Sur l’enseignement de l’occitan

La Felco, la Fédération des Enseignants de Langue et Culture Occitane, nous a adressé un questionnaire sur nos positions vis à vis de l’enseignement de l’occitan.

Voici leurs questions, et nos réponses.

Questionnaire aux candidats aux élections législatives 2012

Madame, Monsieur,

La FELCO fédère les Centres Régionaux d’Enseignement de l’Occitan qui rassemblent eux-mêmes les enseignants – et usagers, parents notamment – du service public de l’Education Nationale. C’est en effet à celle-ci qu’il revient, selon nous, la mission d’enseigner aux enfants de ce pays la langue et la culture d’oc.

Depuis la loi Deixonne (1951), les portes des établissements scolaires s’étaient progressivement ouvertes aux langues régionales. Ces dernières années, en revanche, nous voyons les possibilités d’enseignement se réduire et la préparation de la prochaine rentrée nous fait craindre une forte diminution des possibilités et des moyens en postes notamment… et donc des effectifs d’élèves bénéficiant d’un enseignement de l’occitan.

Nous nous adressons donc solennellement aux candidats aux législatives, en leur demandant quelles dispositions ils comptent prendre pour la transmission et le développement de ce patrimoine vivant de notre République. À cet effet nous vous adressons le questionnaire ci-joint. Toutes les réponses reçues seront communiquées à nos adhérents et médiatisées grâce à la mise en ligne sur notre site et la communication à la presse.

1) Quelles mesures comptez-vous prendre pour développer et généraliser l’offre d’enseignement de langues régionales dans le service public de l’Education Nationale ?

La défense de la diversité culturelle et linguistique, ainsi que la promotion des langues régionales, sont des valeurs auxquelles Europe Écologie Les Verts, mouvement régionaliste et fédéraliste, est très attaché. C’est dès le plus jeune âge qu’il faut sensibiliser les enfants à cette diversité, en leur permettant d’acquérir une deuxième langue. Il est en effet bien connu que les jeunes enfants peuvent devenir bilingues naturellement et sans effort. Ce qui n’a que des effets positifs, en favorisant tant leur ouverture sur le monde, que le développement de leurs capacités cognitives. Je dénonce le désengagement de l’Etat dans ce domaine, à travers son représentant en Languedoc-Roussillon le Recteur Christian Philip, avec l’annulation du dernier Conseil Académique du jeudi 31 mai. Je  dénonce le non respect de la convention de partenariat pour le développement et la structuration de l’enseignement de l’occitan et en occitan et de l’enseignement du catalan et en catalan que la Région et le Rectorat signée le 14 décembre 2009.

 

2) La proposition de loi élaborée par l’intergroupe parlementaire sur les langues régionales, réunissant des élus de tous les partis représentés au Parlement préconisait une politique d’offre de l’enseignement des langues régionales généralisée, sauf pour les parents qui la refuseraient explicitement. Soutenez-vous cette position ?

Europe Écologie Les Verts soutient cette proposition pour pour parvenir à une « récupération linguistique ».  L’ambition des écologistes est  forte : il faut aujourd’hui mobiliser les outils de l’action publique passant par la possibilité d’un bilinguisme français/langues régionales dans tous les secteurs de la vie publique et privée. Le bilinguisme, comme la binationalité, est une chance, une richesse et non une menace.

3) La reconnaissance des langues de France comme patrimoine « national » figure actuellement, et curieusement, à l’article 75-1, dans la partie du texte constitutionnel concernant les collectivités territoriales. Dans l’hypothèse d’une réforme de la Constitution, comptez-vous proposer que cette mention figure désormais dans l’article deux, en liaison avec l’affirmation du statut du français comme langue commune ?

Si depuis la réforme constitutionnelle de 2008, l’article 75-1 de la Constitution reconnaît l’existence des langues régionales comme « appartenant au patrimoine de la France », la décision du Conseil constitutionnel du 20 mai 2011 a montré les limites de cette « avancée » et l’absence d’égalité avec le Français « la langue de la République ».  Je défends donc une réforme constitutionnelle qui modifiera cet article 2 de la Constitution. Il s’agit d’offrir la possibilité à toute région qui le souhaite de définir sa ou ses langues régionales comme co-officielle-s avec le Français.

