Sandrine Rousseau et Lahcen Boudjoudi » Tribunes http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr Site de campagne de Sandrine Rousseau et de Lahcen Boudjoudi, 21e circonscription du Nord, rousseauboudjoudi.fr Thu, 12 Jul 2012 12:01:40 +0000 fr-FR hourly 1 http://wordpress.org/?v=3.4.2 Le chèque-essence, la voiture et … le mur http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/le-cheque-essence-la-voiture-et-le-mur/ http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/le-cheque-essence-la-voiture-et-le-mur/#comments Mon, 16 Apr 2012 13:43:32 +0000 Julien Lecaille http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/?p=2562  

Nicolas Sarkozy a envisagé la création d’un chèque essence sur le modèle grosso modo du chèque déjeuner. De prime abord, cela paraît une idée à creuser, une idée intelligente qui permettrait de diminuer la poids considérable de l’essence dans le budget des salariés, d’augmenter le pouvoir d’achat et de desserrer la contrainte des dépenses obligatoires des ménages. Pourtant cela relève de la même logique que le prélèvement sur les réserves stratégiques de pétrole ou encore du bonus-malus écologique pour les voitures : c’est là une mesure à bien court terme dont le coût final pourrait être utilisé à des usages beaucoup plus efficaces pour augmenter le pouvoir d’achat des ménages.

La question à laquelle doivent répondre les politiques publiques à l’heure actuelle est la suivante : comment réduire notre dépendance au pétrole? C’est finalement la seule question pertinente à moyen et long terme. Le pétrole en effet s’épuise, il met des millions d’années à se renouveler, c’est une ressource limitée. Or, nous faisons comme si nous ne le savions pas, comme si nous ne l’anticipions pas, comme si l’Agence Internationale de l’Energie ne le clamait pas haut et fort. Nous voyons le mur, il est annoncé, il est devant nous et nous appuyons sur l’accélérateur.

« Le pic pétrolier est atteint », annonçait en 2010 l’Agence Internationale de l’Energie. Qu’est-ce que cela signifie? Cela signifie concrètement le début d’une hausse importante des prix du pétrole. Cette hausse est obligatoire et rien ne peut l’enrayer : nous n’avons pas de pétrole en France, nous sommes donc obligés de l’acheter. Or sur le marché il y beaucoup d’acheteurs: tous les pays développés, les pays émergents. La demande de pétrole ne cesse d’augmenter. Même au plus fort de la crise la demande de pétrole n’a cessé d’augmenter. En face, les réserves s’épuisent, l’offre diminue. Certes il existe des réserves de pétrole aujourd’hui inexploitées mais les nouvelles découvertes ne couvrent pas les quantités consommées. Et par ailleurs les réserves qui subsistent sont plus coûteuses à exploiter, moins faciles d’accès, plus difficile à extraire, elles coûtent plus cher.

Le prix de l’essence ne peut pas diminuer. Dès lors comment faire?

Le chèque-essence a tout d’une fuite en avant, d’un dispositif public qui entretient un mythe: celui que nous pourrons continuer comme avant à utiliser la voiture comme moyen de transport essentiel. Au final, l’argent qui sera mis dans le ticket-essence sera autant d’argent qui ne sera investi dans d’autres moyens de transport, transports en communs bien sûrs mais aussi véhicules moins consommateurs, nouvelles technologies.

Or c’est là c’est une nouvelle vitesse qu’il faut enclencher pour permettre à chacun de moins dépendre de l’essence et de préserver notre pouvoir d’achat. Il est important  d’imaginer des mesures transitoires pour que les plus faibles ne soient pas étranglés mais il ne peut s’agir que de mesures spécifiques et ciblées pas de mesures générales de ce type.

Avec EELV je propose que l’on enclenche au niveau national un plan sans précédent de développement des transports en commun, que l’on aide les entreprises automobiles à changer de modèle de production, que l’on augmente le pouvoir d’achat en diminuant les consommations d’énergie aussi bien dans le logement que dans l’automobile.

