Ainsi, entre pragmatisme et fougue, les propos de 2007 de Jean Paul Bacquet, l'ancien président du Groupe PS, prennent encore plus de sens, « nous avons certes pu négocier, mais négocier sur un volume limité et négocier sur les propositions faites par l’Etat. L’Etat ne peut pas prendre les Régions pour des tiroirs-caisses, auquel cas nous deviendrions des quasi-sous-préfets gérant des circulaires de Paris ». Malgré de telles déclarations, ce député n'est pas devenu frondeur, loin de là. Et vous nous proposez de l'imiter !

Avant d’aborder le plus gros volet de ce CPER, celui des mobilités, voici nos principales remarques sur les autres axes.

  • Sur l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation, je crois que l’avis du CESER résume très bien la situation « l’engagement financier de l’Etat sur l’économie de demain n’est pas à la hauteur des enjeux de développement ». Il n’est pas à la hauteur non plus sur le beau projet d’Eco-Campus des Cézeaux, lequel requiert 35 M€ pour la rénovation énergétique des bâtiments. L’Etat en prévoit 6 jusqu’à 2020, quand la Région, nous le saluons, mettra plus de 9M€ sur la table, auxquels devraient s’ajouter des fonds européens conséquents.

Sur ce volet, nous sommes en revanche beaucoup moins séduits et l’Etat aussi visiblement, par la volonté très politique de créer un lieu emblématique dédié à l’innovation. Nous sommes d’autant plus réservés lorsqu’il s’agit d’apporter 3M€ de crédits régionaux sans connaître les apports des autres financeurs potentiels, des pôles de compétitivité en particulier.

  • Sur le volet transition écologique et énergétique, l’Etat est particulièrement sournois. Après avoir détourné les redevances perçues par les Agences de l’eau pour son propre budget, après avoir asphyxié l’ADEME, l’Etat n’a aucune honte à recycler, à valoriser leurs crédits, à hauteur de 42M€, soit plus de 80% des crédits qu’il fait mine d’apporter sur cet axe.

Au-delà des chiffres, et grâce à un engagement louable de la Région, notre action et nos moyens seront renforcés sur les projets territoriaux de développement durable, sur l’efficacité énergétique, la protection des milieux aquatiques et de la biodiversité.

Néanmoins, contrairement à ce que pouvait laisser croire le mandat de négociation, l’éducation à l’environnement et au développement durable n’est toujours pas une priorité, tandis qu’en matière de réduction des pesticides, Stéphane Le Foll a des adeptes. Il est urgent d'attendre encore et encore pour ne pas déplaire à la FNSEA et au MEDEF.

  • Sur le volet territorial, là-encore les crédits de l’Etat sont valorisés, recyclés au maximum au niveau de plusieurs projets culturels, sur le Musée Crozatier et la Chaise Dieu notamment. D’autre part, l’Etat propose d’intégrer dans de CPER des études liées à la fusion avec Rhône-Alpes. Quelle bienveillance de sa part après nous avoir imposé ce mariage forcé !
  • Enfin, sur le volet mobilité, permettez-moi de revenir un an en arrière. Notre groupe avait déposé un vœu lors de la Session de novembre 2013 qui avait été adopté à l'unanimité. Ce vœu demandait notamment à l’Etat « de reconsidérer très largement ses propositions pour l’Auvergne qui ne correspondent pas aux besoins du territoire, en particulier en matière de pérennisation des lignes ferroviaires ».

A l’époque, les premières propositions du Ministre des Transports s’élevaient à 200M€ sur les routes et à 50M€ pour les lignes ferroviaires. Un an après, le ferroviaire a perdu 2M€ que les routes ont récupéré, c’est scandaleux, même si n’est certainement pas assez pour des élus comme Jean-Paul Dufrègne ou Jacques Mézard et bien d'autres élus de Haute-Loire et du Cantal obsédés par la route.

Plus d’un après donc, force est de constater que, malgré votre combativité sur le dossier, la voix de l’Auvergne, votre voix Monsieur le Président, a été autant entendue que lorsque vous défendiez une grande région Massif Central.

Sur les modes de transport alternatifs à la route, l’Etat apportera donc 48M€, RFF 12M€ et la Région 64M€ alors que c’est en dehors de ses compétences. Cette somme sera donc une bouffée d’oxygène, pour le Cévenol et la ligne Le Puy-Firminy notamment, mais une bouffée d’oxygène au goût amer car c’est tout à fait insuffisant face à l’asphyxie de bon nombre de lignes. Mais l’Etat s’en moque et préfère concentrer près de 40% de ses crédits sur la liaison Clermont-Paris, pour des travaux qui ne sont pas prioritaires et qu’il nous force à financer.

En réalité, l’Etat prépare l’élagage drastique de notre réseau ferré. Toutes les lignes qui n’auront pas été rénovées dans le cadre des CPER et du Plan Rail sont en effet promises à la fermeture.

Ainsi, Monsieur le Président, c’était votre constat de 2013 que nous vous invitons à mettre sur la table avec l’Etat « Il est évident que si nous avons supprimé 56% des ralentissements, il en reste 44% » à l’issu du CPER précédent et du Plan Rail. RFF estime le montant des travaux nécessaires à 130M€ dans l’immédiat, à plus de 300M€ sur le long terme. Le compte n’y est donc pas du tout aujourd’hui et ce sont les lignes Clermont-St Etienne, l’Aubrac, et la liaison vers le Mont Dore qui fermeront demain en plus de la relation directe entre Clermont, Ussel, Limoges et Bordeaux que vous n’avez pas cherché à sauver.

L’Auvergne est le parent pauvre de ce volet mobilité, le maltraité, le dindon de la farce. Où sont les promesses du gouvernement lors de la conférence environnementale de 2014 ? Le gouvernement y avait annoncé un investissement financier de l’Etat réparti au 2/3 sur le fer et le fluvial et à 1/3 sur les routes ? Hors crédits RFF, nous sommes à 19% rail et 81% route en Auvergne quand nos voisins de la Région Centre atteignent presque ¾ sur le ferroviaire et la Région Rhône-Alpes 55% !

L’Etat se moque de nous malgré un lobbying auvergnat forcené au cabinet du secrétaire d’Etat aux Transports. Il nous demande, à l’instar des 4 autres régions concernées par POCL, de contribuer à hauteur de 2M€ aux études préalables à l’enquête publique. En 2008, Monsieur le Président, vous disiez, je vous cite : « On ne peut pas demander la même somme à la plus petite des Régions concernées qu’est l’Auvergne qu’à la Région Ile de France ou Rhône-Alpes. »Qu'en dites vous en 2015 ?

Enfin, Monsieur le Président, où sont les fruits de notre union prochaine avec Rhône-Alpes ? Avec J.J Queyranne vous auriez pu peser sur l’Etat pour effectuer les travaux nécessaires sur les lignes en direction de Lyon et de St-Etienne. Quelle est la réponse de Rhône-Alpes sur ce sujet ? Quelle est son attention pour l’Auvergne ? Quelle a été votre coopération sur ce sujet ? Car c’est bien de ça dont nous avions besoin, pas d’une fusion !

Monsieur le Président, nous n’approuverons pas le protocole d’accord, pour son volet mobilité notamment, et nous invitons l’ensemble de nos collègues à en faire autant pour que l’Etat revoie largement sa copie. D’autre part, nous voterons contre les deux tracés LGV POCL proposés, pour des raisons que nous vous expliquerons tout à l’heure.

Je vous remercie.