Réponse de Catherine Hervieu au Collectif pour une paix juste et durable au Proche-Orient

Vous ne serez par surpris de ma volonté de répondre à votre demande de positionnement datée du 16 mai: mes convictions et mon engagement politiques reposent sur des valeurs de justice et de solidarité, lesquelles sont bafouées depuis trop longtemps au Proche-Orient et en Palestine particulièrement.

En préambule, je rappellerai que plus de 120 états membres ont reconnu la Palestine comme Etat à part entière dont huit Etats membres de l’Union Européenne qui avaient réagi positivement à la déclaration d’indépendance de la Palestine du 15 novembre 1988. L’accord conclu entre le Parti Socialiste et EELV stipule que la République française reconnaîtra l’Etat de Palestine et défendra le droit de l’Etat d’Israël à vivre en sécurité. Cet engagement est dans le droit fil de toutes les résolutions des Nations Unies sur la question.

Il est du devoir de chaque pays de respecter ses engagements en matière de droit international et de rappeler à un pays tiers, en l’occurrence à Israël, l’ensemble de ses engagements en matière de droit international, de droits de l’homme et de droit international humanitaire.

Mon positionnement sur la transparence de la coopération militaire et sécuritaire entre la France et Israël.

Avec EELV, je me prononce résolument pour une politique cohérente qui mette en accord les déclarations et les actes. On ne peut pas se positionner contre la politique de colonisation de la Cisjordanie et contre le blocus de Gaza, et continuer à aider l’économie d’Israël. On ne peut pas se déclarer pour des négociations en vue d’une paix dans la région et continuer à vendre des armes à Israël (qui possède déjà une des armées les plus puissantes du monde et l’arme nucléaire même si c’est non-dit officiellement).

Les écologistes sont favorables d’une manière générale à une régulation et une moralisation du secteur de l’armement et de la coopération militaire dans l’objectif de la résolution non-violente des conflits. Il est donc impératif de renforcer le contrôle des ventes d’armes par la représentation nationale et de rendre l’information plus transparente dans la coopération militaire. Les armes françaises ne doivent plus servir à faire la guerre dans d’autres régions du monde.

Ces principes de régulation, de transparence et de débat démocratique en matière militaire sont mes objectifs comme ceux de l’ensemble des candidats EELV Ceci vaut pour la coopération militaire avec Israël comme avec les autres pays du monde.

Par ailleurs, nous proposons d’engager une reconversion à terme de l’industrie d’armement conventionnel et nucléaire et ceci dans le cadre national tout en l’impulsant aux niveaux européen et mondial.

Ma position sur l’adoption par la France de mesures pour assurer la traçabilité des produits des colonies entrant en France.

L’accord d’association France-Israël est un cas concret qui constitue un levier légal pour rappeler Israël à ses obligations et l’Union Européenne à ses devoirs. En effet, l’article 83 et le protocole 4 de cet accord définissent l’application juridique de l’accord pour Israël dans ses frontières de 1967. Or, dans sa mise en œuvre, Israël considère les colonies comme partie intégrante de son territoire et applique aux colonies l’accord d’association. Le cas qui illustre au mieux ce phénomène est celui de l’exportation de produits en provenance des colonies, sous label israélien, dans le but de bénéficier de réduction ou d’exemption de droits de douane à l’entrée des Etats de l’Union.

Si généralement l’Union condamne dans ses déclarations les violations du droit international commises par Israël dans le cadre du conflit, elle ne tire aucune conséquence juridique concernant, par exemple, sa non-mise en œuvre de l’article 2 de l’accord d’association. Le groupe Vert du parlement européen dans la mandature antérieure s’était prononcé pour un gel de l’accord d’association tant qu’Israël ne respecte pas les engagements pris.

Le groupe des députés EELV de la nouvelle mandature nationale travaillent à l’interpellation de la Commission pour infraction au droit communautaire et inaction dans ce domaine et les Etats membres pour non-application des dispositions de l’accord d’association en matière de droits de douane. De façon complémentaire, ils veilleront à renforcer les contrôles douaniers lesquels s’exercent au niveau national, sur les produits provenant d’Israël. Avec comme point d’appui l’ensemble des recommendations du rapport des Consuls européens à Jérusalem en 2011.