Pas de solution faciles et simples mais des solutions efficaces et de long terme!

Sandrine Rousseau

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Un financement pour l’allocation dépendance http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/un-financement-pour-lallocation-dependance/ http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/un-financement-pour-lallocation-dependance/#comments Thu, 01 Mar 2012 10:07:38 +0000 Julien Lecaille http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/?p=432  

Le débat sur les réformes de la lutte contre la dépendance se focalise sur son coût. Entre le catastrophisme de l’évaluation des dépenses et les contraintes des budgets publics, tout est fait pour que la marge de manœuvre soit présentée comme minime. D’autres arbitrages sont cependant possibles. Le financement de l’APA (5 milliards d’euros dont 3 pour le maintien à domicile) est jugé difficile et sa croissance délicate. Parallèlement, les services à la personne bénéficient de plus de 5 milliards d’euros d’aides publiques (déductions fiscales et exonérations de charges sociales, à peine touchées par la loi de finances 2011) : alors que l’on renâcle à augmenter une allocation permettant aux personnes vulnérables de rester autonomes, on accepte de financer des services proches (en termes d’activités réalisées mais non en termes de signification) auprès de personnes valides ! La rigueur budgétaire justifie de réduire le nombre d’heures d’aide à domicile attribuées à une personne âgée en perte d’autonomie mais n’est plus convoquée lorsqu’on subventionne l’emploi d’une femme de ménage par un actif aux revenus conséquents…

La question de l’utilité de soutenir les services de confort pour des personnes non vulnérables doit être posée : ces dépenses ne créent que des emplois de faible qualité, pour un coût prohibitif (plus de 50 000 euros par emploi selon un récent rapport sénatorial) et au bénéfice final des ménages aisés. Aujourd’hui, les dépenses publiques au profit des services d’aide à domicile représentent environ 10 milliards d’euros par an : 4,5 attribués sur critères de ressources aux publics vulnérables (APA domicile), 3 en faveur des personnes âgées mais sans critères de ressources (et bénéficiant majoritairement aux personnes âgées imposables à l’impôt sur le revenu) et enfin 2,5 accordés aux actifs. Toutes les enquêtes soulignant l’extrême inégalité du recours à ces services, ce dernier paquet profite largement aux ménages les plus riches, les trois-quarts sont perçus par les 10% des ménages déclarant les revenus fiscaux les plus élevés. Autrement dit, la suppression des exonérations fiscales en faveur des services de confort permettrait un quasi doublement de l’APA !

Certes, ce redéploiement risque de réduire l’emploi dans les services domestiques mais ces pertes seront plus que compensées par la création de postes dans les services auprès des personnes âgées (l’APA a eu un impact sur l’emploi bien plus massif que le plan Borloo de développement des services à la personne). Un accompagnement est nécessaire pour permettre aux salariés et aux structures du secteur de s’adapter. Mais peut-on continuer à regretter de ne pas pouvoir aider les personnes âgées tout en subventionnant des services proches auprès de ménages qui n’en ont pas un besoin explicite ?

Par FRANÇOIS-XAVIER DEVETTER Économiste, université Lille-I, Clerse, SANDRINE ROUSSEAU Économiste, université Lille-I, Clerse

Publication initiale le 19 janvier 2011: http://www.liberation.fr/economie/01012314492-un-financement-pour-l-allocation-dependance

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Services à la personne : une niche fiscale si consensuelle… http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/services-a-la-personne-une-niche-fiscale-si-consensuelle-services-a-la-personne-une-niche-fiscale-si-consensuelle/ http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/services-a-la-personne-une-niche-fiscale-si-consensuelle-services-a-la-personne-une-niche-fiscale-si-consensuelle/#comments Mon, 27 Feb 2012 16:56:56 +0000 Julien Lecaille http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/?p=398 La politique en faveur des services à la personne lancée en fanfare lors du lancement du plan Borloo en 2005 a été poursuivie sans discontinuité depuis (notamment avec un plan II en 2009). Malgré les mises en cause récurrentes de la cour des comptes, Nicolas Sarkozy et ses ministres ont défendu avec acharnement les niches fiscales en faveur de ces services. François Hollande ne les remet pas plus en cause (tout au plus suggère-t-il de les plafonner à 10 000 euros par an, soit plus de dix heures de femmes de ménage par semaine…). Cette étonnante unanimité s’est construite au nom de la lutte contre le chômage.

