LNPN : lettre ouverte à Philippe Duron des élus EELV des Conseils régionaux de Haute et Basse Normandie, des conseils municipaux de Caen et de Rouen

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Monsieur le Président,

 

Vous avez été nommé le 17 octobre 2012 par Monsieur Cuvillier, Ministre délégué chargé des Transports de la Mer et de la Pêche, président de la commission Mobilité 21 missionnée pour « trier, hiérarchiser, et mettre en perspective les grandes infrastructures » du projet de Schéma National des Infrastructures de Transports (SNIT) élaboré durant la précédente législature.

C’est une tâche ardue, mais indispensable. Nous l’avions exprimé de nombreuses fois : l’empilement de tous les projets n’a pas de sens, surtout quand l’addition s’élève à 245 milliards d’euros et que cette somme est simplement inatteignable dans la situation des comptes publics que nous connaissons.

 

Nous rappelons déjà un point : le SNIT comprend depuis son origine des projets dont l’utilité publique est discutable au regard des critères de développement économique et territorial, ces investissements ne gagnent pas instantanément en pertinence à partir du moment où nous trouvons les moyens de les financer. A contrario, ce n’est pas non plus le seul souci de rigueur dans la gestion des comptes publics qui fait perdre sa pertinence à un projet. Ce schéma apparaît en effet comme un catalogue des projets locaux jugés prioritaires, parfois presque exclusivement par les élus locaux qui les portent. C’est pourquoi rendre crédible le SNIT pour lui donner une véritable force nous paraît particulièrement important. Le SNIT doit devenir un véritable schéma directeur de la mobilité en France.  Le ministre lui-même a rappelé lors de votre nomination cette réorientation qu’il souhaitait donner au document pour “construire une vision soutenable des transports en donnant la priorité aux transports du quotidien.” Nous partageons cet objectif.

La sélection doit donc être menée avec l’intérêt général comme critère principal, dans une dimension nationale et européenne.

 

De ce fait, nous jugeons que le maintien de l’intégralité du projet de Ligne Nouvelle Paris Normandie dans le SNIT n’est pas réaliste et limiterait l’objectif d’un développement d’une politique de mobilité durable ambitieuse dans nos régions.

 

L’urgence selon nous est l’amélioration des conditions de circulation et la préparation de l’avenir. Notre réseau ferroviaire construit il y a plus d’un siècle, et dont certaines portions n’ont que très rarement connu des rénovations, est dans un état préoccupant.

 

Investir sur le réseau existant pour simplement lui garantir une efficacité pérenne est pour nous la première exigence pour un développement durable du train. En ce sens, nous pensons qu’il faut mobiliser des investissements publics non pas pour construire de nouvelles lignes mais bien rénover les existantes. La construction de lignes nouvelles devant être réservée aux cas de saturation, comme entre Mantes-la-Jolie et Paris ou sur Rouen avec la construction d’une nouvelle gare.

 

De plus, vous savez comme nous que l’urgence de la mobilité n’est plus d’aller vite et loin le plus souvent possible. Le prix des carburants augmente de façon tendancielle. Cela doit remettre en cause notre façon même de conduire des politiques de développement territorial.

 

Le pragmatisme qui nous motive est guidé par un véritable attachement pour le train. Pour les écologistes, le train fait partie du «cocktail mobilité durable» et possède un vrai avenir. La hausse de fréquentation spectaculaire des usagers des TER nous prouve qu’il est devenu un véritable mode de transport du quotidien.

 

Ainsi, notre modèle de mobilité doit changer. Nous ne devons plus nous focaliser sur de grands projets sur de grandes distances qui ne feraient gagner que quelques minutes à une minorité de voyageurs, mais bien assurer le droit à la mobilité du plus grand nombre, pour des trajets de proximité et diversifiés.

 

Il est aujourd’hui important d’insister sur la nécessité de disposer d’un maillage ferroviaire dense et efficace.

 

Nous attirons également votre attention sur la question plus actuelle des conditions de voyage sur les lignes vers Paris et les autres destinations. Partant de cela, il est possible de reconsidérer la priorisation des objectifs des investissements à faire et mettre en avant le triptyque : amplitude, fréquence  et régularité du service.

 

Ainsi, comme nous l’avions exprimé lors du débat public sur la LNPN, l’urgence n’est pas d’améliorer systématiquement les temps de parcours mais bien d’assurer avec pragmatisme la mobilité des Normands vers Paris et ailleurs.

 

L’inscription dans le SNIT de l’amélioration de l’existant serait ainsi perçue comme une victoire par tous ceux qui prennent le train, d’autant plus que cela rendrait possibles des améliorations rapides aux effets immédiats, y compris des gains de vitesse.

 

Enfin, l’objectif de fiabilité des nos relations à Paris nous oblige à penser un renforcement de la robustesse du réseau. Or, nous savons qu’aujourd’hui déjà le tronçon entre Mantes et Paris est proche de la saturation, limitant l’augmentation de l’offre. Ainsi, la réalisation d’une ligne nouvelle entre Paris et Mantes apparaît comme indispensable.

 

Ainsi, nous proposons que le projet LNPN soit remplacé dans le SNIT par l’inscription de l’amélioration du réseau existant, la réalisation de la ligne Nouvelle entre Paris et Mantes et la nouvelle gare de Rouen.

 

D’un coût largement inférieur à ce qui est prévu aujourd’hui, nous pensons que cela permet d’imaginer tout simplement sa réalisation dans des délais acceptables.  Ce serait enfin un signal fort envoyé aux Normands : alliant réalisme et volonté d’agir pour notre territoire, il nous paraît que cette solution est la seule envisageable pour un développement réel du transport ferroviaire entre nos régions et Paris.

 

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos salutations distinguées.

 

 

 

 

Clara OSADTCHY,

Présidente du groupe des élus EELV du Conseil régional de Basse-Normandie

David CORMAND,

Président du groupe des élus EELV du Conseil régional de Haute-Normandie

 

Rudy L’ORPHELIN,

Président du groupe des élus EELV du Conseil municipal de Caen

 

Jean-Michel BEREGOVOY,

Président du groupe des élus EELV du Conseil municipal de Rouen.

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