Liberté – Site de la commission recherche et enseignement supérieur https://recherche-enseignementsup.eelv.fr Les analyses et proposition de EELV sur l'ESR Mon, 16 Sep 2013 17:25:21 +0200 fr-FR hourly 1 Réponse d’Eva Joly à l’Association Française d’Economie Politique https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/03/31/reponse-deva-joy-a-lassociation-francaise-deconomie-politique/ https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/03/31/reponse-deva-joy-a-lassociation-francaise-deconomie-politique/#comments Sat, 31 Mar 2012 15:45:07 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2443 Eva JolyVoir le site de l’Association Française d’Economie Politique

Paris, le 30 mars 2012

Monsieur le Président,

La crise financière et ses conséquences sur l’économie réelle affectent le quotidien de milliards d’êtres humains, et les ravages de l’idéologie libérale sur les sociétés et sur l’environnement se font toujours plus patents. De toute évidence, l’orthodoxie économique contemporaine, fondée sur le libre-échange, la financiarisation et le monétarisme, n’a pas permis d’anticiper ces crises et a même contribué à leur venue. La nécessité d’explorer d’autres modèles de développement et d’autres représentations de l’économie devrait donc aller de soi.

Or, force est de constater que depuis de longues années, un mouvement régulier de sélection est à l’oeuvre au sein du monde académique dans le champ des sciences économiques. L’obsession de l’évaluation individuelle et quantitative des travaux et publications, tout comme la priorité de l’agrégation externe dans l’accès au passage au grade de professeur, conduisent à privilégier les universitaires et chercheurs qui s’inscrivent dans une approche orthodoxe de l’économie. Le résultat est une marginalisation de fait des autres courants de pensée.

Je considère que la communauté scientifique a vocation à constituer un véritable contre-pouvoir. Cela n’est possible que si les scientifiques sont eux-mêmes indépendants de tous les pouvoirs, politiques ou financiers. Le statut de fonctionnaire et le caractère majoritairement récurrent des financements sont des garanties nécessaires – non nécessairement suffisantes – à cette indépendance. Mais la communauté doit également être suffisamment diverse pour que les débats en son sein irriguent pleinement le débat public.

La diversité, la confrontation des approches, sont nécessaires à toute science. L’économie ne peut se limiter à être une science prescriptive où la réalité doit s’adapter aux hypothèses des modèles : elle doit comme toute science confronter ses résultats aux faits, et savoir remettre en cause les fondements de ses modèles si nécessaire. La pluralité des approches est au coeur de ce processus.

Pour préserver cette pluralité en matière de sciences économiques, plusieurs solutions sont envisageables : suppression des agrégations externes – une évolution d’autant plus nécessaire qu’elle permettrait l’harmonisation des déroulements de carrière entre les différentes sections CNU ; réforme de la désignation des membres du CNU ; ou encore création d’une nouvelle section CNU.

Ces 3 actions ne sont d’ailleurs pas exclusives les unes des autres. Alors que l’avenir des agrégations du supérieur est actuellement l’objet de marchandages indignes avec le ministère de l’enseignement supérieur, il faut au contraire qu’un débat ouvert et transparent ait lieu sur ce sujet. Il devrait en toute logique avoir lieu à l’occasion des Etats Généraux de l’ESR que nous souhaitons convoquer à l’issue de la séquence électorale de ce printemps, pour préparer avec toute la communauté académique et toute la société une loi-cadre refondant les structures de l’enseignement supérieur français.

En espérant avoir répondu à vos interrogations, je vous prie d’agréer mes sincères salutations.

Eva Joly

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EELV déplore une nomination politique à la tête de l’ANR et demande une réforme en profondeur https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/01/28/eelv-deplore-une-nomination-politique-a-la-tete-de-lanr-et-demande-une-reforme-en-profondeur/ https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2012/01/28/eelv-deplore-une-nomination-politique-a-la-tete-de-lanr-et-demande-une-reforme-en-profondeur/#comments Sat, 28 Jan 2012 12:02:46 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2373 La nomination de Pascale Briand à la direction de l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) et sa lettre de mission démontrent que le gouvernement est décidé à maintenir le financement de la recherche sous un strict contrôle politique. Europe Ecologie – Les Verts s’indigne de cette défiance vis-à-vis de la communauté scientifique et rappelle son engagement de redonner la primauté aux financements récurrents via les organismes de recherche et les universités, et de réformer profondément l’ANR.