Pourtant l’analyse du secteur et de son évolution font apparaître un bilan désastreux.

Tout d’abord les emplois créés sont clairement hors de prix. Si la droite hurle face au coût des 35 heures, que dire de dispositifs (exonérations sociales et fiscales massives) qui aboutissent à un coût de plus de 50 000 euros par emplois (en équivalent temps plein) créés ? Ce premier résultat plus que médiocre est largement aggravé dés lors que l’on tient compte de la qualité des emplois en question. Plusieurs ouvrages et reportages sur les « nounous » ou les femmes de ménages ont pointé récemment les conditions déplorables des salariés de ce secteur (temps partiel, précarité, pénibilités physiques et psychologiques multiples, etc). Au final, la politique menée concourt largement à gonfler les effectifs des travailleurs pauvres (ce qui a justifié en partie l’appel au RSA par la suite). Chers et de mauvaise qualité, c’est la double peine pour les emplois créés à la suite du plan Borloo…

Malheureusement les effets de cette politique ne s’arrêtent pas là. Ils sont également délétères pour la cohésion sociale. La création des « services à la personne » a reposé sur la « fusion » de deux secteurs aux histoires bien différentes : les services d’aides aux personnes dépendantes d’une part et les services domestiques de l’autre. Ce mélange au sein d’un même ensemble était tout sauf fortuit : il visait à donner une légitimité sociales à des services de conforts reposant avant tout sur les inégalités sociales (pour les ménages actifs, la concentration du recours à ces services au sein des 10 % les plus riches s’est d’ailleurs encore aggravée après le plan Borloo). Mais les conséquences de ce mélange étonnant sont particulièrement dommageables pour les acteurs les plus engagés dans l’action sociale auprès des personnes âgées. Le coût de la politique « service à la personne » a clairement privé la politique de la dépendance de ressources nécessaires (l’Allocation personnelle d’autonomie n’est quasiment pas revalorisée depuis 2002 et les réformes annoncées ont été enterrées). Les mesures visant à faciliter la création d’entreprises ont déstabilisé le secteur en voie de structuration de l’aide à domicile. La concurrence accrue entre acteurs à but lucratifs et associations a mis en grande difficultés les structures de l’économie sociale et solidaire engagées auprès des publics fragiles. Bref, pour soutenir des activités de conforts au bénéfice des ménages les plus fortunés, les services sociaux d’aide au maintien de l’autonomie ont été sacrifié.

Les mesures en faveur de l’emploi ne sont jamais gratuites mais quand au coût financier s’ajoute un coût social aussi élevé, un changement de politique s’impose sûrement…

François-Xavier Devetter et Sandrine Rousseau sont les auteurs de « Du Balai, Essai sur le ménage à domicile et le retour de la domesticité » (Raisons d’Agir)

Publication initiale sur LeMonde.fr : http://lemonde.fr/idees/article/2012/02/27/services-a-la-personne-une-niche-fiscale-si-consensuelle_1648731_3232.html

