis nationalement) et le niveau régional complémentaire qui est parfaitement adapté à l’accompagnement des projets d’intérêt général proposés par les acteurs locaux ou à la gestion du bâti universitaire. Il va de soi que cette nouvelle compétence qui sera reconnue aux régions par la loi doit s’accompagner de l’assurance de recettes nouvelles et pérennes et de la création d’un système de péréquation entre régions riches et moins riches, faute de quoi seules les premières seraient en mesure d’intervenir dans ces secteurs essentiels pour l’avenir du pays.

C’est également ce qu’exige la politique d’équilibre entre les territoires affichée dans la structure même du Gouvernement (Ministère de l’égalité entre les territoires attribué à Cécile Duflot). L’Île-de-France où travaillent plus de 40% des forces vives de la recherche française représente à l’évidence un cas extrême qui appelle un traitement spécifique. En matière d’ESR, l’engagement du Conseil régional d’Île-de-France est budgétairement limité. Dans cette région comme partout ailleurs, une politique équilibrée de l’ESR est indispensable pour ne pas laisser des populations et des territoires entiers à l’écart du mouvement. Dans le cadre des 20 et quelques milliards du « Grand emprunt Sarkozy » destinés à soutenir l’ESR, le seul milliard d’euros directement consommable a été attribué au projet Saclay, hors jury et de façon totalement régalienne. Ce projet pharaonique a par ailleurs été sélectionné au titre du plan campus et de très nombreux appels à projets dans le cadre des Investissements d’avenir. Ce milliard d’euros cash sera utilement remis dans un pot commun dont la gestion sera déléguée au conseil régional d’Île-de-France pour des projets d’ESR équilibrés entre les divers territoires de l’ESR francilien.

Les financements européens de la recherche ont pris ces dernières années une place croissante, en particulier avec la montée en puissance du Conseil européen de la recherche. Ce qui se prépare dans le cadre du programme Horizon 2020 (le plan qui remplacera les anciens PCRD pour la période 2014-2020) devrait être plus largement discuté au sein des diverses instances françaises, qui en matière d’ESR comme du reste se tiennent encore trop éloignées des discussions européennes. La dimension européenne de la recherche, l’encouragement à la libre circulation des acteurs européens de la recherche, doivent devenir prioritaires et affichés, y compris chez les plus jeunes chercheurs, dès leur formation doctorale.

Des établissements réellement autonomes,
au fonctionnement démocratique renforcé

La loi sur les Libertés et responsabilités des universités (LRU) est à remplacer. Elle n’a en aucune manière apporté aux universités l’autonomie qu’abusivement elle prétendait leur conférer, elle a au contraire généré une bureaucratisation au détriment du service aux usagers, et ne leur a guère permis que de de gérer la pénurie. L’abrogation pure et simple de la loi LRU créerait, sur le plan légal et pratique, autant de difficultés qu’elle en résoudrait : une large partie de cette loi n’en est pas moins inacceptable et une réforme en profondeur est donc indispensable. Cette nouvelle loi devra être préparée avec la contribution de l’ensemble du monde académique, des étudiants et de la société. Dans l’intervalle, les dévolutions de patrimoine seront suspendues.

Dans son essence, l’autonomie des établissements d’enseignement supérieur est à promouvoir. Une autonomie qui autorisera enfin le déploiement de politiques d’établissement créatives, innovantes, au service de l’ensemble des usagers de ce service public de l’enseignement supérieur que nous appelons de nos voeux. Il faut pour cela une réforme d’ampleur du mode de financement de l’enseignement supérieur en France, afin d’amener le financement moyen par étudiant et le taux d’encadrement (pédagogique comme administratif) au niveau des pays comparables les plus performants, et d’engager une politique sociale ambitieuse permettant à tous les jeunes de réussir, quelle que soit leur origine sociale.

Afin de remettre le fonctionnement démocratique au coeur des pratiques académiques, l’ensemble des conseils d’administration, des études et de la vie étudiante, et scientifiques de toutes les structures d’enseignement ou de recherche rattachées au MESR ou de structures les intégrant (Pres notamment) devront comporter au minimum un tiers d’élus direct. Les alliances ont été mises en place au nom des vertus de la coordination inter-établissements, mais elles sont surtout un moyen de limiter le rôle des scientifiques élus et de donner plus de poids à la finalisation des recherches. Elles seront donc dissoutes pour être transformées en structures légères de coordination scientifique.

