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Recyclage du plutonium, risques et alternatives

Un historique de le filière du plutonium en France avec les perspectives actuelles.

SÉMINAIRE PARLEMENT EUROPÉEN

« RECYCLAGE DU PLUTONIUM, RISQUES et ALTERNATIVES » 9 janvier 2003

INTERVENTION de DIDIER ANGER Conseiller Régional Verts de Basse-Normandie, Forum Plutonium, représentant du CRILAN (Comité de Réflexion, d’Information et de lutte Anti-Nucléaire de Basse-Normandie- La Hague)

Je voudrais tout d’abord rappeler le rôle premier tenu par la France et le lobby nucléaire dans la filière du plutonium et leur volonté, par la création d’AREVA, d’accéder à une position dominante dans le Monde. En 2000, la COGEMA a mené des enquêtes publiques pour étendre les capacités de stockage des piscines de l’usine de la HAGUE et du retraitement des déchets spéciaux par les usines UP2 800 et UP3. Elle attend maintenant les décrets d’autorisation .

L’histoire de cette filière est significative de sa non-rentabilité économique. Le commissariat à l’énergie atomique (CEA) a été créé le 18 octobre 1945. En août 45, les Etats-Unis avaient essayé, en réel, leurs bombes, à l’uranium enrichi sur Hiroshima, au plutonium, à Nagasaki Ils se dirigeaient vers le choix de la bombe au plutonium, plus miniaturisable. C’est le Gouvernement provisoire, issu de la Résistance d’union sacrée entre De Gaulle et les communistes qui crée le CEA et qui met à sa tête le communiste Joliot-Curie. Leur objectif commun : l’indépendance de la France par rapport aux Etats-Unis, et celle-ci passait, selon eux, par l’indépendance militaire et la bombe. Ce n’est qu’après la fin de cette « union sacrée » et l’arrivée au pouvoir des gouvernements de 3e force et le choix de l’Alliance Atlantique que le PCF choisissait la défense de la « Patrie du socialisme ». JOLIOT-CURIE était chassé du CEA, mais la recherche continuait sous MENDES-FRANCE en 1954 et Guy MOLLET en 1957.

La France n’a jamais compté sur la rentabilité de l’extraction du plutonium à partir des combustibles irradiés des centrales nucléaires : les dépenses d’armement décidées par un État n’ont jamais pour but direct la rentabilité financière. On peut même dire que les circuits courts d’une telle économie contribuent fortement aux difficultés, notamment en matière d’inflation.

Une première usine d’extraction du plutonium militaire a été construite à Marcoule, à partir notamment des combustibles irradiés des réacteurs UNGG comme CHINON, sur la Loire. Ceux-ci produisaient subsidiairement de l’électricité. Après le retour de De Gaulle au pouvoir en 1958, les choses s’accéléraient. Une deuxième usine devait être construite à la HAGUE. La décision était prise en 1959, la déclaration d’utilité publique date de 10 août 1961, la construction commence en 1962, l’usine est mise en service en 1967. Selon Bertrand Goldschmidt, un des fondateurs du CEA « Pour pallier une hypothétique défaillance de l’usine chimique et de l’extraction du plutonium de Marcoule, il a été décidé de construire au cap de la Hague une deuxième usine de traitement des combustibles irradiés. » Une usine de secours : on craignait un incendie à Marcoule. Payée par le CEA, c’est-à-dire le Ministère de la recherche, l’Etat. Cette usine de la Hague a pris de l’ampleur après le changement de filière (UNGG à PWR) en 1969. Les réacteurs à eau pressurisée rendaient un peu plus difficile l’extraction du plutonium militaire. C’est le moment où la France décide de développer la surgénération. Les premiers essais (Rapsodie à Cadarache, Phénix à Marcoule) démontraient qu’on récupérait du plutonium militaire dans les « couvertures fertiles ».Quelle était la fonction de Super-phénix et de la surgénération ? Le général THIRY, Directeur du centre de Moruroa (de 1963 à 1969), puis conseiller de GIRAUD, grand patron du CEA à partir de 1971, avant de devenir Ministre de la défense, déclarait au Monde du 19/01/78 : « La France sait faire des armes atomiques de tous modèles et de toutes puissances. Elle pourra, pour des coûts relativement faibles, en fabriquer de grandes quantités dès que les surgénérateurs lui fourniront en abondance le plutonium nécessaire. » Et BENEDETTI, député socialiste du Gard, le 15/11/1983 : « La filière des rapides est la seule capable, actuellement, de fournir du plutonium à plus de 95 % d’isotopes 239 en quantités suffisantes pour alimenter le développement de notre force nucléaire tactique. » Dans les années 70, on avait prévu, en France, la construction de 13 à 19 surgénérateurs pour 2000, 40 pour 2010 ! Deux éléments nouveaux devaient intervenir : Ø La chute du mur de Berlin en 1989 et la fin de l’URSS en 1991 : Le surarmement nucléaire ne pouvait devenir un objectif. Ø Le coût monstrueux des surgénérateurs par rapport aux autres réacteurs nucléaires (60 milliards de francs selon l’officielle Cour des Comptes, à l’investissement, soit 5 fois plus qu’un R.E.P.) pour une production d’électricité ridicule (3 % de ses capacités théoriques, du fait surtout de ses nombreux arrêts).