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Recherche : le diabolique marché de dupe de Valérie Pécresse http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/recherche-le-diabolique-marche-de-dupe-de-valerie-pecresse-recherche-le-diabolique-marche-de-dupe-de-valerie-pecresse/ http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/recherche-le-diabolique-marche-de-dupe-de-valerie-pecresse-recherche-le-diabolique-marche-de-dupe-de-valerie-pecresse/#comments Mon, 27 Feb 2012 16:04:02 +0000 Julien Lecaille http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/?p=414 Lors de leurs vœux à la recherche et à l’enseignement supérieur, Nicolas Sarkozy et Valérie Pécresse ont comme chaque année fait miroiter des milliards d’euros aux scientifiques. Mais ces carottes toujours plus grosses cachent de plus en plus mal un bâton dont les retours menacent jusqu’aux fondements du monde académique français.
Le plan campus, lancé il y a trois ans déjà, devait « répondre à l’urgence immobilière » des universités françaises. Cinq milliards d’euros étaient promis aux gagnants de cette grande loterie à laquelle étaient conviées les 85 universités françaises. Des 46 projets présentés, 12 furent retenus en grande pompe. Depuis, la communication sur le plan campus n’a pas cessé, mais pas un centime n’a été dépensé ni même engagé. Les universités avaient pour priorité de rénover leurs bâtiments ; on les oblige à en construire de nouveaux, dans le cadre exclusif de partenariats public-privé (PPP) qui imposent de longues annuités de remboursement. Le socle d’une nouvelle politique en matière d’enseignement supérieur et de recherche est, lui, posé : la mise en concurrence systématique de tous contre tous.

Le « Grand emprunt » constitue à cet égard une remarquable escalade. La carotte a grossi : 21,9 milliards, mais de nouveau, seuls les intérêts, modestes, seront disponibles. La sélection s’annonce drastique, car il s’agit de financer l’ »excellence » et elle seule. Subitement, les notations de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Aeres), basées sur les activités passées des équipes concernées, sont devenues discriminantes. Leur simplisme (A+, A, B ou C, risible écho aux agences de notation financière) confère une redoutable efficacité au tri effectué entre équipes « excellentes », notées A+, et toutes les autres, y compris les très bonnes (les « A ») écartées pour la plupart des projets. Quant aux laboratoires et aux conseils scientifiques des universités, lieux d’échanges et de mutualisation des moyens, ils sont simplement rayés de la carte des décisionnaires.

Las, le marché proposé est un marché de dupes. Quoi qu’en disent le président et la ministre, véritable experte en bonneteau budgétaire, les moyens de l’enseignement supérieur et de la recherche sont restés au mieux constants ces dernières années. Il suffit pour s’en convaincre de lire les statistiques officielles. Ce qui va à quelques-uns, les « excellents », est pris à tous les autres. Pour ceux-ci, la grande majorité, la disette arrive d’ailleurs plus vite que les agapes promises à ceux-là : les subventions d’Etat accordées par le CNRS à ses laboratoires sont en 2011 en diminution de 10 à 15 %.

PRODUCTIVISME SCIENTIFIQUE

Cette déstructuration s’accompagne d’un formidable gâchis d’énergie. Des milliers d’heures de travail sont détournées de leur objet, chercheurs et universitaires n’ayant d’autre choix que de consacrer toujours davantage de temps à répondre à des appels d’offre, à empaqueter leurs travaux sous forme de « projets », à chercher à s’insérer dans tel réseau, telle fondation… Bloquant tout développement des connaissances, cette logique absurde qu’avait imaginée le prix Nobel Léo Szilárd dans sa nouvelle La Fondation Mark Gable, semble s’être réalisée dans les modalités de la « nouvelle gouvernance de la science » à la mode Pécresse !

Cette prétention à l’excellence a un autre effet, insidieux mais dévastateur à long terme. Elle pousse le monde académique à un productivisme scientifique qui écarte la qualité au profit d’indicateurs quantitatifs facilement mesurables. Au mieux, les équipes se replient sur leur laboratoire, au pire, elles se transforment en sous-traitants d’entreprises encouragées à externaliser leur R&D par les milliards, eux bien réels, du crédit d’impôt recherche. Dans les deux cas, les chercheurs se détournent de la Cité. Or, comment préparer « l’indispensable transition vers un nouveau modèle de développement, plus durable » selon les termes mêmes d’Alain Juppé et de Michel Rocard, sans nouveau partenariat entre science et société ?