EELV s’inquiète de la volonté manifeste du gouvernement d’intervenir dans les choix scientifiques et techniques, tout en les maintenant hors de tout débat démocratique. L’opacité des sélections opérées dans le cadre des Investissements d’avenir (LabeX, IdeX et IHU) masquait déjà mal des considérations politiciennes. Il y a quelques semaines, un pas a été franchi avec la suspension arbitraire du programme ANR consacré à la santé environnementale, qui finançait des travaux susceptibles de déranger certains industriels de la chimie.

Dans ce contexte, la nomination de Mme Briand a de quoi inquiéter : à la tête de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) de 2005 à 2009, elle a longuement bloqué le dossier du bisphénol A malgré les alertes répétées. Si ses compétences scientifiques ne sont pas en cause, sa qualité d’ancienne élue UMP explique peut-être ce fâcheux précédent et révèle clairement une volonté gouvernementale de maitrise politique de l’ANR. EELV sera particulièrement attentif à son action – ou son inaction – sur le dossier de la santé environnementale.

La généralisation du financement sur projets mis en place par la droite prive de moyens des pans entiers de la recherche et fait crouler les autres sous des montages de dossiers. Pour garantir l’indépendance des chercheurs et faciliter leur activité, EELV s’engage à redonner la priorité aux financements récurrents et à réformer en profondeur l’agence de financement. Celle-ci sera cantonnée à des missions bien circonscrites : accélérer l’émergence de projets très novateurs et dynamiser le financement de thèmes prioritaires. Ces derniers seront mis en débat dans la société et au parlement, dans le cadre de l’évolution vers une véritable démocratie scientifique.

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Circulaire Guéant sur les jeunes diplômés étrangers : le dogme de l’immigration zéro passe avant l’économie et la recherche https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2011/11/03/circulaire-gueant-sur-les-jeunes-diplomes-etrangers-le-dogme-de-limmigration-zero-passe-avant-leconomie-et-la-recherche/ Thu, 03 Nov 2011 17:37:04 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2348 Communiqué de presse du 3 novembre 2011

En renonçant à demander tout aménagement de la circulaire du ministère de l’Intérieur du 31 mai sur la transformation des permis de séjour d’étude en permis de travail, Laurent Wauquiez, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, a confirmé que pour le gouvernement, la seule vraie priorité est le dogme de l’immigration zéro – et il a mangé son chapeau au passage.

Saisi par le collectif du 31 mai, interpellé par Europe Ecologie Les Verts et les partis de gauche, le ministre semblait avoir pris la mesure de l’absurdité de la situation en déclarant le 6 octobre que la circulaire devait être « corrigée ». En effet, alors que la France se veut hautement attractive pour les jeunes étudiants étrangers, la circulaire de Claude Guéant a de facto pour conséquence d’empêcher tout jeune diplômé de travailler en France à l’issue de sa formation. Le débat semblait traverser tout le gouvernement, Valérie Pécresse s’étant elle aussi émue de la situation. Il faut dire que les milieux économiques ont largement fait part de leur opposition à cette mesure. Mais rien n’y a fait : finalement, la ligne xénophobe l’emporte une fois de plus. Il n’y aura ni retrait, ni même aménagement de la circulaire.

Or cette circulaire est d’autant plus absurde que les étudiants étrangers rencontraient déjà d’énormes obstacles pour obtenir le statut salarié. En plus de la recherche d’emploi, il leur faut permettre à l’entreprise de justifier de son choix d’embaucher un étranger après plusieurs mois de recherche d’un profil français capable de remplir la même mission. Dans ces conditions, seules les entreprises ayant réellement besoin d’un profil spécifique embauchent un diplômé étranger. Ces difficultés ne sont pas limitées au monde de l’entreprise : elles affectent également durement les chercheurs étrangers, dont les compétences sont très recherchées mais qui peinent à assurer la jonction entre leur soutenance de thèse française et un éventuel futur poste dans le public ou privé.

EELV déplore la volte-face de Laurent Wauquiez et renouvelle son appel au retrait immédiat de cette circulaire. Les étudiants étrangers, qu’ils retournent dans leur pays d’origine ou s’établissent temporairement ou définitivement en France, participent tous au rayonnement de notre pays. Ils sont un atout pour nos universités, notre économie et notre culture, et certainement pas un fardeau ou une menace.