À la fin des années 80, EDF abandonne la filière surgénératrice, mais on lui impose de laisser Phénix et Super Phénix survivre, ce dernier branché, bien qu’en coma dépassé.

C’est à ce moment (1988-1990) que la COGEMA, de statut privé pour le marché mondial de l’extraction du plutonium mais propriété alors quasi-exclusive du CEA-État, d’un côté et de l’autre EDF, entreprise d’État, entrent en conflit : Le conflit est arbitré par ...L’Etat. Ø La COGEMA veut sauver la filière du plutonium : Elle demande à EDF d’introduire du MOX (oxyde mixte à 95 % d’uranium enrichi et à 5 % de plutonium), pour 30 % du combustible dans 28 réacteurs 900mégawatts, mais pas pour ceux à 1300 mégawatts, non prévus techniquement et juridiquement à cet effet. Ø La valorisation énergétique du plutonium resterait faible au sein même de la production électrique nucléaire : qu’est-ce que 5 % de 30 % d’à peine la moitié du combustible des centrales nucléaires françaises ? Ø Les critiques d’EDF sont connues par une circulaire interne datée du 24 novembre 1989 et se sont approfondies par la suite :

1.Le coût du sauvetage de la filière est trop important : 2,3 milliards de francs de plus par an pour le retraitement et la fabrication du MOX. Ce surcoût pèse encore plus dans le cadre actuel de l’ouverture du marché européen de l’électricité.

2 Le plutonium, vieux de plus de 3 à 5 ans, trop chargé en américium, de rayonnement gamma est inutilisable. Faudra-t-il le désaméricianiser et quel en sera le coût ?

3 Il y aura au moins 10 % de rebuts (on a même atteint 25 % au début du fonctionnement de l’usine MELOX à Marcoule). 4° Les risques de criticité sont plus grands dans les réacteurs équipés en MOX.

5° Les risques de toxicité sont accrus pour les intervenants en zone active.

Le Gouvernement ROCARD (avec FAUROUX comme ministre de l’industrie et LALONDE, comme ministre de l’environnement) a signé l’autorisation de construction de l’usine MELOX, alors qu’elle était déjà presque terminée.

Depuis cette époque, la situation est devenue plus mauvaise pour l’économie du plutonium.