L’évaluation de toute activité financée sur fonds publics est non seulement légitime mais désirable afin d’en améliorer l’efficacité. L’évaluation des organismes et des universités pourrait être confiée à un HCST rénové et opérationnel. Du fait du mode international de fonctionnement de la recherche, les activités des chercheurs sont soumises à évaluation quasi permanente, qu’il s’agisse de publier ses résultats, d’obtenir des contrats pour développer ses recherches, d’être recruté ou promu. Dans le monde entier, ce sont les pairs qui procèdent à l’évaluation, et ces pairs doivent être reconnus par ceux qui seront évalués. Un mix d’évaluateurs élus et nommés reste la meilleure solution pour la constitution des comités d’évaluation. Celle-ci est formalisée dans le cadre des organismes nationaux de recherche qui en France emploient les chercheurs. Pour les enseignants-chercheurs dont les missions à l’université sont plus diverses, la situation est nécessairement plus complexe. La part recherche doit être évaluée par des pairs selon des procédures adaptées à la diversité de leurs activités. En revanche, l’évaluation de leurs enseignements appelle à d’autres procédures, l’avis des étudiants devant être pris en compte. En toute hypothèse, l’Aéres (Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur), au coût démesuré pour la collectivité et qui n’a nullement fait la preuve de sa valeur ajoutée, doit être soit supprimée, soit très largement restreinte dans ses missions, ses champs d’intervention et son coût de fonctionnement.

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https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/09/18/concevoir-le-nouveau-paysage-de-lenseignement-superieur-et-de-la-recherche/feed/ 1
Réponse d’Eva Joly au mensuel du SNESUP – FSU https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/02/28/reponse-deva-joly-au-mensuel-du-snesup-fsu/ https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/02/28/reponse-deva-joly-au-mensuel-du-snesup-fsu/#comments Tue, 28 Feb 2012 18:31:14 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2411 Envisagez-vous  l’abrogation de la loi LRU ? Par quelles mesures immédiates et à  plus long terme, engagez-vous un changement de cap garantissant un fonctionnement des établissements fondé sur une collégialité  démocratique et assurant aux universités et laboratoires des financements d’Etat stables et pérennes ?

Je m’engage à associer autonomie et démocratie dans l’enseignement supérieur. La LRU et le pacte pour la recherche seront remplacés par un texte fondé sur les conclusions d’Etats Généraux de l’ESR, ouverts sur la société. Ce texte devra réaffirmer et installer les principes de collégialité propres à l’Université, et les généraliser aux structures fédératives régionales qui permettront d’accélérer la résorption du clivage entre Universités et Ecoles. Le statut dérogatoire de Grand Etablissement sera supprimé. Les moyens du Grand Emprunt seront reconvertis en crédit budgétaires, et l’ANR ne conservera qu’une fraction de son budget actuel, réservé aux actions fortement pluridisciplinaires ou relevant de thématiques prioritaires décidées lors d’un débat démocratique. L’AERES sera supprimée, les évaluations étant conduites par des comités élus aux 2/3 au moins et respectant la diversité des productions scientifiques.

Pour  rompre  avec  le  processus   inégalitaire  actuel des Idex, Labex,…,   quelles   mesures   institutionnelles   et  quels  moyens budgétaires  (y compris en emplois) comptez-vous mettre en oeuvre, dès la  prochaine  rentrée,  pour assurer un développement  équilibré sur l’ensemble du territoire du service public d’enseignement supérieur et de recherche ? Quels  sont  les  objectifs qui seront assignés à ce service public ?

Le système public de l’ESR doit produire et transmettre les connaissances, en toute indépendance et sur l’ensemble du territoire. Avec les écologistes, je veillerai à conserver un maillage complet, fondé sur des regroupements d’universités ou des structures fédérales démocratiques, tous dotés de moyens fondés sur l’évaluation contradictoire de leurs besoins. L’association des cycles Licence, Master et Doctorat sera réaffirmée, le statut des IUT garanti par la loi. Une loi de programmation budgétaire pour le quinquennat intégrera une augmentation d’1 G€ par an du budget du MESR. Le statut de fonctionnaire n’est pas seulement une garantie du service public, il est aussi un atout pour la qualité du travail de recherche et son indépendance : 5000 postes seront crées chaque année pour résorber la précarité.

Comptez-vous abroger la « réforme » de la formation des enseignants ? Quelles mesures pensez-vous prendre pour engager, dès la rentrée 2012, une   tout   autre   réforme   associant   une   véritable   formation professionnelle  à  une formation  universitaire en s’appuyant sur le potentiel des IUFM et des UFR ?

La réforme actuelle impose un véritable parcours d’obstacles et crée les conditions d’une pénurie du recrutement. Il faut refonder totalement l’entrée dans le métier, en articulant étroitement concours, formation initiale et formation continue. EELV propose trois types de concours : le premier aura lieu après la licence et ouvrira sur deux années de formation professionnelle en alternance débouchant sur un mastère. Le deuxième type sera ouvert aux candidats déjà titulaires d’un mastère et le troisième à ceux qui auront une expérience professionnelle reconnue par la Validation des Acquis de l’Expérience : ils donneront droit à une année de formation débouchant sur un mastère d’enseignement et une titularisation. C’est en proposant du temps de formation après le concours que les nouveaux enseignants pourront réellement analyser leurs pratiques, s’initier aux différentes facettes du métier, rencontrer tous les acteurs éducatifs et s’initier à une authentique démarche de recherche.

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