Bayonne – 5 octobre 2013

Peggy_Alternatiba

Alternatiba* 2013 : Peggy Kançal intervenait  à la  table ronde sur Le défi climatique animée par Sophie Chapelle et Gilles Lemaire avec Christophe Cassou, Iker Elosegi et Hervé Kempf.

*Alternatiba, le village des alternatives lancé par l’association altermondialiste Bizi pour exposer au grand public les moyens concrets de lutte contre le réchauffement climatique. Il s’est tenu à Bayonne les 5 et 6 octobre 2013.

Intervention intégrale de Peggy Kançal, déléguée au Plan Climat

Mesdames, messieurs,
Je voudrais tout d’abord dire l’honneur que j’ai de relater aujourd’hui parmi vous les travaux de « changement climatique en Aquitaine », car ce travail est précieux et sa qualité a été saluée unanimement par les acteurs régionaux le 4 septembre dernier à l’hôtel de Région lors de la publication officielle de l’ouvrage. Je n’aborderai pas bien sûr l’ensemble de l’ouvrage, mais vais me concentrer sur le dernier chapitre, qui établit une synthèse dite  » recommandations aux décideurs « .

# Tout d’abord quelques mots sur l’origine de ces travaux :
Lors de la relance du Plan Climat régional en 2010, le Président de la Région Aquitaine a missionné Hervé le Treut dans le but de réaliser un travail prospectif sur les impacts du changement climatique en Aquitaine, à la manière du GIEC.
A l’origine de cette commande politique originale, il y a eu la conjonction de deux attentes :
  • D’une part, la volonté du Conseil régional de mettre le changement climatique à l’agenda politique de notre institution, à disposer d’un éclairage pointu et novateur sur le sujet pour anticiper les décisions et les choix de politiques publiques ;
  • D’autre part, un intérêt et un défi scientifique réels de lancer, pour la première fois, un travail de modélisation à une échelle régionale. Et ce, même si cette modélisation régionale ne pourra pas se faire complétement à travers ce premier rapport, mais nécessitera encore une dizaine d’années de travaux complémentaires.
La Région Aquitaine constituait, à bien des égards, un territoire très intéressant pour une telle étude prospective expérimentale : le réchauffement climatique y est plus marqué (+ 1,1 ° au XXe siècle, au lieu de + 0,9 ° de moyenne en Europe) et ce avec des éléments forts de vulnérabilité (forêt, littoral ou encore chaîne montagneuse).
Et c’est ainsi que Hervé le Treut a constitué son équipe, rassemblant au total plus de 160 chercheurs de toutes spécialités, coordonnée par des responsables de chapitres et par une coordinatrice, Émilie Bourdenx ici présente dans cette salle.
Il est important de rappeler le positionnement des chercheurs dans ce dispositif, qui amène à bien distinguer le rôle du scientifique et du politique :
  • Le scientifique s’est impliqué dans ce travail pour rendre compte de la façon la plus objective, neutre, accessible et lisible possible de son sujet. Cette éthique, inspirée du mode de travail du GIEC, est garante d’une indépendance, et a donc la vertu de poser les constats avec une certaine  honnêteté intellectuelle, sans parti pris, et de dépassionner le débat (c’est le cas par exemple sur le sujet du nucléaire impacté par l’évolution de ressource en eau, ou encore du devenir de la montagne et de ses activités touristiques).
  • Au politique de se saisir de cette matière, de cette source de connaissances pour orienter ou réorienter les choix publics, pour concevoir des politiques publiques d’atténuation et d’adaptation, pour anticiper les décisions et arbitrages difficiles à prendre car mettant en jeu des intérêts contradictoires, pour maîtriser les coûts financiers notamment.
# Un travail innovant sur la forme et la méthode  avec un regard neuf et inédit sur le changement climatique à l’échelle régionale.
L’ouvrage alerte les décideurs sur deux points :
    • La complexité du changement climatique  : de nombreux problèmes sont interdépendants, la pluridisciplinarité est un maître mot et l’appréhension de ces questions va au-delà du monde scientifique. Les sciences humaines et sociales ont été pleinement intégrées.  Mais l’étude s’est limitée au champ de connaissance à caractère universitaire. Sur certains sujets (conservation d’espèces, urbanisme et développement des villes, énergie et aléas climatiques), d’autres compétences techniques sont à mobiliser.
    • Les enjeux d’urgence et d’adaptabilité : le rapport confirme une hausse particulièrement forte des températures en Aquitaine, par rapport au scénario de réchauffement de + 4 à 5 °, avec des fluctuations naturelles qui diminuent la prévisibilité. Il faut donc anticiper des élévations de températures estivales pouvant atteindre + 10° en fin de siècle et une forte diminution des précipitations, sans datation de tels épisodes.

Il faut donc se préparer à penser différemment avec une réelle réactivité.

 

# Un travail qui doit être vu comme un point de départ, et non comme un point d’arrivée : la Région va donner du sens à ce rapport.
Les recommandations initiales ont été entendues par la Région, et donneront donc lieu à des actions spécifiques :
  •  Nécessité d’assurer la dissémination de l’information produite par ce groupe de réflexion. La Région organisera dans les semaines à venir 6 ou 7 séminaires thématiques, animés par des scientifiques à destination des décideurs politiques et économiques (Phase sans société civile).
  • Nécessité de mettre en place un comité scientifique permanent. La Région pérennisera le comité de pilotage en le transformant en comité scientifique permanent.
  • Nécessité d’étudier en continu certains processus/phénomènes permettant un suivi environnemental de l’Aquitaine. Il faudra coupler davantage recherche et observation (dispositif de veille et actualisation des connaissances) : les programmes de soutien à la Recherche par la Région intègreront ces pistes identifiées par la communauté scientifique comme priorité stratégique.
  • Nécessité de repenser les modes de gouvernance. La Région par ailleurs est prête à jouer ce rôle d’animateur pluridisciplinaire à travers ces compétences et structures actuelles ou à venir (comme l’Agence Régionale de la Biodiversité par exemple, ou encore une territorialisation de la politique énergie climat avec les TEPOS).

 

En conclusion, le travail de C2A, au-delà de son utilité et de sa pertinence universitaire, ouvre un dialogue de fond entre la communauté scientifique, les élu/es, le monde associatif et la société civile dans son ensemble sur la question du changement climatique en Aquitaine.

A nous tous de nous en saisir et de travailler à des solutions locales !

 

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