Pascal DURAND, Porte-parole EELV

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Convention nationale EELV ESR : un succès et de nombreuses propositions https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2011/10/17/convention-nationale-eelv-esr-un-succes-et-de-nombreuses-propositions/ Mon, 17 Oct 2011 19:59:19 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2324 (Photo : les organisateurs de la convention ESR EELV avec Philippe Meirieu et Eva Joly (tous droits réservés)) ...]]>

(Photo : les organisateurs de la convention ESR EELV avec Philippe Meirieu et Eva Joly (tous droits réservés))

Près de 150 personnes ont participé aux débats organisés par EELV à Lyon le samedi 1er octobre dans le cadre de la convention nationale « Des régions à l’Europe : perspectives pour reconstruire l’enseignement supérieur et la recherche ». Etudiants, personnels, responsables d’université, syndicalistes ou simples citoyens intéressés par les questions de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR), ils sont venus débattre des propositions présentées par EELV pour 2012.

Après la plénière d’ouverture consacrée aux évolutions en cours dans l’enseignement supérieur et la recherche en France et en Europe, la journée s’articulait en 5 ateliers, chacun préparé à l’aide de notes préalablement diffusées et bénéficiant de l’éclairage de « grands témoins ». Ainsi, les débats ont-ils dépassé les simples principes pour aller au fond des questionnements et aborder des mesures précises :

  • Favoriser l’accès et le succès du plus grand nombre dans le supérieur, en mettant en place un revenu étudiant, en refusant résolument la hausse des droits d’inscription, en construisant 10 000 places de logement étudiant par an, en révisant la pédagogie des premiers cycles et en développant la pluridisciplinarité
  • Sortir des logiques d’élitisme en rapprochant activement universités et écoles au sein de structures ancrées régionalement, en multipliant les années de transition entre filières, en ramenant progressivement les classes préparatoires vers l’université
  • Garantir l’indépendance de la recherche, en rompant avec la logique de la prétendue excellence et son hyper-concentration des moyens pour retrouver une pérennité des financements, en résorbant la précarité et en remettant la collégialité au coeur du fonctionnement de l’ESR (remplacement de la loi LRU, suppression de l’Aéres et retour à une évaluation par les pairs)
  • Développer les échanges entre sciences et société, en mettant en débat les grandes orientations de recherche, en finançant les travaux associant scientifiques et associatifs, en créant des boutiques de science pour répondre aux questions des citoyens, en valorisant le doctorat dans la fonction publique et les conventions collectives
  • Favoriser l’innovation écologique en diminuant drastiquement le crédit d’impôt recherche, en conditionnant les aides aux entreprises innovantes, en développant des mécanismes novateurs de soutien aux projets (concours…), en faisant évoluer les pôles de compétitivité vers des pôles de coopération recentrés sur les PME/PMI.

Les attentes d’une communauté ESR malmenée par les réformes des dernières années étaient palpables. Les propositions déjà formulées par EELV ont été particulièrement bien reçues. D’autres ont émergé, qui vont maintenant être intégrées au projet 2012 des écologistes.

Lors de la plénière de conclusion, Eva Joly a souligné l’importance qu’elle attache à la formation des jeunes et à l’Université, ainsi qu’à la nécessaire indépendance des scientifiques, ceux-ci devant avoir les moyens d’être « de véritables contre-pouvoirs ». Elle a pointé la nécessité de « redonner confiance à la communauté de l’enseignement supérieur et de la recherche » par une politique fondée sur la concertation avec les acteurs de l’ESR, à l’opposé des bouleversements autoritaires et des mensonges budgétaires du gouvernement.

Plénière de clôture : les vidéos


Plénière de clôture : intervention de Philippe Meirieu


Plénière de clôture : intervention de Eva Joly

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Contre l’instrumentalisation des chercheurs, pour une recherche plurielle à l’INRA https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2011/10/13/contre-linstrumentalisation-des-chercheurs-pour-une-recherche-plurielle-a-linra/ Thu, 13 Oct 2011 18:08:48 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2317 Communiqué de presse du 13 octobre 2011

Europe Ecologie Les Verts dénonce l’instrumentalisation de son personnel à laquelle se livre la direction de l’INRA à la veille du verdict du procès du fauchage de l’essai de vigne OGM de Colmar qui doit être rendu le 14 octobre 2011. Non seulement elle incite les chercheurs à aller assister au verdict, mais elle exige que chacune et chacun signale son intention de se rendre sur place. Ces pratiques frôlant le fichage d’opinion sont inadmissibles, particulièrement dans un organisme de recherche public. La pluralité des points de vue et la libre confrontation des idées sont pourtant des préalables à la qualité de la recherche.