Dans certaines régions, d’autres conceptions du soutien à la science s’expérimentent, se mettent en place, préférant la coopération à la concurrence, la mise en réseaux à la compétition permanente, encourageant les échanges avec le monde associatif. Les grandes orientations scientifiques et techniques y sont mises en débat. Une autre politique de la recherche et de l’enseignement supérieur est possible au niveau national aussi, qui valoriserait la prise de risques tout en assurant aux acteurs la visibilité – en termes de moyens et de statut – nécessaire à l’exercice efficace de leur métier véritable : produire de nouvelles connaissances et les partager.

 

Cécile Duflot, secrétaire nationale d’Europe Ecologie – les Verts ;

Laurent Audouin, responsable de la commission enseignement supérieur et recherche ;

Marc Lipinski, ancien vice-président enseignement supérieur, recherche, innovation du Conseil régional d’Ile-de-France ;

Sandrine Rousseau, vice-présidente enseignement supérieur et recherche du Conseil régional Nord-Pas-de-Calais.

Publication initiale sur : http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/01/24/recherche-le-diabolique-marche-de-dupe-de-valerie-pecresse_1468951_3232.html

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L’indispensable refondation du système français de recherche http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/lindispensable-refondation-du-systeme-francais-de-recherche/ http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/lindispensable-refondation-du-systeme-francais-de-recherche/#comments Fri, 24 Feb 2012 22:06:05 +0000 Julien Lecaille http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/?p=382 Bien qu’encore peu discutée dans la campagne en cours, la refondation du système français de recherche est à l’ordre du jour tant la situation est devenue intenable. Plan campus, Investissements d’avenir : les structures nouvelles et les milliards supplémentaires de l’ère Sarkozy promettaient un nouvel âge d’or. La réalité est tout autre : au lieu de consacrer leur temps à leurs missions statutaires -chercher, former les plus jeunes, s’ouvrir à la société – les chercheurs et enseignants-chercheurs croulent désormais sous des avalanches d’appels à projets, doivent multiplier les réunions préparatoires, courir d’un guichet à l’autre pour décrocher les contrats qui leur rendront les moyens de travailler, et participerà toutes sortes de comités où ils évaluent leurs collègues et, faute d’argent disponible, retoquent la très grande majorité de leurs demandes de crédits.

L’Agence nationale de la recherche (ANR) est au cœur de cette évolution ubuesque. Les Etats généraux organisés en 2004 par le mouvement Sauvons la recherche avaient souhaité « une nouvelle structure … dotée d’un budget propre « qui permettrait d’  » augmenter la réactivité du système et de favoriser des domaines où un effort supplémentaire aura été jugé nécessaire… ». La communauté avait imaginé une structure légère ? Elle est confrontée à une lourde machine qui réoriente toute la recherche en « mode projet ». Les chercheurs attendaient des moyens additionnels ? Les 800 millions d’euros du budget annuel de l’ANR étaient précédemment octroyés aux organismes nationaux de recherche, lesquels n’ont eu d’autre choix que de diminuer année après année la dotation de base de leurs laboratoires (encore -10% cette année au CNRS). Et alors qu’une des forces du système français est la stabilité de l’emploi scientifique, gage de liberté d’action et de capacité à travailler dans la durée, le financement sur projet a fait exploser la précarité dans les laboratoires, avec près de 15 000 jeunes chercheurs en CDD.

