Ce n’est pas un marathon

« C’est un marathon »
J’entends cette phrase, constamment, depuis quelques semaines. Depuis que la campagne législative a pris de la signification dans les médias.
On la prononce pour compatir à mon endroit, pour m’encourager, pour signifier, plus simplement, que l’on comprend, ou, encore, que l’on admire un engagement, d’autant plus qu’il est un engagement bénévole.
Mais la métaphore sportive reste toujours la même. Le marathon. La course longue. Eprouvante.
J’ai pratiqué de nombreux sports, à des niveaux divers. Le ski, pour commencer, puisque j’ai glissé tôt et vite, jusqu’à faire de l’enseignement du ski mon premier métier. Mais j’ai aussi couru, fait de l’endurance comme du cross, je nage toujours, j’ai joué au football, escaladé des parois, fais du trapèze. Et du vélo, bien sûr. Pas tellement comme une activité de loisirs, d’ailleurs. Ce n’est qu’un moyen sportif de se déplacer, mon moyen de déplacement privilégié.
Alors je veux bien filer la métaphore sportive.
Non, une campagne, ce n’est pas un marathon. C’est une course contre le temps, certainement, mais ce n’est pas que ça.
Ce n’est pas non plus un sport de combat. Ceux et celles qui se limitent à ça font fausse route. Il y a du combat, de toute sorte. Du combat frontal, de l’esquive, de la lutte. Mais pas seulement.
Une campagne législative, c’est d’abord, en termes sportifs, une variété infinie de disciplines.
Certains, certaines, tombent dans le piège des décathloniens. Le piège narcissique que décrit si bien ce grand champion qu’était Christian Plaziat. Où l’égo domine, et le miroir devient le premier public.
D’autres font dans le triathlon. Limitant le champ des performances à une ou deux disciplines qui compenseront la faiblesse dans la troisième.
Je prends ça comme un énorme trail. Parfois je grimpe, j’escalade, parfois je glisse sur des panoramas ou des points de vue qui ne valent pas qu’on s’attarde trop longtemps. Je marche, je roule, incessamment. Je cours. Comme un sportif, je m’alimente en chemin, je me nourris des autres, de leur point de vue, de leur conversation.
Je mène aussi des courses d’orientation. Je place l’équipe, je joue parfois arrière, réceptionnant les ballons que d’autres ont amené. Je joue parfois avant, fendant le terrain pour mieux m’exposer. Je renvoie des balles, je saute certains obstacles, je roule et joue de souplesse vers d’autres.
Et toujours, je reviens, seul, à des tous petits temps de respiration, de prise de rythme, de parenthèse de yoga, pour retrouver l’équilibre, la force de continuer, la lucidité sur la route à suivre.
Non, ce n’est pas un marathon, pour moi. C’est un immense parcours multidisciplinaire. Un grand trail.
Dont on ne ressort indemne que si l’on prend du plaisir, que si l’on fait ce qu’on aime, sans se trahir, sans tricher.
Et comme toutes ces épreuves, elle me transforme. Comment ? Ça, il est encore trop tôt pour le dire.

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