L’INRA est hélas singulièrement connue pour sa difficulté à adopter une pluralité des points de vue, privilégiant depuis toujours une approche industrielle de l’agriculture fondée sur la chimie et les manipulations du vivant au détriment des recherches sur l’agriculture biologique. L’agro-écologie reste désespérément le parent pauvre de l’INRA, tandis que des millions d’euros sont investis chaque année dans les biotechnologies, à la grande satisfaction des multinationales de l’agro-chimie et des industriels de l’alimentation. L’essai OGM de Colmar, tout paré de concertation qu’il ait pu être, n’en restait pas moins la marque de l’obsession de la direction actuelle de l’INRA vis-à-vis des OGM.

Dans une société de plus en plus complexe, où la technologie joue un rôle sans précédent, il faut donner à la recherche les moyens de redevenir un véritable contre-pouvoir. EELV propose d’ailleurs de mettre en place un véritable statut de protection des lanceurs d’alerte. Pour garantir l’indépendance des chercheurs, il faut des moyens financiers récurrents et des postes stables, ce qui évite les tentatives de pression des tutelles et donne le temps de développer des travaux réellement innovants et de dialoguer avec la société. C’est hélas l’exact contraire de la politique gouvernementale actuelle, basée au nom de l’excellence sur la précarisation humaine et budgétaire.

Europe Ecologie Les Verts

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Convention Lyon 2011 – Préparation aux débats https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2011/09/22/convention-lyon-2011-preparation-aux-debats/ Thu, 22 Sep 2011 16:46:29 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2142 Dans le cadre de notre convention nationale « Des régions à l’Europe : perspectives pour reconstruire l’enseignement supérieur et la recherche », nous soumettons un certains nombre de textes préparatoires aux débats que nous aurons le 1er Octobre à Lyon.

Vous serez présent le 1er octobre ? Prenez-en connaissance pour préparer les débats !
Vous ne pouvez pas être des nôtres ? N’hésitez pas à nous faire des remarques, propositions… en nous contactant par mail !

 Au programme de la convention

 

 

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Convention ESR – EELV – Lyon 1er octobre 2011 https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2011/09/18/convention-esr-%e2%80%93-eelv-lyon-1er-cotobre-2011/ Sun, 18 Sep 2011 15:53:46 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2008 Samedi 1er Oct 2011 de 10h à 18h (accueil à 9h30) – Université Lumière Lyon II, site des quais, quai Claude Bernard, Lyon, amphi Aubrac (tram T1 – arrêt Rue de l’Université)

Partout dans le monde, l’enseignement supérieur et la recherche connaissent des bouleversements majeurs. En France, les textes réglementaires (LRU) et les multiples structures (ANR, AERES, LABEX, IDEX… – la liste ne semble pas avoir de fin) mis en place par la droite participent tous d’une même logique : remplacer la collégialité par une gouvernance managériale, concentrer les moyens sur quelques sites et précariser toujours davantage les personnels comme les étudiants. La course insensée aux classements internationaux, évaluations et autres outils de « benchmarking » a entrainé une politique de prétendue « excellence » qui sacrifie la masse des chercheurs et des enseignants-chercheurs au profit d’une élite éphémère et freine toute démocratisation réelle de l’enseignement supérieur. Les mouvements de protestation massifs d’étudiants et de personnels (enseignantschercheurs, chercheurs et BIATOSS) ont bien montré l’ampleur de l’opposition aux politiques du gouvernement. L’urgence en 2012 sera de rompre avec ces logiques pour refonder un système d’enseignement supérieur et de recherche sur des bases adaptées aux enjeux cruciaux du XXIe siècle.

La politique de l’enseignement supérieur et de la recherche que proposent les écologistes a pour ambition d’articuler la défense des libertés académiques et scientifiques, la promotion d’une démocratisation de l’enseignement supérieur dans son accès comme dans son fonctionnement, de garantir de bonnes conditions de travail pour les personnels comme pour les étudiants – ce qui inclut un combat résolu contre la précarité. Surtout, cette reconstruction ne pourra se faire qu’avec l’implication aussi large que possible des professionnels, des étudiants et des citoyens intéressés.

Assurément, rien de sera possible sans avoir regagné la confiance d’une communauté qui a été trop malmenée.

