Intervention concernant la motion du FN sur la pêche – JANINE PETIT

Séance Plénière 20 & 21 octobre 2011

« Monsieur le Président, mes chers collègues, cette motion pose des questions sur le contenu thématique de la pêche et sur un plan plus général.

 Elle présente un certain nombre d’arguments avec lesquels nous sommes d’accord, en particulier sur la spécificité de la pêche

artisanale qui donne du sens au concept de circuit court, mais elle est aussi simpliste et réductrice, car poser l’objectif d’une pêche durable oblige à élargir le débat, à la fois pour la spécificité de notre détroit et aussi, plus largement, sur la raréfaction de la ressource.

La Côte d’Opale s’étend de Bray-Dunes, au sud de Berck, sur la Mer du Nord et la Manche, où se pratiquent les pêches locales, côtières, hauturières, artisanales et industrielles, coexistant avec la pêche de loisirs, la grande pêche, avec le trafic marchand, voyageurs, touristique le plus dense du monde sur le détroit et l’arc Manche ; cela s’appelle le rail.

La vraie pêche artisanale est en grande difficulté. Les reproches aux Néerlandais existent à l’adresse de certains Français par les Espagnols et les Anglais, entre autres.

 Le détroit est un système unique, à forts courants et turbidité élevée, avec un fleuve côtier et ses trois estuaires (Canche, Authie, Somme) et des fonds qui constituent une mosaïque d’écosystèmes très productifs, indispensables à la reproduction durable des espèces et à la régénération des écosystèmes et de tout l’arc Manche – Mer du Nord, source d’une pêche durable.

L’épuisement des ressources halieutiques est grave, les stocks s’effondrent, des zones mortes apparaissent un peu partout dans le monde, même ici, en Mer du Nord et Manche. Il n’y a plus de stock pour soutenir une nouvelle croissance des captures.

Les causes sont multiples : pratiques destructrices, surpêche, pêche industrielle, filets dérivants, câbles, chalutage des fonds,

herses, exploitation des gravières, non-respect des quotas, dérogations, non-contrôle, pêches illégales, érosion du littoral, artificialisation des ports, du trait de côte, des espaces péri-portuaires, montée de la mer, changement climatique, changement des courants, acidification, réchauffement, pollutions… séquelles industrielles, séquelles des guerres, pollutions terrigènes – cela veut dire : qui viennent de la terre –, pesticides, perturbateurs endocriniens, chimiques, microbiologiques, déchets de toutes origines, menaces d’épidémies, d’insécurité (Gravelines).

 Des actions sont en cours sur le plan mondial, européen, national et régional : parc naturel maritime avec les trois estuaires – c’est un grand débat aujourd’hui –, assemblée des régions Arc Manche ; évidemment, la recherche est à développer, notamment sur les Écoports.

Il y a aussi une action européenne très importante : directive cadre de l’eau, directive sur le milieu marin, directive sur les pollutions marines, etc.

 Monsieur le Président, c’est pour toutes ces raisons que nous vous proposons de préparer un débat sur la pêche soutenable en plénière.

 Sur un plan plus général, on voit au travers de cette motion, comme beaucoup d’autres présentées précédemment par le Front

National Rassemblement pour le Nord – Pas de Calais, que ce parti instrumentalise un certain nombre de sujets pour en présenter des visions parcellaires, simplistes et réductrices.

Le Front National Rassemblement pour le Nord – Pas de Calais a montré et démontré de manière persistante sa capacité à intervenir et à porter des éléments de discours totalement opportunistes, au gré de ce qui peut déstabiliser l’adversaire, brouiller la visibilité des électeurs ou des opinions, attirer l’attention de la presse ou du potentiel électeur.

Les contenus, les principes, le fond ne sont pas importants dans ce mode de fonctionnement et le Front National Rassemblement pour le Nord – Pas de Calais pourrait très bien dire exactement le contraire demain ou la semaine prochaine ; c’est de la communication et de la théâtralisation.

Les revirements en matière d’économie sont les plus frappants sur ce registre. Jusqu’à la grande crise financière de 2008, il n’y avait jamais assez de libéralisme, de dérégulation du point de vue du FN, même face aux thèses ultralibérales de l’UMP, il fallait faire du REAGAN en Europe.

 Depuis, ces effets de dérégulation ayant produit les effets que l’on sait, le FN tient le discours inverse. Cela relève aussi d’une stratégie clairement établie de banaliser le Front National en tant que parti, le placer sur le même plan que les autres en faisant oublier ses fondamentaux, et ses fondamentaux restent inacceptables, c’est l’histoire de la droite extrême en France et ailleurs, un discours ambiant divisant, stigmatisant, violent, dressant les gens les uns contre les autres et qui porte des effets qui délitent la société au moment où nous avons le plus besoin de nous serrer les coudes et construire ensemble des solutions aux problèmes réels.

 Nous refusons cette préconisation de repli sur soi dans une région fermée, là où, au contraire, il y a nécessité de solidarité dans la société et entre les territoires. Nous ne participerons donc pas à cette banalisation du Front National, quel que soit le cheval de Troie employé. Il n’est pas question pour le groupe Europe Écologie Les Verts de cautionner d’une quelconque manière un discours politique, xénophobe, dont l’orientation générale va clairement à l’encontre de nos valeurs.

 En conséquence, nous n’apporterons pas nos voix à cette motion du Front National Rassemblement pour le Nord – Pas de Calais ni sur celles qui viendront à l’avenir. »

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