L’inflation des missions de l’ANR semble sans limites : elle est désormais censée gérer 19 milliards d’euros d’ « Investissements d’avenir ». Certes il s’agit pour l’essentiel de capital non consommable, des milliards extra-budgétaires placés au Trésor public et par là-même non contrôlables par le Parlement, mais les seuls intérêts générés donneraient à l’ANR un rôle démesuré. Clé de voûte du processus, huit « Idex » (Initiatives d’excellence) dotés d’un capital de 7,7 milliards d’euros : quatre Idex pour la seule Ile-de-France, les autres pour Strasbourg , Aix-Marseille, Toulouse et Bordeaux. L’élite est désignée, le restant sacrifié : tous les autres territoires sont de facto relégués en deuxième division. La centralisation s’aggrave, et même en Ile-de-France, un très grand nombre d’acteurs sont écartés de cette promesse d’opulence. L’idéologie de la compétition formate financements, rémunérations, ressources humaines ; et partout elle crée souffrance au travail, exclusion et tension exacerbée pour la réussite d’une petite minorité. De la maternelle aux laboratoires, de l’association de quartier aux scènes nationales, l’accroissement des inégalités résulte de choix politiques, comme la constitution d’une France à deux vitesses. A cet égard, l’engagement de François Hollande d’accélérer la mise en oeuvre des Investissements d’avenir » révèle une incompréhension profonde de ce qui se joue là.

Même si elle ne cesse d’invoquer « l’autonomie », la droite s’est toujours méfiée des chercheurs trop indépendants. Avec la disparition quasi-totale de tout membre élu par les pairs des nouvelles structures de gouvernance, des jurys de sélection et d’évaluation, elle met la démocratie scientifique et universitaire à l’agonie. Avec l’ANR et le Grand Emprunt Sarkozy, il est bien plus aisé de cibler les financements vers la recherche-innovation plutôt que vers la création de connaissances, vers ceux qui développent les recherches finalisées souhaitées par les lobbies les plus puissants : le nucléaire plutôt que le solaire, l’aérospatial plutôt que l’agroécologie, les produits de santé marchandisables plutôt que la santé environnementale et la prévention. La disparition soudaine de la ligne  » santé environnementale  » de l’ANR – trop dérangeante pour certains lobbies – fournit un parfait exemple de ce pilotage politique au service d’intérêts particuliers. La toute récente nomination à la tête de l’ANR d’une ancienne élue UMP qui, lorsqu’elle dirigeait l’AFSSA, a longuement retardé la sortie du dossier du Bisphénol A, ne peut qu’interpeller.

« LA POLITIQUE DES INVESTISSEMENTS D’AVENIR DOIT ÊTRE NON PAS ACCÉLÉRÉE MAIS TOTALEMENT REVISITÉE »

En arrivant au pouvoir national en 1981, la gauche de l’époque avait manifesté une réelle ambition scientifique, concrétisée par des signes budgétaires et des recrutements immédiats. Si elle veut préserver sa capacité de recherche et setourner vers l’avenir, la France de 2012 devra impérativement lancer un processus similaire. Dès juin, la politique des Investissements d’avenir doit être non pas accélérée mais totalement revisitée, à l’aune des besoins réels de l’ensemble du système français d’enseignement supérieur et de recherche et des territoires. Un audit exhaustif devra être engagé pour préparer le budget 2013, en même temps que seront organisés les Etats généraux qu’attend la communauté académique. L’activité de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, l’Aéres, contestée de toutes parts, pourra être suspendue sans dommage aucun en attendant d’être remplacée. Et un plan de titularisation de l’ordre de 5000 postes par an – chercheurs, ingénieurs, techniciens – est indispensable, faute de quoi le pays perdra le bénéfice de milliers de jeunes qu’il a pourtant formés au plus haut niveau et à grand coût.

Mais ces mesures immédiates ne suffiront pas, tant les enjeux dépassent aujourd’hui le seul cadre des laboratoires et touchent la société toute entière. Il est temps d’ouvrir enfin un dialogue approfondi avec des citoyens bien plus matures, plus éduqués qu’il y a trente ans. C’est en rendant aux scientifiques leur liberté de creuser des pistes originales, de s’aventurer dans des territoires inexplorés, en les incitant à travailler en mode coopératif, que nous pourrons jeter les bases d’une démocratie scientifique sans laquelle il ne sera pas de société écologique. Articuler ces exigences à un engagement gouvernemental assumé et durable, responsable mais ambitieux, tels sont les enjeux. Les sciences et la société ont tout à y gagner.