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Au programme de la convention

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Pilotage, liberté de la recherche et démocratie scientifique https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2011/09/18/pilotage-liberte-de-la-recherche-et-democratie-scientifique/ https://recherche-enseignementsup.eelv.fr/2011/09/18/pilotage-liberte-de-la-recherche-et-democratie-scientifique/#comments Sun, 18 Sep 2011 14:21:46 +0000 http://recherche-enseignementsup.eelv.fr/?p=2056 Convention ESR EELV Lyon 1/10/11 – Note « Pilotage, liberté de la recherche et démocratie scientifique » – Synthèse des débats préparatoires de la commission ESR EELV, rédigée par Marc Lipinski

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Longtemps, la quasi totalité des chercheurs s’est opposée à toute irruption du monde extérieur dans les laboratoires. La peur d’être « piloté » par le personnel politique ou de voir ses recherches orientées par les applications d’aval et les besoins du marché est d’autant plus prégnante que cette méfiance est basée sur des réalités éprouvées. Or, pour les chercheurs, les espaces de liberté sont indispensables à l’accomplissement de recherches purement cognitives. Eux seuls sont à même de percevoir dans quelles directions déployer leurs efforts pour obtenir des avancées conceptuelles, atteindre des points de rupture dans les connaissances, explorer les interfaces possiblement productives. Ce sont eux qui sont en position de distinguer ce qui vaut la peine d’être tenté de ce qui n’apparaît que comme perte de temps et d’argent. Vouloir faire fonctionner toute la recherche en « mode projet » est donc inepte. Jamais il ne suffira d’assigner à la recherche fondamentale des objectifs volontaristes même assortis de moyens financiers conséquents pour qu’elle aboutisse à coup sûr. Si l’on veut réellement que progressent les savoirs et que se préparent les révolutions scientifiques de demain, il est totalement contre-productif de marchander aux chercheurs leur liberté. C’est malheureusement le cours que suivent les choses quand la recherche est promue essentiellement pour les retombées économiques qu’on en attend et de ce point de vue, les bouleversements introduits par les gouvernements des années récentes n’ont fait qu’aggraver une tendance de fond de la politique française de recherche déjà clairement à l’oeuvre dans les années Jospin-Allègre. Disons-le clairement : pour les écologistes, l’action publique doit viser à un avancement général des connaissances et la recherche cognitive doit être soutenue en conséquence.

Une fois défendu ce principe incontournable de liberté pour la recherche dans tous les domaines, sciences exactes, sciences de la vie, humanités, il est indéniable qu’une politique écologiste visera également à ce que se développent des travaux estimés cruciaux pour leurs applications prévisibles, attendues ou espérées (par exemple en matière d’énergie pour la réduction des gaspillages, l’amélioration des méthodes de production d’énergie d’origine réellement renouvelable, etc.). Certaines de ces recherches à visée applicative ont vocation à être développées en partenariat avec des acteurs du secteur marchand, à condition que ceux-ci assument leurs responsabilités sans externalisation vers les laboratoires publics de recherche. Mais la recherche partenariale doit aussi se diversifier, au-delà des seules entreprises privées. Il s’agit d’encourager la recherche dans toutes ses déclinaisons afin qu’un équilibre satisfaisant soit trouvé dans son organisation. A l’habituelle représentation opposant secteur académique – la recherche d’amont – et secteur des entreprises – l’aval – l’écologie politique préférera l’image du trépied dont la stabilité dépend d’une troisième composante, le monde associatif et citoyen.

Celui-ci étant à l’évidence largement dépourvu des moyens incitatifs dont disposent l’Etat et le secteur privé, il reviendra à la puissance publique d’inventer des dispositifs permettant d’inclure la société civile intéressée dans l’organisation générale du système français de recherche. Lors des Etats généraux de la recherche de 2004, les débats avaient été particulièrement âpres sur la question des rapports entre sciences et société. Pour les écologistes, l’engagement citoyen est hautement souhaitable, dans la recherche et l’innovation comme dans toutes les activités sociales. Il n’est pas plus étrange, moins légitime ni déraisonnable qu’une partie des budgets pour la recherche soit destinée à répondre à la demande sociale. Le milieu de la recherche semble y être désormais plus ouvert, comme en atteste la réussite du dispositif des Partenariats institutions-citoyens pour la recherche et l’innovation (Picri) mis en place dès 2005 par la région Ile-de-France, aujourd’hui rejointe par d’autres régions. Depuis l’émergence du phénomène quand apparut le Sida au début des années 1980, toujours plus nombreux sont les groupes de « profanes éclairés » qui en savent tout autant que les spécialistes ou les experts d’un sujet donné. Contrairement aux craintes initiales des chercheurs, l’irruption brutale d’une fraction de la société civile alors en danger de mort a surtout débouché sur une demande supplémentaire et pressante de recherche fondamentale. Ces rapports nouveaux entre « savants » et « simples citoyens » soulignent les besoins d’évolution d’une recherche publique qui malgré de récents efforts reste encore peu ouverte au monde extérieur.

