Séance plénière exceptionnelle consacrée à la réforme territoriale

Par Martine Alcorta – Intervention en séance plénière du 26 janvier 2015.

Chères collègues, chers collègues,

Je ne reviendrai pas sur le découpage territorial, qui s’est fait avec des préoccupations qui ne correspondent pas à notre vision de l’aménagement du territoire : concurrence et compétitivité européennes, métropolisation aigüe des territoires. Les identités culturelles auraient dû prévaloir à nos yeux sur les questions économiques. Les écologistes sont attachés à cette notion d’identité culturelle régionale, qui est une bonne base d’appui pour l’ouverture à l’espace européen et mondial.

Je voudrais simplement aborder deux points, celui de la compétence générale, celui de la proximité territoriale que je relierai à l’intérêt régional.

Sur la question de la compétence générale. Supprimée, rétablie, à nouveau supprimée, c’est un vrai « tango législatif » qui anime cette question et cela montre bien la frilosité de nos politiques de décentralisation. Ce n’est pas tant la suppression de la compétence générale conçue comme « chacun a le droit de faire ce qu’il veut dans son coin » qui nous gêne, mais la suppression d’une marge de manœuvre pour les régions. Car d’un côté, on crée une nouvelle carte qui amplifie les contrastes entre les régions, que ce soit au niveau de leur taille, de leurs ressources environnementales et humaines, et d’un autre côté on uniformise leur rôle, on rigidifie leurs compétences, et on supprime même leur droit à l’expérimentation. Où est alors la véritable marge de manœuvre des régions pour s’adapter aux spécificités de leurs nouveaux territoires ? Quelle différence ferons-nous entre un établissement public et une collectivité territoriale?

Désigner des chefs de file ne doit pas empêcher les régions d’expérimenter la complémentarité des échelons et la transversalité des politiques publiques. Car il y a des compétences qui ne peuvent pas être portées par une seule collectivité, ni un seul échelon territorial. Je pense à la culture, au logement, à la question énergétique…j’en oublie certainement.

A bien y regarder, le problème du millefeuille, c’est autant la superposition des couches que leurs multiplications. Non seulement on ne s’attaque pas au nombre de couches, mais en plus on renforce leur parallélisme. Si nous avons des difficultés à gérer la transversalité, la solution n’est pas de la supprimer mais de l’organiser. Car aujourd’hui, pour nous écologistes, c’est une approche globale qui permet de comprendre les problèmes et une vision systémique qui permet d’y répondre efficacement. Nous percevons le « cloisonnement des compétences » et la suppression de la compétence générale des régions, comme un renoncement à  « faire ensemble ». Et nous y sommes opposés car l’égalité des territoires a besoin de cette solidarité de gouvernance.

En ce qui concerne la proximité territoriale et l’intérêt régional. Si je croise les deux termes, c’est parce qu’il est important à nos yeux, qu’une politique publique, ne se fasse ni au détriment du premier ni au détriment du deuxième. Si les écologistes proposent d’effacer les conseils généraux, c’est parce que nous pensons que la proximité peut se structurer différemment, il faut faire évoluer une organisation territoriale qui date d’un autre siècle. C’est la raison pour laquelle nous proposons d’enlever une couche au millefeuille et de créer deux chambres régionales, une composée d’élus à l’échelle régionale pour représenter les citoyens et une deuxième composée d’élus, qui représenteraient chaque bassin de vie, ce qui pourrait correspondre en gros à nos pays actuels ou de grosses intercommunalités. Une chambre, pour traiter de l’intérêt régional et une chambre, pour coller aux réalités du terrain qui travailleraient ensemble.

Il est devenu fréquent, que le développement des territoires se heurte aux conflits d’usage. Et ces conflits vont s’intensifier, car on ne peut plus faire du développement économique sans tenir compte des limites de nos ressources, sans prendre en compte la destruction des écosystèmes, sans nuire à la qualité de vie des habitants. Combien de projets sont aujourd’hui bloqués, parce qu’il n’y a pas eu en amont de prise en compte globale des projets ? Si on ne croise pas la démocratie représentative avec de la démocratie participative, qui oblige à confronter les intérêts particuliers avec l’intérêt général, nous laissons le champ ouvert à une gouvernance de lobbys, qu’ils soient économiques ou associatifs où les intérêts particuliers des plus forts l’emporteront.

Les écologistes défendent depuis toujours ce qu’ils appellent le « fédéralisme différencié », c’est-à-dire une nouvelle organisation de l’État sur un mode fédéral, avec des régions fortes qui ont des compétences normatives importantes et une autonomie fiscale. L’État ayant pour mission de garantir une péréquation fiscale entre régions pauvres et riches. Ce fédéralisme doit être différencié, car pour nous, la distribution des compétences et les formes d’organisation territoriales, peuvent varier d’une Région à l’autre pour mieux coller à leurs spécificités. C’est dans ce cadre que nous souhaiterions une collectivité spécifique pour le Pays Basque. Vous comprendrez donc que pour nous, en termes de décentralisation, le compte n’y est pas, même si certaines mesures, comme le caractère prescriptif des schémas structurants vont dans le bon sens. A condition qu’ils survivent aux futures délibérations.

Je vous remercie.

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