 

4) La FELCO a réfléchi à la complémentarité du rôle des collectivités et de l’Etat en matière de langues régionales : http://www.felco-creo.org/mdoc/detail_fr.php?categ=collec&id=58. Quels rôles respectifs pour l’Etat et les collectivités locales considérez-vous comme les plus appropriés pour assurer la protection et le développement de ce patrimoine national ?

Le combat des écologistes pour la reconnaissance des langues et cultures régionales s’inscrit aussi dans l’ambition d’une 6ème République où l’organisation de la France se ferait sur le modèle d’un fédéralisme différencié avec une régionalisation renforcée. Les régions se verraient alors accorder un pouvoir réglementaire élargi, voire un pouvoir législatif secondaire, permettant d’adapter aux réalités régionales les normes nationales dans nombre de domaines tels la culture, la fiscalité etc. Je considère que le transfert vers les régions de compétences et de moyens correspondants, en matière de langue et de culture s’inscrirait dans le sens de l’histoire. Cela ne saurait, bien entendu, suffire. Je défends également la proposition d’une loi-cadre ambitieuse qui établisse un statut juridique clair et qui dessine les lignes d’un cadre fort en termes de moyens. Le développement des langues régionales dans l’enseignement, les medias et les relations publiques sont autant de priorités. Chacun doit avoir le droit et la possibilité effective de pouvoir envoyer son enfant dans une école bilingue ou par immersion.

5) Êtes-vous favorable 

- à la ratification de la Charte Européenne des langues de moindre diffusion, gelée en 1999 ?

- à l’adoption d’une nouvelle loi visant à protéger nos langues et nos cultures ? (Voir propositions de la FELCO sur notre site : http://www.felco-creo.org/mdoc/detail_fr.php?categ=deputat&id=216

 

Je souhaite évidemment permettre la ratification de la Charte européenne des langues régionales, comme celle de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales. Il s’agit, ni plus ni moins, de mettre la France en conformité avec le droit européen en matière de diversité linguistique. En effet, vous le savez, la France, pourtant membre de l’Union européenne, ne respecte, à cet égard, pas les critères de Copenhague qui sont, avec rigueur, exigés de chaque Etat souhaitant intégrer l’Union. Europe Écologie Les Verts est favorable à la ratification de la Charte avec ce qu’elle comporte déjà dans le domaine de l’enseignement.

En matière d’enseignement en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sont pratiquées, selon la situation de chacune de ces langues et sans préjudice de l’enseignement du français, la France s’engage :

- à prévoir une éducation préscolaire totale ou substantielle dans les langues concernées au moins aux élèves dont les familles le souhaitent et dont le nombre est jugé suffisant ;

- à prévoir un enseignement primaire total ou substantiel dans les langues concernées au moins aux élèves dont les familles le souhaitent et dont le nombre est jugé suffisant ;

- à prévoir un enseignement secondaire total ou substantiel dans les langues concernées au moins aux élèves dont les familles le souhaitent et dont le nombre est jugé suffisant ;

- à prévoir un enseignement technique et professionnel total ou substantiel dans les langues concernées au moins aux élèves dont les familles le souhaitent et dont le nombre est jugé suffisant ;

- à prévoir un enseignement universitaire et d’autres formes d’enseignement supérieur dans les langues concernées ;

- à proposer ces langues comme disciplines de l’éducation des adultes et de l’éducation permanente ;

- à assurer l’enseignement de l’histoire et de la culture dont ces langues sont l’expression ;

- à assurer la formation des enseignants nécessaires ;

- à créer un organe de contrôle chargé de suivre les mesures prises et les progrès réalisés, et à établir sur des rapports périodiques publics.

 

Bien à vous,

 

François Baraize et Jacqueline Markovic.