Il revient donc à l’Etat d’introduire parmi les missions des établissements de recherche, organismes et universités, cet impératif d’ouverture. Les citoyens ont toute capacité à s’impliquer comme on peut le constater chaque fois qu’on leur donne les moyens et le temps de s’approprier des questions complexes, y compris quand elles sont de nature scientifique ou technologique, il suffit pour s’en convaincre d’examiner la façon dont ils participent aux conférences de citoyens ou aux débats publics lorsqu’ils sont organisés de bonne foi et non comme rideaux de fumée pour camoufler des décisions déjà prises. En écho aux labels Carnot attribués aux laboratoires publics particulièrement engagés dans des partenariats avec les entreprises, un nouveau label et des financements ad hoc soutiendraient les laboratoires qui s’engageraient à des coopérations actives avec le monde associatif. À l’université, les étudiants doivent se voir offrir la possibilité de suivre des parcours de formation diversifiés, avec des enseignements dans des disciplines majeures et mineures au cours desquels ils pourraient mettre leurs acquis au service de la demande citoyenne de science. Ils obtiendraient des crédits d’enseignement pour cela. A l’image de ce qui existe dans nombre de pays à travers le monde, des science shops – que la Commission européenne promeut pour que le progrès scientifique soit mieux orienté au service de la société – accueilleraient sur les différents campus universitaires citoyens et associations actives sur le territoire alentour pour tenter de leur offrir des réponses aux problèmes qu’ils leur soumettraient. Des représentants de cette société « civile » locale seraient appelés à siéger dans les Cevu – voire dans les conseils scientifiques – redémocratisés. Les conseils régionaux pourraient inclure dans les conventions qu’ils signent avec les universités ou avec les Pres un objectif de création de telles « boutiques de science ». A l’instar de l’échelon européen appelé à jouer un rôle plus grand dans les politiques de soutien à la recherche, les conseils régionaux devraient en effet se voir conférer des compétences accrues en matière d’enseignement supérieur et de recherche dont le lien avec l’organisation des territoires n’est plus à démontrer. Les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (Pres) pourront d’autant mieux constituer des outils pertinents – fournissant par exemple un cadre favorable au rapprochement des premiers cycles universitaires et des classes préparatoires aux grands écoles, à celui des écoles et des seconds et troisièmes cycles des universités – qu’ils redeviendraient des lieux de mutualisation démocratique et non ces couches administratives additionnelles, détachées à dessein du terrain universitaire pour qu’elles se rapprochent du monde économique par le biais de ces fondations de coopération scientifique à la gouvernance de plus en plus distante et opaque.

On le voit, pour les écologistes, opposer liberté académique et demande sociale et sociétale n’est plus pertinent. L’Etat doit conserver sa responsabilité de fixer les grandes orientations du système français de recherche et d’enseignement supérieur, il lui revient de faire voter des budgets en accord avec les missions qu’il assigne aux établissements qui ont à se conformer à une stratégie cohérente et de long terme définie démocratiquement. Il ne s’agit donc pas de donner à la puissance publique ou aux citoyens une capacité de contrôle de la façon dont les chercheurs accomplissent leur métier. Il faut au contraire libérer ceux-ci de cet amoncellement de taches qui ont progressivement accaparé leurs emplois du temps. En retour, ceux-ci doivent accepter un certain volontarisme politique qui s’exprimerait dans une interaction féconde avec les organismes de recherche et sans l’étranglement progressif de toutes leurs marges de manoeuvre et de leur capacité à développer de véritables politiques scientifiques dont nous sommes actuellement les témoins.

Au stade où nous en sommes arrivés, c’est toute l’organisation du système français de recherche qui doit être revu. Ce ne pourra se faire qu’après un processus, complexe à mettre en oeuvre mais absolument nécessaire, de très large élaboration démocratique. Il s’agira de rendre le système globalement plus performant, mais aussi de combler des déficits dans certaines grandes disciplines. L’éternelle question de la transversalité devra être revisitée puisque chacun en convient, c’est aux frontières entre les disciplines que les chances sont les plus grandes de produire ces avancées soudaines qui transforment la perception d’une question, ouvrent de nouveaux champs thématiques, remettent à plat certaines problématiques.

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