En juillet 2000, une étude économique prospective de la filière électrique nucléaire a été transmise à JOSPIN sous la responsabilité de Messieurs CHARPIN (commissaire au plan) Benjamin DESSUS (CNRS) et René PELAT (Haut-commissaire à l’énergie atomique CEA !). Elle reconnaît (page 96) : « Dans les conditions actuelles du prix de l’uranium, alors qu’elle avait été préparée dans un contexte où le minerai allait devenir rare et cher, la stratégie retraitement-recyclage avec un stockage des déchets ultimes se révèle aujourd’hui plus chère que le stockage direct... » « ...Le contexte international favorable au retraitement à la fin des années 80 est totalement inversé. La principale explication est économique : les prévisions de l’époque sur le développement de la production électronucléaire et sur le volume des réserves d’uranium naturel, faisaient craindre une raréfaction voire un épuisement de cette ressource et donnaient ainsi son intérêt à un programme de valorisation du plutonium présent dans les combustibles usés par le retraitement et par son utilisation dans des surgénérateurs. Or, dès le début des années 80, les prévisions du développement du nucléaire dans le Monde se sont avérées très exagérées. Et le prix de l’uranium naturel, loin de s’envoler a été plutôt divisé par un facteur 4 entre le début des années 80 et la fin des années 90. Dans ces conditions, le surcoût lié au retraitement et à la fabrication du combustible MOX par rapport à la fabrication directe d’UOX (Oxyde d’uranium) neuf par enrichissement de l’uranium naturel n’est pas compensé par l’économie d’uranium naturel à travers l’utilisation du plutonium et par celle résultant de la réduction du coût direct du stockage des déchets ultimes. En d’autres termes, cette stratégie représente du point de vue d’un électricien, une augmentation de son coût du kwatt/heure, ceci apparaissant comme un obstacle à sa compétitivité, élément de moins en moins supportable, dans un marché qui s’ouvre à la concurrence... » « ...Certains pays préfèrent le stockage direct. Un tel choix accompagne parfois une politique de sortie du nucléaire mais plus souvent une volonté de ne pas isoler le plutonium par crainte de prolifération. » Dans la « Revue d’économie financière », qui préparait JOHANNESBURG 2002, page 297, Christian STOFFAÈS, directeur de la prospective et des relations internationales à EDF, a écrit : « Il faut couper définitivement et de manière convaincante le lien originel entre la production d’électricité d’origine nucléaire et les matières nucléaires susceptibles d’utilisation militaire, en interrompant la production de plutonium à partir de déchets nucléaires et en recherchant des solutions acceptées pour le devenir des combustibles irradiés. » Et pourtant... Un nouvel engagement pour le retraitement-extraction de plutonium après plus de deux ans de négociations, a été signé entre EDF et la COGEMA pour 800 tonnes/an de combustibles irradiés jusqu’en 2007 (sur 1200 tonnes/ an produits). EDF demandait à la COGEMA-AREVA d’assumer le surcoût, donc au CEA, toujours majoritaire à 77 %, doté par le Ministère de la Recherche, dans le budget du Gouvernement français. Il semblerait que la COGEMA ait utilisé l’ouverture du marché de l’électricité pour menacer EDF de ne plus la lui acheter (et elle en consomme beaucoup) mais de faire appel à la concurrence. De telles pratiques, de tels marchandages n’ont pas grand-chose à voir avec la vérité des prix, l’économie, au sens global du terme et le marché .

En Grande-Bretagne, BNFL est au bord de la faillite. En novembre 2001, la compagnie privée British Energy, le plus gros producteur d’origine nucléaire, du Royaume-Uni a annoncé sa volonté d’arrêter le retraitement-extraction du plutonium. Et voici, les sociaux-libéraux de Tony BLAIR redevenus favorables à l’interventionnisme d’État, à la française, en la matière, pour sauver la filière. On annonce l’arrêt du retraitement, trop coûteux, dans la Russie, nouvellement acquise à l’économie de marché (dépêche AFP Moscou du 26/11/02).

AREVA a pris le relais de la COGEMA pour regagner dans le Monde ce qu’elle commence à perdre en Europe avec le commerce du plutonium. Premier objectif : la récupération du plutonium militaire pour en faire du MOX, même si, de qualité différente et dans des alliages particuliers, il pose quelques problèmes techniques nouveaux. AREVA : 1. Se donnerait ainsi une image de marque d’opérateur pour la paix ; 2. Pourrait, malgré tout, récupérer le plutonium après usages, dans des réacteurs ; 3. Espère non seulement maintenir ses activités mais aussi s’introduire dans le marché américain et à terme essayer d’y relancer la filière du plutonium, dans un pays où le Président BUSH est le meilleur soutien des lobbies du nucléaire et du pétrole. En effet, s’y étant engagé depuis plus de 10 ans, les USA et l’ex-URSS doivent retirer chacun 50 tonnes de plutonium de leur armement nucléaire. Deux voies s’offraient à eux :
-   le moxage du plutonium
-   l’immobilisation de celui-ci par son introduction -à très petites doses- dans des déchets, pour le rendre le plus inutilisable possible à des fins militaires (cf. étude Oeko-Institute et IEER).

AREVA et ses épigones ont proposé leurs services pour le moxage aux USA : La rentabilité économique n’a rien à voir avec l’affaire. Lors d’une audition publique aux USA à l’automne 1999, un représentant de Westinghouse m’a affirmé que le surcoût du Mox serait pris en charge par l’État américain. À nous de militer pour l’arrêt de la production de plutonium, pour l’immobilisation des stocks civils et militaires. C’est la moins mauvaise façon de les gérer et ces opérations sauvegardent l’emploi pour une bonne vingtaine d’années sur les sites où l’on a produit ces stocks. La Hague, le 6 décembre 2002.


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