La promotion des droits de l’homme, considérée comme un des objectifs de l’Union, doit être appliquée à la lettre dans toutes les politiques de l’Union, y compris dans sa politique commerciale. Les produits issus des colonies devraient par conséquent ne pas être exportables sur le marché européen. Les députés EELV s’engagent dans cette démarche.

Par ailleurs, les violations des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés constituent une violation de l’article 2 de l’accord d’association. Une procédure pour non-respect de la clause devrait de fait être initiée par la Commission européenne, gardienne des Traités, ou conformément à l’article 79 de l’accord, par le Conseil qui, en tant que partie à l’accord, peut si l’autre partie « n’a pas satisfait à une obligation découlant du présent accord, prendre les mesures appropriées ». Cependant, force est de constater l’inaction de la Commission. Celle-ci pourrait faire l’objet d’un recours en carence devant la CJCE, recours qui sanctionne le défaut d’action d’une institution. Les futurs députés EELV s’emploieront à ce que le président de la république française, dans son action à l’échelle européenne et internationale agisse en conséquence.

La campagne citoyenne menée en France et dans d’autres pays européens contre les entreprises qui travaillent dans les colonies est juste. Veolia et Alsthom, par exemple, participent à la construction et à la gestion du tramway qui relie Jérusalem et certaines colonies. Cette construction progresse sur un territoire en dehors de toute légalité. Elle viole non seulement la Convention de Genève, mais également les résolutions du Conseil de sécurité qui s’est prononcées contre l’annexion des territoires palestiniens en Cisjordanie.

De la même manière, la lutte contre la cession d’une partie du port de Sète à l’entreprise israélienne Agrexco, qui travaillait dans les colonies, était appuyée par les écologistes et les élus EELV du conseil régional. Aujourd’hui cette entreprise est en liquidation judiciaire et ne viendra pas en France.

Toutes les campagnes de la société civile pour la moralisation du commerce international sont fondamentales et en ce sens il faut soutenir le travail qui de certains parlementaires européens (dont celles et ceux du groupe des Verts/ALE) pour alerter le Conseil et la Commission sur les contrats passés avec une société qui travaille pour maintenir la colonisation et assure en même temps la sécurité des bâtiments du Parlement européen à Bruxelles.

Les entreprises qui participent aux activités de colonisation ne doivent plus avoir de contrats avec l’Etat français et il faut qu’il en soit de même au sein de l’Union Européenne. Ainsi, le cas de l’entreprise G4s, qui assure la sécurité dans les check-points et celle des bâtiments du parlement européen à Bruxelles, est inacceptable. Après la campagne d’opinion et l’intervention de parlementaires européens et du groupe vert/ALE auprès du président Buzek, la société G4s s’est engagée à cesser ses activités dans les colonies. Et de même au niveau des collectivités territoriales avec le relai des élus EELV.

Mon positionnement sur la reconnaissance explicite de l’Etat Palestinien, viable et indépendant dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale.

La question de la reconnaissance de l’Etat palestinien n’est pas un élément nouveau. Elle a déjà été évoquée à de nombreuses reprises : à la fin de la période intérimaire prévue par les Accords d’Oslo dans la Déclaration de Berlin de 1999, par la feuille de route pour la Paix adoptée par le Quartette en 2003 qui appelait à la création en 2005 d’un Etat palestinien indépendant. La Conférence internationale d’Annapolis en 2007 évoquait la création d’un Etat palestinien dans un délai de un an. Toutes ces promesses n’ont jamais été tenues.

La demande de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) de devenir le 194e état des Nations Unies de plein droit est arrivée après de longues années de négociations infructueuses et un processus de paix au point mort.

Or, la signature le 3 mars 2011 d’un accord de réconciliation entre les mouvements du Fatah et du Hamas met fin à une division à la fois du territoire et du peuple palestinien qui fragilisait et affaiblissait les velléités de l’Autorité palestinienne et ouvre ainsi une nouvelle voie aux Palestiniens.

Outre les questions d’ordre sécuritaire, qui ont toute leur importance dans ce processus de réconciliation (construire dans la durée des services de sécurité professionnels et apolitiques), cet accord prévoit notamment la formation d’un gouvernement d’unité nationale formé d’indépendants suivie par des élections à tous les niveaux organisées dans un délai raisonnable.

Il faut que maintenant la France se prononce résolument au sein du Conseil de sécurité pour la reconnaissance de plein droit de l’Etat Palestinien dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-est pour capitale.