Laurent Audouin, maître de conférence, université Paris-Sud, délégué enseignement supérieur et recherche auprès d’Eva Joly ;

Marie Blandin, sénatrice du Nord (EELV), présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat ;

Marc Lipinski, directeur de recherche CNRS, conseiller régional Ile-de-France (EELV) ;

Sandrine Rousseau, maître de Conférence, université de Lille-I, vice-présidente enseignement supérieur et recherche du Conseil régional Nord Pas-de-Calais (EELV).

Une publication initialement sur : http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/02/22/l-indispensable-refondation-du-systeme-francais-de-recherche_1646402_3232.html

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A 60 jours de l’élection, le candidat Sarkozy redécouvre les vertus de la « moralisation du capitalisme ». http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/a-60-jours-de-lelection-le-candidat-sarkozy-redecouvre-les-vertus-de-la-moralisation-du-capitalisme/ http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/a-60-jours-de-lelection-le-candidat-sarkozy-redecouvre-les-vertus-de-la-moralisation-du-capitalisme/#comments Fri, 24 Feb 2012 18:31:51 +0000 Julien Lecaille http://sandrinerousseau.eelv-legislatives.fr/?p=360 par Eva Sas, Agnès Michel, Sandrine Rousseau

Nous avions eu droit au grand discours sur la « moralisation » du
capitalisme en 2009, mais las, aucun acte n’est venu. Voici qu’à
l’approche de l’élection, Nicolas Sarkozy retrouve sa capacité
d’indignation devant la rémunération des grands dirigeants, les
retraites chapeaux, les parachutes dorés, et veut aligner la fiscalité
des dividendes sur celle du travail. Formidable ! Mais comment peut-on
faire confiance à celui qui a allégé l’Impôt sur le Fortunedes plus
gros patrimoines , il y a moins d’un an, privant l’Etat de 2 milliards
de recettes ? Comment peut-on croire celui qui a baissé la TVA sur la
restauration par électoralisme, sans vérifier ni la baisse des prix ni
l’améloiration de la qualité du travail ?

A nouveau, Nicolas Sarkozy stigmatise les bénéficiaires du RSA : « les
personnes au RSA devraient faire 7 heures de travail, rémunérées au
niveau du smic. C’est la logique des droits et des devoirs. ». Pour le
président de la République, les chômeurs ou bénéficaires des minimas
sociaux le sont par choix ou par fainéantise. Mais comment peut-on
croire que c’est par choix et par refus de travailler que les gens
touchent 478 euros par mois ! La moitié des personnes éligibles au RSA
ne le touchent pas, pour des questions administratives, mais aussi de
malaise par rapport à une situation d’assistanat. Nicolas Sarkozy le
sait : cette mesure de 7h de travail se soldera par la fin du RSA, et
par la mise en concurrence de ces travailleurs « gratuits » avec les
salariés. Et avec son référendum pour contraindre les demandeurs
d’emploi à accepter des emplois mal rémunérés, c’est encore une
tentative du candidat Sarkozy pour modifier le rapport salarial en
faveur des employeurs et baisser les salaires moyens en France. Au
final c’est un ensemble de mesures très cohérentes, visant à ajouter
l’humiliation d’être chômeur à la pauvreté déjà subie par les
personnes bénéficiaires du RSA.

C’est le chômage qu’il faut combattre et non pas les chômeurs.

Nicolas Sarkozy essaie désespérement d’effacer son image de président
des riches et veut nous faire croire qu’il est aux côtés des Français
qui travaillent. Mais les Français travaillent, M. le président, et
ceux qui ne travaillent pas, c’est qu’ils ne peuvent pas le faire. Il
n’y en France que 70 000 offres d’emplois non pourvus à Pôle Emploi
pour 2,9 millions de Français au chômage total. Ce qu’il faut, M.
Sarkozy, c’est créer des emplois et non pas essayer de baisser le
salaire de ceux qui travaillent.

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